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Production et régulation de l’émission du parfum

C) Diversité des molécules du parfum de rose

5) Production et régulation de l’émission du parfum

Déterminer le lieu de production du parfum est une question difficile. Certaines techniques colorimétriques comme la coloration au NaDi (David & Carde, 1964) permettent de visualiser les composés chimiques odorants dans le pétale, sans toutefois les différencier. Quelques réactifs permettent néanmoins de distinguer les lipides acides des lipides neutres (Caissard et al., 2004). Cependant, ils colorent les zones de concentration des composés, qui ne correspondent pas forcément aux zones de production où les concentrations peuvent être plus faibles.

Les rosiers ‘‘hybrides de thé’’ modernes ont souvent des fleurs à nombreux pétales, qui peuvent représenter plus de 90% du poids de la fleur. Même si les étamines de ces fleurs peuvent renfermer une grande concentration de composés volatils, les pétales sont donc le lieu principal de synthèse du parfum chez la plupart des cultivars modernes (Bergougnoux et al., 2007). L’épiderme adaxial des pétales est constitué d’une couche de cellules coniques (Fig. 4) dont la forme permet une réflexion maximale de la lumière. Ces cellules forment des amas, appelés osmophores, chez certains groupes de plantes tel que les Orchidacées, mais recouvrent la plus grande partie du pétale chez la majorité des plantes (Caissard et al., 2004). C’est le cas de la rose. Chez celle-ci, la surface abaxiale ne présente, à l’inverse, pas ces cellules coniques. Les deux surfaces du pétale, bien que différentes, sont toutes deux capables d’émettre des composés volatils (Bergougnoux et al., 2007). De plus, certaines enzymes de synthèse de composés odorants se retrouvent dans les deux épidermes du pétale de rose (Scalliet et al., 2006 ; Bergougnoux et al., 2007). La cuticule à la surface des pétales pourrait représenter une barrière à l’émission du parfum. Cependant, son épaisseur n’explique pas la différence d’émission entre une rose parfumée et une rose non parfumée. Celle-ci résiderait plutôt au niveau de la synthèse des composés (Bergougnoux et al., 2007). Chez les rosiers ‘‘mousseux’’, les sépales portent des trichomes qui sécrètent une résine odorante. La composition en composés organiques volatils de cette résine est différente de celle des pétales (Caissard et al., 2006).

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Figure 4 : Epiderme adaxial d’un pétale de Rosa × hybrida observé en microscopie électronique environnementale (Gr. × 600). D’après Caissard et al., 2004.

Traditionnellement, on distingue deux modes de sécrétion des composés organiques volatils : la sécrétion ‘‘eccrine’’ durant laquelle les molécules diffusent ou sont transportées directement à travers la membrane plasmique, et la sécrétion ‘‘granulocrine’’ correspondant à une exocytose des composés contenus dans des vésicules spécifiques (Caissard et al., 2004). Chez la rose, des gouttelettes lipidiques ont pu être observées et pourraient être impliquées dans les sécrétions des monoterpènes par le pétale (Machenaud, 2010 ; Fig. 5). Cependant, l’intervention de protéines de transport, tels les transporteurs ABC, ne peut pas exclue. Une fois sécrétées, les molécules sont directement volatilisées à la surface du pétale de rose et non stockées sous la cuticule comme chez les Lamiacées par exemple (Caissard et al., 2004).

Figure 5 : Cellule épidermique de pétale de Rosa × hybrida observée en microscopie électronique à transmission pendant la sécrétion. GL : gouttelette lipidique ; PC : paroi cellulaire. Barre = 0,5µm. D’après Bergougnoux et al., 2007.

Chez les plantes attirant des pollinisateurs diurnes, un pic d’émission de parfum peut être observé en journée (Vainstein et al., 2001). D’autre part, la composition peut aussi évoluer au cours de la journée. Ces deux caractéristiques représentent un avantage pour la plante en termes d’économie d’énergie mais aussi pour attirer les pollinisateurs au moment de

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la journée où ceux-ci sont actifs (Dudareva & Pichersky, 2000). Chez la rose, la grande majorité des composés, qu’ils soient terpéniques, aromatiques ou dérivés d’acides gras, sont émis au cours de la journée (Helsper et al., 1998 ; Picone et al., 2004). La plupart des émissions suivent l’horloge circadienne biologique de la plante, tandis que pour quelques composés (monoterpènes oxydés, β-caryophyllène, et dihydro-β-ionone), celles-ci sont directement dépendantes de l’exposition de la fleur à la lumière (Helsper et al., 1998 ; Fig. 6). Il a été montré que ce cycle d’émission dépend à la fois de la disponibilité du substrat mais aussi de l’expression des gènes de synthèse. Ainsi, la forme glycosylée du 2-phényléthanol serait la source de rythmicité dans l’émission de cette molécule (Picone et al., 2004). L’acétate de géranyle montre un pic d’émission au cours de la journée. Ce pic correspond au pic d’expression du gène de l’enzyme synthétisant cette molécule, l’alcool acétyltransférase RhAAT, directement dépendante du cycle circadien endogène (Hendel-Rahmanim et al., 2007). L’émission de l’acétate de géranyle dépend donc directement de l’expression de son gène de synthèse. Le germacrène D montre aussi un pic d’émission au cours de la journée, mais directement lié à l’exposition de la fleur à la lumière et non au cycle circadien.

Figure 6 : Emission de composés volatils par les fleurs non coupées de Rosa × hybrida cv. ‘Honesty’, exposées à une photopériode de 12h. Les zones blanches et grises correspondent respectivement aux périodes d’éclairage et d’obscurité. D’après Helsper et al., 2004.

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Cependant, l’expression du gène de la germacrène D synthase et la concentration en germacrène D dans les cellules de pétales sont constantes au cours de la journée. L’émission est donc directement régulée par la lumière et est indépendante des gènes de synthèse et du stock intracellulaire en germacrène D (Hendel-Rahmanim et al., 2007).

Par ailleurs, la quantité et la composition du parfum sont aussi influencées par le stade d’ouverture de la fleur du rosier (Helsper et al., 1998 ; Picone et al., 2004). D’autres facteurs pourraient aussi influer sur le parfum d’une rose. En particulier, les facteurs climatiques, et notamment la température, sont connus pour affecter la quantité de parfum émise par les fleurs de Trifolium repens L. (Jakobsen & Olsen, 1994).