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portante dans les discours spécialisés, particulièrement dans les sciences de la vie et la méde- cine. De plus, plusieurs travaux réalisés en anatomie ont exploré les modes de conceptualisa- tion dans différentes langues (français, anglais, portugais, allemand). La première question que l’on peut se poser est de savoir si l’on trouve des expressions métaphoriques dans le dis- cours anatomique en espagnol. Il est très facile de constater que c’est le cas : il suffit de con- sulter des ouvrages d’anatomie pour constater, comme on pouvait s’y attendre, que le posi- tionnement des structures anatomiques fait largement appel à des expressions métapho- riques, qui peuvent être analysées selon l’appareil théorique mis au point par Vandaele et coll. :

Exemple 1.1 : verbe abandonar – représentation fictive

« La arteria circunfleja humeral posterior y el nervio axilar abandonan la axila a través del es- pacio cuadrangular, en la pared posterior […]. » (Drake, Vogl et Mitchell, 2015, p. 721)

Exemple 1.2 : verbe abandonar – représentation factive

« […] los españoles abandonaron la región. » (Almeida, 2005, p 155)

Dans les exemples 1.1 et 1.2, la structure actancielle est : X abandona Y. Le terme arteria cir- cunfleja humeral posterior et nervio axilar, d’un côté, et españoles, de l’autre, expriment le premier actant sémantique, tandis que axila et región expriment le deuxième actant séman- tique. Le syntagme en la pared posterior est considéré comme un circonstant, car, à la diffé- rence des actants, il n’intervient pas dans le sens du prédicat. Dans l’exemple 1.1., le verbe abandonar exprime le fait que deux structures, une artère (arteria circunfleja humeral pos- terior) et un nerf (nervio axilar) sont situés dans un espace (espacio cuadrangular) à la limite

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de la région de l’aisselle. Ce verbe exprime un déplacement fictif. En effet, ni l’artère ni le nerf ne se déplacent, comme c’est le cas pour des personnes qui quittent, factivement, une région du monde.

Exemple 1.3 : verbe cruzar – représentation fictive

« La arteria axilar [...] cruza el borde inferior del músculo redondo mayor. » (Drake et coll., 2015, p. 730)

Exemple 1.4 : verbe cruzar – représentation factive

« Las motocicletas estuvieron a punto de atropellar a dos señores y una dama que cruzaban a pie. » (Múnera López, 2018, p. 200)

Dans les exemples 1.3 et 1.4, la structure actancielle est : X cruza Y. Le terme arteria axilar exprime le premier actant sémantique, tandis que le syntagme borde inferior del músculo redondo mayor exprime le deuxième actant. Là aussi, il s’agit déplacement fictif, la catégorie d’êtres humains (et plus largement d’êtres vivants capables de se déplacer) se projetant sur les catégories de structures anatomiques concernées.

Comme il n’y a pas eu de travaux sur la conceptualisation métaphorique de l’anatomie topo- graphique en espagnol, le premier élément de problématique est donc de caractériser les ICM dans ce domaine et dans cette langue : quels sont les modes de conceptualisation méta- phorique exprimés dans des textes d’anatomie en langue espagnole?

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Par ailleurs, nous avons évoqué plus haut l’influence de la France sur l’Espagne dans le do- maine médical. La question que soulève cette influence est de savoir si le discours anato- mique espagnol est calqué sur le discours français. Cette influence pourrait provenir de la tra- duction et être perceptible dans les textes traduits, ou bien être intégrée dans le discours médical espagnol en raison de la formation du corps médical, et être perceptible dans les textes rédigés en espagnol. En vérité la question est vaste. Un premier pas pour l’aborder consisterait à examiner des corpus constitués de textes rédigés et de textes traduits en espa- gnol. Pour aller plus loin, il faudrait ensuite comparer le corpus espagnol avec des corpus comparables et parallèles en français et, à titre de témoin, dans d’autres langues.

3.1. Hypothèses

Notre hypothèse de travail principale est donc que les modes de conceptualisation métapho- rique gouvernent la phraséologie du discours anatomique en espagnol.

Notre hypothèse secondaire est que le discours anatomique français influe sur le discours anatomique en espagnol. Dans le présent travail, nous chercherons à explorer une sous-hy- pothèse, c’est-à-dire que, si notre hypothèse secondaire est vraie, on ne devrait pas observer de différences majeures entre des textes rédigés en espagnol et des textes traduits.

3.2. Objectifs

Nous nous fixons les objectifs suivants :

• Constituer un corpus de textes d’anatomie topographique en espagnol, avec un sous- corpus de textes rédigés, et un sous-corpus de textes traduits. En prévision de la com- paraison avec des résultats obtenus antérieurement, notamment ceux de Lubin (2006), nous aurons recours à des critères de choix compatibles. En particulier, nous nous intéressons à la même période (quasi-contemporaine), soit la fin du XXe siècle et le début du XXIe siècle.

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• Repérer et annoter les ICM exprimant le positionnement des mêmes structures ana- tomiques que celles qui avaient été étudiées par Lubin, soit les artères, les veines, les nerfs et les muscles. L’intérêt de ce choix repose sur le fait que les artères, les veines et les nerfs sont des structures longitudinales partageant certaines caractéristiques et se distinguant par d’autres (notamment leur fonction), ce qui permet de mettre en évidence des différences fines de conceptualisation. Les muscles servent de struc- tures témoins.

• Caractériser les modes de conceptualisation métaphorique exprimés par ces ICM en espagnol.

• Comparer les deux sous-corpus constitués par les textes traduits et les textes rédigés en espagnol.

À la lumière de notre analyse, nous espérons que des travaux ultérieurs permettront d’ap- profondir la comparaison de l’espagnol avec des textes rédigés ou traduits dans d’autres langues.