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Les différentes pratiques qui suivent ont été abordées avec les conseillers comme limitant le ruissellement. Ils ne sont pas forcément convaincus par toutes ces techniques mais ils ont pu

nous dire si elles étaient couramment pratiquées par les agriculteurs.

D.2. Les cultures intermédiaires

Les cultures intermédiaires sont le point où les conseillers insistent le plus auprès des

agriculteurs. Il existe plusieurs raisons à cela. Tout d’abord, les conseillers des entreprises

privés vendent de la semence pour les cultures intermédiaires, des graines de moutarde

principalement. C’est avant tout une démarche commerciale qui les amène à parler des

cultures intermédiaires. Cependant, ils sont tous convaincus que les cultures intermédiaires

sont bénéfiques pour lutter contre le ruissellement. Une entreprise prête même le semoir pour

que les agriculteurs n’aient pas l’excuse du matériel. Pour les conseillers de la chambre, il n’y

a aucune démarche commerciale, donc ce sont les différents résultats concluants des essais

mis en place pour lutter contre le ruissellement qui les incitent à conseiller les cultures

intermédiaires. Les conseillers constatent que les agriculteurs implantent de plus en plus

d’avoine pour limiter la culture de moutarde. En effet, les agriculteurs veulent la limiter car ce

n’est pas un bon précédent devant la culture de lin.

D.3. Le non labour

L’objectif principal des conseillers est que leurs clients soient satisfaits des conseils. Pour

cela, la récolte doit être de bonne qualité et avec de hauts rendements. Le non labour n’est

quasiment pas conseillé car, demandant beaucoup de compétence (d’après le conseiller 7), il

peut réduire la production d’une année. Les conseillers ne veulent pas prendre le risque de

baisser la qualité d’une récolte par peur de perdre des clients. D’après les conseillers, « le non

labour ne marche pas dans tous les cas ». Le non labour ne se fait pas dans tous les types de

sol et il demande une certaine technicité de la part de l’agriculteur. Les conseillers essaient de

ne pas aborder ce sujet avec les agriculteurs.

D’après le conseiller 8, ce sont principalement l’expérience des anciens et les revues agricoles

qui orientent le choix des agriculteurs. « Il faut une compétence et les types de sols qui vont

avec. Sur le bord de mer et puis 40 km à l’intérieur, vous faites la même chose, vous vous

plantez. Les types de sols sont complètement différents », parole du conseiller 7. Pour le

conseiller 8, « le non labour est un effet de mode, c’est une ambiance générale. Chez nous, ils

commencent à le faire parce qu’ils commencent à en avoir marre de voir leur terre partir. Mais

il n’y pas d’élément déclencheur unique pour expliquer ce phénomène. Nous, notre

positionnement, ce n’est pas de dire d’arrêter le labour systématiquement. Le non labour ce

n’est pas simple, ça complique les systèmes, il faut faire ça bien si on veut réussir, la

simplicité est souvent compensée par un désherbage chimique élevé. On essaie d’abord

d’améliorer les résultats avec le labour, comme par exemple de dire de pas faire de terre fine

pour semer un maïs ».

D.4. Le binage

Le binage au mois de juin sur les cultures de maïs et de betterave consiste à redonner de la

porosité au sol si une croûte de battance s’est formée. Le binage n’est pas du tout conseillé par

les conseillers des négociants et coopératives. Ils estiment qu’un binage sur une parcelle

propre sans mauvaises herbes va resalir la parcelle en créant un nouveau lit de semence. Le

binage est très peu réalisé sur betterave et ils ne connaissent pas d’agriculteur pratiquant le

binage sur maïs. De plus, d’après un conseiller de négociant, il faut un équipement important

pour réaliser cette intervention. Étant donné que les surfaces en maïs sont importantes dans le

BV de l’Austreberthe, l’idéal serait d’avoir cet équipement en CUMA. Mais cette solution

n’intéresse pas les agriculteurs, d’après les conseillers, car aucun d’entres eux ne veut décaler

sa date d’intervention. Tous les agriculteurs veulent la machine le même jour. Il n’y a donc

pas de binage pratiqué sur maïs.

D.5. L’écroûtage du blé

L’écroûtage du blé consiste à casser la croûte de battance formée durant l’hiver à l’aide d’une

houe rotative. La chambre d’agriculture conseille cette pratique pour redonner de la porosité

au sol. Les conseillers de la coopérative et des négociants ne parlent jamais de cette pratique

avec les agriculteurs.

D’après les conseillers, aucun agriculteur ne pratique cette intervention. La raison évoquée est

la contrainte du climat. En hiver, les agriculteurs ne peuvent pas rentrer dans les parcelles

pour travailler le sol.

D.6. Les microbarrages sur pomme de terre

Les conseillers parlent très peu de cette technique. Ils ne la connaissent pas réellement donc

ne peuvent pas la conseiller. Ils connaissent très peu d’agriculteurs la pratiquant. Les

agriculteurs équipés pour réaliser les micro-barrages vont les faire chez les voisins pour

transmettre la technique et rentabiliser la machine.

Les conseillers ne s’aventurent pas dans le conseil du travail du sol. Ils véhiculent

l’information d’une exploitation à une autre si les agriculteurs sont demandeurs. Les

conseillers considèrent que le travail du sol ne fait pas partie de leur métier. Leur influence sur

ce sujet est donc limitée. Or, nous avons tendance à penser que ce sont les conseillers de

proximité comme les conseillers cultures qui doivent faire passer les informations pour lutter

contre le ruissellement. Le conseil en direction du travail du sol porte avant tout sur les

cultures intermédiaires, car certains conseillers vendent de la semence.

D.7. Le point de vue des agriculteurs sur le conseil relatif au travail du sol

Pour mettre en place un changement dans leur pratique du travail du sol, les agriculteurs font

rarement appel au conseiller cultures. En effet, seule l’expérience des anciens et des voisins

aide l’agriculteur à prendre sa décision. La majorité des agriculteurs de l’échantillon ont

besoin d’un exemple de réussite chez d’autres agriculteurs pour se lancer eux-mêmes dans le

changement. Les conseillers cultures sont uniquement appelés pour des problèmes liés aux

cultures. Quand on demande aux agriculteurs d’où provient le conseil pour lutter contre le

ruissellement, certains agriculteurs répondent « c’est l’expérience, nous n’avons pas attendu

le syndicat pour limiter le ruissellement », d’autres « c’est l’animatrice du syndicat qui nous a

aidés ». Les agriculteurs se référant à « l’expérience » sont des agriculteurs sensibles aux

problèmes de ruissellement et qui d’eux-mêmes interviennent pour le réduire. Ceux évoquant

l’action de l’animatrice sont principalement des agriculteurs qui n’interviennent pas

d’eux-mêmes car ils ne constatent pas de problème majeur, mais qui ne sont pas contre

l’intervention du syndicat. À l’inverse, certains agriculteurs ne sont pas d’accord avec la

politique du syndicat mais font tout de même appel à lui pour les dossiers de subventions. Ces

agriculteurs ne sont pas en accord avec le fait que « le syndicat construise des bassins de

rétention d’eau pour ensuite accorder des permis de construire dans des zones inondables »,

paroles d’agriculteurs.

Dans cette approche du conseil, on remarque que des points de vue sont partagés entre les

agriculteurs et les conseillers. Cependant, dans leur démarche, les conseillers ont tendance à

penser que les agriculteurs ne sont pas intéressés par de nouvelles techniques. Or certains

agriculteurs essaient de réduire d’eux-mêmes le ruissellement. Ils sont donc intéressés et

motivés par les nouvelles pratiques que peuvent apporter les conseillers. Globalement, les

conseillers essaient d’intégrer le ruissellement dans leur pratique, principalement au niveau

des cultures intermédiaires. Le travail du sol est rarement abordé (sauf pour certains

conseillers de la chambre d’agriculture).

Pour les questions précises sur le ruissellement, la plupart des agriculteurs de l’échantillon