Le suivi de l'évolution des concentrations des formes minérales de l'azote durant l'incubation permet la détermination de flux d'interface (interface eau – biofilm).
Ces flux sont évalués en absence puis en présence d’un inhibiteur de l’ammonium monooxygènase (AMO), première enzyme de la nitritation. L'inhibiteur utilisé est l'acétylène à l'état gazeux (C2H2), cette molécule inhibe
toute nitrification à une concentration supérieure ou égale à 1% vol/vol dans l'eau superficielle.
Dans notre cas, le volume de C2H2 injecté est de 10% vol/vol car cette dose permet également, comme nous le
verrons plus loin, l'inhibition des N2O réductases et donc une évaluation de la dénitrification. L'inhibiteur est
injecté à la moitié du temps d’incubation.
Les graphes montrant les évolutions des concentrations se présentent donc sous forme de courbes diphasiques :
les premières parties de courbes sont réalisées en absence d’inhibiteur de la nitritation. Elles décrivent les flux d'interface (production ou consommation d'azote minéral).
les secondes parties de courbes décrivent le comportement des systèmes après inhibition de la nitritation. Des régressions linéaires sont réalisées à partir des courbes d’évolution des concentrations afin de modéliser les flux.
L'évaluation de l'activité de nitrification est réalisée à partir des flux d'ammonium ou à défaut à partir des flux de nitrites.
Organigramme du traitement des échantillons d'expérimentations sur biofilms
Nitrification potentielle Production de NO3- en aérobiose
Disparition potentielle des NO3- en anaérobiose Production potentielle de N2O en anaérobiose (dénitrification potentielle)
Mesures de potentiels sur biofilms grattés
Rapport C/N des biofilms
Mesures de carbone
Analyse des gaz N2O
Analyse des formes de l'azote minéral NH4+, NO2-, NO3-
Analyse des échantillons d'eau
Surfaçage biofilms Volume des galets Matière sèche
Perte au feu Chlorophylle a Phéopigment des biofilms
Autres paramètres descriptifs
Traitement échantillons Eau - Biofilms
Figure 65 : schéma théorique illustrant le principe de mesure de la nitrification par suivi de la concentration en ammoniaque.
L’augmentation du flux d’ammonium après inhibition de la nitritation est attribuée à l’activité des bactéries nitritantes et par extension à l’activité de nitrification, NH4
+
étant directement en amont de l’inhibition. A1) Prédiction de l'évolution des flux d'interface après inhibition de la nitritation par l'acétylène Après inhibition du processus de nitritation, on attend :
Une augmentation du flux de NH4 +
(c’est sur cette modification qu’est basée la mesure de nitrification) : L’ammoniaque produit par ammonification n’est plus consommé par la nitritation.
Cette affirmation repose sur les hypothèses suivantes : - Les vitesses
+de la minéralisation de l'azote organique
+de la réduction dissimilative des nitrates en ammonium +de l’assimilation de NH4
+
comme source d’azote restent inchangées au cours du temps d'incubation.
- L'équilibre adsorption - désorption de l'ammonium sur les particules reste inchangé.
Une diminution du flux de NO2 -
:
la nitritation ne produit plus de nitrites, ces derniers sont toujours consommés par nitratation, dénitrification, assimilation et réduction dissimilative des nitrates en ammonium.
Cette affirmation repose sur les hypothèses suivantes :
- Les vitesses de production et de consommation de nitrites par dénitrification
par réduction dissimilative des nitrates en ammonium par assimilation des nitrates en tant que source d'azote reste inchangées.
Pas de conclusion sur le flux de NO3 -
:
La production de nitrates est stoppée une fois le stock de nitrites épuisé.
Les flux de nitrates ne peuvent pas, en pratique, être utilisés pour l’évaluation de l’activité de nitrification, car le stock de nitrites à l’intérieur des biofilms n’est sans doute jamais complètement épuisé (les nitrites sont produits et consommés par divers processus microbiens et il est rare d’observer un épuisement complet des nitrites de l’eau des systèmes) si bien que l’activité des bactéries de la nitratation (Nitrobacter) peut ne pas être perturbée malgré l’ajout d’inhibiteur.
L'inhibition de la nitritation augmente la disponibilité de l'O2 pour les processus de respiration avec de possibles
conséquences induites sur la dénitrification non couplée à la nitrification et sur les autres processus anaérobies.
C2H2 N organique NH4 + NO2 - NO3 -
Ammonification Nitritation Nitratation
Nitrification Variation du flux attribuée
à la nitritation Concentration en NH4+ Temps Inhibiteur de la nitritation (C2H2) Phase 1 avant
inhibition Phase 2après inhibition
Redistribution de l'assimilation des formes de l'azote.
La diminution de la production de nitrate, corrélée à l'augmentation de la disponibilité de NH4 +
produit par minéralisation, peut conduire à ce qu'une part des nitrates consommés pour l'assimilation de l'azote avant l'inhibition soit redistribuée sur la consommation d'ammoniaque.
En pratique, le plus souvent, l’effet de l’inhibiteur est peu observable au niveau des flux d’ammoniaque, peut être à cause de la redistribution possible de l'assimilation des formes de l'azote après l'inhibition.
C'est pourquoi, dans le cas où les flux d’ammoniaque restent constants, nous attribuons la variation du flux de nitrite à une valeur de l’intensité de l’activité de nitritation et par extension de nitrification ; les nitrites ne sont plus produits par nitritation mais continuent d’être utilisés au même rythme par nitratation.
Si une diminution du flux de nitrite après injection de l’inhibiteur est observée et que simultanément, une augmentation du flux d'ammoniaque est observé, les flux d'ammoniaque servent de base aux calculs de l'intensité de nitrification.
L’évaluation correcte de la nitrification par cette méthode repose donc sur les hypothèses suivantes :
1. Tous les processus faisant intervenir la molécule étudiée sont constants à l’échelle de temps considérée (soit sur les 5 à 6 heures d’incubation). C’est pourquoi une surveillance est réalisée pendant toute la durée de l’expérimentation pour vérifier que certains paramètres déterminants sur le cycle de l’azote ne deviennent pas limitants(ex : O2)
2. L’acétylène inhibe uniquement la nitritation et n’a aucun effet significatif sur les autres processus liés à la production ou à la consommation d'ammonium et de nitrite.
3. L’acétylène a une action immédiate et complète sur la nitritation.
4. Les flux d’interface mesurés depuis la colonne d’eau sont directement liés aux processus en cours dans les biofilms.
5. La perturbation de l'hydrodynamique ne modifie pas de manière significative les processus se déroulant dans les biofilms.