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1.1 La prise en compte des capacités contributives de la famille pour l’ouverture du droit à

La prise en compte des capacités contributives de la famille pour l’ouverture du droit à prestations est le procédé de principe en matière d’aide sociale. Dès la demande de prise en charge, l’aide sociale prend en compte la contribution pouvant être apportée par la famille en appréciant la situation du demandeur au regard de ses ressources propres mais aussi des capacités contributives des personnes tenues à l’obligation alimentaire. Ainsi l’aide sociale peut-elle être en tout ou partie refusée en se fondant sur les obligations alimentaires ; en cas

111 En ce sens, CCAS, 07.04.00, n°982835, Delcroix c/ Dpt Maine et Loire : les requérants contestaient une récupération sur donation au motif qu’ils contribuent déjà à la prise en charge des frais de placement dans le cadre de l’obligation alimentaire. Pour écarter le recours, la CCAS observe qu’il « ne ressort pas du dossier que la donation a été utilisée par les requérants pour financer leur participation (…) aux frais d’hébergement (…) » et précise « qu’en tout état de cause, cet élément ne fait pas obstacle à l’application de l’article 146 » (récupération sur donation).

112 En ce sens, CCAS 29.10.99, n°982469, Dpt Allier : pour limiter le montant de la récupération sur donation, la CCAS s’appuie sur la situation financière modeste du requérant et ajoute qu’« il convient de tenir compte de l’effort accompli par les obligés alimentaires, y compris les petits-enfants, pour participer aux frais de placement (…) ».

de prise en charge, la commission d’admission précise expressément le montant laissé éventuellement à la charge du bénéficiaire et de ses obligés alimentaires.

II-1.1.a) Instance compétente et prérogatives

Selon le Code de l’action sociale et des familles, « les personnes tenues à l’obligation alimentaire (…) sont, à l’occasion de toute demande d’aide sociale, invitées à indiquer l’aide qu’elles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais. La commission d’admission fixe, en tenant compte du montant de leur participation éventuelle, la proportion de l’aide consentie par les collectivités publiques » (art. L132-6 CASF).

C’est l’instance dite de « constitution des dossiers » de demande d’aide sociale qui collecte les pièces relatives à l’état de besoin du demandeur, à ses ressources et aux éventuels débiteurs alimentaires. Ce dossier est ensuite transmis à l’instance d’instruction de la demande qui, dans un troisième temps, adresse le dossier avec une proposition de décision à l’instance de décision (sauf exception : la commission d’admission à l’aide sociale).

La commission d’admission à l’aide sociale comprend des membres permanents dont le Président, magistrat nommé par la Cour d’appel, ainsi que des membres siégeant selon la nature de la demande (selon la collectivité publique débitrice de l’aide sollicitée).

La commission d’admission à l’aide sociale décide de l’admission, totale ou partielle, à l’aide sociale ou à l’inverse du rejet de la demande. La décision est en principe motivée et communiquée à l’intéressé. Des recours peuvent être formés (cf. infra).

Les textes prévoient une procédure d’urgence utilisée notamment pour les personnes âgées et handicapées en matière d’hospitalisation, de placement ou d’octroi d’une allocation d’aide ménagère. L’admission à l’aide sociale est décidée par le maire de la commune ; c’est une décision provisoire qui doit ensuite être ratifiée par la commission d’admission à l’aide sociale.

II-1.1.b) Une double appréciation a priori : identification des débiteurs alimentaires et évaluation de leur contribution

1. S’agissant de l’identification des débiteurs de l’obligation alimentaire, ces derniers peuvent

se retrouver en situation d’inégalité selon qu’ils ont été ou non identifiés par les services départementaux. En effet, l’impossibilité d’identifier la totalité des débiteurs n’est pas a priori un motif de limitation de la contribution du ou des débiteurs effectivement sollicités, dans la limite cependant de leurs propres capacités contributives113. Et en tout état de cause, le caractère vain de la recherche des obligés alimentaires ne saurait justifier le refus de l’aide sociale, décision qui « aurait pour conséquence de priver (le demandeur) des garanties qui lui sont offertes par la loi ou d’imposer à l’établissement qui l’accueille des créances irrécouvrables »114. A fortiori, l’absence de recherche par les services départementaux des éventuels obligés ne saurait avoir pour conséquence de priver le demandeur du droit à l’aide sociale en reportant sur celui-ci la responsabilité des démarches à entreprendre115.

Sous ces réserves, l’égalité entre obligés alimentaires pourra être rétablie par des recours ultérieurs des obligés alimentaires effectivement sollicités contre ces débiteurs « défaillants »116 .

La question des conséquences d’un refus des obligés alimentaires de fournir les informations requises n’est pas clairement tranchée par la jurisprudence. Il a été jugé que le droit de la personne à une aide de la collectivité prime sur la carence, même délibérée, de certains obligés. Ainsi, en prenant appui sur la reconnaissance par la loi du droit des personnes âgées privées de ressources suffisantes à bénéficier d’une aide de la collectivité, la CCAS a considéré que « la circonstance que certains obligés alimentaires n’aient pas produit d’informations sur leurs ressources n’est pas par elle-même dans les circonstances de l’espèce, de nature à faire obstacle à ce que le bénéfice de l’aide sociale aux personnes âgées

113 En ce sens CCAS 09.12.98, n°970055, Bellet et a/ c/ Dpt Ardennes: relevant que « les recherches effectuées n’ont pas permis de retrouver 8 des 20 obligés alimentaires de l’intéressée » et que « les obligés alimentaires ne sont pas en mesure de prendre en charge la totalité des frais non couverts par les ressources personnelles de l’intéressé mais qu’ils peuvent contribuer par une participation mensuelle évaluée à 1000F », c’est à tort que la CDAS avait refusé l’admission à l’aide sociale.

114 CCAS 09.12.98, n°970055 , Bellet et a/ c/ Dpt Ardennes; dans le même sens, CCAS 02.08.02, n°001311, Dpt Vaucluse.

115

CCAS 22.07.02, n°981306, Dpt Isère. 116

soit reconnu (…) »117. Mais la solution inverse a été également retenue. Ainsi la CCAS a t- elle estimé que, dès lors qu’il « résulte de l’instruction que les obligés alimentaires ne se sont pas prêtés à l’enquête nécessaire (…), la CDAS (…) a fait une exacte appréciation des circonstances de l’affaire en refusant (…) le bénéfice de l’aide sociale aux personnes âgées »118.

Il semble donc que la Commission d’admission à l’aide sociale ait un pouvoir d’appréciation, au cas par cas, des conséquences qu’il convient de tirer d’une carence des obligés alimentaires.

2. S’agissant de la détermination de la contribution des débiteurs de l’obligation alimentaire,

« la commission d’admission à l’aide sociale a compétence pour fixer dans quelle mesure les frais (…) sont pris en charge par les collectivités d’assistance et par suite pour fixer le montant de la participation aux dépenses engagées et à engager laissé à la charge du bénéficiaire et de ses débiteurs d’aliments »119. En conséquence, les institutions de l’aide sociale (commission d’admission et juridictions de l’aide sociale) ne peuvent pas mettre à la charge de chacun des débiteurs d’aliments une somme déterminée120.

Lorsque l’aide sociale a déjà statué, les décisions mentionnent une proposition de contribution par obligé émanant de la commission d’aide sociale dans environ la moitié des cas.

En principe, ces décisions doivent être motivées quant à l’appréciation des besoins du demandeur et de la participation laissée à la charge de celui-ci et de ses obligés alimentaires.

117 CCAS 03.02.97, n° 951017, Caron le Breton c/ Dpt Val d’Oise; voir aussi CCAS 22.12.00, n°990847, Morsli c/ Dpt Seine St Denis : alors que la CDAS avait refusé le renouvellement de la prise en charge au motif notamment que les « obligés alimentaires ne se prêtent pas à l’enquête des services sociaux », la CCAS énonce qu’il ressort des textes que « bien que les obligés alimentaires soient obligés de se prêter aux enquêtes, il appartient au département de mettre en œuvre les procédure prévues à l’article 145 du CFAS (alors applicable) en cas de carence de ces derniers ». En conséquence, « on ne peut considérer que le refus de renouvellement de l’aide sociale (…) sur le motif que les obligés alimentaires ne se prêtent pas à l’enquête soit fondé » ; dans le même sens, CCAS 22.06.00, n°981891, Dpt Paris; CCAS 23.04.02, n°000138, Dpt Val d’Oise; CCAS 15.11.02, n°982545, Dpt Paris; CCAS 15.11.02, n°982572, Dpt Var.

118

CCAS 07.04.00, n°982551, Bessières et Hervé c/ Dpt Paris; dans le même sens, CCAS 29.10.99, n°981619, Dpt Moselle : « il résulte de l’instruction que la CDAS a fait une exacte appréciation des ressources de Mme (…) et de l’aide qu’elle est en droit d’attendre de l’ensemble de ses obligés alimentaires, y compris ceux qui ne se sont pas prêtés à l’enquête, en lui refusant le bénéfice de l’aide sociale aux personnes âgées (…) ».

119

CE 17.03.93, Epoux Deloye.

120 Sur les questions soulevées par l’articulation des compétences entre les juridictions de l’aide sociale et le juge aux affaires familiales, cf. infra.

Cependant, cette obligation apparaît très relative121.

II-1.1.c) Révision a posteriori

La décision de la commission peut être révisée sur production par le bénéficiaire de l’aide sociale d’une décision judiciaire rejetant sa demande d’aliments ou limitant l’obligation alimentaire à une somme inférieure à celle qui avait été envisagée par l’organisme d’admission. La décision de la commission fait également l’objet d’une révision lorsque les débiteurs d’aliments ont été condamnés à verser des arrérages supérieurs à ceux qu’elle avait prévus » (art. L132-6 CASF)122.

En résumé, la prise en compte des capacités contributives de la famille passe par la fixation de la participation publique à la prise en charge des besoins en fonction d’une créance alimentaire évaluée globalement pour l’ensemble des débiteurs sans répartition entre eux et sans que cette évaluation ait un caractère définitif au regard des créances alimentaires.

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