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Les pathologies chroniques et les pathologies associées à une perte à long-terme de la fonction musculaire

ETAT DE LA LITTERATURE

IV. Potentiel thérapeutique lié à l’utilisation des

IV.5 Les pathologies chroniques et les pathologies associées à une perte à long-terme de la fonction musculaire

IV.5.1 La cachexie associée au cancer

La cachexie associée au cancer est un syndrome multifactoriel paranéoplasique menant à une réduction significative de la masse corporelle, due principalement à la perte du tissu adipeux et du muscle squelettique (Fearon et al., 2012). Depuis les premières études menées en 1991 par Chance (Chance et al., 1991a) et Stallion (Stallion et al., 1991), de nombreux travaux ont examiné les effets des β2-agonistes sur des modèles animaux de cachexie cancéreuse. Toutes ces études ont montré que les β2-agonistes (cimatérol, clenbutérol, formotérol et salmétérol) atténuaient et/ou inversaient la perte de masse musculaire (Hyltander et al., 1993; Stallion et al., 1993; Costelli et al., 1995a; Stallion et al., 1995; Carbo et al., 1997; Busquets et al., 2004; Fuster et al., 2007), avec une amélioration de la fonction musculaire et des capacités d’exercice (Busquets et al., 2011). Cependant, ces effets peuvent varier en fonction de la molécule administrée, le rétablissement le plus important étant observé avec le clenbutérol, comparé au salbutamol et au salmétérol

(Carbo et al., 1997). Le clenbutérol peut également exercer un effet bénéfique en association avec d’autres agents anti-cancéreux comme la roxithromycine et le naproxène (Piffar et al., 2003; Kenley et al., 2008). De multiples mécanismes ont été identifiés comme pouvant contribuer à l’effet anti-cachectique des β2-agonistes dans le traitement de la cachexie associée au cancer : i) une diminution de la dégradation protéique dans le muscle squelettique (Stallion et al., 1991; Costelli et al., 1995a; Busquets et al., 2004) et une augmentation de la synthèse protéique (Stallion et al., 1995; Busquets et al., 2004), ii) une diminution des acides aminés comme source de production d’énergie par le muscle squelettique (Costelli et al., 1995b), iii) une réduction de l’apoptose du muscle squelettique (Busquets et al., 2004), iv) une régulation négative du contenu protéique en myostatine et de l’expression du récepteur à l’activine B (ActRIIB) (Busquets et al., 2012), en association avec une augmentation de l’expression de la follistatine (Busquets et al., 2012).

IV.5.2 L’insuffisance cardiaque chronique

La perte de masse musculaire est un facteur fréquent de co-morbidité chez les patients atteints d’insuffisance cardiaque et contribue à réduire la capacité d’exercice et la force musculaire (Fulster et al., 2013). Le traitement de patients atteints d’insuffisance cardiaque chronique avec des β2-agonistes (clenbutérol, salbutamol) a conduit à des résultats mitigés. Un traitement de 3 semaines au salbutamol augmente la force du muscle respiratoire chez des patients atteints d’insuffisance cardiaque chronique (Harrington et al., 2000), mais ne minimise pas les anomalies du quadriceps ni n’augmente la capacité d’exercice. A l’inverse, une autre étude a suggéré que l’administration de clenbutérol chez des patients menait à une augmentation de la masse maigre et une augmentation de la force maximale (Kamalakkannan et al., 2008). Cependant, l’endurance et la durée d’exercice diminuaient après l’administration de clenbutérol (Kamalakkannan et al., 2008). Ainsi, l’utilisation de β2-agonistes dans le traitement de l’insuffisance cardiaque doit être considérée avec précaution, en raison des bénéfices limités sur le muscle squelettique et des effets négatifs reportés sur le muscle cardiaque (voir ci-dessus III.5.).

IV.5.3 L’accident vasculaire cérébral

L’hémiparésie, la séquelle la plus répandue après un accident vasculaire cérébral, est associée à une atrophie des muscles squelettiques hémiparétiques (English et al., 2010).

L’administration de clenbutérol a une activité neuroprotectrice contre l’ischémie cérébrale (Culmsee et al., 1999; Culmsee et al., 2004). Paradoxalement, l’inhibition de la voie de signalisation induite par les récepteurs β2-adrénergiques (en utilisant des antagonistes aux récepteurs β2-adrénergiques ou des souris KO aux récepteurs β2-adrénergiques) réduit également les atteintes cérébrales post-ischémiques (Han et al., 2009). Ainsi, l’utilisation de β2-agonistes comme stratégie neuroprotectrice n’est pas complètement résolue et reste matière à débat. A notre connaissance, les effets de l’administration de β2-agonistes sur l’atrophie du muscle squelettique hémiparétique n’ont, à ce jour, jamais été documentés dans un modèle animal d’accident vasculaire cérébral.

IV.5.4 La bronchopneumopathie obstructive chronique

Des dysfonctionnements du muscle squelettique apparaissent souvent chez des patients atteints de bronchopneumopathie obstructive chronique (BPCO), affectant ainsi leur qualité de vie et risquant même d’augmenter leur mortalité (Marquis et al., 2002). L’utilisation des β2-agonistes pour le traitement de patients atteints de BPCO est très largement répandue. Tirer partie de cette thérapie pour augmenter la masse musculaire serait d’un grand intérêt clinique. Cependant, les données sur ce sujet restent limitées, et suggèrent que l’administration de β2-agonistes à des patients BPCO induit une meilleure tolérance à l’effort (D'Agostino et al., 2010). Les effets sur le muscle squelettique d’un traitement à long terme de β2-agonistes restent à déterminer chez des patients BPCO.

IV.5.5 Le sepsis

Le sepsis correspond à un état inflammatoire systémique causé par des infections sévères. Il est associé à une perte importante de masse musculaire. L’atrophie est compensée par l’administration de clenbutérol, avec une récupération complète de la masse du muscle gastrocnemius de rat cinq jours après inoculation d’endotoxine (Choo et al., 1989). Plusieurs tentatives ont été menées pour vérifier l’implication des β2-agonistes dans ces conditions de perte musculaire. Ainsi, l’administration d’IBMX, un inhibiteur des phosphodiestérases qui augmente la concentration en AMPc, réduit la dégradation protéique dans le muscle squelettique d’animaux ayant un sepsis, alors que le H89, un inhibiteur de PKA, bloque complètement l’effet antiprotéolytique de l’IBMX (Lira et al., 2007). Le sepsis peut également induire des dysfonctionnements au niveau du diaphragme, ce qui risquerait

d’entraîner des insuffisances respiratoires. La terbutaline limite ces effets délétères du sepsis sur le diaphragme chez le rat (Ito et al., 2006).

IV.5.6 La lésion musculaire liée à la température (brûlure, hyperthermie)

L’élévation de la température corporelle, observée dans de nombreuses pathologies (hyperthermie maligne et sepsis), augmente la protéolyse du muscle squelettique (Hall-Angeras et al., 1990; Luo et al., 2000; Ametller et al., 2011). L’addition de formotérol réduit significativement la dégradation protéique induite par l’hyperthermie sans affecter la synthèse protéique (Ametller et al., 2011). Cependant, la pertinence physiologique de cet effet anti-catabolique doit être considérée avec précautions car les β2-agonistes exercent un effet thermogénique (production de chaleur) (Mogilnicka et al., 1985; Cartana & Stock, 1995).

Les brûlures sévères induisent une réponse catabolique soutenue qui cause la perte à long terme de la force et de la masse musculaires (Hart et al., 2000). Dans un modèle animal de brûlure sévère, l’administration de clenbutérol est capable de restaurer la dépense d’énergie et d’améliorer le gain de poids corporel, la masse musculaire et le contenu protéique du muscle squelettique (Chance et al., 1991b; Martineau et al., 1993; Hollyoak et al., 1995).

Au regard de l’augmentation de la masse musculaire induite par les β2-agonistes, l’usage de ces derniers dans le traitement des pathologies associées à la perte de masse musculaire est d’un grand intérêt. D’une façon intéressante, les β2-agonistes peuvent également exercer un effet thérapeutique en modulant l’expression de gènes qui ne sont pas directement impliqués dans l’anabolisme du muscle squelettique. Compte tenu de l’effet des β2-agonistes sur la régulation de la masse musculaire, il est tout naturel de se questionner de leurs effets sur la performance chez des sujets sains.