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II. Présentation du Conseiller des dames

4. Les principales chroniques : des titres et un contenu mouvant

Dans cette dernière partie de la présentation générale du Conseiller des Dames, nous exposons succinctement les principales chroniques du journal. Nous pouvons constituer deux grands types de chroniques. Dans un premier temps, nous énumérerons les chroniques régulières, paraissant dans chaque numéro mensuel, écrites par le même rédacteur. Nous citerons aussi les chroniques plus ponctuelles mais qui ont répondu à une visée importante du journal, comme par exemple les articles à visée éducative. Cependant la structure du périodique est mouvante tout au long des six années étudiées : les titres des chroniques changent, certaines sont privilégiées à d’autres au fil du temps, des déplacements significatifs s’opèrent, etc. Ces évolutions feront l’objet d’une analyse dans une prochaine partie de notre étude.

Présentation générale du Conseiller des Dames

Les chroniques principales :

- « Economie domestique » : Plus tard « Economie domestique des dames. Conseils et ouvrages divers ». En 1848, cette chronique ouvre chaque numéro et on lui accorde une place remarquable. Peu à peu, elle s’affaiblit et se trouve reléguée à la fin du journal.

- « Chronique des salons » : Ou « Chronique de Paris », « Chronique du mois » écrite par la très mondaine Mme de Sabran. Cette chronique est créée en 1850 et prend peu à peu la place de l’économie domestique.

- Chroniques narratives : Elles prennent la forme de feuilletons (notamment durant les années 1848-1849, ou de récits ponctuels s’intitulant « Légendes et croyances », ou « Souvenirs historiques ».

- « Causerie de la mère de famille » : Rédigée par Louise Boyeldieu d’Auvigny, cette chronique apparaît en 1851 à une période où le Conseiller des Dames renforce son caractère éducatif et instructif.

- « Petite correspondance des demoiselles » : Tout comme la précédente, elle apparaît en 1851 et est rédigée par Louise Boyeldieu d’Auvigny.

- « Modes » : Ou « Revue des modes de la saison ». Cette chronique rassemble les commentaires sur la mode parus dans les journaux Le Follet et les Modes

Parisiennes.

- « Explication de la planche de broderie » : Cette chronique consacrée aux travaux d’aiguille permet à la dame de réaliser les modèles de la maison Sajou, suivant une description précise de la broderie.

- Planche de broderie : A la fin de chaque numéro mensuel, une planche de dessins de broderies et de toilettes est jointe. Elle représente les modèles de la maison Sajou.

Au-delà des principales chroniques qui paraissent de manière régulières, Le

Conseiller compte de nombreuses autres chroniques, plus ponctuelles :

- « Actualités » : Cette chronique n’apparaît que durant les années 1848-1849. Elle reste cependant peu fréquente et s’intéresse à certains points d’actualité politique (Une dame à l’Assemblée nationale, Une visite intime chez le président, etc.)

- « Etude de mœurs » : Chronique instructive : étude sociale ou historique autour des femmes. (par exemple : « Les femmes de tous les pays », une chronique de Benjamin Tilleul).

- « Variétés » : Cette chronique peut contenir des articles sur l’actualité culturelle, politique, des chroniques narratives, des réflexions sur la société contemporaine (par exemple : Le carême).

- « Recherches industrielles » : Ou « Petite histoire des bijoux des dames ».

- « Portraits et caractères » / « Profils d’artistes » : De nombreuses chroniques sont dédiées à la biographie de personnes célèbres, la plupart du temps des femmes, épouses d’hommes politiques, femmes de lettres mais surtout artistes, cantatrices et comédiennes.

- « Bibliographie » : Cette rubrique n’apparaît que de rares fois mais son contenu est cependant significatif.

- « Courrier des théâtres » : Cette chronique se développe dès 1851 et est signée par Z. Bourey, le directeur-gérant du journal.

Une revue féminine bourgeoise

La presse féminine – journaux de mode, journaux féminins contenant de la littérature, des causeries, des planches de broderies, des chroniques sur l’éducation, etc. - se densifie après 1830. Cet essor correspond à la demande d’un public qui lui aussi s’étend et se fortifie durant le règne de Louis-Philippe : la bourgeoisie. Les mœurs de cette classe montante exercent leur influence au sein de la société. La famille, le foyer, les valeurs chrétiennes sont remises à l’honneur. Le statut de la femme évolue lui aussi. La femme bourgeoise répond à un modèle forgé par le catholicisme et qui s’est renforcé tout au long de la première moitié du XIXe siècle.

Evelyne Sullerot explique dans son ouvrage sur la presse féminine : « La femme,

exclue de la société agissante, pensante, marchande et entreprenante, est chargée de remplir une nébuleuse mission (…) »50. Cette nébuleuse mission, loin de toutes actions, correspond à une réalité abstraite que Michela de Giorgio appelle « l’épanouissement de

l’humanité »51. Cette mission se traduit par l’épanouissement du foyer, de la famille et

des hommes. Bien qu’elle ne puisse agir « parmi les hommes », la femme se voit attribuer des fonctions civilisatrices importantes : elle règne sur l’espace domestique, sur l’équilibre familial et par conséquent sur l’équilibre social.

Ces mœurs bourgeoises et le statut féminin qui en découle se reflètent dans les divers organes de la presse féminine. Ceux-ci évoluent et s’éloignent alors du modèle dix-huitièmiste du journal de mode un peu frivole. Les journaux féminins accordent une place de choix aux chroniques d’économie domestique qui conseillent et instruisent la dame sur la manière d’entretenir son foyer. La préoccupation de l’éducation des enfants est de plus en plus présente et la morale religieuse autour du rôle de la mère et de l’épouse se discerne en filigrane dans l’essentiel des articles.

Le traitement de la mode lui aussi a évolué. La femme bourgeoise est au 19e siècle la principale cliente des toilettes à la mode. Faisant partie intégrante de son rôle de maîtresse de maison, les travaux d’aiguilles et le travail de la broderie se voient offrir une place importante dans les journaux féminins. La dame, gardienne du foyer, de la famille et des valeurs chrétiennes qui les régissent se voit donc offrir une presse qui lui est propre, reflétant ses occupations et ses devoirs. La seconde partie de notre étude s’intéresse spécifiquement au contenu du Conseiller des Dames et aux enjeux de ses

50 SULLEROT, Evelyne, op. cit., p. 133. 51 DE GIORGIO, Michela, op. cit., p. 170.

diverses chroniques. Nous mettrons donc en exergue les chroniques les pl us significatives en tentant de montrer comment la pensée bourgeoise conformiste s’affirme par le biais de cette presse.