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Place de la littérature de jeunesse et de la lecture littéraire dans le cadre

L’objet de ma recherche autour de la réception littéraire, et plus particulièrement d’une activité de lecture littéraire rendue possible par un débat interprétatif en GS, peut s’inscrire dans les objectifs des programmes 2008 et correspondre en partie aux attentes du document d’accompagnement des programmes Le langage à l’école maternelle 2011. Il se trouve légitimé plus largement par la communauté pédagogique qui a œuvré pour l’intégration de la littérature de jeunesse à l’école.

Les programmes officiels de l’école primaire depuis 2002 prennent en considération explicitement la littérature de jeunesse, la construction d’une première culture littéraire et la mise en place de la lecture littéraire à partir d'albums. Ces programmes 2002 ont développé les activités littéraires à l’école maternelle par des lectures offertes, des mises en réseaux, des activités de compréhension, des productions d’écrits, par la mise en place de débats littéraires : « Dès cinq ans, des débats sur l’interprétation des textes peuvent accompagner ce travail rigoureux de la compréhension », accompagnés d’objectifs en communication au service de ces derniers :

l’élève doit être capable de prendre l’initiative d’un échange et le conduire au-delà de la première réponse, de participer à un échange collectif en acceptant d’écouter autrui, en attendant son tour de parole et en restant dans le propos de l’échange.

A cela, s’ajoute une liste d’œuvres qui fut proposée pour les élèves des cycles 2 et 3. Elles furent revisitées, enrichies et annexées en 2010 aux nouveaux programmes de 2008, ce qui exprime une volonté de confirmer la légitimation de la littérature de jeunesse dans les programmes. Une autre enfin vient de voir le jour courant 2013 pour les classes de maternelle.

Cependant, les attentes institutionnelles de 2008 concernant la littérature de jeunesse sont quelque peu différentes. Max Butlen le souligne lors d’un colloque :

son rôle [à la littérature de jeunesse] est sans doute moins considérable que dans les textes de 2002 et 2007, en raison de l’accent désormais mis sur le vocabulaire, l’orthographe et la grammaire.48

Les programmes de maternelle du 19 juin 2008 prennent en considération et répondent aux exigences du socle commun de connaissances et de compétences. La littérature est donc envisagée pour la « maîtrise de la langue française » et de « la culture humaniste ». Elle semble donc trouver sa légitimation dans les domaines « s’approprier le langage » et « découvrir l’écrit ». Mais la place de la littérature est moins visible que dans les anciens programmes. Dans « s’approprier le langage » et sous l’item « Comprendre» est précisé un des objectifs de la lecture à haute voix d’œuvres littéraires.

Une attention particulière est portée à la compréhension […].Grâce à la répétition d’histoires ou de contes adaptés à leur âge, classiques et modernes, ils parviennent à comprendre des récits de plus en plus complexes ou longs, et peuvent les raconter à leur tour.

La découverte de la littérature est donc un support privilégié pour améliorer le langage oral et la compréhension de manière globale qui s’effectuerait grâce à la répétition. La découverte de l’écrit dans ces programmes est orientée sur les prémices de l’entrée en lecture et de l’écriture par le code. La littérature se fait exemple et support pour mettre en avant ce dévoilement.

Les situations nombreuses d’écoute de textes que l’enseignant raconte puis lit [….] préparent les élèves à aborder l’apprentissage de la lecture et de l’écriture. Par trois activités clés (travail sur les sons de la parole, acquisition du principe alphabétique et des gestes de l’écriture), l’école maternelle favorise grandement l’apprentissage systématique de la lecture et de l’écriture qui commencera au cours préparatoire.

Les procédures graphophonétiques et le décodage semblent priorisés pour l’entrée dans l’écrit au détriment des autres dimensions de l’acquisition de la lecture qui s’attache au sens. Les processus cognitifs supérieurs tel le raisonnement par le fait de trouver des inférences sur un texte, la formulation d’hypothèses ne sont pas mis en avant dans les programmes comme faisant partie du processus de lecture dans ce premier temps.

Les enfants se familiarisent peu à peu avec le français écrit à travers les textes lus quotidiennement par l’enseignant. Afin qu’ils perçoivent la spécificité de l’écrit, ces textes sont choisis pour la qualité de leur langue (correction syntaxique, vocabulaire précis, varié, et employé à bon escient) et la manière remarquable dont ils illustrent les genres littéraires auxquels ils appartiennent (contes, légendes, fables, poèmes, récits de littérature enfantine). Ainsi, tout au long de l’école maternelle, les enfants sont mis en situation de rencontrer des œuvres du patrimoine littéraire et de s’en imprégner. Ils deviennent sensibles à des manières de dire peu habituelles ; leur curiosité est stimulée par les questions de l’enseignant qui attirent leur attention sur des mots nouveaux ou des tournures de phrases qu’ils reprennent à leur compte dans d’autres situations.

La littérature et son rôle apparaît plus nettement dans les Ressources pour faire la

classe :

Il faut donc, au cours de l’école maternelle, développer les capacités des jeunes enfants à comprendre et à interpréter des œuvres plus exigeantes, à partir de connaissances tels les archétypes de personnages, […], de mondes fictionnels […].Il s’agira aussi d’acquérir des postures de lecteur qui peut remettre en question sa première compréhension du texte, demande des relectures, fait du lien avec d’autres œuvres et accepte d’être parfois déstabilisé […].49

Cet objectif sera le point d’appui de mon travail. Par le développement d’une culture littéraire et la rencontre de différents genres, il apparait envisageable de travailler sur l’album, d’en découvrir ses instances littéraires.

Le dispositif de débat peut également en partie s’inscrire dans les compétences de communication précisées dans « s’approprier le langage » :

Progressivement, ils participent à des échanges à l’intérieur d’un groupe, attendent leur tour de parole, respectent le thème abordé. […]Ils apprennent peu à peu à communiquer sur des réalités de moins en moins immédiates ; ils reformulent l’essentiel d’un énoncé entendu. Ils acquièrent progressivement les éléments de la langue nécessaires pour se faire comprendre, c’est-à-dire pour : désigner correctement les protagonistes concernés, marquer les liens entre les faits, exprimer les relations temporelles par le temps adéquat des verbes et les mots ou expressions pertinents, situer les objets ou les scènes et décrire les déplacements de manière pertinente.

Toutefois, ces compétences sont orientées sur la maîtrise de la langue ainsi que les bases de la situation d’énonciation plus que sur la réflexion que peut apporter l’échange entre pairs.

L’ouverture sur un tel travail pourra se trouver confirmé par la nouveauté dans ces programmes sur la liberté pédagogique souhaitée :

Ces programmes sont précis […] tout en étant ouverts en termes de méthode afin de respecter strictement le principe de la liberté pédagogique […]. Il appartient aux enseignants […] de s’emparer résolument de cette liberté nouvelle. Le rôle de l’enseignant est en effet d’aider ses élèves à progresser dans la maîtrise des objectifs fixés par les programmes et progressions nationaux : il lui revient de choisir les méthodes les plus adaptées aux caractéristiques individuelles et aux besoins spécifiques de ses élèves. Le professeur des écoles ne saurait être un simple exécutant : à partir des objectifs nationaux, il doit inventer et mettre en œuvre les situations pédagogiques qui permettront à ses élèves de réussir dans les meilleures conditions.50

Par cette nouveauté, cette expérimentation peut se justifier.

49 Ressources pour faire la classe, « le langage à l’école maternelle », p.163. 50 Extrait de la Présentation du B.O. 2008.

Enfin, la communauté pédagogique soutient cette démarche. Max Butlen rappelle lors de son intervention à la journée d’étude La littérature des enfants fait

école en 2008 que :

L’idée qu’une pédagogie de la compréhension et de l’interprétation est non seulement possible mais nécessaire […], et l’on découvre que la lecture de la littérature de jeunesse offre [….] un formidable champ d’application et d’investigation».