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Les changements de phase du contenu en eau d’une masse d’air dégagent ou absorbent de la chaleur latente. Cet échange de chaleur se fait directement avec

la masse d’air et affecte son énergie thermique cpT. La condensation et l’évapo-

ration dégage et absorbe, respectivement, la chaleur latente de vaporisation Lv,

dont la valeur varie avec la température. Lv vaut 2,5 106 J/kg à 0◦C. La congé-

lation et le givrage dégagent la chaleur latente de fusion Lf, tandis que la fonte

conduit à une absorption de chaleur latente de fusion. Lf varie peu avec la tem-

pérature, elle vaut respectivement 0,33 et 0,24 106 J/kg à 0 et -40C. La déposi-

tion de vapeur sur les cristaux de glace dégage la chaleur latente de sublimation

Ls, tandis que la sublimation des cristaux de glace conduit à une absorption de

chaleur latente de sublimation. Ls, qui est la somme de Lv et Lf, varie très peu

aux températures négatives. Ls vaut 2,83 106 J/kg entre 0 et -100◦C.

Pour évaluer l’importance relative des processus microphysiques dans le dé- gagement de chaleur latente, McGee and van den Heever (2014) ont calculé le bilan des taux chauffage pour des masses d’air alimentant une ligne de grain tropicale simulée par le modèle atmosphérique RAMS (Cotton et al., 2003) doté d’un schéma microphysique sophistiqué. En-dessous de 6 km d’altitude, le dégagement de chaleur latente provient principalement de la nucléation des gouttelettes de nuage (jusqu’à +80 K/h environ) et de la condensation (jusqu’à +40 K/h environ). À partir du niveau de congélation et jusqu’à 2,5 km au-dessus, le givrage des gouttelettes et la congélation de la pluie contribuent à hauteur de +8 à 12 K/h environ. Entre 6 et 12 km d’altitude, le dégagement de chaleur la- tente est dominé par la déposition de vapeur sur les hydrométéores glacés, avec des taux de chauffage supérieurs à +40 K/h atteignant parfois +100 K/h entre 6 et 8 km. Ce taux de chauffage conséquent peut s’expliquer par la valeur élevée de la chaleur latente de sublimation et par l’importance du processus de Berge- ron qui provoque l’évaporation des hydrométéores liquides et la déposition de vapeur sur la glace, car la pression de vapeur saturante vis-à-vis de la glace est plus basse que celle vis-à-vis de l’eau liquide. Les taux de refroidissement dus à la

fonte des hydrométéores glacés près du niveau de congélation sont de l’ordre de -5 à 10 K/h. Ces bilans sont dressés pour des masses d’air venant de la surface, les taux de chauffage et de refroidissement sont plus modérés pour les masses d’air venant d’altitudes plus élevées. Dans une autre étude avec le modèle RAMS, Seigel and van den Heever (2013) montrent que dégagement et absorption de chaleur latente peuvent avoir lieu en cycle, formant une source d’énergie im- portante pour les ascendances. Les hydrométéores comme la grêle se forment dans l’ascendance puis en sont rejetés. A l’extérieur ils chutent sous le niveau de congélation et peuvent fondre. En étant réintégrés dans l’ascendance quelques niveaux plus bas, ils peuvent être le lieu d’un nouveau dégagement de chaleur latente en servant de support à la déposition de vapeur ou en congélant. Ce re- cyclage des hydrométéores est un processus d’intensification de la convection profonde encore peu documenté.

Processus radiatifs

Les transferts radiatifs peuvent également induire un chauffage ou un refroi- dissement des masses d’air. Cependant, à l’intérieur d’un système de convection profonde et dans son proche environnement, le chauffage par dégagement de chaleur latente domine le chauffage radiatif avec une amplitude supérieure de plusieurs ordres de grandeur (McGee and van den Heever, 2014). Le refroidisse- ment radiatif n’est significatif qu’au sommet du nuage (sur une couche de l’ordre de 1 à 2 km), avec une amplitude de -2 K/h, même si, là aussi, le refroidissement dû à la microphysique domine l’effet radiatif d’un ordre de grandeur au moins.

Processus turbulents

Les mouvements convectifs (ascendances, subsidences, poches froides) sont par nature turbulents : ils produisent un cisaillement du vent qui génère des tour- billons. Une partie de leur énergie cinétique est transférée par les grands tour- billons vers les tourbillons d’échelle inférieure, jusqu’à une échelle où les forces de viscosité de l’air dissipent l’énergie cinétique (l’échelle de Kolmogorov, de l’ordre de 0,1 mm dans l’atmosphère). On fait généralement référence à ce flux d’énergie des grandes vers les petites échelles par le terme de « cascade d’éner- gie » (Kolmogorov, 1941). Les tourbillons induisent également des échanges de masses d’air entre les mouvements convectifs et leur environnement. Plus les tourbillons sont grands, plus ils sont efficaces pour incorporer de l’air de l’en- vironnement dans les mouvement convectifs (phénomène d’entraînement) et éjecter de l’air de l’ascendance dans l’environnement (contribution au détraî-

nement). La turbulence est plus ou moins intense en fonction de la phase de

développement du cumulonimbus. Les processus qu’elle induit (entraînement, détraînement, mélange) affectent la dynamique du nuage, en diluant ses pro- priétés et en diminuant sa flottabilité (Devenish et al., 2012; de Rooy et al., 2013). La compréhension de ces processus est un sujet de recherche important depuis plusieurs décennies (Cotton et al., 2010).

L’interface entre une ascendance et son environnement est le lieu d’une forte turbulence, à cause du fort cisaillement horizontal du vent vertical et des forts gradients de flottabilité. À l’aide d’observations radar Doppler depuis avion, Da- miani et al. (2006) ont montré la présence de tourbillons de l’ordre de 500 m à l’interface entre un cumulus et son environnement, favorisant l’intrusion d’air sec au sein du nuage. Par des simulations numériques, Klaassen and Clark (1985) identifient des structures de l’ordre de 125 m à l’interface des nuages, dont l’ori- gine serait liée à des instabilités thermodynamiques comme les instabilités de

Rayleigh-Taylor ou de Kelvin-Helmholtz. Par analogie entre les ascendances et les jets tels qu’ils peuvent être reproduits en laboratoire, plus les ascendances sont larges, plus elles sont susceptibles de conserver sur une longue distance un cœur qui est moins affecté par la turbulence que leurs bords. Dans ce cas, les masses d’air au bord des larges ascendances voient une plus grande dissipa- tion de leur énergie cinétique par la turbulence et une plus grande dilution par mélange avec l’air de l’environnement. Au contraire, au cœur de ces larges ascen- dances, les masses d’air peuvent monter à grande vitesse et être moins affectées par le mélange avec l’environnement. Ces cœurs convectifs peuvent contribuer significativement au transport convectif. C’est l’hypothèse des hot towers décrite plus bas.

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