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La perception de l’IAE par les différents acteurs économiques

ANNEXE 4 : ENTRETIEN AVEC ERIC TRAORE, EXPERT-COMPTABLE ET COMMISSAIRE AUX COMPTES

C. La perception de l’IAE par les différents acteurs économiques

L’IAE est considérée de manière très différente selon les points de vue. En effet, ce secteur se situe à mi-chemin entre l’économie et le social, ce qui lui vaut quelques vives critiques. Depuis sa création, l’élan solidaire a évolué en un dispositif dont le but est de prendre en charge et d’encadrer les chômeurs. Les structures d’IAE cherchent à la fois à réussir du point du vue économique et du point de vue social.

Du côté des organismes sociaux, on considère que ces structures rentrent bien dans le cadre de l’ESS, qui cherche à l’origine à proposer une alternative au système économique en place. Ce dernier ne pouvant plus satisfaire tout le monde depuis les Trente Glorieuses, l’ESS a en quelque sorte été légitimée. Selon ses acteurs, l’IAE porte toujours les idéaux de cette mouvance, et ce malgré la création des « Entreprises d’Insertion », dont le but est clairement de se rapprocher du fonctionnement des entreprises classiques. Selon Marie COGNARD, que j’ai eu la chance d’interroger sur le sujet et occupant le poste de chargée de mission IAE à La Metro (voir annexe 6), les EI sont parfois critiquées sur ce point par les différents acteurs sociaux. C’est notamment le cas puisque celles-ci imposent des prérequis à l’entrée comparables à ceux instaurés par les entreprises classiques, et que les EI imposent un rythme de travail comparable à celui d’emplois classiques. Malgré tout, l’objectif reste l’insertion des salariés en leur donnant l’opportunité de faire leurs preuves et d’acquérir des compétences.

Les structures telles que les ETTI et les AI fonctionnent pour leur part différemment des ACI et des EI, ayant plus un rôle d’intermédiaire que d’employeur réel. Certes, ces structures s’appuient sur le

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système économique classique et ne permettent en rien de s’en détacher, mais l’aspect social y est primordial, et un suivi individuel est mis en place pour son public tout à fait particulier. Ces structures rentreraient donc bien dans le cadre de l’ESS.

Concernant le marché du travail, on accuse la concurrence déloyale que représentent ces structures bénéficiant notamment d’aides importantes de l’Etat. De plus, ces acteurs souffrent d’une mauvaise image. Ils sont en effet perçus comme des utopistes par nombre d’entreprises et entrepreneurs n’ayant jamais franchi le pas pour travailler avec eux. De plus, et comme on peut s’en douter, l’absence ou le manque d’expérience ainsi qu’un passé non conforme aux normes dictées par le marché du travail font peur aux acteurs économiques. Ces derniers ont d’ailleurs à leur portée une masse de français sans emploi mais moins éloignés du marché du travail, car ayant de l’expérience et étant pour beaucoup diplômés, voire surdiplômés.

On notera également que leurs partenaires économiques ne le sont pas par solidarité, c’est rarement le cas pour des entreprises classiques d’ailleurs. Il existe quelques cas où l’entreprise s’engage par convictions à travailler avec ce type de public, mais malheureusement c’est souvent plutôt pour répondre aux critères d’un appel d’offre exigeant un certain pourcentage d’employés en insertion, ou pour atteindre les seuil fixés par la politique de RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) de la direction de l’entreprise.

Toutefois, nombre de partenaires économiques des SIAE ont vu leur discours évoluer depuis la mise en place de leurs partenariats. Celles-ci sont alors décrites comme « efficaces » par certains témoins, et beaucoup reconnaissent leur utilité sociale. Ce qui plaît notamment à ces entreprises partenaires, c’est l’implantation locale des SIAE, et donc leur proximité géographique, ainsi que leur souci d’encadrement de leurs salariés en insertion. Annie Thomas, l’ancienne secrétaire nationale de la CFDT, a déclaré en 2009 à l’égard des acteurs de l’IAE :

« On a affaire à de grands professionnels et des défricheurs d’activités nouvelles. (…) Lorsqu’on les connait, les représentations tombent et cet aspect novateur apparaît. »

Il n’en reste pas moins que le secteur de l’IAE souffre toujours d’un manque de communication, empêchant les forts préjugés sur son professionnalisme, son utilité et la fiabilité de ses salariés de s’estomper.

L’ambiguïté de la place de l’IAE dans le paysage socio-économique français n’est pas nouvelle, mais elle persiste bel et bien. Les questionnements sont toujours là et risquent de s’amplifier dans les années à venir, et pour éviter des dérives de ces structures en expansion et définir leur caractéristiques plus précisément, le cadre légal a évolué jusqu’aux dernières lois de 2014. Ces lois offrent un cadre

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plus strict qu’auparavant, notamment en ce qui concerne le financement par l’Etat de ces structures, mais également concernant l’emploi des salariés en insertion.

Un besoin de contrôle accru se dégage de ces évolutions légales, de la place ambigüe des SIAE ainsi que de l’amplification des échauffourées entre ces structures et des entreprises classiques. Avant de nous pencher sur cette problématique de contrôle, il nous faut mieux comprendre le fonctionnement de ce secteur. C’est ce que nous allons nous atteler à faire dans le chapitre suivant, en commençant par détailler les différents types de structures et leurs caractéristiques, puis en décortiquant le fonctionnement de ce secteur grâce à l’étude de ses autres principaux acteurs.

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CHAPITRE 3L’ORGANISATION DU SECTEUR DE L’IAE

Pour faire simple, ce secteur est principalement composé de ses acteurs principaux, à savoir les SIAE, mais également d’acteurs intermédiaires qui servent à défendre leurs intérêts, à donner des directives au niveau national comme local, à les financer ou encore à créer une forme de cohésion entre elles. Nous allons d’abord nous concentrer sur les quatre principales formes de SIAE, puis nous nous intéresserons aux autres acteurs qui interagissent dans ce secteur.

I. L

ES STRUCTURES DE L

'IAE

Comme énoncé précédemment, il existe quatre principaux types de SIAE, aussi appelés intermédiaires d’insertion, à savoir les Ateliers et Chantiers d’Insertion (ACI), les Entreprises d’Insertion (EI), les Associations Intermédiaires (AI) et les Entreprise de Travail Temporaire d’Insertion (ETTI). Toutes ont en commun les caractéristiques que nous avons développées dans le chapitre 1 de cette partie, mais leur fonctionnement diverge car leurs acteurs appréhendent différemment l’insertion. Nous allons ici les présenter dans l’ordre de la moins courante à la plus courante.

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