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Chapitre 4 Résultats (article) : Trouble cognitif léger : perspectives des ergothérapeutes du

5.1 Principaux résultats et pistes de recherches futures

Un des résultats importants de ce sondage est que plus de 50% des ergothérapeutes disent très bien connaître cet état. Ainsi, la majorité des ergothérapeutes dans notre étude a démontré une connaissance générale du TCL. Cependant, quelques différences ont été constatées entre leurs réponses les écrits scientifiques. La plupart des répondants ont indiqué que les difficultés liées au TCL sont rencontrées principalement dans les AIVQ, et que ces difficultés sont plus marquées que ceux liés au vieillissement normal. Toutefois, une partie importante des professionnels (25%) a mentionné les activités de base comme étant également affectées dans le TCL. De plus, une grande majorité ne connaît pas les sous-types de TCL. Enfin, ils utilisent peu l’observation directe pour évaluer l’indépendance fonctionnelle dans cette condition. Ils privilégiant les tests permettant de dépister les troubles cognitifs, tels que le MOCA ou le MMSE.

Ces résultats sont semblables à ceux obtenus lors des sondages réalisés auprès d’ergothérapeutes au Canada pratiquant auprès d’une clientèle gériatrique (Douglas et al., 2007; Belchior et al. 2015). Le sondage réalisé par Douglas et al. (2007) avait pour but de connaître les évaluations standardisées et non standardisées utilisées par les ergothérapeutes auprès d’une

population gériatrique. Trois façons de répondre au sondage ont été utilisées : par courrier électronique, par courrier postal ou via un site Internet. Un total de 247 ergothérapeutes a participé au sondage, ce qui représente un taux de réponse de 24,5%; parmi ceux-ci, 43 (17,4%) ont participé par voie électronique. Les résultats montrent que l’évaluation des composantes cognitives était plus fréquente que l’évaluation du fonctionnement dans les activités quotidiennes. De même, l’étude de Belchior et al. (2015) montre que les ergothérapeutes canadiens identifient les problèmes cognitifs plus fréquemment que les problèmes fonctionnels auprès des patients TCL. L’étude en question a été réalisée au moyen d’un sondage dans lequel les ergothérapeutes ont été incités à lire deux vignettes de patients TCL, soit un cas TCL amnésique et l’autre non-amnésique. Les participants devaient identifier de possibles difficultés et mentionner quels outils de dépistage et d’évaluation ils utiliseraient dans leur pratique pour les évaluer.

Puisqu’il n’existe pas encore de consensus ni de façon standardisée d’évaluer l’impact fonctionnel du TCL, il se peut que les ergothérapeutes priorisent des tests standardisés évaluant la cognition. De plus, les professionnels n’ont pas encore accès à des outils standardisés sensibles à l’impact fonctionnel du TCL (Belchior et al., 2015). Il se peut également que les ergothérapeutes priorisent leurs connaissances tacites, c.-à-d. des connaissances acquises avec l’expérience, plutôt que la connaissance des données probantes sur le TCL. Les connaissances tacites peuvent toutefois montrer certaines limites. Par exemple, en évaluant les réponses sur les sous types de TCL, on peut supposer qu’il n’existe pas une connaissance assez approfondie de cet état, même parmi ceux qui ont répondu avoir une très bonne connaissance du sujet. On pourrait également supposer que certains ergothérapeutes confondent le début de la démence avec le TCL.

Ainsi, il serait important d’approfondir notre connaissance de la pratique des ergothérapeutes, afin de mieux comprendre le contexte qui les amène à faire ces choix de pratique. Pour illustrer notre propos, voici un élément mentionné dans la section réservée au commentaire par un des participants :

“Je trouve mon milieu de pratique souvent peu propice à une évaluation adéquate des déficits cognitifs. De plus, comme tout doit aller vite vite vite, les médecins s'attendent à des évaluations papier crayon rapide pour avoir un chiffre mais cela

va à l'encontre de ma spécificité professionnelle. Puis, dans mon milieu, on n’a pas l'occasion malheureusement d'intervenir réellement sur les difficultés observées.”

Ce type de précisions permettrait de nuancer les résultats du sondage et des études futures apportant ces nuances seraient très enrichissantes pour la pratique. Ainsi, des groupes de discussion focalisée pourraient être un bon moyen d’approfondir notre compréhension de la pratique clinique. Plusieurs répondants nous ont d’ailleurs signalé l’intérêt de participer à des groupes de discussion sur le TCL, ce qui montre l’intérêt, pour plusieurs, d’approfondir le sujet. De plus, les connaissances tacites des ergothérapeutes pourraient venir enrichir la connaissance scientifique du TCL. Dans un contexte de transfert de connaissances, ces échanges entre la clinique et la recherche sont riches, car ils permettent la bonification des connaissances dans les deux sens.

Enfin, nous pensons important de documenter les possibles barrières, autre que celles liées au contexte de pratique, qui pourraient expliquer l’écart entre la pratique clinique et les données probantes. Pour guider ces études futures, le cadre théorique du National Institute for

Health and Clinical Excellence (NICE, 2007) semble être intéressant. Le cadre du NICE est un

guide pour les professionnels de la santé ayant pour but de les aider à offrir des soins adéquats aux patients, en encourageant les cliniciens à changer leur pratique pour être en accord avec les dernières lignes directrices. Ce modèle identifie, entre autres, les principaux obstacles aux changements qui peuvent être rencontrés dans le milieu de santé, tels que la motivation, les croyances et attitudes des cliniques, leurs compétences ainsi que des diverses considérations pratiques (comme avoir les ressources et le personnel nécessaires dans les milieux de pratique). Cette identification des barrières nous amènerait ensuite à synthétiser et à disséminer nos résultats, ainsi qu’à proposer des solutions pratiques afin de les surmonter.

Ce sondage est donc un premier pas vers l’amélioration des pratiques envers la clientèle âgée atteinte de troubles cognitifs.

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