4. Applications
4.2. Pente maximale asymptotique
4.2.2. Pente maximale asymptotique d’un fibré inversible hermitien
µmax(π∗(L ⊗π∗(M))⊗n) =µ�max(π∗(L⊗n)) +nµ(M� ).
Par passage à la limite on obtientµ�πmax(L ⊗π∗M) =µ(M� ) +µ�πmax(L).
4.2.2. Pente maximale asymptotique d’un fibré inversible hermitien quelconque. – La sur-additivité deµ�πmaxobtenue dans le sous-paragraphe précédent permet d’étendre le domaine de définition de la fonctionµ�πmax(L)à l’espace de tous les fibrés inversibles hermitiens sur X. Dans le reste de la section, le symbole Θ désigne l’espace des fibrés inversibles hermitiensL surX tels queLK soit gros.
Définition 4.2.4. – Soient
L
et L deux fibrés inversibles hermitiens sur X. On suppose que L ∈ Θ. Il existe alors un entier n0(L
,L) > 0 tel queL
K ⊗LK⊗n soit gros quel que soit n� n0(L
,L)(cf. [33, 2.2.24]). On définit, pour tout entier n�n0(L
,L),An(
L
,L) =µ�πmax(L
⊗L⊗n)−nµ�πmax(L).Lemme 4.2.5. – SoientE etF deux
O
X-modules localement libres de rang fini. Pour tout homomorphismef :EK →FK, il existe un élément non-nula∈O
K tel queaf se relève en un homomorphisme deE versF. Si de plusf est injectif, l’homomorphisme relevé peut être choisi injectif.Démonstration. – Soitη: SpecK→Spec
O
K le point générique. C’est un morphisme plat. SoitX :=XK. On désigne parp:X →SpecK et q:X →X les morphismes canoniques, qui s’insèrent dans un carré cartésien:X q ��
p
��
�
X
π
��SpecK η ��Spec
O
K.D’après [26] III, 1.4.15, pour tout
O
X-module quasi-cohérent G, l’homomorphisme canonique η∗π∗G → p∗q∗G est un isomorphisme. Par conséquent, on a un isomorphisme canonique H0(X,GK) ∼= H0(X,G)K. Si E et F sont deuxO
X -modules localement libres de rang fini, alorsHomOX(E,F)s’identifie à l’espace des sections deE∨⊗F au-dessus deX. D’autre part,HomOX(EK,FK)∼=H0(X,EK∨⊗FK) =H0(X,E∨⊗F)K.
94 CHAPITRE 4. APPLICATIONS
Par conséquent, pour tout homomorphismef :EK →FK, il existe un élément non-nul a ∈
O
K tel que af se relève en un homomorphisme deE →F, autrement dit, l’image de l’homomorphisme composéE a ��E ��q∗EK q∗f
��q∗FK
est dansF. Cet homomorphisme est injectif lorsquef est injectif.
Soit
E
un fibré vectoriel normé sur X. On dit qu’une section s∈ H0(X,E
)est effective si maxσ:K→C�s�σ,sup � 1. On dit que s est strictement effective si l’inégalité est stricte, c’est-à-dire max
σ:K→C�s�σ,sup <1. Toute section s ∈H0(X,
E
) correspond à un homomorphisme ϕ :O
X →E
. Si on munitO
X des métriques hermitiennes habituelles, alorss est effective si et seulement si maxσ:K→C sup
x∈Xσ(C)�ϕx�σ �1; elle est strictement effective si et seulement si max
σ:K→C sup
x∈Xσ(C)�ϕx�σ<1.
Soient
E
1 etE
2 deux fibrés vectoriels normés sur X, et f :E
1,K →E
2,K un homomorphisme. On a démontré dans le lemme 4.2.5 qu’il existe a∈O
K tel queaf se relève en un homomorphisme deE
1 versE
2. Par conséquent, pour tout sauf un nombre fini de place finie p, l’homomorphisme fCp se relève en un homomorphisme deE
1,�Op versE
2,�Op. Pour tout p∈Σf, on désigne parhp(f) la borne inférieure des valeurs −log|b|p, où b parcourt l’ensemble des éléments dans Cp tels que bfCp se relève en un homomorphisme deE
1,�Op vers
E
2,�Op. L’argument ci-dessus montre que hp<+∞et quehp(f)�0pour toute sauf un nombre fini de places finiesp. Sivest une place infinie de K qui correspond à un plongement σ: K →C, on désigne par hv(f)ouhσ(f)le nombre réel sup
x∈Xσ(C)
log�fx�σ. Le nombrehv(f)(v∈Σf∪Σ∞) est appelé lahauteur localedef env. On définit lahauteur def comme le nombre
(74) h(f) = 1
[K:Q]
�
v∈Σ
nvhv(f)∈[−∞,+∞[.
On observe que, lorsque X = Spec
O
K, la définition de hv(f) et de h(f) coïncide avec celle à la fin de §2.1.1.Lemme 4.2.6. – Soient
E
1etE
2 deux fibrés vectoriels normés surX, etf :E
1,K→E
2,K un homomorphisme. Soitϕ:H0(XK,E
1,K)→H0(XK,E
2,K)l’application K-linéaire induite par f. Alors on a hv(ϕ)�hv(f)quel que soit v∈Σf∪Σ∞, où on a considéréH0(XK,L
i,K) comme la fibre générique deπ∗(E
i) (i= 1,2). Si de plusϕ est injectif, alors(75) �µmax(π∗(
E
1))��µmax(π∗(E
2)) +h(f).Démonstration. – Soientp∈Σf et
ϕp:H0(XCp,
E
1,Cp)→H0(XCp,E
2,Cp)MÉMOIRES DE LA SMF 120
4.2. PENTE MAXIMALE ASYMPTOTIQUE 95
l’homomorphisme induit parϕ. Par définition, π∗(
E
1)⊗�O
p (resp.π∗(E
2)⊗�O
p) est le disque fermé de rayon 1 dans H0(XCp,E
1,Cp) (resp. H0(XCp,E
2,Cp)). Si b ∈ Cp est tel que bfCp se relève en un homomorphisme deE
1,�Op versE
2,�Op, alors bϕp se relève en un homomorphisme de π∗(E
1)⊗�O
p vers π∗(E
2)⊗�O
p. Donc �bϕp�p �1, d’où �ϕp�p �|b|−1p . On obtient donc log�ϕp�p �hp(f). Supposons maintenant que σ:K→Cest un plongement. Pour tout éléments∈H0(Xσ(C),E
1,σ), on a�ϕσ(s)�σ,sup= sup
x∈Xσ(C)�f(s)x��ehσ(f)�s�σ,sup, qui implique quelog�ϕσ�σ�hσ(f). Par conséquent, on ah(ϕ)�h(f).
Si f est injectif, l’homomorphisme ϕ est injectif. L’inégalité (75) résulte donc de l’inégalité de pentes (22).
Remarque 4.2.7. – On garde les notations du lemme 4.2.6.
(1) Si l’homomorphismef lui-même se relève en un homomorphisme de
E
1 versE
2, alorshp(f)�0quel que soitp∈Σf. Donc on obtienth(f)� 1 [K:Q]
�
σ:K→C
hσ(f).
(2) SiL est un autre fibré inversible hermitien, et sig:
E
1,K⊗LK→E
2,K⊗LKest l’homomorphisme induit parf, alors on ahv(g) =hv(f)pour toutev∈Σf∪Σ∞. (3) SiL
�1 etL
�2 sont deux fibrés inversibles hermitiens et si f� :L
�1,K →L
�2,K est un homomorphisme, alorshv(f ⊗f�)�hv(f) +hv(f�)pour toute v∈Σf∪Σ∞. En particulier, siE
1 etE
2 sont de rang 1, alors pour tout entiern�1 et toute v ∈Σf ∪Σ∞, on a hv(f⊗n)�nhv(f). Dans ce cas-là, si on applique le lemme 4.2.6 à f⊗n :E
⊗1,Kn →E
⊗2,Kn, on obtient que, la hauteur de l’homomorphisme ϕn :H0(XK,E
⊗1,Kn)→H0(XK,E
⊗2,Kn)induit parf⊗n est majorée parnh(f).(4) Soit φ une fonction continue sur X(C) qui est invariante par la conjugaison complexe. Soit
O
X(φ)le fibré inversible hermitien surX dont le fibré inversible sous-jacent est le fibré trivialO
X et tel que la norme de la section unitaire1en x∈X(C)este−φ(x). Alors la hauteur locale enσ:K→Cde l’homomorphisme d’identitéO
X →O
X(φ)est égale à la valeur maximale de la restriction de −φ àXσ(C). En particulier, siφ=aest une fonction constante, alors la hauteur de l’homomorphisme d’identitéO
X →O
X(a)est−a.(5) Si
E
i (i= 1,2,3) sont des fibrés inversibles hermitiens surX, f :E
1,K →E
2,Ketg:
E
2,K→E
3,Ksont des homomorphismes, alorshv(gf)�hv(g) +hv(f)pour toutev∈Σf ∪Σ∞.(6) Soient
E
un fibré vectoriel normé sur X et g :O
X →E
un homomorphisme, alorsg correspond à une section effective (resp. strictement effective) deE
si et seulement sihσ(g)�0(resp.hσ(g)<0) pour toutσ:K→C.(7) Pour tout fibré vectoriel normé
E
surX, on alogλ1(π∗(
E
)) = inf{a∈R|E
⊗O
X(a)admet une section effective non-nulle}.96 CHAPITRE 4. APPLICATIONS
Si l’homomorphismef est injectif, et se relève en un homomorphisme de
E
1 versE
2, et sihσ(f)�aquel que soitσ:K→C, alorsλ1(π∗(E
1))�e−aλ1(π∗(E
2)).Proposition 4.2.8. – Soit
L
un fibré inversible hermitien surX.1) pour tout L ∈ Θ, la suite (An(
L
,L))n�n0(L,L) est croissante et converge vers une limite dansR;2) siM est un fibré inversible hermitien sur Spec
O
K,L ∈Θ, alors An(L
,L ⊗π∗M) =An(L
,L)quel que soit n�n0(
L
,L);3) si
L
K est gros, alors�
µπmax(
L
) = infL∈Θ lim
n→+∞An(
L
,L);4) pour tout fibré inversible hermitienM sur Spec
O
K, on a�
µ(M) = inf
L∈Θ lim
n→+∞An(π∗(M),L).
Démonstration. – 1) D’après la proposition 4.2.2, pour tout entiern�n0(
L
,L),�
µπmax(
L
⊗L⊗(n+1))�µ�πmax(L
⊗L⊗n) +µ�πmax(L).DoncAn+1(
L
,L)�An(L
,L).Comme LK est gros, une de ses puissances tensorielles s’écrit comme le produit tensoriel d’un fibré inversible ample et d’un fibré inversible effectif. Donc il existe un entier m�1 et un homomorphisme injectif ϕde
L
K vers LK⊗m (cf. proposition 1.4.3 1)). Pour tout entier n � n0(L
,L), soit ϕn :L
K ⊗LK⊗n → LK⊗(m+n) l’homomorphisme induit par ϕ, qui est également injectif. D’après l’inégalité (75), pour tout entieru�1, on a�
µmax(π∗(
L
⊗u⊗L⊗un))��µmax(π∗(L⊗u(n+m))) +h(ϕ⊗nu).D’après la remarque 4.2.7 (3), on a h(ϕ⊗nu) � uh(ϕn) � uh(ϕ). Par passage à la limite, on obtient
�
µπmax(
L
⊗L⊗n)��µπmax(L⊗(m+n)) +h(ϕ).D’après la proposition 4.2.3 1), on a
An(
L
,L)�mµ�πmax(L) +h(ϕ).Par conséquent, la suite (An(
L
,L))n�n0(L,L) est bornée supérieurement, donc converge dansR.2) En effet, pour toutn�n0(
L
,L), on a, d’après la proposition 4.2.3 2),An(
L
,L⊗π∗(M)) =�µπmax(L
⊗L⊗n⊗π∗(M⊗n))−nµ�πmax(L⊗π∗(M)) =An(L
,L).3) D’après la proposition 4.2.3 1), on aAn(
L
,L
) =�µπmax(L
), donc�
µπmax(
L
)� infL∈Θ
n→+∞lim An(
L
,L).MÉMOIRES DE LA SMF 120
4.2. PENTE MAXIMALE ASYMPTOTIQUE 97
D’autre part, pour toutL ∈Θ, d’après la proposition 4.2.2, on a l’estimation An(
L
,L)�µ�πmax(L
) +�µπmax(L⊗n)−n�µπmax(L) =µ�πmax(L
).Par conséquent, lim
n→+∞An(
L
,L)�µ�πmax(L
).4) En effet, pour toutL ∈Θ, on a, d’après la proposition 4.2.3 2), An(π∗(M),L) =µ�πmax(π∗(M)⊗L⊗n)−nµ�πmax(L) =µ(M� ).
Définition 4.2.9. – Soit
L
un fibré inversible hermitien sur X. On appelle pente maximale asymptotiquedeL
relativement àπla valeur�
µπmax(
L
) := infL∈Θ
n→+∞lim An(
L
,L)∈[−∞,+∞[.La proposition 4.2.8 3) montre que cette fonction généralise la fonction de la pente maximale asymptotique initialement définie surΘ.
La proposition suivante montre que la fonction �µπmax prolongée préserve les propriétés de la fonction initiale.
Proposition 4.2.10. – Soient
L
,L
1 etL
2 trois fibrés inversibles hermitiens sur X, etM un fibré inversible hermitien surSpecO
K. On a1) µ�πmax(
L
1⊗L
2)��µπmax(L
1) +µ�πmax(L
2);2) µ�πmax(
L
⊗n) =nµ�πmax(L
)pour tout entier n�1;3) µ�πmax(
L
⊗π∗(M)) =µ�πmax(L
) +�µ(M);4) sif :
L
1,K→L
2,K est un homomorphisme non-nul, alors (76) �µπmax(L
1)��µπmax(L
2) +h(f).Démonstration. – Pour tout fibré inversible hermitienL surX tel queLK soit gros, et tout entiermsuffisamment grand, on a, d’après les propositions 4.2.2 et 4.2.8 et le lemme 4.2.6, que
A2m(
L
1⊗L
2,L)�Am(L
1,L) +Am(L
2,L), Amn(L
⊗n,L) =nAm(L
,L),Am(
L
⊗π∗(M),L) =Am(L
,L) +�µ(M), Am(L
1,L)�Am(L
2,L) +h(f).Par passage à la limite, on obtient les (in)égalités annoncées.
98 CHAPITRE 4. APPLICATIONS
4.2.3. Pente maximale asymptotique d’un fibré vectoriel hermitien. – La