I. Le virus Zika et son cycle
I.5. Physiopathologie
Des éléments du mécanisme d’action du ZIKV sur les cellules du système nerveux, ont été
découverts grâce à des études réalisées in vitro sur des cellules souches neurales progénitrices
humaines (hNPC), qui sont les cellules précurseurs des neurones ou des cellules gliales.
Les cellules souches neurales peuvent être infectés par le ZIKVin vitro car le virus présente un
fort tropisme pour ces cellules. Une étude a mis en évidence l’infection des cellules souches
neuralespar le ZIKV suite à l’exposition in vitro de trois types cellulaires humains au virus:
- les cellules souches neurales progénitrices (hNPC)
- les cellules souchespluripotentes induites
- les neurones immatures
Figure 16 :Pourcentage d’infection des plusieurs cellules du système nerveux à ZIKV
in vitro (60)
Les cellules souches neurales progénitrices humaines (hNPCs), essentielles au développement
du cortex cérébral du fœtus et qui se différencient en neurones, sont la cible cellulaire
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préférentielle du ZIKV. Après trois jours d’exposition au virus, 90% des cellules neurales ont
été infectées par le ZIKV et près d'un tiers ont été détruites, comme l’illustre le pourcentage
d’infection des cellules en figure 16. Les autres types cellulaires ont été très peu infectés par le
virus. Les neurones matures sont les moins sensibles au ZIKV (60).
Le virus Zika est donc un virus fortement neurotrope qui cible particulièrement les hNPCs mais
aussi, dans une moindre mesure, les neurones à tous les stades de maturité.
Par ailleurs, à partir d’un modèle de culture cellulaire, le ZIKV a été responsable de lésions des
cellules souches neurales progénitrices, comme montré en figure 17.
En effet, le virus a infecté les hNPCs et a causé une dérégulation du cycle de division cellulaire
et a empêchant ainsi la division normale des hNPCs en neurones. En conséquence, une
diminution de la croissance et de la viabilité des cellules a été induite, ce qui a entrainé la mort
cellulaire de la plupart des hNPCs. Quant aux cellules survivantes, elles ont subi une
modification de l’expression des gènes contrôlant la division cellulaire, ce qui fait qu’elles ne
sont plus capables de se diviser efficacement en nouvelles cellules car leur rôle a été détourné
pour permettre la multiplication de particules de ZIKV (61).
L’action du virus pourrait être directe par l’infection des neurones ou des cellules gliales par le
virus ou indirecte par l’apparition d’un phénomène inflammatoire causé par l’infection. Les
mécanismes d’action du virus sont actuellement étudiés.
Ainsi, l’infection virale peut ainsi perturber l’embryogénèse cérébrale et provoquer une
microcéphalie et d’autres anomalies neurologiques (60).
Figure 17 : Infection des cellules neurales progénitrices par le ZIKV (60)
De plus, d’autres recherches ont d’ailleurs démontré que le ZIKV impacte le cerveau adulte.
L’exposition au ZIKV affecterait la neurogenèse adulte en infectant les cellules neurales
adultes, selon une étude réalisée sur un modèle animal de souris adultes (62).
Les souris ont été inoculées par des anticorps anti-ZIKV et ont ensuite été infectées par le virus
par voie sanguine, pour reproduire au mieux la transmission vectorielle. Le tropisme du virus
pour les hNPCs a été mis en évidence grâce à un marquage des particules virales du ZIKV. Les
résultats ont permis d’observer que le ZIKV infecte de façon préférentielle les deux zones du
cerveau adulte impliquées dans la neurogenèse, le gyrus denté de l’hippocampe et la zone
sous-ventriculaire, qui contiennent les cellules souches neurales progénitrices.
Selon les observations, l’infection à ZIKV des cellules du système nerveux est associée à lune
apoptose cellulaire et à une réduction de la prolifération des hNPCs.
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Toutefois, les effets sanitaires potentiels à long terme de l’infection à ZIKV sur les zones
impliquées dans la neurogenèse du cerveau adulte restent inconnus. Ils doivent être évalués
pour que les conséquences possibles d’une infection à ZIKV sur la neurocognition de l’homme
soient identifiées (62).
D’autre part, les mécanismes moléculaires liés à l’infection à ZIKV ont été étudiés.
L’étude s’est intéressée à la voie de signalisation Akt-mTOR, une des voies essentielles au
développement du cerveau et agissant sur la régulation de l'autophagie.
L'infection des cellules souches neurales fœtales humaines inhibe la voie de signalisation
Akt-mTOR, comme le montre la figure 18. L’inactivation de cette voie cause une dérégulation
cellulaire conduisant à une neurogenèse défectueuse et à une activation anormale de
l'autophagie. La différenciation des cellules souches neurales en cellules matures du cerveau
(neurones et cellules gliales), est donc fortement réduite (63). Ainsi, ce défaut de
développement neuronal pourrait expliquer le sous-développement du cerveau des enfants
atteints de microcéphalie.
Figure 18 :Mécanismes moléculaires de la pathogénicité du ZIKV sur la
neurogenèse (63)
Suite à l’étude in vitro des protéines du ZIKV sur des cellules souches humaines prélevées au
cours du 2
èmetrimestre de grossesse, 2 protéines, NS4A et NS4B, seraient impliquées dans
l’inactivation de la voie de signalisation Akt-mTOR. Cette inactivation empêche la formation
normale des neurones.
Des modèles expérimentaux sont à l’étude pour poursuivre les investigations sur les
mécanismes d’action du ZIKV et pour mieux définir l’implication de ces protéines.
Ces résultats mettent en évidence que le ZIKV infecte les cellules souches neurales
progénitrices avec un rendement élevé et que cela provoque une diminution de la population
cellulaire des hNPCs. Des recherches supplémentaires s’avèrent nécessaires pour apporter des
réponses aux nombreuses questions qui persistent sur l’infection à ZIKV (comment le virus
entre dans le cerveau humain…).
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Dans le document
POUR LE DIPLOME D'ETAT DE DOCTEUR EN PHARMACIE Présentée et soutenue publiquement
(Page 32-35)