Pour E1, on obtient une baisse th´eorique de SST de -0.54˚C proche de celle observ´ee
(-0.48˚C, erreur de 10%) et une augmentation th´eorique de SSS de +0.01 psu identique `a
celle observ´ee. On conclut que lors de ce premier ´ev´enement la CMO de la zone LION4
est assez bien isol´ee de son environnement que ce soit sur l’horizontale ou la verticale. La
couche 150-600m n’´evolue ni en salinit´e, ni en temp´erature, ni en densit´e. La diminution
de temp´erature est par ailleurs responsable d’environ 90% de l’augmentation de densit´e.
Pour l’´ev´enement E2, la baisse th´eorique de SST (ou de temp´erature de la couche de
surface) vaut -0.32˚C, loin de celle observ´ee (-0.16˚C, erreur de 50%). Dans le mˆeme temps,
la couche interm´ediaire se refroidit et c`ede 0.06˚C c’est-`a-dire l’´equivalent d’une hausse
de temp´erature de 0.18˚C pour la couche de surface. En ajoutant les deux contributions
(-0.32 + 0.18), on obtient une ´evolution de -0.14˚C pour la couche de surface, tr`es pr`es
des -0.16˚C observ´es. C’est la signature de l’entraˆınement de la LIW dans la CMO. Cet
entraˆınement est ´egalement visible pour la salinit´e. La contribution du flux d’eau est nul
pendant E2. En revanche, la couche de surface voit sa salinit´e augmenter de +0.03 psu
alors que la couche interm´ediaire (trois fois plus ´epaisse) voit sa salinit´e baisser de -0.01
psu ... le sel est conserv´e et la LIW a ´et´e entraˆın´ee dans la CMO augmentant la salinit´e
pr`es de la surface. L’augmentation de densit´e dans la couche de surface (+0.06 kg.m−3) est
en accord avec le flux de flottabilit´e et elle n’est maintenant due qu’`a 60% `a la diminution
de la temp´erature. Sans cet entraˆınement, la densit´e aurait augment´e dans les mˆemes
proportions grˆace `a une diminution de -0.32˚C de la temp´erature mais les caract´eristiques
de l’eau form´ee auraient ´et´e plus froides et moins sal´ees. De plus, une forte salinit´e permet,
`a densit´e constante, de maintenir une temp´erature plus chaude en surface. Ce qui peut
avoir une r´etroaction positive sur le flux de chaleur avec une augmentation de la perte de
chaleur par l’augmentation du gradient de temp´erature entre l’eau et l’air. Il faudrait tester
cette id´ee avec mod`ele coupl´e r´egional prenant en compte l’interaction oc´ean-atmosph`ere
`a une fr´equence quotidienne. Il est int´eressant de noter ´egalement que l’advection lat´erale
semble r´eellement n´egligeable dans ces calculs de bilan.
Pour E3, le flux de chaleur pr´evoit une baisse de temp´erature de -0.04˚C pour la couche
de m´elange qui inclut maintenant couche de surface et couche interm´ediaire. En r´ealit´e, le
couche de surface se refroidit de -0.01˚C, la couche interm´ediaire de -0.06˚C et la couche
de fond ne change pas de temp´erature. La couche interm´ediaire se refroidit plus que pr´evu
par les flux de surface, elle a donc encore fourni de la chaleur `a la colonne d’eau. La couche
de surface se refroidit moins que pr´evu car elle a b´en´efici´e de l’entraˆınement de la LIW.
L’entraˆınement de la LIW est ´egalement visible `a travers le bilan de sel. La salinit´e de
surface augmente de +0.02 psu alors que le flux de sel en surface est tr`es faible au regard
de la profondeur de la colonne d’eau (+0.001 psu pr´evu). Au cours de E3, l’augmentation
de la densit´e de surface qui permet d’atteindre le seuil de 29.09 en moyenne sur LION4
est due pour 90% `a l’augmentation de salinit´e c’est-`a-dire `a l’entraˆınement de la LIW. La
situation est invers´ee par rapport `a E1.
A travers le calcul des bilans de chaleur et de sel dans la colonne convect´ee pour les
´ev´enements E1, E2 et E3, on peut conclure que le m´ecanisme d’entraˆınement de la LIW est
tr`es net dans OPAMED8 `a partir de E2. L’augmentation de la salinit´e et de la temp´erature
de surface due `a l’entraˆınement de cette eau de sub-surface joue un rˆole essentiel dans
l’augmentation de la densit´e de surface jusqu’`a la valeur permettant la convection profonde
avec les bonnes caract´eristiques T-S. En effet, la temp´erature de la WMDW (12.7˚C) est
atteinte assez tˆot au cours du processus (pendant E2) bien avant que la densit´e atteigne
29.10. L’entraˆınement de la couche de LIW entre E2 et E3 permet de conserver cette
temp´erature (apport de chaleur par entraˆınement) tout en augmentant la densit´e de surface
grˆace `a l’apport de sel. Ce processus d’entraˆınement de la LIW est mis en ´evidence pour
la premi`ere fois `a notre connaissance dans une simulation r´ealiste 3D. On peut ´egalement
indiquer que l’advection lat´erale semble avoir un impact tr`es faible sur ces bilans dans la
zone LION4 lors de la phase d’approfondissement de la CMO.
Le fait de ne pas utiliser de rappel newtonien pour la salinit´e de surface semble un
´el´ement essentiel. En effet le rappel vers un champ mensuel constant d’une ann´ee `a l’autre
et de basse r´esolution aurait tendance `a lutter contre l’effet de l’entraˆınement vertical de
la LIW.
Calcul du volume d’eau profonde form´e
On peut utiliser un diagnostic de recensement des masses d’eau par classes de densit´e
afin de d´eterminer l’action de diff´erents processus physiques (flux de surface, advection,
m´elange, subduction) sur des volumes d’eau d´efinis par leur densit´e. Ce diagnostic aussi
-10
0
10
20
30
40
50
flux cross-isopycnal (Sv)
0 30 60 90 120 150
temps (jours)
Fig. 3.16 –S´erie temporelle de la formation de masse d’eau avec une densit´e sup´erieure `a 29.10 kg.m−3
en trait plein et 29.05 kg.m−3en pointill´es dans la zone LION de d´ebut d´ecembre `a fin avril pour l’exp´erience
OM8-15.7. On a trac´e ici uniquement le terme dˆu aux flux de surface dans la m´ethode de Walin.
de temp´erature. Adapt´e par Tziperman (1986) aux classes de densit´e, il a ´et´e appliqu´e `a
l’Atlantique Nord (Speer and Tziperman, 1992; Haines and Old, 2005; Old and Haines,
2005) et `a la M´editerran´ee (Lascaratos, 1993; Tziperman and Speer, 1994; Rupolo et al.,
2003). Certains de ces auteurs se limitent `a l’impact des flux de surface en tant que processus
cr´eant les masses d’eau. C’est ce que nous faisons ici. La m´ethode de Walin compl`ete
(classe de temp´erature) et sa mani`ere de l’appliquer `a la M´editerran´ee ont ´et´e longuement
d´etaill´ees dansSomot (2003) et sont reprises en annexe C. La m´ethode appliqu´ee ici (classe
de densit´e, flux de surface uniquement) est ´egalement utilis´ee dans Somot et al.(2005). La
figure 3.16 repr´esente l’´evolution quotidienne de la formation de masse d’eau (en Sv) dont
la densit´e est sup´erieure `a un certain seuil. Ici, on choisit de repr´esenter les seuils 29.10 et
29.05 kg.m−3. Cette formation est en fait le transport d’eau `a travers une isopycne donn´ee.
Lorsque les flux de surface interviennent, ce n’est pas l’eau qui se d´eplace mais l’isopycne
sous l’effet du flux de flottabilit´e. Lorsque le transport d’eau s’effectue vers une classe d’eau
plus lourde (l´eg`ere), le flux cross-isopycnal est compt´e positivement (n´egativement) et on
parle de formation (destruction) de masses d’eau. Pour zoomer sur les eaux profondes,
on a d´efini les classes de densit´e par intervalle de 0.01 kg.m−3. Les eaux tr`es profondes
(WMDW) sont d´efinies par le seuil 29.10 alors que le seuil 29.05 kg.m−3 englobe les eaux
interm´ediaires. La profondeur des isopycnes peut ˆetre visualis´ee sur la figure 3.8 (29.10 `a
1300 m, 29.05 `a 400 m).
La formation d’eau lourde (> 29.05 kg.m−3) d´emarre mi-janvier pendant E2 lorsque la
CMO p´en`etre dans la couche de LIW. La formation d’eau tr`es profonde d´emarre un peu plus
tard et culmine avec E3 mi-f´evrier. Les pics de formation sont corr´el´es avec les ´ev´enements
m´et´eorologiques E2, E3, E4 et E5. Notons que les p´eriodes de restratification (cf. fig. 3.6)
correspondent aux phases de destruction de la masse d’eau par les flux de surface (flux
cross-isopycnal n´egatif).
Il est int´eressant de mettre en parall`ele la courbe de la figure 3.16 avec la courbe (trait
plein) de la figure 3.17. Cette derni`ere estime le volume d’eau du mod`ele dont la densit´e
d´epasse 29.10 (WMDW). On voit que le volume de WMDW commence `a augmenter
uniquement apr`es fin janvier c’est-`a-dire lorsque la CMO croise l’isopycne 29.10. On
atteint un pic quotidien de formation d’environ 40 Sv pendant quelques jours suite `a E3.
En mars, le taux de formation d’eau profonde est plus faible mais n’est pas n´egligeable.
Pourtant le volume d’eau profonde stagne. On peut voir ici les effets contradictoires
4
5
6
7
8
9
volume (1e13 m3)
0 30 60 90 120 150
temps (jours)
Fig. 3.17 –S´erie temporelle du volume d’eau (en m3) ayant une densit´e sup´erieure `a 29.10 kg.m−3 dans
la zone LION4 de d´ebut d´ecembre `a fin avril. L’exp´erience de r´ef´erence avec correction du flux de chaleur
(OM8-15.7) en trait plein, avec correction du flux de chaleur et de sel (OM8-15.6) en tirets, avec correction
du flux de chaleur, du flux de sel et du flux de quantit´e de mouvement (OM8-15.5) en pointill´es.
de la formation par les flux de surface et de la destruction de cette mˆeme classe d’eau
Dans le document
Modélisation climatique du bassin méditerranéen : variabilité et scénarios de changement climatique
(Page 88-91)