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Avec cette étude s’attardant aux cas de ML les plus sévères de deux régions québécoises endémiques, nous avons mis en lumière que la majorité des cas étaient traités de façon conformes aux recommandations nord-américaines en vigueur et que la majorité des patients ont une évolution clinique favorable avec cette prise en charge, telle qu’objectivée par une résolution complète des signes cliniques objectifs à 3 mois chez plus de 99% des cas traités durant la période de 2004 à 2017. Ces résultats sont rassurants, dans le contexte où des inquiétudes sur la prise en charge québécoise ont récemment été soulevées au niveau politique (Rapport n° 4246-20180411 de l’assemblée nationale du Québec, ANQ, 2018). Par ailleurs, contrairement aux inquiétudes de sous-traitement, la majorité des cas qui n’étaient pas traités adéquatement recevaient des traitements pour des durées supérieures aux recommandations actuelles. La maladie de Lyme n’est donc vraisemblablement pas sous- traitée, mais par contre, la proportion de surtraitement dépasse celle de sous-traitement pour les quelques cas chez qui le traitement ne respecte pas les recommandations en vigueur.

Dans notre étude, la majorité des cas (90%) a été traitée conformément aux recommandations de l’IDSA et de l’INESSS. Cette proportion est comparable mais

légèrement inférieure à celle trouvée par les rares études qui ont évalué la conformité du traitement de la ML en la comparant aux recommandations de l’IDSA. Il s’agit notamment de l’étude de Gasmi et. al, 2017, qui a trouvé une conformité aux directives de l’IDSA dans 100% des cas. Cependant, dans cette étude, les critères de comparaison n’étaient pas clairs et les informations relatives au traitement n’étaient disponibles que pour 25% des cas. Ceci rend difficile la comparaison directe avec nos résultats et l’interprétation de la légère différence observée.

Une autre étude a trouvé une conformité du traitement aux recommandations de l’IDSA dans 99,9% des cas (Kowalski et. al., 2010). Cette étude ne concernait que des cas de ML précoce et le seul critère de comparaison du traitement aux recommandations de l’IDSA était la molécule. Or, dans notre étude, nous avons considéré des critères de comparaison plus stricts, et non seulement la molécule. De plus, notre étude incluait seulement des cas de ML confirmés par sérologie, ce qui laisse comprendre que ce sont des cas qui sont à un stade plus avancé de la maladie, même parmi les cas localisés. Ceci pourrait avoir un effet notamment sur la durée du traitement car, en cas de maladie disséminée, les cliniciens auront probablement tendance à donner une antibiothérapie pendant plusieurs jours comparativement à la maladie localisée. Ceci pourrait concorder avec nos résultats étant donné que nous avons trouvé que la raison principale de non-conformité aux recommandations de l’IDSA était une durée du traitement supérieure aux recommandations. Cette différence de proportion pourrait donc s’expliquer par ces différentes raisons.

En cas non-conformité du traitement à ces recommandations, la raison principale identifiée dans notre étude était la durée du traitement qui est supérieure aux recommandations de l’IDSA. On peut donc affirmer que, contrairement à ce qui avait été soulevé dans les pétitions présentées à l’Assemblée nationale (Rapport ANQ, 2018), la ML n’est pas sous-traitée au Québec, mais plutôt bien traitée et, dans les rare cas de non-conformité aux recommandations en vigueur, il y a plus de surtraitements que de sous-traitements.

Par ailleurs, il est important de sensibiliser les cliniciens aux dangers d’une antibiothérapie trop prolongée. D’abord, une antibiothérapie prolongée pour le traitement de la ML n’a pas montré une efficacité supérieure comparativement à la durée raisonnablement courte conformément aux recommandations en vigueur (Wormser et., al., 2003; Klempner et. al.,

2001; Maloney, 2008). Par contre, une antibiothérapie prolongée pourrait entrainer des risques non négligeables, tels que les abcès, le choc septique (secondaires à l’infection bactérienne à travers des cathéters mis en place pour administrer des antibiotiques en intra veineux), la diarrhée due à la colite à Clostridium difficile, ou même des décès (complication du choc septique par exemple) (Marzec et. al., 2017).

Concernant la disparition des signes cliniques objectivables, nous avons trouvé que 99,3% des cas avaient une disparition complète des signes cliniques dans les trois mois suivant le début du traitement. Nos résultats sont similaires à ceux des autres études effectuées en Amérique du nord (Kowalski et. al., 2010; Wormser et. al., 2003). Le traitement appliqué semble donc efficace pour éliminer les signes cliniques les plus incapacitants, tels que la paralysie faciale ou les signes d’arthrite. Certaines études ont trouvé une évolution clinique favorable dans des proportions qui sont légèrement inférieures à nos résultats, à savoir une proportion de 82% (Tory. Et. al, 2019) et 85% (Ogden et.al., 2020). Cette légère discordance s’explique par le fait que, dans ces deux études, les auteurs ont inclus seulement des cas d’arthrite de Lyme et de grande proportion de cas d’arthrite respectivement, comparativement à notre étude où la proportion d’arthrite était de 15%. Or, les cas d’arthrite ont souvent une évolution clinique moins favorable comparativement aux autres présentations de la maladie (Wormser et al., 2006; Steere et. al., 2006).

Bien que la majorité des cas inclus dans notre étude aient très bien répondu au traitement, une proportion de 10% des cas a développé le syndrome post-maladie de Lyme. D’autres auteurs ont trouvé des résultats similaires aux nôtres (Kowalski et. al., 2010; Wormser et. al., 2003). Ces résultats sont en accord avec la littérature qui précise que, suivant un traitement antibiotique bien conduit, il y aura un syndrome post-maladie de Lyme dans 10% des cas (Wormser 2006; Stupica et al., 2012). Nos résultats témoignent aussi de la nécessité de poursuivre les recherches afin de mieux comprendre cette entité et diminuer cette proportion non-négligeable de SPL.

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