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Chapitre 1 Introduction générale

1.4 Les traitements des hormones dans les stations d’épuration

1.4.1 Procédés physiques/biologiques

Le traitement par boues activées (activated sludge system, ASS) est le procédé utilisé habituellement par les usines d’épuration pour traiter les eaux usées [185]. Ce type de traitement peut éliminer les hormones grâce à leur adsorption sur les solides suivi par leur dégradation due à l’activité microbiennes dans les boues [185-187]. Il semble que l’adsorption soit la première étape qui mène à la dégradation biologique des hormones [123, 188], quoiqu’il existe certaines preuves quant au rôle plus important que joue la dégradation biologique par rapport à l’adsorption [186]. Donc l’ordre dans lequel aura lieu l’élimination par ASS demeure méconnu. En fonction de leurs propriétés physico-chimiques (Tableau 1-4), de leur faible solubilité dans l’eau et de la constante d’Henry, l’enlèvement des hormones par ASS serait la méthode privilégiée, surtout pour des usines avec de longs temps de rétention des matières solides [185, 188]. La cinétique ainsi que l’équilibre des réactions de l’adsorption entre les hormones et la matière solide seront fortement influencées par les conditions dans l’usine. Ainsi, la taille des particules solides, la quantité de matière organique, le pH, la température, la rétention hydraulique, la salinité et la compétitivité par d’autres composés pour les sites d’adsorption sur les matières solides font en sorte que l’élimination des hormones par la ASS est incomplète. L’adsorption sur la matière solide par les hormones va dépendre de la température, plus elle sera faible moins l’adsorption sera importante. Ceci a été démontré pour les hormones oestrogéniques (E1, E2, E3 et EE2) [185]. L’adsorption et la désorption peuvent prendre place simultanément, mais l’adsorption demeure plus rapide que le phénomène de désorption. La désorption peut aussi avoir lieu dans les filières subséquentes des usines d’épuration des eaux usées selon les conditions de traitement [185]. Un désavantage de l’utilisation des ASS est la production des boues, les biosolides, qui augmentent les coûts d’opération pour leur entreposage ou engendrent une contamination des eaux souterraines ou des rivières par la désorption des hormones quand elles sont utilisées (épandage) dans les milieux agricoles [189]. Le Tableau A1-1 présente l’efficacité de divers procédés de traitement des eaux usées incluant les ASS (en combinaison ou non avec d’autres procédés).

Les procédés physiques vont dépendre de l’adsorption des hormones de la phase aqueuse vers la phase solide (l’adsorbant). L’adsorption est considérée comme une méthode

37 populaire et efficace pour la purification de l’eau avec le charbon actif (AC, activated

carbon) étant l’adsorbant le plus utilisé [190, 191]. Cet intérêt envers le AC provient de sa grande surface spécifique, de l'ordre de 1000 m²/g de charbon et de sa structure poreuse (macropores, mésopores et micropores) qui ont pour effet d'augmenter ses propriétés adsorbantes par rapport aux substances dissoutes dans l’eau, telles les hormones. Le AC peut prendre différentes formes, soit le AC en grain (ayant une taille de particules de 0.2 à 5 mm, GAC), le AC particulaire (avec une taille de particule de moins de 0.18 mm, PAC) et le AC extrudé (ayant une taille de 0.8 à 5 mm). L'adsorption sur le AC est provoquée par des liaisons de Van der Waals, soit les dipôles induits ou forces de dispersion de London. Ces interactions de faible intensité vont dépendre de la distance ou l’espace entre les composés en solutions et la surface du AC. En général, l'adsorbabilité d'un composé augmente sur le AC en fonction de son poids moléculaire, du nombre de groupements fonctionnels (double liaison ou halogène) et de la polarité des molécules [192]. Le Tableau A1-2 illustre l’efficacité du AC pour éliminer les hormones dans différentes matrices d’eaux selon le temps de contact et la dose ajoutée. Les performances du AC envers les hormones sont acceptables avec des pourcentages d’élimination entre 80 et 100% (Tableau A1-2) dans la plupart des études. Toutefois, l’enlèvement sera influencée négativement par la présence de matières organiques et d’autres composés susceptibles d’être adsorbés, que ce soit par compétitivité ou saturation des sites d’adsorption, surtout dans les eaux usées [156, 193]. Les inconvénients du AC sont i) la production de boue élevée et des eaux de rétrolavage de couleur noire, ii) la difficulté à adapter la dose ajoutée en fonction de la quantité d’hormones dans l’eau et autres composés présents (matière organique et autres polluants), iii) les coûts d’opérations élevés associés à l’utilisation de produits chimiques pour les rétrolavages, l’impact environnemental d’un tel processus, ainsi que le stockage ou l’élimination des boues produites et iv) de déterminer l’endroit dans la filière de l’usine de traitement où il doit être appliqué.

D’autres types de phases absorbantes ont été évalués pour l’élimination des hormones, comme la chitine, le chitosane et des résines échangeuse d’ions [194]. Cependant leur succès est beaucoup plus limité comparativement au AC avec une capacité d’adsorption selon l’ordre suivant : GAC  résine échangeuse d’ion  chitin  chitosane. De la même manière, une nouvelle approche a été adoptée pour éliminer les hormones dans l’eau, soit le polymère moléculaire imprimé (MIP). Les MIPs sont fabriqués par l’intermédiaire d’empreintes

38 moléculaires, c’est-à-dire des polymères préparés à partir de monomères fonctionnels

polymérisés autour d’une molécule, également appelée template. Dans le cas des hormones, c’est plus souvent le E2, qui sert de gabarit pour la formation de sites de reconnaissance. L'extraction de la molécule template laisse inoccupé des sites de reconnaissance à haute affinité (taille et disposition spatiale des groupements fonctionnels) pour la molécule cible (Figure 1-13) ou celles de la même famille, soit les hormones estrogèniques dans le cas du E2.

Figure 1-13 Schématisation du principe de préparation des MIPs [195].

La première application des MIPs pour l’élimination des hormones a été réalisée les E2, l’E3 et l’E1 dans l’eau déionisée [196]. La sélectivité et la spécificité des MIPs envers les oestrogènes a également été démontrée avec l’ajout du chlorhydrate de fluoxétine (antidépresseur) et de l’acenaphthène (HAP), deux composés pouvant causer une interférence, mais n’ayant pas d’impact significatif sur le pourcentage d’enlèvement (95%) du E2 en solution [197]. Inversement, pour les adsorbants C18, NIP (polymère non imprimé) et le GAC, l’ajout du fluoxétine et de l’acenaphthène a considérablement diminué le pourcentage d’élimination du E2 dans l’eau [156, 193]. Malheureusement, les coûts de fabrication des MIPs ainsi que le nombre limité de composés cibles pouvant être captés par les sites de reconnaissance font que cette technologie est difficile à intégrer dans les usines de traitement. Cependant, si la législation par l’Union Européenne sur les hormones, prévue pour décembre 2013 [86], entre en vigueur, la sélectivité exceptionelle de cette approche ciblée pourrait en faire un atout important pour les usines d’épuration des eaux usées.

Les technologies membranaires (l’osmose directe (FO), la microfiltration (MF), la nanofiltration (NF), l’osmose inverse (RO) et l’ultrafiltration (UF)) font également partie des procédés physiques à considérer (Tableau 1-5). Les techniques séparatives à membranes utilisent les propriétés de tamisage moléculaire d’une membrane poreuse par lequel passe

39 un liquide contenant les composés à séparer [192]. Elles peuvent éliminer avec succès les

hormones des matrices d’eaux [180, 198, 199] de plusieurs façons, soit par adsorption ou par exclusion de taille. En terme de demande énergétique, elle varie selon l’ordre suivant : RO  NF  UF  MF [198, 200]. Les performances des membranes vont changer en fonction de leurs propriétés physiques (perméabilité, taille des pores et hydrophobicité), du colmatage, du pH, de la température, de la salinité (effet électrostatiques) et de la nature de l’eau (matières organiques) [192, 198, 200-202]. Le Tableau A1-3 présente l’efficacité de divers procédés membranaires étudiés pour l’enlèvement des hormones dans les matrices d’eaux.

Tableau 1-5 Description des propriétés pour les procédés membranaires

Propriétés Osmose inverse

(RO) Nanofiltration (NF) Ultrafiltration (UF) Microfiltration (MF)

Taille des pores (nm) non-détectable 0.1-5 1-20  20 Matériau - Acétate de cellulose - Polyamide Nylon - Polyfluorure de vinylidène - Polysulfone - Acétate de cellulose - Polypropylène - Polyéthylène - Polycarbonate - Céramique Pression (atm) 10-100 5-50 2-10 1-5 Vitesse de perméation (L m2 h-1) 10-15 15-35 20-100 40-150 Mécanisme d’élimination

Diffusion Tamisage Tamisage Tamisage

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