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Premiers commentaires sur l’Affaire

Je prie encore une fois mes lecteurs de bien vouloir m’excuser pour ces longues citations mais il le fallait pour montrer le côté inouï de ce que j’ai décidé d’appe- ler l’Affaire Vénissac. J’ai longuement hésité avant d’employer cette expression.

10. Il s’agit bien évidemment de l’usage de l’Analyse Non Standard. 11. Il s’agit de G. Reeb dont il sera abondamment question dans ce travail.

“Affaire” est un mot fort. On pense tout de suite à l’Affaire Dreyfus. Il n’y a évi- demment pas de commune mesure mais il y a quand même toutes les apparences d’un scandale. Je dis bien "apparence" car, pour le moment, à part le fait que la correspondance est bien réelle, sa publication et sa contextualisation sont de [LdL] et l’auteur de [LdL] ne saurait être considéré comme impartial. Maintenant explicitons un peu en quoi il semble y avoir scandale.

Certes, le grand public et même la communauté scientifique considèrent sou- vent que les mathématiciens sont des êtres à part aux pratiques parfois extrava- gantes. Mais à ce point ! Comment accepter qu’une autorité scientifique appa- remment légitime, mais non officielle et dont la composition est secrète12 refuse de communiquer les arguments scientifiques qui motivent une de ses décisions ? Comment une telle décision peut-elle avoir force de loi dans la région parisienne au point que la thèse a été soutenue en province ? Cette affaire ne se passe-t-elle pas plutôt dans la Russie stalinienne de l’époque Lyssenko et L’Analyse Non Stan- dard serait-elle une science bourgeoise ? Restons sérieux. Une enquête très rapide m’a permis sans difficulté de savoir que G. Reeb, personnage central dans [LdL], est un mathématicien mondialement connu et que trois des soutiens de Vénissac, A. C. . ., J. M. . . et J-P. R. . . déjà connus à l’époque, sont maintenant reconnus et honorés très au delà de nos frontières. Plusieurs personnalités insoupçonnables m’ont confirmé sans hésitation l’exactitude des faits rapportés dans [LdL] mais sans se prononcer sur l’interprétation qu’en faisait Lobry, ce que je ne leur de- mandais pas d’ailleurs. Nous retenons donc que l’incident rapporté dans [LdL] a bien eu lieu et il semble assez surprenant pour qu’on en recherche une explication. Une première hypothèse se présente immédiatement à l’esprit. Le groupe au- quel appartient Venissac est un groupe ultra marginal composé d’hurluberlus qui font perdre leur temps à la communauté et, dans ce cas, même si son attitude est condamnable, on peut comprendre que la Commission des Thèses, agacée, n’ait pas eu envie de discuter et ait essayé de se débarrasser au plus vite de ce pro- blème. Cette hypothèse semble a priori peu plausible en raison de la qualité que j’ai rappelée des soutiens de Vénissac mais elle mérite tout de même une petite investigation. En effet, il arrive dans toutes les communautés scientifiques qu’un petit groupe ayant au départ une solide réputation se singularise par des excentri- cités au point d’être finalement rejeté. On peut penser à l’affaire de la “mémoire de l’eau” ou au “climato-scepticisme” d’un Claude Allègre. Si c’est le cas il n’y a plus vraiment d’affaire Vénissac. Il y a simplement l’existence d’un groupe qui s’est marginalisé et d’une communauté scientifique, représentée ici par la com-

mission, qui est excédée.

Autre hypothèse, il existe une controverse sérieuse entre deux écoles de pensée sur la façon de faire les mathématiques et la Commission des Thèses appartient au camp opposé à celui du jury de Vénissac. Sur ce point, dans le rapport du second “délégué” on lit : « Although there is a heuristic description of the formation of a horseshoe and of folding in chapter IV, these phenomena are not given a precise formulation or a rigorous proof. » à quoi le Jury répond : « (. . .) Mais il ne semble pas avoir étudié de près les techniques originales13utilisées par Vénissac, car son rapport qualifie d’heuristique la démarche de Vénissac dans son dernier chapitre, alors qu’il s’agit d’un plan de démonstration précise et rigoureuse.» Le rappor- teur estime que la description du phénomène est heuristique et le jury estime, au contraire, qu’elle est précise, mais que le rapporteur ne la comprend pas faute de connaitre les «techniques originales» utilisées par Vénissac. On sent qu’il y a la une divergence sérieuse sur le style de la rédaction. La rapporteur parle d’absence de preuve rigoureuse ce que le jury admet implicitement en parlant de « plan pré- cis de démonstration ». Un plan de démonstration n’est pas une démonstration, ce que la commission reprend à son compte dans sa dernière correspondance. Fina- lement le jury est resté sur sa position intransigeante et la thèse a été soutenue en province, en dehors de la juridiction de la commission. Mais peut-être excessive- ment intransigeante ? En effet, comme nous l’avons déjà remarqué, la commission a quand même fait en grande partie machine arrière. Elle a bien voulu communi- quer un extrait de rapport scientifique et puis elle a finalement tendu une énorme perche en demandant un “résultat nouveau”. Le jury de Vénissac ne s’est-il pas crispé sur une position manquant de pragmatisme ? Ou bien les enjeux étaient-ils si grands que tout compromis était inacceptable ?

Une partie de ce travail de thèse sera de tenter de trancher entre ces deux hypothèses.

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