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CHAPITRE 4 : CONSTATS ET PROBLÉMATIQUE

4.3 L A PROBLÉMATIQUE

4.3.1 La pertinence du projet

Ce projet permettra donc de combler les lacunes des connaissances quant à la réaction sociale en ligne à la suite d’attentats terroristes de référence islamiste, car bien que certains se soient attardés à la détailler (Innes, Roberts, Preece et Rogers, 2016), le portrait dressé demeure incomplet. D’un point de vue scientifique, la pertinence de ce projet réside dans le fait que l’espace des réseaux sociaux dans un contexte post-attentat demeure peu étudié sur le plan de la réaction sociale, ce qui résulte en une méconnaissance des interactions sociales qui s’y déroulent. Ce projet apporte d’ailleurs une contribution à la littérature existante puisqu’il effectue notamment un parallèle entre les réactions sociales observées en ligne et hors-ligne dans un contexte post-attentat, mettant ainsi en lumière une portion de la réaction sociale dont la manifestation en ligne n’a pas encore été étudiée. De plus, ce projet s’attarde à la dynamique de la cyber-haine par le biais d’une évaluation empirique de son évolution, permettant donc d’approfondir les connaissances quant au déploiement de cette réaction haineuse, ce qui n’a pas été fait dans les études recensées. Bref, considérant la proportion considérable de nos interactions sociales qui se déroulent sur les réseaux sociaux (Klein, 2012 ; Kumar, Novak et Tomkins, 2010 ;

Shirky, 2011), il semble impératif de développer davantage de connaissances sur la dimension numérique de la réaction sociale pour couvrir l’ensemble des environnements où cette dernière se déploie. Les données issues des réseaux sociaux offrent effectivement une nouvelle perspective quant à l’étude des impacts du terrorisme et mettent en lumière une facette méconnue de la réaction sociale (Innes, Roberts, Preece et Rogers, 2016) pouvant dorénavant être colligée et observée en temps réel (Williams et Burnap, 2016). Il s’avère donc pertinent de recourir aux données issues de ces plateformes, car ces dernières procurent un angle unique pour attester de la réaction sociale se manifestant à la suite d’attentats terroristes.

D’un point de vue sociétal, il importe de s’attarder aux diverses réactions sociales qui se manifestent en ligne, car certaines nuisent à la cohésion sociale alors que d’autres pourraient permettre d’atténuer les tensions observées dans un contexte post-attentat. D’un côté, il est en effet particulièrement important d’examiner le développement de la haine sur les réseaux sociaux afin d’être en mesure de mieux prévenir ses impacts et de préserver la cohésion sociale pouvant être fragilisée par la cyber-haine (Awan, 2016 ; Burnap et Williams, 2016 ; Craig, 2002 ; Williams et Burnap, 2016). La cohésion sociale s’avère être une condition essentielle au bon fonctionnement d’une société, car à l’opposé, les tensions sociales contribuent notamment à l’augmentation du sentiment d’insécurité (Awan et Zempi, 2016 ; Citron, 2014). D’ailleurs, ce climat de méfiance est accentué dans un contexte post-attentat, car les relations sociales sont déjà fragilisées par les évènements (Kaplan, 2006). D’un autre côté, considérant que les appels au calme et à la tolérance ainsi que l’impression de solidarité collective pourraient contribuer à l’atténuation des tensions sociales découlant des attentats (Beyers et Jones, 2007 ; Kaplan, 2006 ; King et Sutton, 2013), il apparaît tout aussi pertinent de s’intéresser à ces réactions prosociales et à leurs manifestations en ligne. Une meilleure connaissance de ces dernières pourrait donc mener à des mesures adéquates pour limiter les effets néfastes des attaques terroristes. Dans un autre ordre d’idées, vu l’influence des réseaux sociaux dans la vie quotidienne, ces plateformes méritent d’autant plus d’être étudiées. En effet, les propos de personnalités influentes publiés sur les réseaux sociaux sont souvent repris par les médias traditionnels et intégrés aux bulletins de nouvelles (Klein, 2012). Cette manœuvre expose au grand public le contenu partagé sur ces plateformes et révèle la grande portée qu’ont les réseaux sociaux sur la société, d’où la nécessité de s’attarder à la réaction sociale qui s’y déploie. D’ailleurs, le contenu médiatique influencerait l’opinion que se forge le public sur un sujet donné (de Vreese, 2004 ; Stieglitz, Bunker,

Mirbabaie et Ehnis, 2017), tandis que les propos des figures politiques ou culturelles, fréquemment émis sur les réseaux sociaux, peuvent aussi avoir un impact considérable sur l’opinion publique (Disha, Cavendish et King, 2011). En somme, ces multiples implications sociétales révèlent la nécessité de s’attarder à la portion virtuelle de la réaction sociale, et ce, particulièrement dans un contexte post-attentat.

D’un point de vue pratique, les conclusions de ce projet en ce qui concerne l’évolution de la cyber-haine pourraient représenter un atout pour les autorités. En effet, considérant les éventuels bienfaits des discours prosociaux (Beyers et Jones, 2007 ; Kaplan, 2006 ; King et Sutton, 2013) et l’influence du contenu médiatique sur les perceptions subjectives des internautes (Stieglitz, Bunker, Mirbabaie et Ehnis, 2017), il apparaît pertinent que les autorités interviennent au moment opportun en véhiculant des discours visant à apaiser la population. En effet, la littérature tend à indiquer que les discours prosociaux pourraient atténuer les représailles et la vague de haine observée à la fois en ligne et hors-ligne (Beyers et Jones, 2007 ; Fimreite, Lango, Laegreid et Rykkja, 2013 ; Kaplan, 2006 ; King et Sutton, 2013 ; Sinkkonen, 2016). Une meilleure compréhension de la cyber-haine et de son évolution pourrait alors indiquer aux autorités le contenu approprié à diffuser afin d’apaiser les tensions sociales ainsi que le moment auquel le diffuser. Ces savoirs pourraient effectivement être profitables aux organisations gouvernementales et aux autorités policières, qui s’efforcent d’informer le public et de maintenir l’ordre lors de situations de crise (Eriksson et Olsson, 2016 ; Procter, Crump, Karstedt, Voss et Cantijoch, 2013). Quant à la cyber-haine extrême, soit les propos empreints de violence, une connaissance plus juste de sa prévalence et de son évolution pourrait indiquer aux autorités l’importance conséquente à accorder à ce phénomène dans un contexte post-attentat, afin d’adresser efficacement ces comportements pouvant s’avérer criminels dans certains pays (Shaw, 2011). En effet, afin que les autorités policières puissent utiliser efficacement Twitter, il importe qu’elles aient une compréhension éclairée de la façon dont les individus utilisent les réseaux sociaux (Procter, Crump, Karstedt, Voss et Cantijoch, 2013). En somme, les conclusions de ce projet pourraient dont s’avérer bénéfiques aux niveaux scientifique, sociétal et pratique.

Chapitre 5 :

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