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II. B IODEGRADATION

II.4 Perturbation de la biodégradation : causes et conséquences

Dans certaines circonstances, l'efficacité d'un système à boues activées peut diminuer brutalement voire même être nulle lorsque des composés toxiques sont présents dans l'effluent à traiter. Une fois dans le bioréacteur, ces substances inhibitrices ont un effet délétère sur l'activité biologique. Différentes causes d'inhibitions peuvent être rencontrées : la toxicité due aux métaux lourds,

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l'empoisonnement par des composés organiques particuliers (phénols, détergents, antibiotiques…) ou encore la présence d'oxydants forts. Les métaux lourds, même à faibles concentrations sont toxiques pour l'activité biologique (Juliastuti et al., 2003). Les sels non dissous, les oxydes et les métaux élémentaires sont quant à eux rarement toxiques.

La présence d'un composé inhibiteur peut interférer de différentes manières sur le bon fonctionnement du traitement biologique :

 inhibition de l'activité : la biomasse épuratrice fonctionne toujours mais à un rendement amoindri;

 arrêt total de l'activité microbienne : la biomasse meurt ou devient métaboliquement inactive. L'activité biologique peut dans le second cas éventuellement reprendre à condition que les composés toxiques soient éliminés du bioréacteur;

 toxicité spécifique : l'activité biologique globale n'est pas affectée, seule la dégradation d'un substrat ou d'une famille de substrat est inhibée.

Dans le dernier cas d'une toxicité spécifique, plusieurs effets des substances toxiques sur le processus de biodégradation sont recensés. Parmi les plus courants, la littérature rapporte : l'inhibition de leur propre dégradation et l'inhibition de la biodégradation des autres composés (Kong et al., 1994) L'effet des inhibiteurs sur l'activité biologique dépend, entre autres, de la nature et de la concentration des composés inhibiteurs et des conditions environnementales telles que le pH, la température ou encore la salinité.

II.4.2 Inhibition spécifique – Cas des hydrocarbures

Si de trop fortes concentrations en hydrocarbures alimentent le bassin biologique, cela peut créer une inhibition de la biodégradation par manque de nutriments ou des effets toxiques exercés notamment par les hydrocarbures volatils (Leahy and Colwell, 1990).

L'étude réalisée par Lotfabad and Gray (2002) sur les cinétiques de biodégradation d'HAP dans des sols pollués s'est particulièrement intéressée au phénanthrène et au pyrène. Les résultats indiquent des taux de dégradation maximum d'environ 140 mg.kg-1 de sol et par jour. De plus, la dégradation du phénanthrène débutait dès le premier jour et atteignait son taux maximal en une journée alors que pour le pyrène, une phase initiale de latence d'environ 5 jours était observée avant qu'un taux moyen de dégradation de 14,8 ± 3,6 mg.l-1.j-1 ne soit obtenu. Une hypothèse expliquant ces résultats serait que le phénanthrène (ainsi que le fluorène et le chrysène) agissent comme des inhibiteurs à la dégradation du pyrène. Des résultats similaires avaient été observés par Heitkamp et al. en 1988, qui évoquaient une inhibition de la dégradation du pyrène par les autres HAP et, à l'inverse, une dégradation du benzo(a)pyrène (BaP) accélérée par la présence d'autres HAP. Cependant, une autre

Chapitre 1 : Etude bibliographique

39 étude réalisée sur des sédiments de rivières contaminés a conduit à des observations différentes puisque le pyrène était minéralisé à la même vitesse que les autres HAP (Molina et al., 1999).

D'autres auteurs font référence à des cas d'inhibitions. En effet, Stringfellow et al. (1995), après avoir relevé un taux d'oxydation spécifique du naphtalène par Pseudomonas Stutzeri et Pseudomonas

Saccharophilia de 1,4 et 2,4 mg O2.min-1.g-1 de cellule respectivement, ont remarqué que la présence de naphtalène faisait chuter le taux de dégradation du phénanthrène de 100 à 80% (une action similaire du fluorène a également été reportée). Cependant, il semblerait que le naphtalène n'agisse pas comme un inhibiteur à la dégradation du phénanthrène puisqu'une oxydation simultanée des deux molécules a été observée. Par contre, de manière générale, la dégradation du phénanthrène serait bel et bien inhibée par la présence d'autres HAP (jusqu'à 55% de diminution sur le taux de dégradation), qui agissent comme des inhibiteurs compétitifs.

II.4.3 Limites de la biodégradation face aux pics de polluants

La biodégradation est un traitement efficace mais ses performances peuvent facilement être perturbées lorsque des paramètres opératoires fluctuent et notamment lorsque des variations de charges entrantes ont lieu. Assez peu d'études s'intéressent à l'influence d'une variation de charge sur l'activité microbienne.

Du fait de leur croissance lente, les microorganismes n'ont pas assez de temps pour adapter leurs métabolismes aux rapides variations de charges des eaux usées. Par exemple, le taux de croissance spécifique maximal9 reporté pour des bactéries hétérotrophes sur des eaux usées urbaines est de

4 - 8 j-1 à 20°C (Henze et al., 2006). Plusieurs études se sont intéressées à ce phénomène. Lee et al. (2002) ont observés que les rendements d'élimination de la DCO étaient sérieusement réduits lorsque les charges organiques entrantes étaient augmentées : sur un système à boues activées classiques, les taux d'élimination de le DCO passent de 93% à 62% lorsque la concentration en DCO est multipliée par deux (de 2 à 4 kg DCO.m-3.j-1).

Par ailleurs, des travaux ont investigués l'effet d'eaux usées brutalement chargées en colorants sur le comportement d'un système à boues activées (bassin aéré couplé à un décanteur) et tout particulièrement sur sa stabilité (Alinsafi et al., 2006). Leurs résultats suggèrent qu'une partie du colorant est adsorbée sur les boues dans le bassin aéré puis désorbée dans le décanteur. Une seconde expérience consistant à faire varier la nature du colorant (à concentration constante) sur un court laps de temps a permis de mettre en évidence l'existence d'un choc sur la biomasse avec développement de bactéries filamenteuses et diminution de la concentration en matières sèches puis un retour à la normale en quelques jours. Ainsi, la biomasse est largement affectée par les différents polluants du fait de leur toxicité et n'a pas le temps de s'adapter à leur nature chimique entre chaque

9 Le taux de croissance de la biomasse est égal au rapport de la production de biomasse sur la quantité de biomasse (en

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changement. La biomasse reste cependant active pour l'élimination du polluant initial au fil des expérimentations.

III. L'ADSORPTION

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