• Aucun résultat trouvé

Les principes d’Ostrom comme approche diagnostique : les systèmes socio-écologiques

Dans le document Master of Science in Geography12 (Page 16-19)

2 Cadre conceptuel et théorique

2.3 Les principes d’Ostrom comme approche diagnostique : les systèmes socio-écologiques

rarement attribuables à une cause unique. Au contraire, ces problèmes sont généralement

« systémiques, interconnectés, multi-causals et évolutifs » (Ostrom, 2007 : 15181). La recherche de solutions efficaces requiert le dépassement des panacées institutionnelles et la construction d’une théorie systémique plus rigoureuse (del Mar Delgado-Serrano, 2015) permettant une compréhension plus approfondie des différents systèmes sociaux et biophysiques concernés et de leurs interactions.

Depuis leur publication, les principes de conception élaborés par Ostrom ont été repris par un grand nombre de chercheurs et utilisés en tant qu’outils analytiques et diagnostiques, en constituant une grille d’analyse qui n’a jamais réellement été remise en cause (Hollard & Sene : 2010).

De nombreux travaux de terrain ont rapporté des expériences très variées d’organisations locales informelles, de règles, de mécanismes de gestion des ressources communes (Combes et al., 2016), en confirmant en même temps l’efficacité prédictive des principes de conception ainsi que leur utilité pratique lorsqu’il s’agit d’analyser la structure et le fonctionnement des ressources communes et leurs systèmes de gestion respectifs. En 2010, Cox et al. (2010) ont analysé 91 articles dans le but d’évaluer les principes, en constatant qu’ils sont bien soutenus par l’évidence empirique. En général, ils sont utiles pour comprendre pourquoi certaines institutions dédiées à la gestion des biens communs sont

« robustes », alors que d’autres ne le sont pas (Ostrom, 2008a : 10). Cela dit, Cox et ses collègues ont également identifié un certain nombre de critiques surgies depuis leur apparition. Le principal reproche empirique porte notamment sur l’exhaustivité des huit principes et sur l’applicabilité de l’approche.

Selon ces critiques, les principes d’Ostrom ne listent pas tous les éléments pertinents relatifs à la durabilité des systèmes de gestion des ressources naturelles (Cox et al., 2010). Au cours des dernières années, en reconnaissant le bien-fondé de ces déclarations, Ostrom et d’autres chercheurs se sont engagés dans l’élaboration d’un nouvel outil diagnostique pour l’étude des systèmes socio-écologiques complexes. Le résultat a été la création du cadre conceptuel des systèmes socio-écologiques (SSE) ou

‟social-ecological system framework (SESF)” (Ostrom, 2007 ; 2009). Depuis le lancement de ses bases entre 2007 et 2009 (Ostrom, 2007 ; 2009), ce cadre conceptuel a permis aux chercheurs d’entamer l’élaboration d’un langage commun aux sciences sociales et environnementales pour analyser comment les interactions parmi une plus grande variété de variables sociales et écologiques se répercutent sur les résultats obtenus en matière de gestion des ressources. Cet outil a été conçu pour permettre aux chercheurs de clarifier ce qui rend un problème d’utilisation des ressources unique ou généralisable, par la compréhension des interactions critiques entre facteurs sociaux, environnementaux et institutionnels, et les différents résultats pouvant découler de ces interactions

15 (Kittinger et al., 2013). L’utilisation d’un tel outil diagnostique permet donc une plus subtile

« compréhension de ces systèmes complexes, et jette les bases pour une comparaison entre systèmes et pour des prescriptions politiques plus responsables » (Ostrom et Cox, 2010 : 1).

Venons-en maintenant à son fonctionnement. Le cadre conceptuel des systèmes socio-écologiques a une structure hiérarchique : il est organisé en plusieurs niveaux de systèmes imbriqués. Ces sous-systèmes, couramment appelés « variables de premier niveau », 1se composent : d’un Système de Ressources (SR, par exemple une pêche côtière), des Unités de Ressources (UR, par exemple des homards), des Acteurs impliqués dans le système (A, par exemple les pêcheurs), et d’un Système de Gouvernance (SG, l’ensemble des organisations et des normes qui règlent les activités de pêche dans la région considérée). Ensemble, ces recherches de terrain, Ostrom a proposé plusieurs dizaines de variables de deuxième niveau permettant de synthétiser les principales caractéristiques de chaque sous-système (voir Image 2). À titre d’exemple, la présence de limites clairement définies autour du système analysé (variable RS2) est généralement considérée comme une variable clé du système de ressources, car l’évidence empirique indique que ce paramètre produit souvent un effet majeur sur l’efficacité du système de gestion des ressources collectives (del Mar Delgado-Serrano, 2015).

Selon les spécificités des systèmes socio-écologiques analysés, d’autres variables de deuxième niveau peuvent être sélectionnées, et des niveaux plus profonds de variables peuvent être intégrés à l’analyse.

À titre d’exemple, lorsque les limites d’un système peuvent être définies naturellement, ou de façon arbitraire, elles peuvent être décrites comme étant des limites naturelles (variable de troisième niveau RS2a) ou des limites anthropiques (variable de troisième niveau RS2b). Ce cadre conceptuel se

1Source : Repella, 2014 : 6

Image 1 : Structure d’un système socio-écologique1

16 compose donc essentiellement d’un ensemble de définitions et d’une liste d’attributs. Il est censé faciliter l’identification, la catégorisation et l’organisation de variables nécessaires pour la compréhension des résultats et processus associés à la gestion des ressources naturelles d’un système donné.2Il permet également au chercheur d’établir dans quelle mesure les attributs des différents

sous-systèmes affectent et sont affectés par leurs interactions et leurs résultats conséquents, plutôt que par des paramètres

socioéconomiques,

politiques et écologiques plus vastes ou plus petits.

De ce fait, il peut également faciliter la vérification ou la création de théories concernant la fonctionnalité des SSE (Partelow, 2015).

En termes pratiques, cet outil peut donc être utilisé pour (Ostrom, 2011 : 15) : analyser les règles de gestion en place et la manière dont ces règles affectent les variables du système, prévoir les résultats d’un système donné (par exemple une situation de libre accès), ou évaluer les résultats obtenus à travers des arrangements institutionnels particuliers dans un contexte donné.

2Source : Ostrom, 2007 : 15183

Image 2 : Variables de deuxième niveau élaborées par E. Ostrom2

17

Dans le document Master of Science in Geography12 (Page 16-19)