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Pathologies suivies au Pôle VAD à Garches (1997-2012)

Myopathies Neuropathies Autres pathologies respiratoires Atteinte médullaire Myasthénies Séquelles Poliomyélite autres atteintes neurologiques Malformation du rachis Maladie neuromusculaire non étiqueté

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1.3 Sources des données

Dans le milieu hospitalier, les sources des données sont souvent hétérogènes ou de structure mal définie. Cela s’explique en partie par la disparité des logiciels de gestion de ces données en fonction des services (par exemple : READOSS pour la réanimation, SANDRA pour les examens biologiques…). Et ces données ne sont pas systématiquement destinées à la recherche. Cette diversité entraîne une difficulté à traiter et à analyser ces données. De plus, cela fait appel à des ressources humaines importantes (attaché de recherche clinique, Data manager, biostatisticien..), afin de les standardiser et ainsi les rendre exploitables.

1.3.1 Données structurées disponibles

1.3.1.1 Registre des patients neuromusculaires ventilés

En 1997, grâce au soutien initial de l’Association Française des Myopathies (AFM), un registre multicentrique de patients atteints de maladies neuromusculaires ventilées a été organisé et coordonné par le Pr Jean Claude Raphael. Ce travail prospectif a été le résultat d’un bilan systématique comportant des informations sur les indications de la ventilation à domicile, des éléments cliniques, gazométriques, physiologiques et sur les conditions de vie (cf. le questionnaire en annexe). L’objectif de ce registre était de fournir des informations sur les pratiques cliniques et de les comparer. A partir de ces pratiques cliniques, différents types de recherches pouvaient être réalisés :

- Des études physiopathologiques, avec une meilleure compréhension des mécanismes de l’insuffisance respiratoire dans les maladies neuromusculaires.

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- Des évaluations technologiques, avec des recherches sur les techniques et les modes optimaux de ventilation.

- Des évaluations sociales, avec l’étude de l’environnement des patients et leurs structures d’accueil.

- Des évaluations économiques, avec l’étude du coût réel des différents traitements.

- Une description de l’histoire naturelle des maladies neuromusculaires, permettant d’envisager la réalisation d’essais thérapeutiques.

Ce registre a inclus tous les patients atteints de maladie neuromusculaire avec une durée de ventilation prescrite supérieure ou égale à 6 heures par jour. Le diagnostic de la pathologie neuromusculaire avait été posé en répondant aux critères cliniques, histologiques, immuno-histochimiques ou moléculaires, en référence à l’ouvrage d’Emery (Emery 1998), tout en décrivant l’atteinte respiratoire par groupe de pathologie neuromusculaire (Dystrophinopathies, dystrophie myotonique de Steinert, dystrophie fascio-scapulo-humérale…), ceci par souci d’homogénéité. Les patients avec des atteintes médullaires ou des séquelles de poliomyélite ont été inclus pour pouvoir les comparer à des populations de patients neuromusculaires où la morbidité pouvait être multiple et le handicap évolutif.

L’évaluation du handicap respiratoire a été réalisée à distance d’un épisode aigu de décompensation (deux mois minimum). Ce bilan comprenait :

- Un examen clinique avec une recherche systématique des signes cliniques évocateurs d’une insuffisance respiratoire (avec la présence de céphalées matinales, d’une somnolence diurne, de troubles du sommeil, d’une dyspnée aggravée par le décubitus évoquant la possibilité d’une paralysie diaphragmatique), souvent méconnus et discrets dans ces pathologies.

- Des examens paracliniques :

o avec une mesure de la capacité vitale exprimée en ml / kg, en position assise et couchée, avec un spiromètre, exprimée en norme BTPS. La valeur absolue des CV mesurées (ml) a été recueillie ainsi que l’âge et la taille, ce qui a permis de recalculer de façon

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automatique la CV théorique, de façon à harmoniser ces normes parfois différentes selon les laboratoires.

On note la CV théorique (Quanjer, Tammeling et al. 1993) :

𝐶𝑉 𝐻𝑜𝑚𝑚𝑒 = ((6.10 ∗ 𝑡𝑎𝑖𝑙𝑙𝑒) − (0.028 ∗ 𝑎𝑔𝑒)) − 4.65 𝐶𝑉 𝐹𝑒𝑚𝑚𝑒 = ((4.66 ∗ 𝑡𝑎𝑖𝑙𝑙𝑒) − (0.026 ∗ 𝑎𝑔𝑒)) − 3.28

A partir de la CV théorique, nous pouvons calculer une CV en % afin de normaliser les résultats.

On note :

𝐶𝑉 𝑒𝑛 % = 𝐶𝑉 𝑚𝑒𝑠𝑢𝑟é𝑒 𝐶𝑉 𝑡ℎé𝑟𝑜𝑟𝑖𝑞𝑢𝑒

o avec une mesure des gaz du sang artériel en respiration libre (FiO2 0.21), au repos et à distance (deux heures au moins) de la ventilation mécanique si celle-ci a déjà été mise en place. Pour mesurer l’éfficacité de la ventilation, les gaz du sang ont également été mesurés sous ventilateur (deux heures au moins après son début). Le prélèvement a été immédiatement transféré au laboratoire afin d’éviter des artéfacts propres à cette mesure.

1.3.1.2 Limites du registre et des données disponibles.

Cette étude prospective multicentrique a nécessité la collaboration active des centres qui y participaient, en fonctionnant sur la base du volontariat. Sur les 10 centres initiaux, seuls 7 centres ont continué de collaborer. Un monitoring régulier et rigoureux est nécessaire pour assurer une qualité de recueil et une gestion rigoureuse des données. Toutes les études multicentriques se heurtent aux difficultés des variations inter-centre, et au sein d’un même centre, des variations inter-observateur. L’une des principales limites fut la mise en place des procédures de qualité, en vérifiant que les données recueillies étaient bien conformes aux données effectivement mesurées selon les conditions prévues par le protocole.

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En connaissance de cette difficulté, nous avons choisi d’étudier uniquement les patients traités à Garches afin de réaliser ce monitoring.

Pour compléter le registre, nous avons extrait et compilé plusieurs types de données, de différentes sources et sous différents formats.

1.3.2 Données semi-structurées

Ces données sont représentées ou stockées sans format prédéfini, elles sont typiquement constituées de texte brut, de tableau, masque de saisie... Cette absence de format entrane des irrégularités et des ambiguïtés qui sont incompréhensibles pour des logiciels d’analyse tels que SAS ou R (les deux logiciels les plus utilisés). L’enjeu majeur est de les structurer sous forme de base de données afin d’en tirer des informations analysables.

1.3.2.1 Extraction des données sous Réadoss

Readoss est le logiciel de stockage des dossiers de chaque patient ayant eu un suivi dans le service de réanimation (où se trouve le pôle de ventilation à domicile). Ces dossiers contiennent l’historique clinique du patient, des données sociodémographiques, les examens biologiques, les épreuves fonctionnelles respiratoires.

Il existe trois types de dossier sous Réadoss :

 l’initiation de la ventilation à domicile (VAD) : un masque de saisie, qui peut être facilement extrait vers Excel et transposé afin de faciliter sa lecture. Il faut au préalable avoir défini les variables. Parmis ces variables, certaines sont non structurées c’est-à-dire en format texte, ce sont

généralement des questions ouvertes (par exemple : historique du patient). Cette variable peut être extraite et traitée séparément en la découpant (utilisation d’un ou plusieurs séparateurs tels que « ; »

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ou « » ou «.» ; l’option sous SAS dans une étape DATA pour indiquer un séparateur est DLM= ou DLMSTR= pour plusieurs séparateurs , ou encore, la procédure sous Excel est la suivante :

sélectionner/Données/convertir/séparateurs) et en sélectionnant l’information utile. Il n’existe qu’un seul fichier par patient.

 un bilan systématique de suivi des patients ventilés : également sous forme de masque de saisie, pour lequel il faut suivre le même type de procédure que le fichier ci-dessus. Toutefois, les données sont répétées donc doivent être conservées dans une table différente.

 un bilan texte, souvent un bilan d’urgence : ce fichier est exclusivement sous forme de texte, toutefois, il suit une logique avec en première partie le motif d’hospitalisation, l’historique du patient, l’anamnèse et les examens respiratoires, neurologiques, de sommeil et autres examens complémentaires. Ce fichier peut être reconverti en masque de saisie afin d’en extraire les données. Au préalable, il faut créer un masque de saisie sous Excel ou Access avec les mêmes libellés que le fichier brut puis copier/coller le fichier pour chaque patient dans le masque de saisie afin de convertir les données en table structurée avec une variable par colonne.

1.3.2.2 Extraction des données sous SANDRA

SANDRA héberge les examens biologiques. Pour l’état respiratoire des patients, nous nous intéressons au gaz du sang. Nous pouvons extraire directement un fichier texte et le convertir grâce à des séparateurs en base de données sous Excel. Transférer la base Excel sous SAS et sélectionner les variables qui nous intéressent.

1.3.2.3 Extraction des données des EFR

Les examens fonctionnels respiratoires sont sous forme de masque de saisies, ils peuvent être reconvertis en base Excel en transposant chaque fichier d’une lecture horizontale vers une lecture verticale, c’est-à-dire les variables en colonne et les observations en ligne.

56 1.3.2.4 Les dossiers papiers

Chaque patient à un dossier papier aux archives de l’hôpital. Ces dossiers n’ont été demandés que pour les patients n’apparaissant pas dans les dossiers informatiques ou avec des données manquantes disponibles exclusivement sous papier.

1.4 Critères de jugement principal et secondaires

Le critère de jugement principal de ce travail est la survie des patients neuromusculaires ventilés. La date de décès a été recueillie auprès des associations pour insuffisants respiratoires (technicien, médecin), du médecin traitant, de l’entourage familial et parfois auprès des mairies de naissance. Les critères d’études secondaires sont l’analyse des changements de techniques et l’observance du traitement, notamment chez les patients atteints d’une dystrophie myotonique de type 1, où l’observance rapportée par la littérature est médiocre (Gamez, Calzada et al. 2000, M.-A. Hamon 2007).

1.5 Considérations éthiques

Le principe même d’une ventilation à domicile nécessite un consentement éclairé du patient et de sa famille ainsi que sa participation active. Le formulaire de consentement éclairé figure en annexe. Cette étude, qui ne comporte pas d’intervention thérapeutique innovante, a été soumise à l’avis d’un comité consultatif de protection des personnes (CCPPRB) et fait l’objet d’une déclaration à la CNIL. L’investigateur principal s’est porté garant de la confidentialité des données informatiques. Le nom (figurant sur les questionnaires) n’a pas été informatisé, mais remplacé par le numéro d’observation. Ce registre a été mis à jour en 2013 et a de nouveau fait l’objet d’une demande auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). Il a de plus fait l’objet d’un dépôt de dossier auprès du Comité consultatif sur le traitement de l’information en matière de recherche dans le domaine de la santé (CCTIRS), qui a abouti à un avis favorable le 9 avril 2015 (annexe 3). Le matériel de ventilation a été fourni par les associations pour insuffisants respiratoires. Le bilan demandé est identique à ce qui est demandé par la Caisse Nationale d’Assurance Maladie.

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1.6 Les différentes populations d’études.

Tableau 3 : Caractéristiques des patients des trois études abordées. Les variables sont définies en annexes.

Registre des patients Neuromusculaires VAD

Cohorte des patients DM1 sous VNI

Cohorte des patients DMD sous VM

Effectifs 255 128 150

Dates d’inclusion 01/01/1997 01/01/1997 01/01/1997

01/01/2010 01/01/2012 01/01/2014

Date s de point 01/01/2015 01/01/2015 01/01/2015

Homme/Femme (sexe ratio) 182/73 (2,49) 78/50 (1,56) 150/0 (ND) Age du diagnostic (moyenne ± écart type) en année DM 30.5 ± 16.4 5.6 ± 3.9 Age mise sous ventilation (moyenne ± écart type) en année 41.0 ± 16.0 45.4 ± 11.0 20.8 ± 4.5 IMC — no. (%) < 18.5 94 (37) 8 (6) 96 (64) 18,5 – 24.9 82 (32) 41 (32) 34 (23) 25 – 29.9 43 (17) 42 (33) 17 (11) ≥ 30.0 36 (14) 37 (29) 3 (2) Statut fonctionnel Marche 116 (45) 115 (90) -

Fauteuil roulant manuel 33 (13) 13 (10) -

Fauteuil roulant éléctrique 97 (38) - 144 (96)

Alité 9 (4) - 6 (4)

Statut respiratoire initial

Gaz du sang PaCO2 — mmHgH 51.3 ± 24.5 46.7 ± 6.6 45.5 ± 9.5 PaO2 — mmHgH 77.1 ± 33.3 72.2 ± 16.2 87.9 ± 22.0 pH 7.4 ± 0.0 7.4 ± 0.0 7.4 ± 0.3 CO2 total— mmol/l 30.7 ± 6.1 28.7 ± 3.0 28.9 ± 7.2 Bicarbonate— mmol/l DM 27.1 ± 2.6 DM

Saturation artérielle en oxygene — no. (%) DM 92.9 ± 7.9 DM Capacité vitale (% de la théorique)

CV assise 35.9 ± 20.3 58.5 ± 17.7 18.6 ± 7.8 CV couchée 32.4 ± 19.4 50.5 ± 19.5 17.3 ± 8.1 Symptômes d’insuffisance respiratoire

Dyspnée de repos 47 (18) 9 (7) 33 (22) Dyspnée d’effort 157 (62) 90 (66) 48 (32) Céphalées matinales 80 (31) 39 (28) 25 (17) Orthopnée 83 (33) 42 (31) 55 (37) Troubles du sommeil 104 (41) 76 (56) 24 (16) Somnolence diurne 113 (44) 98 (72) 15 (10) Désaturation nocturne 121 (47) 82 (64) 33 (22)

Autres pathologies associées

Cardiaque (oui*) — no. (%) 98 (38) 42 (33) 128 (85)

FEVG stade A DM DM 64 (43)

FEVG stade B DM DM 25 (17)

FEVG stade C DM DM 33 (22)

FEVG stade D DM DM 6 (4)

58 Ventilation mécanique à domicile

Décision

Programmée 189 (74) 120 (94) 98 (65) Durant une décompensation respiratoire 66 (26) 8 (6) 52 (35) Technique de ventilation Non invasive 217 (85) 128 (100) 119 (79) Invasive 38 (15) - 31 (21) Mode — no. (%) Barometrique 150 (59) 99 (77) 4 (3) Volumetrique 105 (41) 29 (23) 146 (97) Heure de ventilation prescrite — (heure/jour)

< 8 196 (77) 105 (82) 77 (51)

10 - 16 48 (19) 22 (17) 43 (29)

> 16 11 (4) 1 (1) 30 (20) DM : données manquantes, VNI : ventilation non invasive, VM : ventilation mecanique, % pourcentage.

No. : Effectifs, IMC, Indice de masse corporelle, < 18.5 = maigreur, 18.5 - 25 = corpulence normale, 25 - 30 = surpoids, ≥ 30 =Obèse; FEVG = Fraction d’éjection ventriculaire gauche : Stade A= LVEF ≥ 55%, stade B: 45% ≤ FEVG ≤ 54 %, stade C: 30 %< FVG ≤ 44%, stade D: FEVG ≤30.

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3. Méthodes statistiques utilisées : application à l’analyse de survie chez les patients neuromusculaires

Il est possible d’estimer la survie à partir de données d’observation d’une cohorte de patients neuromusculaires ventilés. En pratique, cela implique de connaître la date de début de suivi (dans notre cas la mise en route de la ventilation) et la date de fin de suivi. La date de fin de suivi peut être égale à la date de décès du patient : nous connaissons alors la survie de celui-ci. Quand le patient n’est pas décédé, la date de fin peut correspondre à la date de fin de l’étude ou à la date à laquelle le patient est perdu de vue dans cette étude d’observation, il est alors considéré comme censuré à droite, et nous ne connaissons pas son statut vital exact à la fin de l’étude.

Dans chaque analyse le nom de la cohorte est indiqué :

- L’étude a débuté le 01/01/1997 lors de la constitution du registre.

- La date de point pour chaque étude est le 01/01/2015.

- Le critère de jugement est le décès, toutes causes confondues (mise à part dans l’analyse de l’observance ou le critère de jugement est l’arrêt de la ventilation).

- L’ensemble des analyses statistiques a été réalisé à l’aide du logiciel SAS® 93 Software pour Windows (Copyright © 2012, SAS Institute Inc, Cary, NC, USA) et la version du logiciel R 2.2.0.

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2.1 Survie des patients neuromusculaires ventilés

Quand on s’intéresse à la survie des patients neuromusculaires ventilés, on s’intéresse à l’apparition d’un évènement, « le décès », au fil du temps, en fonction des caractéristiques (cliniques, paracliniques) observables chez chaque individu.

Pour chaque individu, il est nécessaire de connaitre le temps de suivi et la date de décès sous l’hypothèse qu’il s’est produit.

La fonction de survie est notée S(t) où t est le temps. La variable aléatoire T représente la durée de vie d’un patient. T est toujours supérieur ou égal à 0. S(t) est défini comme la probabilité qu’un individu survive au-delà du temps t, c’est-à-dire qu’il décède après t.

On note :

𝑆(𝑡) = 𝑃[𝑇 > 𝑡]

La fonction de survie S(T) est une fonction monotone décroissante avec S(t) = 1 pour t = 0 et S(t) = 0 pour t = ∞, c’est-à-dire que la probabilité de décès augmente avec le temps.

2.1.1 Approche non-paramétrique : la méthode de Kaplan - Meier

Les méthodes non paramétriques (c’est-à-dire qu’aucune hypothèse n’est faite sur la distribution des temps de survie) sont raisonnées sur des périodes de temps ordonnées. Elles permettent d’estimer la survie et de tenir compte des données censurées à droite. Deux méthodes sont utilisées :

- la méthode actuarielle (Böhmer 1912), basée sur des périodes de durée fixée c’est-à-dire déterminées à priori (une semaine, un mois ou une année par exemple), donc la force de mortalité est supposée constante dans les intervalles, ce qui la rend moins exigeante en calcul mais également moins précise.

- la méthode de Kaplan – Meier (Meier 1958), basée sur des périodes de durée aléatoire en fonction de la survenue de l’évènement, c’est-à-dire que les intervalles de temps débutent à l’instant ti où survient un décès et se termine juste avant le décès suivant. Dans cette méthode, il

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n’y a pas d’hypothèse formulée concernant la force de mortalité dans les intervalles étudiés. La méthode de Kaplan - Meier est la plus utilisée dans notre champ d’application et reste la plus précise car la fonction de survie est ré-estimée à chaque évènement.

Par conséquent, c’est la méthode de Kaplan que nous utiliserons et que nous décrirons en détails.

En pratique, on construit un tableau ordonné par temps de participation individuel croissant :

ti est le temps de participation

ni est le nombre de patients exposés au risque de décéder en ti.

di est le nombre de décès constaté en ti.

ci est égal au nombre de censurés à droite entre [ti et ti+1[

ni+1 = ni – mi – ci (la censure est toujours postérieure à un évènement)

La probabilité conditionnelle de survie en ti+1 sachant que l’on est en vie à ti est estimé par:

𝑆 ( 𝑡𝑖 + 1| 𝑡𝑖) = (𝑛𝑖– 𝑑𝑖) 𝑛𝑖

On obtient la probabilité de survie cumulée en ti ce qui correspond au produit des probabilités conditionnelles de survie :

S (ti) = ∏ S (tj + 1| tj)

𝑖

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Table 4 : Estimation de la probabilité de survie selon la méthode de Kaplan-Meier (étude sur la survie des patients atteints d’une Dystrophie musculaire de Duchennes après 12 ans de suivi). t n Di ci s(t) S(ti+t|ti) 0.00 150 0 0 1,000 1 0.23 147 1 2 0,993 0,993 1.33 138 2 7 0,979 0,986 2.47 130 4 4 0,950 0,969 3.25 124 1 5 0,943 0,992 4.91 115 2 7 0,927 0,983 5.67 99 4 12 0,892 0,960 6.63 86 3 10 0,862 0,965 7.61 77 1 8 0,851 0,987 8.84 66 4 7 0,803 0,939 9.95 57 5 4 0,740 0,912 10.73 49 3 5 0,700 0,939 11.49 46 2 1 0,671 0,957 12.08 43 1 2 0,655 0,977

S(ti) est une variable aléatoire, il est donc nécessaire de calculer la variance de la fonction de survie, c’est-à-dire des taux de survie successifs selon la méthode de Greenwood pour définir l’intervalle de confiance à 95 % de S (ti) (Rothman 1978).

𝑉𝑎𝑟[𝑆(𝑡)] ≈ [𝑆(𝑡)]² ∑ 𝑚𝑖 𝑛𝑖(𝑛𝑖 − 𝑚𝑖) 𝑡𝑖<𝑡 Soit 𝐼𝐶1−𝛼 = 𝑆𝑖∗ (1 ± 𝜀𝛼𝑚1 𝑛1(𝑛1 − 𝑚1)+ 𝑚2 𝑛2(𝑛2 − 𝑚2)+ ⋯ + 𝑚𝑖 𝑛𝑖(𝑛𝑖 − 𝑚𝑖)

La méthode de Kaplan–Meier permet également de tracer des courbes de survie. En abscisse est placée ti et en ordonnée S (ti).

La représentation graphique de la fonction de survie est une courbe en escalier (temps en abscisse et taux de survie cumulatif en ordonnée) où chaque marche représente un évènement. Il convient de compléter le graphique par des barres représentant les censures et l’intervalle de confiance. Il est également souhaitable d’indiquer le nombre de patients à risque au fil du temps.

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Figure 11 : Courbe de Kaplan-Meier avec ses intervalles de confiance pour la survie des patients atteints de Dystrophie musculaire de Duchenne (n=150).

Deux courbes de survie peuvent être comparées de manière brute par la méthode du Log – Rank (Fleming TR 1991). Il s’agit d’une extension du test du Chi 2 à chaque temps t. On teste l’hypothèse dans laquelle il y a une égalité des probabilités de décès dans les populations comparées à chaque temps de décès. Le test est basé sur la comparaison des décès observés sur les décès théoriques attendus, dans chaque population.

Par exemple, on cherche à comparer les groupes A et B pour savoir s’ils ont des taux de décès différents en fonction du temps.

64 Au temps de décès tk les données s’écrivent :

Groupe Evènements Non évènements après ti Total (à risque)

A mAi nAi - mAi nAi B mBi nBi – mBi nBi Total mi nAi - mi ni On note : 𝐸𝐵 =𝑚𝑖∗ 𝑛𝐵𝑖 𝑛𝑖 Alors : 𝑋² = [𝑂𝐵 − 𝐸𝐵] 𝑚𝑖 (𝑛(𝑛𝑖− 𝑚𝑖) 𝑖− 1) ∗𝑛𝐴𝑖𝑛∗ 𝑛𝐵𝑖 𝑖 ² 𝐾 𝑖=1

Figure 12 : Courbes de Kaplan-Meier pour la survie des patients atteints de Dystrophie musculaire de Duchenne avec troubles de la déglutition Vs sans troubles de la déglutition : Logrank=0.02 (n=150).

Lorsque l’on veut tester l’effet d’une variable quantitative sur la survie, il est possible de la découper en classes ordonnées (par exemple en quartile) (Alberti, Timsit et al. 2005).

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Figure 13 : Distribution de l’âge des patients atteints de maladie neuromusculaire sous ventilation à domicile (n=255).

Toutefois, il est impossible de prendre en compte conjointement plusieurs facteurs. Pour la survie des patients atteints de maladie neuromusculaire, avec parfois un caractère multi-systémique (DM1), on peut faire l’hypothèse que le risque de décès est influencé par plusieurs facteurs simultanément, alors, il est plus adapté de se tourner vers des modèles de régression plus souples.

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2.1.2 Approche semi-paramétrique : Modèle de Cox

2.1.2.1 Théorie

Le modèle de Cox est le modèle d’analyse multivariée le plus utilisé dans la recherche biomédicale dans le cadre d’analyse de survie chez les patients atteints d’une maladie neuromusculaire (Chevret 2001, Timsit, Alberti et al. 2005). Il permet d’estimer, à partir de données d’observation, l’effet d’une variable (dans notre exemple, la technique de ventilation) sur la survie, après ajustement sur les autres variables explicatives de décès.

Ce modèle possède trois caractéristiques (Cox 1972):

- il est semi-paramétrique, c’est-à-dire que la fonction de survie n’est pas modélisée, seul l’effet d’une variable sur la survie est modélisé,

- il s’agit d’un modèle à risque multiplicatif, c’est-à-dire que la présence d’un caractère (avoir une atteinte cardiaque chez le patient souffrant d’une maladie de Steinert par exemple) multiplie le risque de décès par rapport au risque basal (ne pas être avoir d’atteinte cardiaque) selon un coefficient de régression estimé (risque relatif ou hazard ratio),

- ce risque relatif doit être constant au cours du temps. Il s’agit là de l’hypothèse de validité du modèle de Cox qui est un modèle à risque proportionnel constant.

Le risque de décès pour un individu i à un instant t est spécifié dans le modèle de Cox par l’équation suivante :

λ(t | Xi) = λ0(t) ∗ 𝑒𝛽∗𝑋𝑖

λ(t | Xi) : C’est le risque de décès instantané en fonction des covariables

λ0(t) : C’est le risque de décès de base, il correspond au risque instantané de décès lorsque toutes les co-variables sont nulles.

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Xi : C’est l’ensemble des covariables du patient i (données observées : âge, sexe, pathologies associées, modalité de mise en route de la ventilation…). Il peut s’agir de variables aléatoires continues (l’âge, la capacité vitale, ...), dichotomiques (sexe, techniques, dyspnée…) ou discrètes à plusieurs classes.

β : C’est la matrice des coefficients, estimés par la régression de Cox associés à chaque variable.

Le modèle de Cox est semi paramétrique : on ne cherche pas à estimer le risque de base λ0(t) qui est le même pour tous les individus à un instant donné. Prenons deux individus i1 et i2 qui n’ont pas la méthode de ventilation initiale (i1 est sous ventilation invasive [VI] et i2 est sous ventilation non-invasive [VNI]), on code la variable trachéotomie=1 si VI=1 et trachéotomie=0 si VNI=1.

On a obtient alors, à chaque temps t :

λ(t | 𝑖1) λ(t | 𝑖2)=

λ0(t) ∗ 𝑒𝛽1∗𝑋1+⋯+𝛽𝑘−1∗𝑋𝑘−1+ 𝜷𝒌∗𝟏+⋯+ 𝛽𝑘+𝑛∗𝑋𝑛+1

λ0(t) ∗ 𝑒𝛽1∗𝑋1+⋯+𝛽𝑘−1∗𝑋𝑘−1+ 𝜷𝒌∗𝟎+⋯+ 𝛽𝑘+𝑛∗𝑋𝑛+1 = 𝑒𝜷𝒌

Le rapport est indépendant du temps, c’est-à-dire que i1 a un risque instantané de mourir « 𝑒𝜷𝒌 » fois celui de l'individu i2.

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