Dans cette section nous allons d´emontrer le Th´eor`eme 0.1 ´enonc´e dans l’introduc- tion.
Th´eor`eme 0.1. Supposons satisfaites les hypoth`eses (H0), · · · , (H5). Alors
char((A∞)χ) divise char(( cE∞/ dSt∞)χ).
On conserve les notations des sections pr´ec´edentes. Dans tout le reste de cette section
T = Zp(1) ⊗ZpO(χ
−1
). Pour tout syst`eme d’Euler c de T , on note
cK,∞ := (cF)K⊂fF ⊂K∞
l’´el´ement correspondant dans HIw1 (K, T ) := lim←−
n
H1(Kn, T ). On suppose que
(H3) le caract`ere χκ−1 est non trivial.
L’une des cl´es de la preuve du th´eor`eme 0.1 est le r´esultat suivant dˆu `a Rubin Th´eor`eme 4.6. Soit c un syst`eme d’Euler pour la repr´esentation T de GK. Sous
l’hypoth`ese (H3), si cK,∞ 6∈ HIw1 (K, T )Λ−tor alors le Λ-module HF1∗
can(K∞, T
∗)∨ est
de type fini et de torsion. De plus char(HF1∗
can(K∞, T
∗
)∨) divise char((HF1can(K∞, T )/cK,∞Λ)Λ−tor).
D´emonstration [33, Theorem 2.3.2 et Theorem 2.3.3]) Comme l’action de GK∞
sur T est donn´ee par κχ−1, elle n’est ni triviale ni donn´ee par le caract`ere cy- clotomique. En particuliers les hypoth`eses not´es Hyp(K∞, V ), Hyp(K∞, T ) et
Hyp(K∞/K) des th´eor`emes de Rubin sont automatiquement v´erifi´ees.
Pour tout n ≥ 0, notons En (resp. En0) le groupe des unit´es (resp. p-unit´es)
de Ln. Rappelons que la partie finie du conducteur de Ln/K peut s’´ecrire sous la
par les id´eaux de K qui sont ramifi´es dans L∞/L. Soit fχ le conducteur de χ et
soit η ∈ F∞. Pour tout n ≥ n0 et tout g | eh tel que efχ| ges0, posons b εn,g,η := corLn,g(1),Ln,g(εbn,g,η(1)). Par d´efinition, on a cn,g,η := corKn(1),Kn(cn,g,η(1)) ∈ H 1(K n, T )
o`u cn,g,η(1) est d´efini dans (4.4). Soit maintenant
cg,η,∞= {cn,g,η}n≥n0
l’´el´ement correspondant de {cn,g,η(r)}n≥0, r∈Rdans HIw1 (K, T ), o`u cn,g,η(r) est d´efini
dans (4.4).
Remarque 4.7. Pour tout n ≥ n0, on a
• cn,g,η = corLn,g,Kn(εbn,g,η⊗ 1χ−1)
• resKn,Ln(corLn,Kn(εbn,g,η⊗ 1χ−1)) = [Ln : Ln,g]resKn,Ln(cn,g,η).
Rappelons que les Λ-modules ( cE0
∞ ⊗Zp O(χ
−1))∆ et H1
Fcan(K∞, T ) sont iso-
morphes (voir (2.3)), o`u cE0 ∞= lim←−nEbn0. Notons θ : ( cE0 ∞⊗ZpO(χ −1))∆ //H1 Fcan(K∞, T )
Lemme 4.8. Supposons que p - [L : Lχ]. Posons
εg,η,∞= {εbn,g,η ⊗ 1χ−1}n≥n0.
Alors sous les hypoth`eses (H1), (H2) et (H3), on a
char(HF1∗ can(K∞, T ∗ )∨) divise char(( cE0 ∞⊗ZpO(χ −1 ))∆/εN∆ g,η,∞Λ)
pour tous η ∈ F∞ et g tel que efχ | ges0.
D´emonstration. Soit n ≥ n0. Puisque [Ln : Ln,g] = [L : Lg], la remarque ci-dessus
montre que (εbn,g,η ⊗ 1χ−1)N∆n = [L : Lg]resK n,Ln(cn,g,η). Comme Lχ ⊂ Lg ⊂ L et p - [L : Lχ], on a θ(εN∆ g,η,∞)Λ = cg,η,∞Λ.
D’o`u le diagramme commutatif εN∆ g,η,∞Λ // θ o ( cE0 ∞⊗ZpO(χ −1))∆ θ o cg,η,∞Λ //HF1can(K∞, T ) .
Sous l’hypoth`ese (H3), la proposition 4.5 montre que la famille {cn,g,η(r)}n≥0, r∈R
d´efinit un syst`eme d’Euler pour T . L’´el´ement εN∆
g,η,∞ est non nul. En effet, par
d´efinition cet ´el´ement est li´e `a la d´eriv´ee en z´ero de la fonction L(s, χ). Or L0(0, χ) 6= 0 vu que χ(Dv(L/K) 6= 1 pour toute place v ∈ Σ∞\{v0}. Le th´eor`eme 2.11 im-
plique que H1
Fcan(K∞, T )/cg,η,∞Λ est un Λ-module de torsion. Le th´eor`eme 4.6
permet de conclure. Lemme 4.9. Le Λ-module ( dSt∞⊗Zp O(χ
−1
))N∆ est engendr´e par les εN∆
g,η,∞, η ∈ F∞et efχ | ges0 ( dSt∞⊗ZpO(χ −1 ))N∆ = hεN∆ g,η,∞: η ∈ F∞,efχ| ges0i.
D´emonstration. Soit g un id´eal entier de K, sans facteurs carr´es. Si g | efχ et
g6= efχ alors pour tout n ≥ 0 χ(Gal(Ln/Ln,g) 6= 1 et donc
(bεn,g,η⊗ 1χ−1)N∆n = 1 ;
on en d´eduit que
εN∆
g,η,∞= 0
pour tout η ∈ F∞. D’o`u le lemme.
Corollaire 4.10. Sous les hypoth`eses et notations du lemme 4.8 char(HF1∗ can(K∞, T ∗ )∨) divise char ( cE0 ∞⊗ZpO(χ −1 ))∆/( dSt∞⊗ZpO(χ −1 ))N∆.
D´emonstration. On sait d’apr`es le th´eor`eme 2.11 qu’il existe un isomorphisme ( cE0
∞⊗Zp O(χ
−1))∆ ∼ //Λ .
Rappelons que pour tout id´eal P de Λ, l’id´eal caract´eristique de Λ/P est l’unique id´eal principal (f ) de Λ contenant P tel que le quotient (f )/P est pseudo-nul. Soit ψ l’homomorphisme compos´e
ψ : ( dSt∞⊗ZpO(χ
−1))N∆ //( cE0
∞⊗Zp O(χ
de sorte qu’on ait un diagramme commutatif ( dSt∞⊗ZpO(χ −1))N∆ // _ Λ o // //Λ/ψ(( dSt∞⊗ ZpO(χ −1))N∆) (f ) // Λ // //Λ/(f ) pseudo-nul o`u (f ) = char(Λ/ψ(( dSt∞⊗ZpO(χ
−1))N∆)). Le lemme 4.8 et le lemme 4.9 affirment
que ψ(( dSt∞⊗ZpO(χ −1))N∆) ⊂ char(H1 F∗ can(K∞, T ∗)∨).
Par cons´equent,
char(Λ/ψ(( dSt∞⊗ZpO(χ −1))N∆)) = char(( cE0 ∞⊗ZpO(χ −1))∆/( dSt ∞⊗ZpO(χ −1))N∆)
est divisible par char(H1 F∗ can(K∞, T ∗)∨). Remarque 4.11. Lorsque ( cE0 ∞⊗ZpO(χ
−1))∆est de rang sup´erieur `a 1, en utilisant
les ´el´ements de Rubin-Stark au lieu des unit´es de Stark, on d´emontre un r´esultat semblable au corollaire 4.10, cf. th´eor`eme 0.3, g´en´eralisant ainsi au cas non semi- simple les r´esultats de B¨uy¨ukboduk obtenus dans [8, Theorem A].
Lemme 4.12. Pour toute place p-adique de K, soit Dv∞le sous-groupe de d´ecomposition
de v dans L∞/K∞. Alors on a une suite exacte de Λ-modules
0 //( cE∞⊗ZpO(χ −1))∆ //( cE0 ∞⊗Zp O(χ −1))∆ // M v|p χ(Dv∞)=1 (O[[S]]/ωnvO[[S]]) o`u ωnv = (S + 1) pnv
− 1 et pnv est l’indice du groupe de d´ecomposition de v dans
K∞/K.
D´emonstration. Pour tout n ≥ 0, on a la suite exacte canonique 0 //En //En0 //⊕v|pZ[Gal(Ln/K)/Dv(Ln/K)]
o`u v parcourt l’ensemble des places p-adiques de K. Comme les Z-modules en pr´esence sont de type fini, on a la suite exacte
On peut ais´ement montrer l’existence d’isomorphismes naturels (O(χ−1)[Gal(Ln/K)/Dv(Ln/K)])∆n '
0, si χ(Dv(Ln/Kn)) 6= 1 ;
O[Gal(Kn/K)/Dv(Kn/K)], si χ(Dv(Ln/Kn)) = 1 .
Ainsi par passage `a la limite projective, on obtient (O(χ−1)[G/Dv(L∞/K)])∆∼=
0, χ(Dv∞) 6= 1 ;
O[[S]]/(ωnv)O[[S]], sinon.
D’o`u le lemme.
Rappelons que pour toute place v ∈ Σp, Av est l’id´eal de Λ engendr´e par les
´el´ements σ − 1, σ ∈ Γdv, o`u d
v est l’indice du groupe de d´ecomposition Dv(K∞/K)
dans Gal(K∞/K). Notons A le produit des id´eaux Av, o`u v parcourt l’ensemble
des places p-adiques de K.
Lemme 4.13. L’id´eal char((dA∞⊗ZpO(χ
−1))
∆) divise A. char(HF1∗
can(K∞, T
∗)∨).
D´emonstration. Consid´erons la suite exacte : (⊕w|pHF1∗ ur(Ln,w, T ∗))∨ //H1 F∗ ur(Ln, T ∗)∨ //H1 F∗ can(Ln, T ∗)∨ //0 .
Comme Dw op`ere trivialement sur T∗ et Dw/Iw est sans torsion, le O-module
H1
ur(Ln,w, T∗) est divisible, et donc d’apr`es la proposition 1.7
HF1∗ ur(Ln,w, T ∗ ) ∼= Homc(Dw/Iw, T∗). Ainsi HomO(HF1∗ ur(Ln,w, T ∗), D) ∼ = (Dw/Iw) ⊗ZO(χ −1) et HomO(⊕w|pHF1∗ ur(Ln,w, T ∗ ), D) ∼= ⊕v|pO(χ−1)[Gal(Ln/K)/Dv(Ln/K)].
Par passage `a la limite projective, on a (O(χ−1)[G/Dv(L∞/K)])∆ '
fini, si χ(Dv(L∞/K∞)) 6= 1 ;
O[Gal(K∞/K)/Dv(K∞/K)], si χ(Dv(L∞/K∞)) = 1 .
L’exemple 2.3 montre que HF1∗ ur(Ln, T ∗ )∨ ∼= Hom(An, T∗)∨ ∼ = (An⊗ O(χ−1))∨∨ ∼ = An⊗ O(χ−1)
Remarque 4.14. Sous l’hypoth`ese de Leopoldt, il est bien connu dans le cas o`u L est totalement r´eel que char((A∞)χ est premier `a l’id´eal d’augmentation de Λ.
D’o`u dans ce cas
char((dA∞⊗Zp O(χ −1 ))∆) divise char(HF1∗ can(K∞, T ∗ )∨).
Proposition 4.15. Supposons que p - [L : Lχ]. Alors sous les hypoth`eses (H0),
(H1), (H2) et (H3), on a
char((dA∞⊗ZpO(χ
−1
))∆) divise A2char(( cE∞⊗ZpO(χ
−1
))∆/( dSt∞⊗ZpO(χ
−1
))N∆).
D´emonstration. Le lemme 4.12 montre que l’id´eal char(lim←−(( bE0
n/ bEn)⊗ZpO(χ
−1))∆n)
divise A. D’o`u char(( cE0
∞⊗ZpO(χ −1))∆/( dSt ∞⊗ZpO(χ −1))∆) divise A char(( cE ∞⊗Zp O(χ−1))∆/( dSt ∞⊗ZpO(χ
−1))N∆). D’apr`es le lemme 4.13, on sait que
char((dA∞⊗ZpO(χ −1 ))∆) divise A char(HF1∗ can(K∞, T ∗ )∨). Or d’apr`es le corollaire 4.10, on a char(HF1∗ can(K∞, T ∗ )∨) divise char(( cE0 ∞⊗ZpO(χ −1 ))∆/( dSt∞⊗ZpO(χ −1 ))N∆). On en d´eduit que char((dA∞⊗ZpO(χ −1
))∆) divise A2char( cE∞⊗ZpO(χ
−1
))∆/( dSt∞⊗ZpO(χ
−1
))N∆).
D´emonstration du th´eor`eme 0.1. Consid´erons le diagramme commutatif sui- vant ( dSt∞⊗ZpO(χ −1)) ∆ // N∆ ( cE∞⊗ZpO(χ −1)) ∆ // N∆ A // 0 0 //( dSt∞⊗ZpO(χ −1))∆ // ( cE∞⊗ZpO(χ −1))∆ // B //0 ( dSt∞⊗Zp O(χ −1))∆/( dSt ∞⊗Zp O(χ −1))N∆ // b H0(∆, cE ∞⊗ZpO(χ −1)) o`u A = (( cE∞/ dSt∞) ⊗ZpO(χ −1)) ∆ et B = ( cE∞⊗ZpO(χ −1))∆/( dSt ∞⊗ZpO(χ −1))∆.
En utilisant le fait que
une simple chasse dans le diagramme ci-dessus montre que char(( cE∞⊗ZpO(χ −1 ))∆/( dSt∞⊗ZpO(χ −1 ))N∆) divise char( bH0(∆, cE∞⊗ZpO(χ −1 )). char((( cE∞/ dSt∞) ⊗ZpO(χ −1 ))∆).
La proposition 4.15 donne donc char((dA∞⊗O(χ−1))∆) divise A2.char( bH0(∆, cE∞⊗Zp
O(χ−1)). char((( cE
∞/ dSt∞)⊗ZpO(χ
−1))
∆). Reste `a montrer que le Λ-module bH0(∆, cE∞⊗Zp
O(χ−1)) est pseudo-nul :
Th´eor`eme 4.16. Sous l’hypoth`ese (H5), le Λ-module bH0(∆, cE∞⊗ZpO(χ
−1)) est
pseudo-nul.
Avant de donner la d´emonstration du th´eor`eme 4.16, remarquons d’abord que b H0(∆, cE∞⊗ZpO(χ −1 )) ∼= lim←−Hb0(∆n, bEn⊗ZpO(χ−1)). Remarquons aussi b H0(∆n, bEn⊗ZpO(χ −1 )) = bH0(Gal(KnLχ/Kn), \En(Lχ) ⊗ZpO(χ −1 ))
puisque p - [L : Lχ], o`u En(Lχ) est le groupe des unit´es de KnLχ. On peut donc
supposer que L = Lχ.
Dans toute la suite, on suppose que la conjecture de Leopoldt est v´erifi´ee pour tous les corps Ln. Pour n ≥ 0 fix´e, on choisit un ensemble Σ fini de places de K de
sorte que ClΣ(Ln) = 0, o`u ClΣ(Ln) est le groupe des Σ-classes de Ln. On a alors
la suite exacte courte
0 //UΣ(Ln) ⊗ Zp //
L
w∈ΣLd×n,w //XΣ(Ln) //0
o`u UΣ(Ln) est le groupe des Σ-unit´es de Ln et XΣ(Ln) ' H1(GΣ(Ln), Qp/Zp)∨ est
le groupe de Galois de la pro-p-extension ab´elienne non-ramifi´ee en dehors de Σ maximale de Ln. En tensorisant par O(χ−1), on obtient la suite exacte
0 //H1(G
Σ(Ln), T ) //⊕w∈ΣH1(Ln,w, T ) //H1(GΣ(Ln), T∗)∨ //0
o`u T = Zp(1) ⊗ O(χ−1) et T∗ = D(χ). Par cohomologie, on obtient la suite exacte
b
H−1(∆n, H1(GΣ(Ln), T∗)∨) //Hb0(∆n, H1(GΣ(Ln), T )) //Hb0(∆n, ⊕w∈ΣH1(Ln,w, T )) . Lemme 4.17. Pour tout n ≥ 0, on a
• bH−1(∆n, H1(GΣ(Ln), D(χ))∨) ∼= O(χ−1)∆n.
• bH0(∆n, ⊕w∈ΣH1(Ln,w, Zp(1) ⊗ O(χ−1))) = 0.
D´emonstration. Rappelons que si G est un groupe fini et M est un G-module, on a b Hi(G, M∨) ∼= bH−i−1(G, M )∨, [9, Corollary 6.5]. En particulier, b H−1(∆n, H1(GΣ(Ln), D(χ))∨) ∼= bH0(∆n, H1(GΣ(Ln), D(χ)))∨.
Puisque la p-dimension cohomologique du groupe GΣ(Ln) (p > 2) est ´egale `a 2 et
Ln v´erifie la conjecture de Leopoldt,
Hi(GΣ(Ln), D(χ)) = 0
pour tout i ≥ 2. La suite spectrale de Hochschild-Serre
Hp(∆n, Hq(GΣ(Ln), D(χ))) =⇒ Hp+q(GΣ(Kn), D(χ))
entraˆıne alors que
H2(∆n, H1(GΣ(Ln), D(χ))) ∼= H4(∆n, H0(GΣ(Ln), D(χ)).
Du fait que ∆n est cyclique, on a
b H0(∆n, H1(GΣ(Ln), D(χ))) ∼= Hb2(∆n, H1(GΣ(Ln), D(χ))) ∼= H4(∆ n, H0(GΣ(Ln), D(χ))) ∼= Hb0(∆ n, D(χ)). Puisque N∆nD(χ) = 0 (χ 6= 1) et D(χ) ∨ ∼= O(χ−1), il vient b H−1(∆n, H1(GΣ(Ln), D(χ))∨) ∼= Hb0(∆n, D(χ))∨ ∼ = O(χ−1)∆n.
Si l’on note ∆n,v le groupe de d´ecomposition de v dans Ln/Kn, le lemme de Shapiro
montre que b
H0(∆n, ⊕w|vH1(Ln,w, Zp(1) ⊗ O(χ−1))) ∼= bH0(∆n,v, H1(Ln,w, Zp(1) ⊗ O(χ−1))).
Du fait que la p-dimension cohomologique du groupe absolu d’un corps local est ´egale `a 2 et que H2(Ln,w, Qp/Zp) = 0 (l’analogue de la conjecture de Leopoldt
pour les corps locaux), on a
La suite spectrale de Hochschild-Serre entraˆıne de nouveau que H1(∆n,v, H1(Ln,w, D(χ)) ∼= H3(∆n,v, H0(Ln,w, D(χ)).
Rappelons que la dualit´e locale (1.1) donne H1(L
n,w, Zp(1)⊗O(χ−1)) ∼= H1(Ln,w, D(χ))∨.
Comme ∆n,v est cyclique, on montre comme ci-dessus que
b
H0(∆n,v, H1(Ln,w, Zp(1) ⊗ O(χ−1))) ∼= Hb1(∆n,v, H1(Ln,w, D(χ)))∨ ∼
= Hb0(∆n,v, O(χ−1))
Ainsi si χ(∆n,v) 6= 1, H0(∆n,v, O(χ−1)) = 0 et donc bH0(∆n,v, O(χ−1)) = 0. Sinon
∆n,v = 1 et donc bH0(∆n,v, O(χ−1)) = 0. D’o`u le lemme.
D´emonstration du th´eor`eme 4.16. Pour n ≥ 0 et Σ assez gros (ClΣ(Ln) = 0).
Consid´erons la suite exacte UΣ(Ln)χ
NΣ ∆n //
UΣ(Ln)χ //cokerN∆Σn //0 . (4.6)
Le lemme ci-dessus montre que |cokerNΣ
∆n| ≤ |O(χ
−1
)∆|.
Passant `a la limite inductive sur Σ, on obtient la suite exacte lim −→ Σ UΣ(Ln)χ //lim−→ Σ UΣ(Ln)χ //lim−→ Σ cokerN∆Σ n //0 Or lim −→ Σ UΣ(Ln)χ∼= (lim−→ Σ UΣ(Ln))χ ∼= (L×n)χ
et (du fait que les morphismes de transitions sont injectifs) lim −→ Σ UΣ(Ln)χ∼= (lim−→ Σ UΣ(Ln))χ ∼= (L×n) χ
Ainsi pour tout n ≥ 0, nous avons une suite exacte (L×n)χ
N∆n //
(L×n)χ //cokerN
∆n //0
avec |cokerN∆n| ≤ |O(χ
−1)
∆|. On passe maintenant `a la limite projective sur n,
on obtient
car lim←−Lc×n ∼= lim
←−(En0 ⊗ Zp). Il s’ensuit que
coker( (E∞0 )χ N∆ //
(E∞0 )χ )
est pseudo-nul. Pour finir, la suite exacte (4.5) et l’hypoth`ese (H2) montrent que
b E0
n/ bEn
est un Zp-module de type fini de rang born´e ind´ependamment de n. Il s’ensuit que
le Λ-module
coker( (E∞)χ N∆ //
(E∞)χ )
Chapitre 5
Syst`emes d’Euler et ´el´ements de
Rubin-Stark
5.1
El´´
ements de Rubin-Stark
Soit K un corps de nombres et soit F une extension ab´elienne finie de K de groupe de Galois G = Gal(F/K). Fixons un ensemble S fini de places de K contenant les places infinies et les places ramifi´ees dans F/K, et un deuxi`eme ensemble T de places de K disjoint de S. Posons bG = Hom(G, C×). Pour tout ρ ∈ bG, on d´efinit la fonction L d’Artin modifi´ee associ´ee `a ρ par
LS,T(s, ρ) = Y p6∈S (1 − ρ(Frobp)Np−s)−1 Y p∈T (1 − ρ(Frobp)Np1−s).
Il est bien connu, e.g. [38, Proposition I.3.4 ], que rS(ρ) = ords=0LS,T(s, ρ) =
|{v ∈ S : ρ(Dv(F/K)) = 1}|, ρ 6= 1 ;
|S| − 1, ρ = 1. o`u Dv(F/K) est le sous-groupe de d´ecomposition de v dans F/K.
Suivant [38], on d´efinit l’´el´ement de Stickelberger ΘS,T(s) = ΘS,T ,F /K(s) =
X
ρ∈ bG
LS,T(s, ρ−1)eρ
o`u eρ = |G|1 Pσ∈Gρ(σ)σ−1.
Avant d’´enoncer la conjecture de Rubin-Stark, faisons les hypoth`eses H(F/K, S, T , r) suivantes :
(ii) l’ensemble S contient au moins r places totalement d´ecompos´ees dans F/K. (iii) |S| ≥ r + 1
(iv) T 6= ∅, S ∩ T = ∅ et US,T(F ) est sans torsion
o`u US,T(F ) est le sous-groupe de S-unit´es de F form´e des ´el´ements congrus `a 1
modulo les ´el´ements de T .
Remarque 5.1. Les hypoth`eses (ii) et (iii) assurent que la fonction s−rΘS,T(s)
est holomorphe en s = 0.
Soit V = {v1, ..., vr} un sous-ensemble de l’ensemble des places de K totalement
d´ecompos´ees dans F/K et soit W = {w1, ..., wr} un ensemble de places de F telles
que wi | vi. Pour tout Z[G]-module M et tout anneau commutatif R, on note RM
le produit tensoriel R ⊗ZM . On d´efinit LS,V comme ´etant le compos´e
RUS(F ) LS //
RSF πV //
RVF
o`u LS est le plongement logarithmique de US(F ) ;
LS : US(F ) // RSF :=
L
w∈SF Rw
ε // −P
w∈SF log |ε|ww
et πV est la projection de RSF = RVF ⊕ RVF0 sur RVF, S = V ∪ V0.
Soit x ∈ RUS(F ). Comme W est une R[G]-base de RVF, LS,V(x) s’´ecrit d’une
mani`ere unique sous la forme
LS,V(x) = r
X
i=1
λwi(x)wi
avec λwi(x) ∈ R[G]. Un raisonnement facile montre que λwi : RUS(F ) −→ R[G]
est le R[G]-morphisme v´erifi´e
λwi(1 ⊗ ε) = − X g∈G log |εg|wig −1 . Soit Vr R[G]LS,V : Vr R[G]RUS(F ) // Vr R[G]RVF = R[G](w1 ∧ ... ∧ wr)
le R[G]-morphisme induit par LS,V. Comme {w1∧ ... ∧ wr} est une R[G]-base de
Vr
R[G]RVF, on peut d´efinir un unique R[G]-morphisme ”r´egulateur”
par
r
^
R[G]
LS,V(x) = RF /K,W(x)(w1 ∧ ... ∧ wr).
De fa¸con explicite, RF /K,W(x1∧ ... ∧ xr) = det(λwi(xj))
r
i,j=1, xi ∈ RUS(F ).
Soit maintenant M un Z[G]-module. On note fM l’image de M par l’application canonique M −→ QM . On d´efinit
f
Mr,S :=x ∈M | ef ρ.x = 0 dans CM pour tout ρ ∈ bG tel que rS(ρ) > r . Remarquons que si M est un Q[G]-module alors fMr,S = eS,rM , que l’on note Mr,S,
o`u eS,r =PrS(ρ)=reρ.
Lemme 5.2.
(i) Les modules (QUS(F ))r,S et (Q[G]r,S)r sont isomorphes sur Q[G].
(ii) Soit ε ∈ US(F ) tel que 1 ⊗ ε ∈ (QUS(F ))S,r. Si |S| > r + 1 alors ε ∈ UV(F ).
D´emonstration. L’assertion (i) est une cons´equence directe de dimC eρ(CUS(F ))r,S) = dimC eρ((C[G]r,S)
r) = r, si rS(ρ) = r ;
0, sinon. Pour la seconde, remarquons que
eS,rRVF0 =
0, si |S| > r + 1 ; RPw|vr+1w, si |S| = r + 1 (V
0 = {v r+1}).
o`u V0 est l’ensemble d´efini ci-dessus. Comme 1 ⊗ ε ∈ (QUS(F ))S,r et |S| > r + 1,
LS(1 ⊗ ε) ∈ eS,rRSF ⊂ RVF. D’o`u ε ∈ UV(F ).
En identifiant HomZ[G](US,T(F ), Z[G]) `a un sous module de HomC[G](CUS,T(F ), C[G]),
pour tout r-uplet (φ1, · · · , φr) ∈ HomZ[G](US,T(F ), Z[G])
r, on d´efinit φ1∧ · · · ∧ φr : CVrZ[G]US,T(F ) // C[G] u1∧ · · · ∧ ur // det 1≤i,j≤r(φi(uj)) et ΛS,T := x∈(QVr Z[G]US,T(F ))r,S | (φ1∧···∧φr)(x)∈Z[G], ∀φ1,··· ,φr∈HomZ[G](US,T(F ),Z[G]) .
Remarque 5.3. Il est imm´ediat que si r = 1 alors ΛS,T = ^US,T(F )S,1. De mani`ere
g´en´erale, si r > 1, on a les inclusions suivantes | G |n Λ S,T ⊂ ( ^ r ^ Z[G] US,T)S,r ⊂ ΛS,T,
pour un entier n suffisamment grand. De plus, comme US,T(F ) est d’indice fini
dans US(F ), QΛS,T = (Q r ^ Z[G] US,T(F ))r,S = (Q r ^ Z[G] US(F ))r,S. (5.1)
Soit Θ(r)S,T(0) le coefficient de sr dans la s´erie de Taylor de ΘS,T :
Θ(r)S,T(0) := lim
x→0s −rΘ(r)
S,T(s).
Conjecture 1. RS(F/K, S, T , r) Supposons que les hypoth`eses H(F/K, S, T , r) sont v´erifi´ees. Alors il existe un unique ´el´ement εF,S,T ∈ ΛS,T tel que
RF/K,W(εF,S,T) = Θ (r) S,T(0).
Remarque 5.4.
• La validit´e de la conjecture RS(F/K, S, T , r) est ind´ependante du choix des places vi et wi.
• Soit εF,S,T l’´el´ement (conjectural) de Rubin-Stark. Le lemme 5.2 et l’´equation
(5.1) assurent que l’´el´ement 1 ⊗ εF,S,T ∈ QΛS,T peut s’´ecrire sous la forme
x1∧ · · · ∧ xr, avec xi ∈ (QUS(F ))r,S. Or on peut ´ecrire
xi = 1 ni ⊗ εi, ni ∈ Zn≥1et 1 ⊗ εi ∈ (QUS(F ))S,r D’o`u 1 ⊗ εF,S,T = 1 n(1 ⊗ ε1) ∧ ... ∧ (1 ⊗ εr), n = n1...nr. Par suite, il existe β ∈ Q tel que
Θ(r)S,T(0) = β det λwi(1 ⊗ εj) r i,j=1= β det X g∈G log |εgj|wig −1r i,j=1.
Supposons maintenant que K est un corps de nombres totalement r´eel de degr´e r = [K : Q], K∞est la Zp-extension cyclotomique de K et conservons les notations
des chapitres pr´ec´edents. En particulier,
χ : GK //O×
est un caract`ere non trivial Qp-irr´eductible de GK, qui se factorise `a travers une
extension finie L de K. Fixons un ensemble S fini de places de K contenant `a la fois les places infinies et au moins une place finie, mais ne contient aucune place p-adique. Pour toute extension galoisienne F de K, notons Ram(F/K) l’ensemble des places de K qui se ramifient dans F/K. Posons
SF = S ∪ Ram(F/K).
Suivant [8], on choisit un ensemble T = {q0}, o`u q0 est un id´eal premier tel que
p - (Nq0− 1) et q0 - 2, pour un tel ensemble T = {q0}, on a
\
USF,T(F ) = \USF(F ).
De plus, si F est un corps totalement r´eel, les hypoth`eses H(F/K, SF, {q0}, r) sont
v´erifi´ees.
Avec les notations de paragraphe 4.1, posons
K0 = {Ln,g, Ln,g(r) : r est premier `a q0fχp, g | eh et n ∈ Z≥0}.
Dans toute la suite, sauf mention express du contraire, on suppose v´erifi´ee l’hy- poth`ese
(H00) le corps L est totalement r´eel.
Donc pour toute extension F ∈ K0, les hypoth`eses H(F/K, SF, {q0}, r) sont
v´erifi´ees. Supposons que
la conjecture RS(F/K, SF, {q0}, r) est v´erifi´ee pour toute extension F ∈ K0.
D´efinition 5.5. Soit εn,g = εLn,g,SLn,g,{q0}, et soit En le groupe des unit´es de Ln.
On d´efinit RSncomme ´etant le Z[Gal(Ln/K)]-module engendr´e par l’image inverse
des ´el´ements 1 ⊗ εn,g par l’application VrEn //QVrEn pour tout g | eh.
Rappelons que pour tout corps de nombres F , H1(F, Z
p(1)) ∼= cF×. Puisque χ(GLn(r)) =
1, on a
Par suite \
Ln(r)×⊗ O(χ−1) ∼= H1(Ln(r), Zp(1) ⊗ O(χ−1)) = H1(Ln(r), T ) (5.2)
Soit εn(r) = εLn(r),SLn(r),{q0}l’´el´ement de Rubin-Stark associ´e `a RS(Ln(r)/K, SLn(r), {q0}, r).
D’apr`es la remarque 5.4, on peut ´ecrire 1⊗εn(r) d’une mani`ere unique sous la forme
ε1∧ · · · ∧ εr, avec εi ∈ Q ⊗ Ln(r)×. On pose
εn,χ(r) :=εb1⊗ 1χ−1 ∧ · · · ∧εbr⊗ 1χ−1 (5.3) o`u εbi est l’image de εi par l’application Q ⊗ Ln(r)× //Qp⊗ZpLn(r)
×,∧. L’iso-
morphisme (5.2) permet d’identifier εn,χ(r) `a son image dans Qp⊗VrH1(Ln(r), T ).
Par suite, pour tout r premier `a q0fχp et tout n ≥ 0, on d´efinit
cn(r) = cor (r) Ln+1(r),Kn(r)(εn+1,χ(r)), cn= cor (r) Ln+1,Kn(εn+1,χ) (5.4) o`u cor(r)L n+1(r),Kn(r) est l’application Qp⊗ Vr H1(Ln+1(r), T ) //Qp ⊗ Vr H1(Kn(r), T ) induite par corLn+1(r),Kn(r): H 1(L n+1(r), T ) //H1(Kn(r), T ) .
Soit G un groupe fini et soit M un O[G]-module, on dispose d’une application ιM :
Vr−1
O[G]HomO[G](M, O[G]) //HomΦ[G](Φ ⊗
Vr
O[G]M, Φ ⊗ M ) . (5.5)
En effet, l’application canonique HomO[G](M, O[G]) //HomΦ[G](Φ ⊗ M, Φ[G])
induit un morphisme Vr−1
O[G]HomO[G](M, O[G]) //
Vr−1
Φ[G]HomΦ[G](Φ ⊗ M, Φ[G]) .
D’autre part, consid´erons l’application
f : HomΦ[G](Φ ⊗ M, Φ[G]) //HomΦ[G]( Vs Φ[G]Φ ⊗ M, Vs−1 Φ[G]Φ ⊗ M ) d´efinie par f (ψ)(m1∧ · · · ∧ ms) = s X i=1
(−1)i+1ψ(mi)m1∧ · · · ∧ mi−1∧ mi+1· · · ∧ ms,.
Par it´eration, on obtient un morphisme Vr−1
Φ[G]HomΦ[G](Φ ⊗ M, Φ[G]) //HomΦ[G](
Vr
Rappelons que pour toutes extensions galoisiennes finies F ⊂ F0 de K, la norme NF0/F induit un morphisme
Vr−1
O[∆F 0]HomO[∆F 0](H
1(F0, T ), O[∆ F0]) //Vr−1O[∆ F]HomO[∆F](H 1(F, T ), O[∆ F]) (5.6) o`u ∆F = Gal(F/K). En particulier, la famille
r−1
^
HomO[∆Kn(r)](H1(Kn(r), T ), O[∆Kn(r)])
n,r
forme un syst`eme projectif pour les morphismes (5.6). D´efinition 5.6. Soit Ψ = {ψn,r}n,r un ´el´ement arbitraire de
lim ←−
n,r r−1
^
HomO[∆Kn(r)](H1(Kn(r), T ), O[∆Kn(r)]).
On note aussi ψn,r l’image de ψn,r par l’application (5.5) et M = H1(Kn(r), T ).
On d´efinit
εn,Ψ(r)χ:= ψn,r(cn(r)) et εχn,Ψ := ψn(cn),
o`u cn(r) est d´efini dans (5.4). Le corollaire 1.3 de [32] montre que
εn,Ψ(r)χ ∈ H1(Kn(r), T ) et εχn,Ψ ∈ H 1(K
n, T ).
Proposition 5.7. La famille {εn,Ψ(r)χ}n≥0,r d´etermine un syst`eme d’Euler pour
(T, Kmin, q0pfχ).
D´emonstration. C’est une cons´equence de la proposition 6.2 de [32].