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Physiopathologie systémique et régionale (muscle squelettique, cerveau

I.1. Physiopathologie systémique

Le choc anaphylactique est l’expression clinique la plus sévère des réactions d’HSI. Dans sa description classique, ce choc évolue en trois phases successives. Dans un premier temps, on observe une baisse de la post-charge, avec diminution des résistances vasculaires systémiques. Les pressions de remplissage ventriculaire restent inchangées, et le débit cardiaque augmente du fait de l’apparition d’une tachycardie. Ceci correspond au tableau d’un choc hyperkinétique. Sans traitement adapté, la vasodilatation s’étend au secteur veineux capacitif et conduit à un effondrement du retour veineux et à une diminution du débit cardiaque, malgré l’augmentation de la fraction d’éjection ventriculaire. À ce stade, toute augmentation de la pression intra-thoracique (ventilation artificielle) peut aggraver la baisse du débit cardiaque, et induire un arrêt par désamorçage du cœur. La fraction du débit cardiaque destinée aux organes les mieux perfusés serait augmentée, et ces circulations seraient préservées (Kapin and Ferguson 1985). Puis apparaît un tableau de choc hypovolémique hypokinétique (avec diminution des pressions de remplissage ventriculaires, effondrement du débit cardiaque et des résistances vasculaires systémiques élevées), secondaire à l’extravasation plasmatique trans-capillaire.

Cette description est confrontée à une réalité clinique plus complexe liée à la variabilité interindividuelle et à des atteintes spécifiques d'organes au cours de certaines formes de choc anaphylactique, comme cela a pu être démontré sur quelques observations de la phase précoce du choc chez des sujets bénéficiant d’une surveillance hémodynamique(Beaupre, Roizen et al. 1984; Nicolas, Villers et al. 1984; Silverman, Van Hook et al. 1984)

Une atteinte primitive du cœur, qualifiée d'anaphylaxie cardiaque, a été évoquée devant des arrêts cardiaques inauguraux attribués pour certains à des spasmes coronaires avec ou sans nécrose myocardique (Wagdi, Mehan et al. 1994). Dans un modèle canin, une étude a montré l'existence d'une diminution de la contractilité ventriculaire gauche au cours du choc anaphylactique (Correa, Mink et al. 1991). Cette dernière était associée à une vasodilatation et non une vasoconstriction coronaire et on ne retrouvait pas de signe d'ischémie myocardique,

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ce qui suggère un effet dépresseur propre des médiateurs de l'anaphylaxie sur le myocarde. Chez l'homme, l'existence d'une baisse de la contractilité cardiaque reste controversée et dépend vraisemblablement de la gravité de la présentation clinique.

La réponse des différents territoires vasculaires est probablement bien plus hétérogène que le modèle classique ne le laisse entendre. En effet, il a été montré dans plusieurs modèles animaux que les territoires pulmonaires et splanchniques subissaient une vasoconstriction au cours du choc anaphylactique. Chez la souris, le rat et le lapin, la vasoconstriction des vaisseaux hépatiques présinusoïdaux est à l'origine d'une hypertension portale responsable d'une diminution du retour veineux et du volume sanguin circulant participant, dans ces modèles, à la chute de pression artérielle moyenne (Shibamoto, Cui et al. 2005). Enfin, du fait de l'altération du débit sanguin dans les différents organes, en particulier dans les compartiments « adaptatifs » tels que les muscles squelettiques, et en l'absence d'inhibition de la respiration cellulaire dans ces territoires, la production énergétique repose sur la glycolyse et s'épuise rapidement par défaut de substrat (Dewachter, Jouan-Hureaux et al. 2005). En l'absence de thérapeutique adaptée, ce phénomène va aboutir à une évolution accélérée vers la mort cellulaire puis un syndrome de défaillance multiviscérale rendant le choc rapidement réfractaire.

I.2. Conséquences régionales du choc anaphylactique: muscle

squelettique, cerveau et poumon

I.2.1 Muscle squelettique

L’organisme s’adapte à l’hypotension et à l’hypoperfusion systémique du choc anaphylactique par une redistribution des débits sanguins régionaux avec par exemple une diminution importante de la perfusion musculaire. Les mécanismes de régulation font intervenir le système nerveux sympathique qui joue un rôle important à plusieurs niveaux (catécholamines circulantes, innervation tissulaire, tonus vasculaire)(Dewachter, Jouan-Hureaux et al. 2005).

Le choc anaphylactique est caractérisé par une diminution importante et brutale de la disponibilité en oxygène. Cette diminution de la pression tissulaire en partielle en oxygène musculaire (mPtio2) est semblable en amplitude (mais pas en vitesse d’apparition) à celle

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observée dans le choc hémorragique(Niinikoski and Halkola 1977; Zhao, Junker et al. 1985; McKinley and Butler 1999), La chaîne respiratoire mitochondriale restant fonctionnelle, le passage à la glycolyse anaérobie se fait après épuisement de l’oxygène disponible et aboutit après épuisement des substrats (glucose et pyruvate) à l’absence totale de production énergétique cellulaire et à la mort cellulaire.

Cette situation diffère profondément de celle observée dans le choc septique dans lequel la microcirculation plus que la perfusion tissulaire est altérée, en association avec une inhibition de la chaîne respiratoire. La disponibilité en oxygène est conservée, ainsi que la production énergétique mais celle-ci est limitée par le métabolisme anaérobie, l’apport de substrats (glucose et pyruvate) n’étant pas totalement interrompu.

I.2.2. Cerveau

Le cerveau humain a une masse égale à environ 2% de la masse corporelle totale mais il consomme respectivement 20% et 25% de la consommation totale en oxygène et en glucose. D’autre part cet organe n’a pas la capacité de stocker de l’oxygène et les réserves en glycogène sont faibles. Il est donc dépendent des apports sanguins et a besoin d’une perfusion en rapport avec ses besoins. Ainsi, le débit sanguin cérébral global (DSC) est égal à environ 15% du débit cardiaque (soit en valeur absolue et au repos environ 50ml/100g et minute).

Une diminution du DSC a des conséquences fonctionnelles voire lésionnelles. Ainsi lorsque la perfusion devient inférieure au seuil fonctionnel, l’amplitude de l’activité électrique cérébrale corticale spontanée diminue et/ou cette activité se ralentit. Lorsque le DSC décroît davantage, l’activité électrique spontanée disparaît. Enfin, lorsque la perfusion atteint le seuil lésionnel, des lésions d’infarcissement s’installent. Le seuil lésionnel dépend du temps pendant lequel la diminution de débit est appliquée. Le tissu cérébral dont la perfusion se situe entre le seuil fonctionnel et le seuil lésionnel correspond à la <<pénombre ischémique>>. Il peut soit récupérer si la circulation est rétablie soit évoluer vers la nécrose si l’ischémie persiste ou si la demande métabolique excède les apports en nutriments.

Ces considérations démontrent l’importance quantitative et qualitative du DSC. L’adéquation entre la perfusion sanguin et le métabolisme cérébral est donc essentielle surtout lorsque l’homéostasie est perturbée ou lorsqu’il existe une demande métabolique (activation neuronale). Avant d’aborder les phénomènes de régulation, les caractéristiques anatomiques

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et histologiques de la circulation cérébrale seront abordées car elles contribuent aux particularités fonctionnelles de cette circulation locale.

I.2.2.1. Les facteurs régulant le DSC

La concentration dans l’espace interstitiel dans ions H+, K+, Ca2+, de l’adénosine et l’osmolarité sont vasoactifs. La réponse des capillaires aux modifications des gaz du sang est le principal facteur du contrôle intrinsèque. Toute modification du débit sanguin provoque des modifications pressions partielles en O2 et en CO2 du sang des capillaires, veinules et veines.