1.3 Vers des exigences de performances énergétiques et environnementales pour
1.3.1 Points divergents entre évaluation énergétique et environnementale . 22
environne-mentale
La réglementation thermique, en diminuant l’énergie consommée, est une mesure propice
à réduire, d’ici 2050, les émissions de GES par un facteur quatre par rapport au niveau
de 1990. Cependant, en fixant des objectifs performanciels sur l’énergie, l’évolution de la
consommation d’énergie est considérée comme linéaire par rapport à celle des émissions de
GES. Ce n’est pas le cas, comme le montre Villot (2012), car toutes les énergies n’ont pas le
même impact.
D’ailleurs, les détracteurs de la RT 2012 s’appuient sur cet argument car en ne prenant en
compte que l’énergie primaire avec les coefficients présentés au paragraphe 1.1.3, la
réglemen-tation favoriserait l’utilisation de gaz par rapport à celle d’électricité (Bergougnoux, 2013).
Or, le gaz a un bilan GES moins favorable que celui de l’électricité : 0.243 kg éq. CO
2/kWh
PCI pour le gaz naturel et 0.082 kg éq. CO
2/kWh pour l’électricité (données issues de la Base
Carbone (2015)).
Dans les paragraphes suivants, nous allons développer les différences entre évaluation
énergétique et évaluation environnementale.
Suivant la frontière choisie, une énergie peut être comptabilisée de différentes manières
comme le présente la figure 1.9. Les besoins d’un bâtiment sont généralement quantifiés en
tant qu’énergie utile. Les systèmes ayant rarement des rendements de 100 %, des pertes sont à
considérer pour quantifier l’énergie finale i.e. l’énergie comptabilisée au compteur.L’énergie
primaire, quant à elle, représente en plus de l’énergie finale, l’énergie nécessaire à l’extraction
et la transformation des ressources énergétiques brutes et à leurs acheminements.
Figure1.9 – Différences et conversions entre énergie primaire, finale et utile
Comme indiqué à la section 1.1.3, l’approche énergétique réglementaire utilise l’énergie
primaire et utilise des coefficients de conversion entre énergie finale et énergie primaire
fi-gés. En ACV, les données collectées sur la consommation du bâtiment le sont en énergie
finale puisque des données environnementales modélisant la chaîne de production de
cha-cun des vecteurs énergétiques sont ensuite associées à ces données de consommation. Ces
modélisations sont définies pour un contexte temporel et géographique donné i.e. électricité
consommée en France en 2008. Chaque base de données propose un profil environnemental
par source d’énergie. Cette modélisation de la chaîne de production et de distribution entraîne
des différences avec les coefficients conventionnels utilisés dans la RT (cf. Figure 1.10).
Cette divergence est principalement due à la représentativité des données utilisées pour
calculer les coefficients de conversion. Par ailleurs, les coefficients de la RT sont figés pour
chaque vecteur énergétique, alors qu’en ACV, la modélisation de la chaîne de production
permet de les adapter en fonction du contexte (Sidler, 2009b).
Ainsi, entre les deux approches, deux résultats différents seront obtenus pour la
consom-mation en énergie primaire lors de la phase d’utilisation d’un même bâtiment. Il faut bien
l’expliquer aux acteurs pour mettre en cohérence les deux résultats.
Figure1.10 – Différences entre coefficients de conversion d’énergie finale à énergie primaire
entre l’approche ACV et l’approche énergétique réglementaire pour des énergies consommées
en France chez l’utilisateur final. Les inventaires du cycle de vie ont été réalisés à partir de
données des années suivantes : électricité (2004 pour ecoinvent v2.2 et 2005 pour DEAM),
fuel (2000 pour ecoinvent v2.2 et 2005 pour DEAM), charbon (1992-1998 pour ecoinvent v2.2
et 2005 pour DEAM) et gaz naturel (2000-2001 pour ecoinvent v2.2 et 2006 pour DEAM).
Par ailleurs, les frontières sont également différentes lorsque nous nous intéressons aux
usages énergétiques pris en compte dans l’approche énergétique réglementaire et dans
l’ap-proche environnementale. En effet, aujourd’hui dans la première, les efforts sont concentrés
sur le chauffage, le refroidissement, l’eau chaude sanitaire, la ventilation, l’éclairage et les
auxiliaires de distribution. Or, si une approche holistique est souhaitée comme c’est le cas
en ACV, les usages liés au bâti mais non réglementés comme les ascenseurs, l’éclairage et la
ventilation des parkings, l’éclairage extérieur, etc. et les usages non liés au bâti (dits
mobi-liers, principalement usages spécifiques de l’électricité) doivent faire partie de l’analyse. Le
choix des usages à considérer dépend de l’objectif de l’évaluation, cependant ne pas considérer
l’ensemble des usages énergétiques ayant lieu sur la parcelle peut induire un biais dans
l’éva-luation. Notamment, la prise en compte d’usages non réglementés, en particulier mobiliers,
pose certaines questions sur la cohérence entre les calculs thermiques, prenant en compte les
apports de chaleur liés à ces usages, et l’ACV intégrant les impacts environnementaux liés
aux consommations énergétiques et aux équipements correspondants.
les indicateurs utilisés dans l’approche énergétique réglementaire.
En effet, dans l’approche réglementaire, l’énergie renouvelable produite sur la parcelle est
défalquée de la consommation totale en énergie primaire du bâtiment ; le Cep agrège donc
les informations de production et de consommation.
Avec l’approche ACV, les frontières d’étude du système sont élargies : toutes les
res-sources énergétiques prélevées dans l’environnement pour toutes les phases du cycle de vie
bâtiment sont considérées. De plus, les flux d’énergie d’origine renouvelable sont séparés de
ceux d’origine non renouvelable, qu’ils soient produits ou non sur la parcelle et sont
rensei-gnés, respectivement, dans les indicateursUtilisation totale de l’énergie primaire renouvelable
et Utilisation totale de l’énergie primaire non renouvelable. L’indicateur Énergie fournie à
l’extérieur permet de valoriser la quantité d’énergie produite sur la parcelle et qui n’est pas
auto-consommée par le bâtiment.
Comme nous l’avons vu dans les paragraphes précédents, il existe des différences dans
les frontières, la manière de comptabiliser l’énergie et d’afficher les résultats entre l’approche
énergétique et l’approche environnementale. Sans remettre en cause les postulats des deux
approches, la thèse vise, en premier lieu, à faire le lien entre celles-ci. Autrement dit, nous
cherchons à répondre à la question : quelles doivent être les caractéristiques du bilan
énergé-tique pour son utilisation dans l’évaluation environnementale de l’énergie utilisée lors de la
phase d’utilisation d’un bâtiment ?
Par ailleurs, une réglementation se doit d’accompagner les innovations, et non pas les
freiner. Les paragraphes suivants présentent les problématiques soulevées par la prise en
compte de futures technologies dans l’évaluation énergétique et environnementale.
Dans le document
Réflexions et contributions méthodologiques à l'ACV de bâtiments neufs : modélisation du contributeur énergie
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