On rappelle le résultat :
Théorème 4.5.1 Supposons que les composantes de Fatou Bi soient simple-
ment connexes et que les bords ∂Bi soient localement connexes. Si ∂B1∩∂B2
ne contient pas de point critique d’orbite infinie et est disjoint de l’ensemble ω-limite de tout point critique récurrent, alors ∂B1∩∂B2 contient un point
périodique.
Réduction. Sans perte de généralité on suppose que f (B1) = B1 et f(B2) = B2, quitte à
travailler avec une itérée de f. Idée de la preuve et outils
Après d’autres réductions, la restriction f ∶ ∂B1∩∂B2 →∂B1∩∂B2 devient fortement dilatante
Définition 4.5.2 (Application fortement dilatante) Soit g une fraction rationnelle de degré au moins 2, et X ⊂ ˆC un compact. On dit que g est fortement dilatante sur X s’il existe un entier N ≥ 0 tel que minx∈X∣∣(gn)′(x)∣∣ > 1 pour tout n ≥ N , où la norme est définie
par la métrique sphérique.
Théorème 4.5.3 ([Man93]) Soit g une fraction rationnelle de degré au moins 2. Soit X ⊂ J (g) un compact invariant ne contenant pas de point critique ni de point parabolique. Si X est disjoint de l’ensemble ω-limite de tout point critique récurrent, alors g est fortement dilatante sur X.
Après une dernière réduction on montre que f ∶ ∂B1∩∂B2 →∂B1∩∂B2est distance-expanding et
ouverte (en utilisant la proposition 4.1.3) dans le but d’utiliser le théorème 4.5.5 sur l’existence d’un point périodique pour les applications ouvertes et distance-expanding.
Définition 4.5.4 (Application distance-expanding) Soit (X, ρ) un espace métrique. Une application continue T ∶ X → X est dite distance-expanding par rapport à la métrique ρ s’il existe des constantes λ > 1, η > 0 et N ≥ 1 tels que pour tous x, y ∈ X,
ρ(x, y) ≤ η ⇒ ρ(TN(x), TN(y)) ≥ λρ(x, y).
Théorème 4.5.5 ([PrzUrb10], chapitre 4) Soit (X, ρ) un espace mé- trique compact, et T ∶ X → X une application continue, ouverte et distance- expanding. Pour tout β > 0 assez petit, il existe un α > 0 tel que si x ∈ X et ρ(x, TL(x)) ≤ α pour un certain L ≥ 1, alors la boule de centre x et de rayon
β contient un point périodique.
Preuve
Si ∂B1∩∂B2contient un point critique d’orbite finie ou un point parabolique, alors ∂B1∩∂B2
contient un point périodique. On suppose désormais que ∂B1 ∩∂B2 ne contient aucun point
critique d’orbite finie ni aucun point parabolique. La restriction f ∶ ∂B1∩∂B2→∂B1∩∂B2 est
alors fortement dilatante, par le théorème de Mañé.
Si ∂B1∩∂B2contient un point multiple dans ∂B1ou ∂B2, alors on sait que ce point est finalement
périodique, grâce à la proposition 4.1.3. À partir de maintenant on suppose également que ∂B1∩∂B2 ne contient aucun point multiple dans ∂B1 ni dans ∂B2.
Sous ces réductions on montre maintenant que la restriction f ∶ ∂B1 ∩∂B2 → ∂B1∩∂B2 est
distance-expanding et ouverte, pour ensuite utiliser le théorème 4.5.5.
Proposition 4.5.6 La restriction f ∶ ∂B1∩∂B2 → ∂B1 ∩∂B2 est distance-
expanding.
Preuve . Comme f ∶ ∂B1∩∂B2 →∂B1∩∂B2 est fortement dilantante, il existe un entier N ≥ 0
tel que
min
z∈∂B1∩∂B2
∣∣(fN
)′(z)∣∣ > 1.
Comme ∂B1∩∂B2 est compact, on va pouvoir étendre cette propriété de f sur un voisinage U
de ∂B1∩∂B2, et montrer que si x, y ∈ ∂B1∩∂B2 sont assez proches, alors la géodésique entre
fN(x) et fN(y) se relève en un chemin de x à y dans U. En comparant les longueurs de la
géodésique et de son relevé, on obtiendra la proposition. Soit 1 < λ < minz∈∂B1∩∂B2∣∣(f
N)′(z)∣∣. Pour tout x ∈ ∂B
1∩∂B2 soit rx >0tel que ∣∣(fN)′(z)∣∣ ≥
Assertion 4.5.7 Il existe une constante > 0 telle que B(x; ) ⊂ U pour tout point x ∈ ∂B1∩∂B2.
Preuve . Supposons par l’absurde qu’il existe une suite (n)n≥0 ⊂ R∗+ convergeant vers 0 et une
suite (xn)n≥0 ⊂∂B1∩∂B2 telles que B(xn; n) /⊂U pour tout n ≥ 0. Soit y ∈ ∂B1∩∂B2 un point
d’accumulation de (xn)n≥0. Il existe un Q ≥ 0 tel que B(xQ; Q) ⊂B(y; ry). Mais B(y; ry) ⊂U,
c’est donc absurde. ◻
Assertion 4.5.8 Il existe des constantes η, ζ > 0 tels que fN(B(x; η)) ⊂ B(fN(x); ζ) ⊂ fN(B(x; ))
pour tout x ∈ ∂B1∩∂B2.
Preuve . On montre d’abord l’existence de la constante ζ telle que B(fN(x); ζ) ⊂ fN(B(x; ))
pour tout x ∈ ∂B1∩∂B2. Supposons par l’absurde qu’il existe une suite (ζk)k≥0⊂ R∗+convergeant
vers 0 et une suite (xk)k≥0 ⊂ ∂B1 ∩∂B2 telles que B(fN(xk); ζk) /⊂ fN(B(xk; )) pour tout
k ≥ 0. Soit y ∈ ∂B1∩∂B2 un point d’accumulation de (xk)k≥0. Puisque fN est une application
ouverte, l’image fN(B(y; /2)) est un ouvert. Il existe donc une constante δ > 0 telle que
B(fN(y), δ) ⊂ fN(B(y; /2)). Pour un entier K ≥ 0 assez grand on a
B(fN(x
K); ζK) ⊂B(fN(y); δ) ⊂ fN(B(y; /2)) ⊂ fN(B(xK; )).
Il y a donc contradiction.
L’existence de la constante η > 0 telle que fN(B(x; η)) ⊂ B(fN(x); ζ) pour tout x ∈ ∂B
1∩∂B2
est simplement la continuité uniforme de fN sur le compact ∂B
1∩∂B2. ◻
Maintenant, soit x, y ∈ ∂B1∩∂B2 tels que d(x, y) < η. Alors fN(y) ∈ B(fN(x); ζ)par l’assertion
4.5.8. Soit Γ la géodésique de fN(x) à fN(y). On a Γ ⊂ B(fN(x); ζ). L’assertion 4.5.8 nous
dit aussi que B(fN(x); ζ) ⊂ fN(B(x; )). Donc il existe un arc γ ⊂ B(x; ) de x à y tel que
fN(γ) = Γ. Grâce à l’assertion 4.5.7 et au fait que ∣∣(fN)′(z)∣∣ ≥ λ sur B(x; ), on peut enfin
écrire
d(fN(x), fN(y)) ≥ λd(x, y).
En effet, si Γ(t) et γ(t) sont des paramétrages de Γ et γ respectivement, avec Γ(t) = fN(γ(t)),
alors d(fN(x), fN(y)) = ∫ 1 0 ∣∣Γ′(t)∣∣dt = ∫ 1 0 ∣∣(fN(γ(t)))′(t)∣∣dt = ∫ 1 0 ∣∣(fN)′(γ(t))∣∣.∣∣γ′(t)∣∣dt ≥λ ∫ 1 0 ∣∣γ′(t)∣∣dt = λl(γ) ≥ λd(x, y) où l(γ) est la longeur de γ. Ceci prouve la proposition. ∎
Proposition 4.5.9 La restriction f ∶ ∂B1∩∂B2 →∂B1∩∂B2 est ouverte.
Preuve . Soit O ⊂ ∂B1∩∂B2 tel que f(O) ne soit pas ouvert. Montrons que O n’est pas ouvert.
Puisque ∂B1∩∂B2−f (O) n’est pas fermé, il existe une suite (yn)n≥0 ⊂∂B1∩∂B2−f (O)
qui converge vers un certain y ∈ f(O). Soit x ∈ O tel que f(x) = y. Comme on suppose que ∂B1 ∩∂B2 ne contient pas de point critique, il existe un voisinage U de x et un voisinage
xn ∶= f−1(yn) ∩U est donc bien défini, et la suite (xn)n≥0 converge vers x. On a xn ∉O pour
tout n ≥ 0 car f(xn) = yn ∉ f (O). Pour montrer que O n’est pas ouvert il ne reste plus qu’à
montrer que xn∈∂B1∩∂B2 pour tout n assez grand.
Pour chaque n ≥ 0 il existe deux composantes de Fatou Bn
1 et B2n telles que xn∈∂B1n∩∂Bn2 et
f (Bn i ) =Bi.
Assertion 4.5.10 Pour n assez grand, Bn i =Bi.
Preuve . Par l’absurde, supposons par exemple que Bn
1 ≠ B1 pour une infinité d’entiers n.
Il existe donc une composante de Fatou B telle que B ≠ B1, f(B) = B1 et xn ∈ ∂B pour
une infinité d’entiers n. Donc x ∈ ∂B. Puisque f ∶ B → B1 est un revêtement éventuellement
ramifié de degré fini, la formule de Riemann-Hurwitz assure que le bord ∂B a un nombre fini de composantes connexes (on rappelle que B1 est supposée simplement connexe). Chaque
composante connexe de ∂B est localement connexe, car ∂B1 est localement connexe. Soit ˜W la
composante connexe de ∂B contenant x et W la composante connexe de ˆC − ˜W contenant B. L’ouvert W est simplement connexe avec un bord infini et localement connexe.
Il existe une composante connexe UB de U ∩ W telle que x ∈ UB (proposition 4.3.7) et si U
est assez petit alors UB est en fait une composante connexe de U ∩ B. De même, il existe une
composante connexe UB1 de U ∩B1telle que x ∈ UB1. Ainsi, f(UB)et f(UB1)sont deux connexes
distincts (car f est injective sur U) de V ∩B dont le bord contient y. La proposition 4.3.7 assure alors que y est multiple dans ∂B1. C’est absurde puisque par hypothèse l’intersection ∂B1∩∂B2
ne contient aucun point multiple dans ∂B1. ◻
Donc pour n assez grand xn∈∂B1∩∂B2, ce qui prouve la proposition. ∎
Pour finir la preuve de la partie 1, prenons un point z ∈ ∂B1∩∂B2 et un point d’accumulation
w de l’orbite de z. Soit β > 0 et α la constante apparaissant dans le théorème 4.5.5. Il existe des entiers P > Q ≥ 0 tels que fP(z), fQ(z) soient dans la boule de centre w et de rayon α/2,
donc
d(fQ(z), fP(z)) = d(fQ(z), fP−Q(fQ(z))) ≤ α.
On peut donc appliquer le théorème 4.5.5 avec x = fQ(z) et L = P − Q. On obtient qu’il existe
un point périodique dans l’intersection de ∂B1∩∂B2 avec boule de centre fQ(z)et de rayon β.
Ceci termine la preuve de la partie 2 du théorème 4.1.2. Commentaires
À priori les hypothèses de cette partie ne sont pas suffisantes pour impliquer la densité des points finalement périodiques de ∂B1∩∂B2 dans ∂B1∩∂B2.
Soit x ∈ ∂B1∩∂B2. En utilisant le théorème 4.5.5 on a obtenu que pour tout β > 0 assez petit
il existe un entier p(β) ≥ 0 tel que B(fp(β)(x); β) ∩ (∂B
1∩∂B2) contienne un point périodique
ω(β). Donc près de x il existe un point finalement périodique, envoyé par fp(β) sur ω(β).
Si x était un point d’accumulation de sa propre orbite, alors x serait accumulé par une suite de points périodiques de ∂B1∩∂B2.
Si p(β) = p était constant par rapport à β, alors en faisant tendre β vers 0 on pourrait créer une suite (ωn)n≥0 ⊂∂B1∩∂B2 de points périodiques convergeant vers fp(x), et en raisonnant
de la même façon que dans la preuve du lemme 4.5.9 on pourrait montrer que x est accumulé par une suite de points finalement périodiques de ∂B1∩∂B2.
constant par rapport à β. Ainsi, en faisant tendre β vers 0 il n’y a aucune raison pour qu’un des points finalement périodiques près de x qui sont envoyés par fp(β) sur les points ω(β) soit
dans ∂B1∩∂B2.
Les conditions de la partie 2 du théorème 4.1.2 assurent qu’un de ces points est dans ∂B1∩∂B2,
ce qui donnera la densité des points finalement périodiques de ∂B1∩∂B2 dans ∂B1∩∂B2.