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CHAPITRE 1 REVUE DE LITTÉRATURE

1.3 Déformation résiduelle de pièces courbées

1.3.4 Prédiction de la distorsion

Approches analytiques

La méthode de prédiction la plus citée dans la littérature est une formule analytique initialement proposée par Radford (1987) permettant d’évaluer la distorsion d’une pièce courbée d’angle θ:

t t i t t i T T                  1 1 (2.1) où ΔT est le changement de température (généralement un refroidissement de la température de mise en forme jusqu’à la température ambiante); αi et αt sont les coefficients de dilatation thermique dans le plan et à travers l’épaisseur; ɸi et ɸt sont les contractions dues au retrait chimique dans le plan et à travers l’épaisseur.

L’équation (2.1) a été utilisée dans plusieurs travaux en considérant des coefficients de dilatation et de contraction chimique constants. Cette approche a notamment permis de reproduire plusieurs résultats expérimentaux comme la proportionnalité entre l’angle de distorsion et l’angle total pour des angles variant de 15 à 135º (Huang et Yang, 1997b) ou l’évolution linéaire de l’angle de distorsion en fonction de la température (Radford et Diefendorf, 1993; Radford et Rennick, 2000). D’autres études ont apporté des modifications à l’équation (2.1) pour inclure une

dépendance en température des coefficients de dilatation (Ersoy et al., 2005a; Salomi et al., 2008; Yoon et Kim, 2001).

Les coefficients de dilatation thermique peuvent être directement mesurés sur des échantillons composites (Fu et Radford, 1999; Yoon et Kim, 2001) ou estimés par analyse micromécanique. Pour un composite unidirectionnel, des relations analytiques ont été proposées pour déterminer les coefficients de dilatation longitudinal et transverse à partir des propriétés de chaque constituant. Les plus souvent utilisées sont les formules proposées par Schapery (1968) mais d’autre méthodes analytiques existent (Karadeniz et Kumlutas, 2007). À partir des propriétés caractéristiques d’un pli unidirectionnel, les coefficients de dilatation thermique d’un empilement multidirectionnel peuvent enfin être déterminés à l’aide d’une analyse tridimensionnelle du laminé (Dong, 2009a; Goetschel et Radford, 1997). Un autre approche consiste à utiliser une analyse micromécanique par éléments finis pour estimer les différents coefficients de dilatation sur un volume unitaire représentatif (Dong, 2008; Islam et al., 2001). Les contractions dues au retrait chimique peuvent aussi être estimées à partir de relations micromécaniques bien que cette approche soit plus délicate (Nelson et Cairns, 1989). En effet, le pourcentage du retrait total intervenant effectivement dans la distorsion est difficile à déterminer à priori. Pour pallier cette limitation, des procédures de mesure in situ ont été proposées afin d’estimer l’expansion du composite au cours de la cuisson (Garstka et al., 2007). D’autres travaux ont ajusté la valeur du retrait chimique effectif a posteriori en ajustant les prédictions de l’équation (2.1) avec les mesures expérimentales de l’angle de distorsion (Radford, 1995). Enfin, plusieurs études ont introduit un coefficient de dilatation effectif incluant les effets de la dilatation thermique et du retrait chimique (Bapanapalli et Smith, 2005; Dong, 2009a; Hsiao et Gangireddy, 2008).

Le principal désavantage de l’équation (2.1) est qu’elle ne prend pas en compte les effets de l’interaction moule/pièce. Bien qu’elles soient moins souvent utilisées, d’autres approches analytiques ont été proposées notamment en modifiant la théorie des laminés pour inclure une déformation à travers l’épaisseur du composite (Jain et Mai, 1996, 1997). Plus récemment, Arafath et al. (2009) ont développé une formulation analytique permettant d’inclure les effets de

l’interaction moule/pièce dans l’analyse. Ce travail se limite cependant au cas de composites minces possédant un rapport rayon sur épaisseur supérieur à 8.

Travaux de simulation numérique

Les approches analytiques discutées précédemment peuvent être étendues à des géométries courbées plus générales qu’un simple L (Dong, 2009b), mais ne peuvent pas s’appliquer à des géométries complexes comportant notamment des doubles courbures. Dans ce genre de situation, l’analyse numérique fondée sur le calcul par éléments finis est la seule option disponible pour prédire la déformation résiduelle. La distorsion de composite courbées a notamment été étudiée à l’aide de logiciels commerciaux de simulation ou à l’aide d’outils numériques spécialement développés (Johnston et al., 2001; Zhu et al., 2001). L’utilisation d’un logiciel commercial permet de réduire le temps de développement et aussi d’implémenter des lois de comportement complexes à l’aide de sous-routines usager (Clifford et al., 2006; Ersoy et al., 2010b; Svanberg et Holmberg, 2004a). L’utilisation d’un code « maison » offre quant à elle une plus grande liberté pour la modélisation mais nécessite en contrepartie des efforts de développement plus importants.

Les premières utilisations de la méthode des éléments finis pour prédire la distorsion ont utilisé des lois de comportement simples (linéaire élastique) et ne s’intéressaient qu’à la déformation induite par la dilatation (Radford, 1987; Zahlan et O'Neill, 1989). Au fils des années, des analyses plus détaillées ont été développées pour incorporer notamment :

- un développement graduel des propriétés mécaniques et thermiques au cours de la cuisson (Johnston et al., 2001; Oakeshott, 2003; Svanberg et Holmberg, 2004b);

- une modélisation viscoélastique du comportement (Clifford et al., 2006; Wiersma et al., 1998; Zhu et al., 2001);

- une représentation entièrement tridimensionnelle (Bapanapalli et Smith, 2005; Clifford et al., 2006; Svanberg et al., 2005)

- la prise en compte d’hétérogénéités de fabrication comme des gradients de taux de fibres (Darrow Jr et Smith, 2002) ou des variations d’épaisseur (Oakeshott, 2003).

Une des principales difficultés de la prédiction de la distorsion par éléments finis reste la modélisation du phénomène d’interaction moule/pièce. Dans le logiciel COMPRO, il a été proposé d’ajouter une couche à faible cisaillement pour simuler l’interface entre le composite et l’outillage (Fernlund et al., 2002b). Bien qu’intéressante, cette approche reste limitée car elle nécessite d’ajuster les propriétés de la couche de cisaillement en fonction de la longueur de la pièce (Twigg et al., 2004b). Il faut enfin souligner que malgré l’évolution constante de la puissance des ordinateurs, le temps de calcul peut encore s’avérer important pour les simulations tridimensionnelles de pièces aéronautiques réelles de grande taille. Afin de diminuer les temps de calcul, Fernlund et al. (2003) ont couplé un code simulation 2D des contraintes résiduelles (COMPRO) à un logiciel commercial d’analyse structurelle 3D (Abaqus). Cette approche permet effectivement d’accélérer la résolution tout en conservant une bonne précision des prédictions. Cependant, les auteurs admettent que cette méthodologie peut être difficile à implémenter pour certaines géométries et demande plus d’étapes qu’une analyse tridimensionnelle directe.

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