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I. INTRODUCTION 25 1 DEFINITION

2. DISCUSSION DES RESULTATS

2.2. PPVSM par les MG : mais…

Les médecins pensent donc que leur métier est favorisant sur certains points. Malgré cela, ils émettent de nombreux éléments susceptibles de les freiner.

La pénurie actuelle de MG sur le territoire est une réalité qui ne va pas aller en s’arrangeant.(35) (36) Ce n’est malheureusement pas une donnée que les médecins généralistes peuvent modifier. Gérer ces problématiques est du ressort des instances de santé publique. Des mesures ont d’ailleurs été prises ces dernières années

(suppression Numéros Clausus, déploiement d’assistants médicaux, formation d’infirmiers en pratiques avancées) et devront être évaluées à distance (37). En attendant, en juin 2019 encore 44% des médecins généralistes refusait d’avoir de nouveaux patients, avec comme raison principale le fait qu’ils aient déjà une patientèle trop importante. (38)

Les médecins ont aussi évoqué leur manque de formation pour réaliser une PPVSM. Il est vrai que les seuls items et recommandations sur les VSM délivrés au cours de leur formation concernent la prévention secondaire et tertiaire. Les participants ont d’ailleurs eu besoin de temps pour visualiser ce que pouvait être la prévention primaire dans ce contexte de VSM. Et malgré cela, de nombreuses confusions entre prévention primaire et secondaire ont été faites au cours des entretiens.

92 On peut aussi se questionner sur l’efficacité de la formation déjà délivrée.

Selon une étude réalisée en Ille-et-Vilaine en 2015 :

• 70,1% des MG ignoraient le terme d’information préoccupante (IP) • 77,2% d’entre eux ne connaissaient pas son destinataire

• 79,5% des MG ne connaissaient pas la différence entre signalement et IP • De fait, seul 5 % des MG disaient avoir été formés sur l’IP.(39)

On peut également citer le rapport de l’Observatoire National de l’Enfance en Danger : en 2013 seul 5% des signalement d’enfants en danger provenait du secteur médical. Selon une autre étude, en 2015 dans le département de Loire-Atlantique, les MG étaient à l’origine de 1,23% des IP et 1,22% des signalements.(40) Ces faibles chiffres ont de multiples causes mais nous ne doutons pas que le manque de formation en fasse partie. Devant ces données, on peut aussi se questionner lorsque les médecins disent être plus vigilants en ce qui concerne le dépistage de maltraitance. Nous ne remettons pas en doute leur parole, mais leur vision semble toutefois erronée, au regard des chiffres. Ce qui semble être aussi un gros frein pour les MG est le sujet en lui-même. Ils

considèrent la problématique des VSM comme tabou. Et ils se rendent compte que le frein principal vient d’eux même. Mais comme le fait remarquer M6, nous sommes le reflet de la société, société qui avant janvier taisait le problème des VSM. « Et que nous on est dans le tabou social comme, parce qu’on est dans cette société là, avec les tabous qu’elle véhicule quoi. Que de parler de violences sexuelles dans l’enfance c’est un tabou social ».

On peut noter aussi que certains participants n’ont aucune difficulté à aborder des sujets que d’autres trouvent compliqués à amener, comme les troubles érectiles, les addictions, les violences conjugales, le syndrome du bébé secoué…

On remarque d’ailleurs que les médecins parlent plus facilement de sujet qui les

intéressent, et pour lesquels ils se sont formés. La formation joue donc aussi un rôle sur les représentations personnelles.

Les MG ont aussi peur de l’incidence que pourrait avoir l’évocation des VSM sur les patients : vexation, angoisses, frustration… En ce qui concerne les enfants, une revue Cochrane a montré qu’une PPVSM réalisée directement auprès des enfants ne donnait

93 lieu à aucune modification de leur anxiété. (41). Nous n’avons cependant rien trouvé sur les impacts qu’elle pourrait avoir sur les parents.

Cette appréhension n’est donc pas fondée, en tout cas en ce qui concerne les enfants. Certains semblent s’en rendre compte : « si il faut, ils attendent que ça qu’on leur en parle » (M1), « nous on croit aussi qu’ils le prendraient mal. » (M9). L’explication de leur réticence se trouve peut-être dans les propos de M2 « parce que nous même ça nous renvoi a des trucs pas simples ».

Il y a aussi les contraintes intrinsèquement liées à leur fonction de MG.

La dépendance des enfants à leur parents donne lieu à plusieurs difficultés pour les médecins. La plus problématique est celle de la potentielle présence des agresseurs de l’enfant en consultation. Car rappelons-le, environ 50% des VSM sont incestueuses. L’efficacité d’une PPVSM en leur présence est donc largement remise en cause par les médecins. De plus si les parents ne jugent pas nécessaire de prendre rendez-vous régulièrement pour leurs enfants, ces derniers peuvent ne pas être vu durant une longue période. Le médecin est en effet dépendant de l’observance des patients. Il peut, bien sûr, essayer de maximiser l’adhérence de ses patients et les éduquer sur l’importance d’un suivi. Malgré cela, des enfants échappent à un suivi régulier. Certains médecins, notamment ceux exerçant en milieu rural peuvent croiser

régulièrement leurs patients en dehors du cadre médical. Ce qui peut poser problème, aussi bien aux médecins qu’aux patients, qui peuvent être gêné d’aborder certaines problématiques lors des consultations s’ils savent qu’ils peuvent se croiser en dehors du cabinet médical.

La médecine générale telle qu’elle est actuellement organisée favorise la prévention secondaire. Dans les faits, les patients viennent surtout lorsqu’ils ont un souci de santé afin que leur médecin pose un diagnostic et leur prescrive le traitement approprié. Une part importante de notre exercice porte aussi sur la détection et l’action sur les facteurs de risque. Comme le dit M8 « rarement ils viennent pour dire « ah bah en fait tout va bien je viens juste pour faire une consultation. », sauf en dehors du suivi gynécologique et de celui des enfants.

Enfin comme le dit M8 :« tout le monde a des pratiques différentes et l’enfant va pas être suivi de la même manière avec un médecin ou un autre. ». D’où l’importance de

94 délivrer des supports et des recommandations valides et claires afin que la pratique de la PPVSM soit la plus uniforme d’un MG à l’autre.

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