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V. Discussion

3. Préconisations

Au terme de ce travail, enrichi des témoignages des 28 personnes rencontrées ainsi que des lectures effectuées, nous proposons d’exposer des pistes d’amélioration dans le cadre de notre recherche.

· Faire coïncider le besoin et la solution apportée

A la vue des témoignages recueillis nous pouvons remarquer que les patients formulent eux- mêmes leurs besoins pour ce qui concerne leur santé. La mise en place des entretiens pharmaceutiques est une décision prise par les Autorités de santé. Cette nouvelle démarche est très encadrée présentant des objectifs clairement établis et des conditions d’accès restrictives. Cependant après avoir donné la parole aux principaux acteurs, c’est-à-dire aux patients mais aussi aux pharmaciens pour connaître leur ressenti, on s’aperçoit que le choix du public cible ne semble pas le plus optimal.

Dans le cas des entretiens pharmaceutiques sur les AVK, nous pourrions nous permettre une remarque sur le choix de la population cible. Celle-ci comprend les patients qui suivent traitement chronique avec des AVK, il s’agit donc essentiellement de personnes âgées déjà familières avec ce traitement. Or lorsque nous interrogeons cette population, le dispositif proposé ne semble pas vraiment correspondre. Au contraire appliqué à une autre population, celle des patients initiant un traitement par AVK, il paraît beaucoup plus mis à profit voire répondre à un besoin formulé par les individus interrogés.

Il est important, lorsqu’on veut mettre en place un projet, de s’assurer qu’il correspond bien à un besoin de la population. Une initiative, si bonne soit-elle, si elle n’est pas reprise et intégrée par la population à laquelle elle s’adresse, ne pourra pas aboutir au résultat escompté.

· Intégrer l’ETP au sein des entretiens pharmaceutiques

Bien que les notions auxquelles fait référence le questionnaire de la Sécurité Sociale soient incontournables, car directement liées au bon usage du médicament, il pourrait se montrer profitable de les aborder différemment.

Certes, afin de détecter un mauvais usage susceptible d’engendrer une inefficacité du traitement voire un risque pour la santé du patient, il est recommandé de visiter tous les thèmes abordés par ce questionnaire. Mais pour ne pas assaillir la personne de questions

98 fermées et enchaîner trop directement sur les réponses, une autre approche pourrait être préconisée.

Par exemple, réserver un temps au début du premier entretien pour établir un bilan éducatif. Il s’agirait dans un premier temps de faire un point avec le patient dans le but de cerner son niveau de connaissance. Puis par la suite de réaliser un entretien motivationnel c’est-à-dire repérer les motivations des malades et les ambivalences de ces motivations. De cette façon, le professionnel adopterait une démarche plus proche de l’éducation thérapeutique du patient. Son rôle ne se cantonnerait pas simplement à délivrer des informations en fonction des « bonnes » ou « mauvaises » réponses du malade, mais à aider la personne à trouver ses propres solutions. Le patient en formulant de lui-même ses motivations et les moyens de parvenir à ses objectifs aura plus de chance d’opérer les changements qu’il se sera fixé. Il est important de réussir à saisir le besoin du patient qui se trouve en face. Apporter une réponse impersonnelle sans prendre en considération les attentes et les aptitudes du malade n’aura pas une grande répercussion dans son quotidien. C’est ce que l’on observe avec les patients qui déclarent ne rien changer suite à l’entretien avec leur pharmacien. Pour cela il faudra attendre une certaine maturité de la part du patient quant à son envie de changer.

· Intégrer l’ETP dans sa pratique professionnelle

Comme on peut le lire dans l’article Réflexions sur la place du pharmacien dans l’éducation

thérapeutique du patient. L’ETP s’intègre dans la « philosophie du soin pharmaceutique ». Le

rôle du pharmacien est de sécuriser le patient dans son environnement. Il se positionne comme un médiateur du patient entre le système de soins et la vie quotidienne, entre des savoirs techniques et des représentations compatibles avec le bon usage du médicament.(43)

Aussi, comme nous l’a fait remarquer Cécile Pouteau, l’ETP peut parfaitement s’intégrer dans le quotidien du pharmacien. Nul besoin de déposer un programme, de formaliser une activité bien spécifique et d’avoir recours à un financement. L’ETP peut aussi se résumer à un état d’esprit, une façon de travailler au quotidien. Dans sa relation à l’autre user de questions ouvertes, pratiquer la reformulation des propos du patient, et synthétiser ce que l’on ressort de cette discussion constitue un grand pas pour introduire une éducation thérapeutique du patient au quotidien.

Quant à ceux qui souhaitent se lancer dans des activités bien particulières d’ETP, ils doivent être conscients que la mentalité des patients doit encore évoluer. Le patient a lui-même des difficultés à prendre le rôle d’acteur qu’on lui propose de revêtir en éducation thérapeutique. Il reste encore bloqué sur le schéma « sachant/non sachant » et voit dans la proposition de participer à un entretien pharmaceutique ou à un atelier d’ETP une action unilatérale où il est seul apprenant (52).

Bien au contraire les professionnels ne peuvent que s’enrichir d’offrir plus d’émancipation aux malades. C’est plutôt nous, professionnels de santé, qui avons beaucoup à apprendre d’eux.

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