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D. Propriétés fonctionnelles des macrophages et polarisation

1) Production de médiateurs de l’inflammation

Les cytokines sont des glycoprotéines solubles de faible poids moléculaire (8 à 80 kDa) et sont produites par de nombreux types cellulaires. Les cytokines sont des substances solubles de signalisation cellulaire synthétisées par les cellules du système immunitaire, agissant à distance sur d'autres cellules pour en réguler l'activité et la fonction (recrutement, prolifération, différenciation, activation et mort cellulaire). Elles sont impliquées dans l’inflammation, la réponse immunitaire et l’hématopoïèse. Les cytokines agissent de manière autocrine, paracrine mais également endocrine via la circulation sanguine. Les cytokines agissent rarement seules, mais de manière conjointe avec d’autres cytokines créant ainsi tout un réseau de communication cellulaire. Elles peuvent influencer l'action d'autres cytokines de façon antagoniste, additive ou synergique. La famille des cytokines regroupe le TNF, les interférons, les interleukines, les facteurs de croissance et les chimiokines. Nous distinguerons par la suite les chimiokines par rapport aux autres membres de la famille des cytokines.

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a) Les chimiokines

Les chimiokines sont de petites molécules d’un poids moléculaire compris entre 8 et 12 kDa. Les chimiokines se divisent en quatre sous-familles (C, CC, CXC, et CX3C) selon le nombre de cystéines conservées et le nombre d’acides aminés compris entre la première et dernière cystéine dans la partie N-terminale. Une chimiokine donnée peut se lier à différents récepteurs et différentes chimiokines peuvent se lier à un même récepteur. Sauf exception, les interactions entre les chimiokines et les récepteurs des chimiokines sont peu spécifiques. Les récepteurs des chimiokines sont des récepteurs à 7 domaines transmembranaires couplés à une protéine G pour la transduction du signal (RCPG). Les chimiokines sont impliquées dans le recrutement des cellules immunitaires.

Les chimiokines de type CXC sont divisées en deux sous-groupes en fonction de la présence ou non d’un motif d’amino-acide supplémentaire, E-L-R-CXC (acide glutamique-leucine-arginine-cystéine-X-cystéine). Les chimiokines avec un motif ELR regroupent CXCL1 (GRO-α), CXCL2 (GRO-β), CXCL3 (GRO-γ), CXCL5 (ENA-78), CXCL6 (GCP-2), CXCL7 (NAP-2) et CXCL8 (IL-8) et sont impliquées dans le recrutement des neutrophiles qui expriment les récepteurs CXCR1 et CXCR2 (Rollins, 1997; Laing et al., 2004; Mantovani et

al., 2004) (Figure 9). Le rôle de ces chimiokines est de promouvoir l’adhérence des

neutrophiles aux cellules endothéliales puis leur migration vers les sites de l’inflammation selon un gradient de chimiokines. En plus d'une attraction des neutrophiles, les chimiokines CXCL1, CXCL2, CXCL3 sont également impliquées dans le recrutement et l’activation des basophiles, éosinophiles, monocytes et lymphocytes (Laing et al., 2004). Le deuxième groupe concerne les chimiokines sans motif ELR comme CXCL9 (MIG), CXCL10 (IP-10), CXCL11 (I-TAC), CXCL12 (SDF-1), CXCL13 (BCA-1), CXCL14 (BRAK) et CXCL16 (Figure 9). Ces chimiokines ont un faible pouvoir d’attraction des neutrophiles mais sont largement impliquées dans le recrutement des lymphocytes, monocytes et Natural Killer (Rollins, 1997; Laing et al., 2004; Mantovani et al., 2004) .

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Figure 9: Nomenclature et cellules cibles recrutés par les chimiokines de type CXC

Une sous-division en 4 sous-groupes a été proposée pour les chimiokines de type CC selon leur activité au sein du système immunitaire (Figure 10). Cette sous-division reste cependant approximative. Parmi ces quatre sous-groupes, on trouve les chimiokines impliquées dans la réponse inflammatoire comme CCL3 (MIP-1α), CCL4 (MIP-1β), CCL5 (RANTES) et CCL23 (MPIF-1) (Laing et al., 2004). Ces chimiokines participent activement au processus inflammatoire via leur action sur le recrutement des lymphocytes Th1, monocytes, macrophages, Natural Killer, basophiles, éosinophiles, cellules dendritiques (Rollins, 1997; Mantovani et al., 2004). Les chimiokines de l’allergie regroupent CCL1 (I-309), CCL2 (MCP-1), CCL7 (MCP-3), CCL8 (MCP-2), CCL11 (Eotaxin), CCL13 (MCP-4), CCL24 (Eotaxin-2) et CCL26 (Eotaxin-3) et sont impliquées dans le recrutement des lymphocytes Th2 et Treg (régulateur), cellules dendritiques, basophiles, éosinophiles et induisent la dégranulation des basophiles et la libération d’histamine (Laing et al., 2004). Les chimiokines de l’homéostasie comme CCL14 (HCC-1), CCL15 (HCC-2), CCL16 (HCC-4), CCL19 (ELC), CCL25 (TECK) et CCL27 (CTACK) (Laing et al., 2004) induisent le recrutement des lymphocytes T naïfs et mémoires, cellules dendritiques, monocytes et macrophages (Laing et

al., 2004; Mantovani et al., 2004). Enfin, le dernier groupe est représenté par les chimiokines

de l’inflammation et de l’homéostasie comme CCL17 (TARC), CCL18 (PARC), CCL20 (MIP-3α), CCL21 (SLC) et CCL22 (MDC) impliqués dans les recrutement des cellules dendritiques, monocytes, macrophages, lymphocytes B et Th2 et Natural Killer (Mantovani et

al., 2004).

Les chimiokines de type C se composent uniquement de deux membres, XCL1 (Lymphotactin) et XCL2 (SCM-1β). Elles agissent uniquement sur le recrutement des lymphocytes par le récepteur XCR1 (Laing et al., 2004).

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Figure 10: Nomenclature des chimiokines de type CC et leur rôle dans les réponses immunitaires (Adaptation de la figure de Mantovani, Sica et al. 2004)

La polarisation des macrophages en phénotype M1 ou M2 modifie le profil de production des chimiokines. La polarisation M1 des macrophages dérivés de monocytes humains par le LPS et/ou l’IFN-γ est caractérisée par une augmentation de l’expression des chimiokines de type CC que sont CCL2, 3, 4, 5, 8, 15, 19, 20 et de type CXC que sont CXCL1, 2, 3, 5, 8, 9, 10, 11, 13, 16 (Mantovani et al., 2004; Martinez et al., 2006; Benoit et al., 2008; Martinez et al.,

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2009; Jaguin et al., 2013) (Figure 11). Ces chimiokines sont impliquées dans l’activation et l’entretien de la réponse pro-inflammatoire de type cellulaire par le recrutement des lymphocytes Th1, lymphocytes cytotoxiques, Natural Killer, neutrophiles et monocytes. La polarisation M2a des macrophages dérivés de monocytes humains par l’IL-4 et l’IL-13 montre un profil de sécrétion de chimiokines spécifique de type CC que sont CCL13, 17, 18, 22, 23, 24 et 26 (Mantovani et al., 2004; Martinez et al., 2006; Benoit et al., 2008; Martinez

et al., 2008) (Figure 11). Ces chimiokines sont impliquées dans le recrutement des

lymphocytes Th2, lymphocytes T régulateurs (Treg), éosinophiles et basophiles.

Concernant le phénotype M2b et M2c, leur profil de chimiokines a été évalué dans des modèles de monocytes mais pas de macrophages. Ainsi, il a été montré que les monocytes M2b stimulés par le LPS et IgG secrètent CCL1 qui participe au recrutement des lymphocytes Treg, des cellules dendritiques immatures et des monocytes (Sironi et al., 2006; Benoit et al., 2008) (Figure 11). La stimulation des monocytes par l’IL-10, le TGF-β et les glucocorticoïdes induit un phénotype M2c qui conduit à l’expression des chimiokines CCL16, CCL18 et CXCL13 (Hedrick et al., 1998; Mantovani et al., 2004; Pannellini et al., 2004; Benoit et al., 2008) (Figure 11). Ces chimiokines participent au recrutement des lymphocytes T naïfs, lymphocytes B, cellules dendritiques, monocytes, éosinophiles et contribuent: à l’immunorégulation, la réponse immunitaire adaptative et le retour à l’homéostasie (Mantovani et al., 2004).

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Figure 11: Les cytokines et chimiokines spécifiques de chaque phénotype de polarisation des macrophages

(Benoit et al., 2008)

b) Les cytokines et facteurs de croissance

Comme pour les chimiokines, le TNF-α, les interleukines et les facteurs de croissance sont également régulés au cours de la polarisation des macrophages. L’activation dite classique des macrophages M1 est caractérisée par une production de cytokines de type Th1 telle que l’IL-12 associée à une faible production de la cytokine anti-inflammatoire IL-10 (Martinez et al., 2008). Une augmentation de l’expression de l’IL-12p35 et de l’IL-12p40 est observée dans les macrophages dérivés de monocytes humains stimulés par le LPS et l’IFN-γ (Martinez et al., 2006; Jaguin et al., 2013). La production d’IL-12 par les macrophages participe à l’entretien de la polarisation M1 via la sécrétion d’IFN-γ par les lymphocytes Th1 (Schroder et al., 2004; Mosser et al., 2008). Les macrophages M1 participent à la promotion et à l’entretien de la réponse inflammatoire via la sécrétion d’autres cytokines pro-inflammatoires que sont le TNF-α, l’IL-1β, l’IL-6 et l’IL-23 qui participent à l’activation de la réponse Th1 et à l’activité microbicide des macrophages (Mantovani et al., 2004; Benoit et

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cytokines est retrouvée dans les macrophages M1 dérivés de monocytes humains stimulés par le LPS et l’IFN-γ (Martinez et al., 2006; Jaguin et al., 2013).

A l’inverse, les macrophages M2 possèdent une faible activité microbicide. L’IL-4 et l’IL-13 modulent l’activité pro-inflammatoire de l’IL-1β via la production d’IL-1ra, un antagoniste endogène des récepteurs à 1 et l’augmentation de l’expression du récepteur leurre à l’IL-1 appelé IL-l’IL-1RII (Mantovani et al., 200l’IL-1; Martinez et al., 2008). Dans les monocytes, une diminution de la production d’IL-1β est associée à une augmentation de l’IL-1ra (Fenton et

al., 1992). Il a également été observé que l’IL-4 et l’IL-13 diminuent l’expression de la

caspase-1, responsable du clivage de la pro-IL-1β sous sa forme active (Scotton et al., 2005). Une diminution de la production des cytokines pro-inflammatoires TNF-α, IL-1β, IL-6, IL-12 et IFN-γ est également observée dans les macrophages M2a (Mantovani et al., 2004; Martinez

et al., 2008) qui ont un faible pouvoir microbicide. (Gordon, 2003; Novak et al., 2013).

L’expression du TGF-β est augmentée dans les macrophages M2a dérivés de monocytes humains (Martinez et al., 2006; Jaguin et al., 2013) et au cours de l’ingestion de cellules apoptotiques (Brancato et al., 2011). Le TGF-β contribue à la réparation et à la régénération tissulaire en induisant la différentiation des fibroblastes en myofibroblastes et la production de collagène par ces derniers (Song et al., 2000; Gordon, 2003; Novak et al., 2013). Les macrophages M2a sont capables de synthétiser directement des composants de la matrice extracellulaire comme le collagène de type VI (Schnoor et al., 2008), la fibronectine et la protéine BetaIG-H3 (Gratchev et al., 2001; Gordon, 2003; Martinez et al., 2006). Cette protéine, BetaIG-H3 entraîne l’adhésion et la migration des monocytes et fibroblastes afin d’assurer le processus de réparation tissulaire et d’augmenter la synthèse de collagène par les fibroblastes (Nacu et al., 2008).

Les macrophages M2b stimulés par le LPS et les complexes immuns sont caractérisés par la production conjointe de cytokines pro-inflammatoires (TNF-α, l’IL-1 et l’IL-6) et anti-inflammatoire (IL-10), ce qui les différencie des macrophages de phénotype M1 et M2a (Gerber et al., 2001; Mantovani et al., 2004; Martinez et al., 2008). L’interaction des complexes immuns avec les macrophages augmente la production d’IL-10 (Sutterwala et al., 1998) mais inhibe la production d’IL-12 (Sutterwala et al., 1997) empêchant la sécrétion d’IFN-γ et le développement de la polarisation M1 (Moore et al., 1993). Les macrophages M2b ne sont pas considérés comme des macrophages aux activités anti-inflammatoires mais plutôt impliqués dans le processus de régulation de l’inflammation (Mosser et al., 2008).