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Généralités sur les incendies

I.1 Incendies en milieu tunnel

I.1.2 Problématique des incendies en milieu tunnel

Un incendie en milieu tunnel est un cas particulier de feu confiné ventilé pour lequel une dimension du confinement est très grande par rapport à la section.

Dans un feu confiné ventilé en général, le foyer est en présence d’autres objets ou de parois qui s’échauffent. Tout d’abord, les parois en s’échauffant vont émettre un flux de chaleur, essentiellement radiatif, dont une partie en retour vers la surface du combustible.

Ce flux de chaleur s’ajoute à celui émis par la flamme et accélère l’émission de vapeurs combustibles et donc le débit calorifique global du foyer. Cette montée de débit calorifique implique une montée en température. Les objets présents dans le local (mobilier, objets stockés ...) sont susceptibles, avec la montée en température du local, de dégager des vapeurs combustibles qui peuvent s’enflammer à leur tour, augmentant également le débit calorifique de l’incendie dans le compartiment. Trois scénarios permettant de distinguer les différentes configurations possibles sont schématisés sur les figures I.4 et I.5 pour des combustibles respectivement liquides et solides.

Grand Compartiment Le feu peut avoir une puissance insuffisante pour échauffer de façon notable les parois ou les autres objets, ou alors le compartiment est suffisamment grand par rapport à la puissance du foyer. Dans ce cas il se comportera comme un feu en milieu ouvert (courbes noires sur les figures I.4 et I.5).

Compartiment "Non-Participant" Le compartiment ne contient pas d’objets et ses parois ne sont pas inflammables. Dans ce cas les parois en s’échauffant vont renvoyer un flux de chaleur vers le foyer et accélérer sa combustion. L’évolution du débit calorifique est représentée par la courbe jaune.

Compartiment "Participant" Le compartiment contient des objets inflammables, ou ses parois le sont. Ceux-ci peuvent s’échauffer et émettre eux aussi des vapeurs combus-tibles. Une fois l’ensemble du compartiment à haute température et la concentration des vapeurs suffisante, on observe alors un embrasement généralisé - ouflashover -. On parle alors de débit calorifique global du compartiment puisque le foyer originel n’est plus le seul à brûler. L’évolution est montrée par la courbe rouge (arrêtée après flashover puisque ce n’est plus uniquement le foyer origine qui développe le débit calorifique).

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Fig.I.4 – Evolution de la puissance de feux de liquide confinés ventilés - (—) : feu en Grand Compartiment, (—) : feu en Compartiment Non-Participant, (—) : feu en Compartiment Participant

Fig.I.5 – Evolution de la puissance de feux de solide confinés ventilés - (—) : feu en Grand Compartiment, (—) : feu en Compartiment Non-Participant, (—) : feu en Compartiment Participant

De plus, pour un feu dans ce type de milieu, les fumées émises représentent en elles-mêmes un danger, tant au niveau de leur température que de leur toxicité.

Dans le cas particulier de feux en tunnel, l’origine de l’incendie est, pour la grande majorité, un incident à bord d’un véhicule ou un accident impliquant un ou plusieurs véhicules. La puissance calorifique dégagée dépend des matériaux constituant le ou les véhicules impliqués mais surtout de leur chargement. On retient généralement les ordres de grandeur mentionnés dans le tableau I.1 :

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Puissance maximum Type de véhicule Puissance moyenne possible

(MW) (MW)

Véhicule de tourisme 6 à 8 10

Autobus 20 30

Camion frigorifique 100 150

Matières dangereuses 180 200

Tab. I.1 – Puissances typiques de feux de véhicules et de leur chargement

I.1.2.1 Effets sur les usagers

En cas d’incendie, le danger principal pour les usagers est la montée en température dans le tunnel : par transferts de chaleur convectifs ou radiatifs, mais surtout à cause de la couche de fumée qui se propage dans l’ouvrage et transmet essentiellement par rayonnement des flux pouvant être importants. A ceci s’ajoute un risque d’intoxication, principalement dû à l’élévation du taux de monoxyde de carbone dans le milieu.

Fig. I.6 – Niveaux d’incendie et seuils de tenabilité

La figure I.6 montre l’allure générale de l’évolution de la puissance d’un feu en tunnel (similaire à un feu de solide confiné). On peut distinguer deux instants critiques (voir la référence [1]) :

◾ τc,u correspondant à l’instant où est observée une des conditions de non tenabilité pour les usagers,

◾ τc,sp correspondant à l’instant où les conditions de non tenabilité pour les services de secours sont atteintes.

On retient généralement les valeurs suivantes (tableau I.2) :

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Critère Usagers Services de secours Température maximale d’exposition 50oC 100oC

Flux thermique radiatif maximal 2 kW.m−2 5 kW.m−2 Concentration maximale de CO 300 ppm sous ARI1

Tab. I.2 – Critères de tenabilité pour les usagers et les services de secours

Ces deux instants délimitent trois gammes de puissance, qu’on appelle niveaux d’in-cendie :

◾ niveau 0 : de durée τc,u. C’est durant cette phase que les usagers peuvent évacuer le tunnel sans assistance.

◾ niveau 1 : de durée τc,sp −τc,u. Durant cet intervalle de temps, l’évacuation des usagers peut encore être conduite par les services de secours et le foyer peut être attaqué directement.

◾ niveau 2: au-delà du tempsτc,sp, les conditions de tenabilité des services de secours sont dépassées et le foyer ne peut plus être maîtrisé.

Le risque principal pour un usager pris dans un incendie en tunnel vient des gaz pré-sents dans l’atmosphère de l’ouvrage. En effet, la combustion est très souvent incomplète et produit donc des gaz toxiques, notamment le monoxyde de carbone CO mais aussi l’acide cyanhydrique (dû à la pyrolyse de certains matériaux polymères). Le monoxyde de carbone est un composé très toxique qui se substitue à l’oxygène dans le sang et peut provoquer des étourdissements, des pertes de connaissances, voire conduire à la mort.

Un deuxième danger est le rayonnement thermique provenant du foyer ou de la couche de fumées chaudes qui se développe sous voûte. Ce rayonnement peut occasionner des brûlures cutanées et les gaz chauds inhalés peuvent provoquer de graves lésions internes.

Aussi, pour les services de secours, une atmosphère tenable pour les usagers sera bien sûr une atmosphère tenable thermiquement mais également exempte de toute trace de fumée.

De plus, l’intervention des services de secours est nécessairement retardée par rapport à la déclaration de l’incendie. La mise en sécurité des usagers des tunnels routiers repose en premier lieu sur le principe de leur autoévacuation au moyen d’itinéraires à l’abri des fumées jusqu’aux aménagements destinés à les isoler du tunnel (issues de secours, passages intertubes, galeries de sécurité, abrisĚ). De ce fait, le comportement des usagers influence leur mise en sécurité ; en particulier, si leur délai de réaction est élevé à cause de l’absence de perception immédiate du danger encouru, leur sécurité peut être compromise par la suite.

Le désenfumage, associé aux aménagements pour l’évacuation des usagers, constitue un élément essentiel à la mise en sécurité de ceux-ci. Pour autant, il ne peut raisonnablement pas faire face à toutes les situations car, dans un tel cas, les gaines d’extraction des fumées seraient de dimensions supérieures à la section des ouvrages et les puissances, déjà très élevées, des équipements de désenfumage seraient disproportionnées par rapport aux risques encourus. Ce point est expliqué plus avant en section I.1.3.

1ARI : Appareil Respiratoire Isolant

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I.1.2.2 Effets sur les véhicules

Lors d’un incendie en tunnel, les véhicules autres que le véhicule foyer principal peuvent poser deux problèmes :

◾ effet domino : s’ils sont à proximité du foyer principal, ils peuvent prendre feu à leur tour (ou leur chargement dans le cas de camions),

◾ leur présence peut retarder les services de secours, voire leur interdire l’approche du foyer principal.

En terme de propagation de l’incendie, ce sont non seulement les composants en ma-tière plastique qui posent problème, car ils peuvent dégager des gaz très toxiques, mais aussi les cargaisons transportées. Lors de l’accident du Tunnel du Mont Blanc, c’est le chargement de margarine d’un des camions impliqués dans l’accident d’origine qui a contri-bué à la croissance forte et rapide de l’incendie. Si le carburant contenu dans les réservoirs peut être une source de danger, il faut garder à l’esprit qu’un véhicule léger n’en contient qu’une faible quantité (de 35 à 70 litres) et qu’une voiture en flamme ne dégage somme toute qu’une puissance limitée. Toutefois, même des foyers de puissance relativement basse peuvent retarder les équipes de secours, voire les empêcher d’accéder au foyer principal.

I.1.2.3 Effets sur la structure du tunnel

Un tunnel routier a communément une structure en béton. La faible taille relative des tunnels par rapport aux véhicules et la puissance dégagée par des foyers confinés font que le transfert de chaleur lors d’un incendie est très important et sollicite la structure. Cette chaleur peut être transmise, soit de façon directe par rayonnement du foyer et par impact du panache sur la structure, soit par transport par les fumées. Le béton a une tenue à la température limitée (communément située entre 150 et 200oC) car sa teneur en eau est importante. En cas d’élévation de la température au-dessus de 100oC dans le tunnel, l’eau proche de la surface sollicitée (intérieur du tunnel) s’évapore, rendant le béton cas-sant. De plus, si l’incendie se prolonge, l’eau peut se vaporiser dans le corps même du béton, conduisant à son éclatement, c’est le phénomène d’écaillage. Les structures por-tantes peuvent alors se briser sous les contraintes internes induites par cette vaporisation, pouvant provoquer la ruine locale de l’ouvrage.

Enfin, un tunnel routier contient de nombreux équipements de natures diverses : dis-positifs d’alerte, système d’éclairage, système de ventilation, signalisation, qui peuvent être aussi dégradés lors d’un sinistre. Si lors d’un incendie on donne la priorité au sau-vetage des personnes, on ne doit pas ignorer l’endommagement des équipements et de la structure elle-même.