• Aucun résultat trouvé

Préparation des solutions de travail

CHAPITRE II : DÉVELOPPEMENT DES METHODES D’ANALYSE CIBLEE

C. Mise en place d’une méthode ciblée pour l’analyse des toxines hydrophiles

I.3. Préparation des solutions de travail

Une solution mère multitoxines a été préparée dans le MeOH à partir des solutions étalons certifiées de PTX2, AZA1 à 3, AO, DTX1 et 2, PnTX-A, PnTX-G, YTX, h-YTX, SPX1, 13,19-DidesMeC. 20-meG, GYM-A et AD à des concentrations allant de 120 à 240 ng/mL selon les toxines. Cette solution mère a ensuite été diluée en série dans le MeOH pour préparer six solutions de travail (L1-L6), chacune contenant les toxines étudiées à différentes concentrations. Les solutions de travail des PbTx-2 et 3 ont été préparées séparément en utilisant une solution mère à 250 ng/mL. Ces solutions de travail ont ensuite été utilisées pour préparer les gammes en matrice avec des extraits de moules et d’huîtres blanches (non- contaminées) préalablement préparés pour atteindre les niveaux de concentration appropriés : des aliquotes de 450 µL d’extraits de coquillages sont distribués dans des vials HPLC supplémentés de 50 µL de la solution multitoxines pour chaque niveau. Ce mode opératoire permet d’avoir une charge matricielle constante de 0,09 g/mL pour toutes les solutions analysées. Les gammes en solvant ont été préparées de la même manière, en utilisant du MeOH à la place des extraits d’échantillons. Les courbes d'étalonnage pour l’évaluation des effets matrice vont de 1 à 12 ng/mL pour les AZA et les imines cycliques ; 2–24 ng/mL pour les YTX, AO, DTX et PTX2 ; 6-72 ng/mL pour l’AD.

Les droites d'étalonnage, les pentes moyennes, les ordonnées à l’origine et les coefficients de détermination (R2) ont été déterminés sur la base de trois injections de chacun des sept niveaux de concentration (y compris le blanc, L0).

I.4. Préparation des échantillons

Les échantillons de moules et d’huîtres ont été préparés selon le mode opératoire standard de l'EURLMB (Annexe 1) en extrayant 2 g de tissu homogénéisé avec 2 x 9 mL de MeOH. Après centrifugation, les surnageants sont combinés dans une fiole jaugée et le volume ajusté à 20 ml avec le MeOH.

Pour détecter et quantifier la quantité totale de toxines du groupe AO, y compris les formes estérifiées, une hydrolyse alcaline est nécessaire avant l’analyse des échantillons naturellement contaminés. L'hydrolyse consiste à ajouter du NaOH (2,5 M) à une partie aliquote de l'extrait méthanolique, à homogénéiser l'ensemble au vortex puis à chauffer le mélange à 76°C ± 2°C pendant 40 min. Une fois refroidi à température ambiante, l’extrait hydrolysé est neutralisé avec une solution de HCl (2,5 M) et homogénéisé à l’agitateur. L’extrait est ensuite filtré sur un filtre PTFE de 0,45 μm.

I.5. Conditions d’analyse par LC-HRMS

Les analyses LC-HRMS ont été réalisées avec un système HPLC Dionex Ultimate 3000 (Thermo Fisher Scientific, San José, Californie, États-Unis) couplé à un QTOF (5600 Triple TOF, Sciex). Le spectromètre de masse était équipé d'une source d'ionisation DuoSpray et d'une sonde TurboIonSprayTM. La séparation chromatographique a été réalisée sur une colonne Waters (Saint-Quentin-en-Yvelines, France) X SELECT® HSS T3 (100 × 2,1 mm, 2,5 µm) avec deux phases mobiles composées (A) d'eau et (B) d’un mélange ACN–eau. (95/5, v / v), contenant chacune 50 mM d'acide formique et 2 mM de formiate d'ammonium. Le gradient de la méthode LC, d’une durée de 20 min, était composé des étapes suivantes : après une étape isocratique pendant 1 min, un gradient linéaire a été appliqué allant de 2% à 100% de B en 9 min et maintenu à 100% de B pendant 5 min, avant un retour aux conditions initiales (2% B) en x min. Ces conditions initiales ont été maintenues pendant 5 min pour rééquilibrer la colonne. Le débit était de 0,45 mL/min et la température de la colonne était de 30°C. Le volume d'injection a été fixé à 5 µL. En ce qui concerne la détection par MS,

l'ionisation par électrospray (ESI) a été réalisée dans les modes positif et négatif en deux analyses séparées. Les paramètres pour l'ionisation positive et négative étaient les suivants (les valeurs différentes pour le mode négatif sont indiquées entre parenthèses): gaz (GS) 1 et 2, 35 et 45 psi; gaz rideau (CUR), 30 psi; température de la source (TEM), 500 ° C; tension du capillaire (ISVF), 5,5 (-4,5) kV; potentiel de déclusterisation (DP), 60 V (-100 V); délai de libération des ions (IRD), 67 ms; largeur de libération des ions (IRW), 25 ms. L’analyse MS a été réalisée en mode full scan TOF MS et MS/MS simultanément avec une acquisition dépendante des informations (IDA). L’acquisition full scan (100-1250 Da) a été réalisée avec un temps d'accumulation de 0,2 s en utilisant le mode haute sensibilité. Huit expériences de fragmentation MS2 supplémentaires (temps d’accumulation : 0,05 s) ont été programmées. Les spectres de fragmentation sont acquis en mode IDA en appliquant une énergie de collision (CE) de 40 électrons volts (eV) avec un pas (CES) de ± 20 eV.

Le spectromètre de masse a été calibré automatiquement toutes les cinq injections à l’aide d’un système automatique d’apport de solutions de calibrations (CDS) via la sonde APCI de la source d'ionisation DuoSpray.

I.6. Acquisition et traitement des données ciblées

L'acquisition des données a été réalisée par le logiciel Analyst® TF 1.7.1 (Sciex, Toronto, Canada). L'application MasterViewTM du logiciel PeakView® 2.2 (Sciex, Toronto, Canada) a été utilisée pour créer des listes de composés cibles et afficher des critères d'identification avec des « codes couleurs » associés (vert, orange, rouge), reflétant le niveau de confiance pour les critères suivis : masse (erreur de masse), profil isotopique et spectre MS2 (purity score), ainsi que d'autres informations liées aux pics chromatographiques, telles que le temps de rétention, le rapport signal/bruit (S/N) ou la largeur des pics à mi-hauteur (FWHM). Les voyants passent au vert lorsque les valeurs de confiance préalablement définies pour les paramètres mentionnés ci-dessus sont atteintes ; cela indique un bon niveau de confiance dans l'identification des composés présents dans la liste. La quantification des toxines cibles a été réalisée par le logiciel MultiQuantTM 2.1.1 (Sciex, Toronto, Canada) utilisant des

courbes de calibration en solvant. Les différents signaux acquis et traités automatiquement par MasterviewTM ont été contrôlés visuellement via MultiQuantTM, afin de vérifier qu’il s’agissait bien d’un pic chromatographique. Les critères de décision pour qu'un pic soit reconnu en tant que tel étaient la forme du pic (gaussienne ; une moyenne de 12 points par pic), un rapport S/N supérieur à 6 et une largeur de pic à la base inférieure à 0,6 min.

I.7. Évaluation des performances de la méthode I.7.1. Spécificité

La spécificité de la méthode est définie comme la capacité́ à identifier sans ambiguïté et à quantifier un composé d’intérêt dans un mélange complexe sans interférence provenant des autres composés présents dans la matrice, des impuretés ou encore des produits de dégradation. La spécificité a été évaluée en comparant les extraits des matrices blanches de moules et d’huîtres avec les extraits dopés. La méthode est dite spécifique si aucun composé n’est présent dans les extraits blancs aux temps de rétention des molécules d’intérêt avec un S/N>3.

I.7.2. Précision

La précision caractérise le degré de concordance entre les valeurs mesurées obtenues par des mesures répétées sur les objets identiques ou similaires dans des conditions spécifiées (Anses, 2015). Deux critères ont été pris en compte pour l’évaluation de la précision de notre méthode : la répétabilité et la fidélité intermédiaire.

La différence entre ces critères correspond au nombre de facteurs variant entre chaque analyse. Pour notre étude, des échantillons de moules supplémentés par des toxines marines ont été extraits et injectés deux fois par jour, à trois jours différents répartis sur deux semaines. Le coefficient de variation (CV) a été déterminé dans des conditions de répétabilité (CVr) et de fidélité intermédiaire (CVR).

I.7.3. Justesse

expérimentalement qui correspond à la valeur moyenne obtenue en appliquant la procédure d'analyse un certain nombre de fois (Anses, 2015). La justesse peut être exprimée comme un recouvrement ou comme la différence entre la valeur de concentration déterminée via l’équation de la droite de régression et la valeur de concentration vraie (théorique) en pourcentage. La justesse caractérise alors l’erreur systématique d’une mesure expérimentale par rapport à la valeur vraie.

La justesse de la méthode a été évaluée pour PTX2, AZA1 à 3, AO, DTX1 et 2, PnTX-A, PnTX-G, SPX1, 13,19-DidesMeC. 20-meG, GYM-A et AD à 6 6 niveaux de concentration avec 3 mesures pour chaque niveau. La valeur de concentration vraie retenue pour évaluer la justesse est le niveau de dopage théorique des extraits/solutions.

I.7.4. Rendements d’extraction

Le rendement d’extraction est généralement associé au rapport entre la concentration quantifiée à l’aide d’une calibration et la concentration théorique de dopage dans une matrice blanche.

Ici, le rendement d’extraction est calculé en comparant les niveaux de concentrations en toxines d’échantillons de matrice dopés avant la procédure d’extraction à ceux d’échantillons dits blancs, c’est-à-dire non initialement dopés en composés d’intérêt, extraits selon la même procédure d’extraction, puis dopés à la concentration visée après extraction. Le rendement d’extraction, exprimé en pourcentage, est déterminé au moyen de l’équation ci-dessous ; les rendements d’extractions (%) sont considérés comme satisfaisants s’ils sont compris entre 70 et 120 %.

Équation 1 : Calcul du rendement d'extraction.

𝑅𝑒𝑛𝑑𝑒𝑚𝑒𝑛𝑡 𝑒𝑥𝑡𝑟𝑎𝑐𝑡𝑖𝑜𝑛 (%) = 𝐴𝑖𝑟𝑒 é𝑐ℎ𝑎𝑛𝑡𝑖𝑙𝑙𝑜𝑛𝑠 𝑑𝑜𝑝é𝑠 𝑎𝑣𝑎𝑛𝑡 𝑒𝑥𝑡𝑟𝑎𝑐𝑡𝑖𝑜𝑛 𝐴𝑖𝑟𝑒 é𝑐ℎ𝑎𝑛𝑡𝑖𝑙𝑙𝑜𝑛𝑠 𝑑𝑜𝑝é𝑠 𝑎𝑝𝑟è𝑠 𝑒𝑥𝑡𝑟𝑎𝑐𝑡𝑖𝑜𝑛

Les effets matrices correspondent aux interférences du milieu analysé, sur le composé ciblé. Ils représentent la perturbation de l’ionisation des composés d’intérêt en spectrométrie de masse d’où l’intérêt de les évaluer.

Lorsque la matrice est blanche, l’effet matrice (EM) peut se calculer selon l’Équation 1, en comparant les réponses des échantillons dopés après extraction à celles obtenues dans le solvant à la même concentration.

Équation 2 : Évaluation des effets matrices (EM).

𝐸𝑀 (%) = (𝐴𝑖𝑟𝑒 𝑑𝑒 𝑙′é𝑐ℎ𝑎𝑛𝑡𝑖𝑙𝑙𝑜𝑛 𝑑𝑜𝑝é 𝑎𝑝𝑟è𝑠 𝑒𝑥𝑡𝑟𝑎𝑐𝑡𝑖𝑜𝑛

𝐴𝑖𝑟𝑒 𝑑𝑒 𝑙′é𝑡𝑎𝑙𝑜𝑛 𝑑𝑎𝑛𝑠 𝑙𝑒 𝑠𝑜𝑙𝑣𝑎𝑛𝑡 − 1) × 100

Dans le cadre de notre étude les effets matrices des différentes toxines ont été évalués pour 6 niveaux de concentration en comparant les droites d’étalonnage en matrice et en solvant.

I.7.6. Limites de détection et de quantification

La limite de détection (LD) est définie comme étant la plus faible concentration du composé d’intérêt pouvant être détectée mais non quantifiée comme une valeur exacte. La limite de quantification (LQ) est associée à la plus petite concentration en molécules cibles pouvant être détectée et quantifiée (Anses, 2015).

Plusieurs approches existent afin de déterminer ces valeurs, on citera les deux approches utilisées pour cette étude :

- Le rapport signal sur bruit (S/N) : les LD et LQ sont déterminées comme la concentration en analyte produisant un pic chromatographique avec un rapport signal sur bruit de trois et dix fois le bruit de fond respectivement. Il s’agit de la méthode la plus couramment utilisée. Dans notre étude, la méthode du rapport signal sur bruit a été employée pour une première estimation de la sensibilité de la méthode afin de choisir le bon intervalle des courbes de calibration avant de procéder à la caractérisation de la méthode.

- La régression linéaire : elle est basée sur la dispersion des paramètres de régression linéaire obtenus lors de la calibration. Ainsi, si la relation de réponse est de type linéaire (y = ax + b), alors la LD et la LQ sont obtenues selon :

LOD= 3 σb/a LOQ= 10 σb/a

Où « σb » est l’écart type de l’ordonnée à l’origine et « a » la pente de la droite de calibration.

Cette approche a été utilisée pour déterminer les LD et LQ des toxines choisies pour la caractérisation de la méthode.

I.8. Application : Participation à l’EILA

Dans le cadre de ses activités de référence en tant que Laboratoire National de Référence (LNR), le laboratoire a participé à un Essai Inter-Laboratoire d'Aptitude (EILA) organisé par le Laboratoire de Référence de l’Union Européenne (LRUE) sur les méthodes officielles d’analyse des toxines du groupe des lipophiles, des saxitoxines et de l’AD. Le LNR dispose d'une méthode accréditée qui a été développée et validée sur un spectromètre de masse de type triple quadripôle (API 4000) qui cible un certain nombre de toxines lipophiles dont les règlementées. Généralement les résultats rendus lors d’un tel exercice se basent sur la méthode officielle du laboratoire. Il a été décidé en 2017 de participer en parallèle avec la méthode non-ciblée HRMS afin d’évaluer les performances de la méthode développée pour l’analyse d’échantillons contaminés.

Cet essai avait pour but de déterminer les teneurs en toxines présentes dans les échantillons fournis par le LRUE (Tableau 8 et Tableau 9).

Tableau 8. Echantillons analysés dans le cadre de l'EILA pour la recherche des toxines lipophiles

Echantillon Référence Origine

Homogénat de moules

EURLMB/17/L/01 Irlande, Espagne (Nord-Ouest) EURLMB/17/L/02 Irlande, Espagne (Nord-Ouest)

Tableau 9. Echantillons analysés dans le cadre de l'EILA pour la recherche des toxines du groupe de l'acide domoïque

Echantillon Référence Origine

Homogénat de moules et de coquilles St-Jacques

EURLMB/17/A/01 Irlande, Espagne (Nord-Ouest) EURLMB/17/A/02 Irlande, Espagne (Nord-Ouest)

Pour cette étude, seuls les résultats HRMS concernant les toxines lipophiles et l’AD ont été déterminés car la méthode d’analyse des toxines hydrophiles par LC-HRMS n’était pas encore entièrement mise au point.

Les échantillons dédiés à la recherche des toxines lipophiles ont été extraits selon le mode opératoire standard du LRUE. Ce dernier prévoit une étape d’hydrolyse des extraits (cf. paragraphe I.4) pour tenir compte des formes estérifiées de certaines toxines (AO, DTX1, DTX2). En effet, l’analyse de l’extrait avant hydrolyse renseigne sur la forme libre des toxines (non estérifiées) et l’analyse après hydrolyse donne le résultat total (formes estérifiées et non estérifiées). Les deux échantillons contenant l’AD ont été extraits selon la même méthode que les toxines lipophiles.

Ces échantillons ont été analysés en LC-HRMS dans les conditions décrites dans le paragraphe (I.5). Les résultats obtenus ont été comparés aux résultats du LRUE en calculant les Z-score qui sont les critères permettant d’évaluer la qualité des résultats rendus.

Équation 3. Détermination des Z-scores 𝒁 𝒔𝒄𝒐𝒓𝒆 = 𝒙 − 𝑿

𝝈

Avec x = valeur mesurée

X = valeur assignée par le LRUE

 = écart type

|z|<2 : résultats satisfaisants 2<|z|<3 : résultats douteux |z|>3 : résultats insatisfaisants

II. Résultats et discussion