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Cette étude est un exemple d’analyse multi-échelles contraintes par la géographie. L’approche méthodologique est généralisable ailleurs. Elle est issue d’un séjour de Ion-Florin Mihailescu, en 1994, au Centre d’Etudes Climatiques d’Aix-en-Provence, invité par Annick Douguédroit. Volontés de transposer des techniques et d’initier de nouvelles collaborations sous-tendent ce travail.

a) Objectifs

Expliquer les variations spatiales de la pluviométrie mensuelle et annuelle.

La Dobroudja roumaine est une région de taille modeste située entre Danube et Mer Noire, entre 44 et 45° Nord et 28 et 29° Est. Son relief est modéré. Il est constitué de plaines côtières et fluviales séparées par un plateau, Oltina, dont l’altitude oscille entre 100 et 200 mètres. Son climat continental est marqué par une relative aridité à laquelle est associée une végétation climacique : la steppe. Néanmoins la variabilité spatiale des précipitations est considérable, qu’il s’agisse du total annuel précipité allant en moyenne de 350 à 550 mm, ou du régime saisonnier. Notre hypothèse est que ces différences spatiales non négligeables sont en partie dues à la géographie de la région. L’objectif est de quantifier l’influence de deux de ses composantes : l’altitude et la distance à la mer. A noter que ceci pourrait tout à fait être effectué sur une région d’Afrique du Sud.

b) Résultats

Vingt-neuf séries pluviométriques, dont huit issues de stations météorologiques, ont été étudiées au pas de temps mensuel sur la période 1964-1992 (6/ Richard et al., 2000).

Un régime continental original et une variante « méditerranéenne ».

L’analyse confirme que le régime continental caractérisé par des maxima de fin de printemps (mai et juin) et des minima d’hiver (janvier à mars) prédomine (Fig. 37a). La particularité de ce régime continental, déjà observée dans d’autres régions bordant la Mer Noire, sud de la Bulgarie, Ukraine et sud de la Russie (Douguédroit et Zimina, 1987 ; Planchon, 1997), est constituée par la faiblesse des pluies estivales. L’analyse montre également la spécificité du littoral, surtout pour sa partie sud, où les précipitations automnales sont fortes (Fig. 37b). Ce caractère est généralement rencontré dans les climats de type méditerranéen, voire océanique.

Une géographie des pluies variable selon la saison.

Une moyenne pluviométrique régionale a été calculée pour chacune des 12 moyennes mensuelles des 29 séries. Les écarts à cette moyenne, exprimés en pourcentages, permettent après cartographie, de spatialiser pour chacun des mois les secteurs où les particularismes locaux sont forts. Au mois de mai, le littoral se distingue par sa faible pluviosité, inférieure à 80 % de la moyenne des 29 stations (Fig. 38a).

Figure 37 : ACP sur les précipitations moyennes mensuelles de 29.stations de Dobroudja.

A B

A : CP1, b : CP2. Cercle en trait plein : corrélation > 0, cercle en pointillés : corrélation < 0.

Figure 38 : Ecarts pluviométriques par rapport à l’indice régional.

A B

a : mai, b : août. Cercle en trait plein : > 120 % par rapport à la moyenne régionale, cercle en pointillés : < 80 % par rapport à la moyenne régionale.

Figure 39 : Régressions cubiques entre les précipitations et la distance à la mer.

mm 130 120 110 100 90 80 70 MM 70 80 90 100 110 120 130 140 150 DKMER 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 B JO 9 0 10 0 11 0 12 0 13 0 14 0 15 0 16 0 D KM E R 0 1 0 20 3 0 40 5 0 60 7 0 80 9 0 1 0 0 11 0 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 Km 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 Km a : Précipitations de mars-mai = 85.61 + 0.85dk - 0.012dk2 + 0.00007dk3 +/- SE b : Précipitations de juin-août =101.67 + 1.44dk - 0.018dk2 + 0.000077dk3 +/- SE où dk est la distance kilométrique minimale à la Mer Noire.

Au mois d’août, ce sont les stations de l’intérieur, situées dans la plaine danubienne, qui présentent le plus fort particularisme avec des pluies supérieures à 120 % par rapport à la moyenne régionale (Fig. 38b). Pour mieux comprendre les variations spatiales de la pluviométrie de chacun des mois, nous avons calculé les corrélations entre précipitations d’une part, et l’altitude et la distance à la mer d’autre part. Il s’avère que la distance à la mer est le premier élément expliquant les variations spatiales des abats pluviométriques (42 % de variance expliquée pour les totaux annuels par exemple). Son rôle est significatif de février à septembre et maximal en mai-juin, saison où le contraste thermique entre les températures continentales et marines est maximal.

Le rôle prépondérant des cellules de brises de mer au printemps et en été.

L’hypothèse est que les cellules de brises de mer qui se mettent en place les journées printanières et estivales ensoleillées inhibent ou limitent la convection sur le littoral, tout en la favorisant au niveau du front de brise, à quelques dizaines de kilomètres dans l’intérieur des terres. Pour tester cette hypothèse, nous avons réalisé des ajustements par régressions cubiques sur des nuages de points croisant précipitations et distances à la mer (Fig. 39). En effet, les nuages ne correspondent pas à une relation linéaire. Il existe un seuil au-delà duquel les précipitations n’augmentent plus. Ce seuil est plus marqué en été (Fig. 39b) qu’au printemps (Fig. 39a). Entre juin et août, ce seuil intervient à environ 30 Km de la côte. Cette valeur est compatible avec la littérature sur la pénétration des fronts de brise en climat tempéré (Abbs et Physick, 1992), comme avec la connaissance du climat de la région au sein de laquelle on observe, à 30-35 Km dans l’intérieur, des valeurs maximales de convection thermique et d’occurrence d’orages (Mihalescu, 1986).

c) Perspectives

Ce travail, même si une convention a été signée entre le CRC de l’Université de Bourgogne et l’Université Ovidius de Constanta, est issu d’une collaboration ponctuelle. Celle-ci aurait pu être poursuivie d’autant plus aisément que les soutiens financiers européens encouragent les collaborations avec l’Europe de l’Est. Pour ne pas trop se disperser, tant personnellement que pour l’équipe, je n’ai pas souhaité le faire. Il n’y a donc pas de perspective directe donnée à cette recherche.

Axe 2 : Qualité de l’air en Bourgogne