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2.4 Tests de sensibilit´e pour la mise en place des simulations de r´ef´erence

2.4.1 Param´etrisation de Gent et McWilliams (1990)

La param´etrisation de Gent et McWilliams (1990) (ci-apr`es not´ee GM90) est la pa- ram´etrisation la plus couramment utilis´ee par les mod`eles oc´eaniques pour prendre en compte l’effet des tourbillons lorsque leur r´esolution horizontale est insuffisante pour r´esoudre les processus tourbillonnaires. En pratique, cette param´etrisation est largement utilis´ee par les mod`eles basse r´esolution, notamment les mod`eles climatiques tels que ceux de l’IPCC. En revanche, pour la classe de mod`eles « eddy-permitting », l’utilisation de cette param´etrisation n’est pas syst´ematique car ces mod`eles sont capables de r´esoudre une partie du spectre de la m´eso-´echelle. Selon le sujet de son ´etude, l’utilisateur peut donc choisir soit d’introduire la param´etrisation GM90 dans sa simulation, soit de lais- ser le mod`ele r´esoudre explicitement les processus tourbillonnaires, mˆeme si la variabilit´e m´eso-´echelle ne sera alors que partiellement r´esolue.

Comme la plupart des simulations globales de r´esolution 0,5˚ utilisent actuellement la param´etrisation GM90, la possibilit´e de l’appliquer ou non dans les simulations australes `

a 0,5˚ s’est pr´esent´ee. C’est donc l’effet de la param´etrisation GM90 sur la dynamique des simulations PERIANT05 que nous testons ici, et plus particuli`erement l’effet sur le transport de l’ACC et sur la cellule de circulation m´eridienne (MOC) qui, comme nous l’avons vu dans la partie I, sont largement influenc´es par la circulation tourbillonnaire.

La param´etrisation de GM90

La param´etrisation GM90 est fond´ee sur l’hypoth`ese selon laquelle les tourbillons de

m´eso-´echelle se d´eveloppent principalement `a partir d’un m´ecanisme d’instabilit´e barocline

(Robinson et McWilliams, 1974). A grande ´echelle, les tourbillons sont ainsi repr´esent´es par leur effet local sur l’´ecoulement moyen via le transfert d’´energie cin´etique et potentielle entre ´echelles r´esolues et ´echelles non r´esolues. Ainsi, dans le sch´ema de diffusion lat´erale

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Tab. 2.2 – Caract´eristiques du jeu de simulations permettant de tester la sensibilit´e du

mod`ele `a la param´etrisation GM90. ORCA05-G70.112 est une simulation DRAKKAR

globale de r´esolution 0,5˚ (Biastoch et al., 2008).

G´en´eralit´es

Version NEMO 3.1

Configuration PERIANT05

P´eriode 1980-2004

Initialisation

θ, S Climatologie de Levitus et al. (1998)

~

U ~0

Glace de mer ORCA05-G70.112 (1980)

OBC

θ, S, ~U ORCA05-G70.112

vitesse induite par les tourbillons telle que : ∂τ

∂t + (~U + ~U

)~∇τ = k∇2

ρτ (2.4)

o`u k est le coefficient de diffusion lat´erale, ρ la densit´e, t le temps, et ~U le vecteur vitesse

des composantes zonales et m´eridiennes (u,v). La vitesse ~U∗ est exprim´ee comme suit :

~ U∗ = κ ∂ ∂z  ∇ρ ∂zρ  (2.5)

o`u κ est le coefficient de Gent et McWilliams (1990) exprim´e en m2 s−1. La vitesse induite

par les tourbillons ~U∗est donc directement proportionnelle `a la pente des isopycnes. L’incli-

naison des isopycnes fournit en effet une ´energie potentielle disponible qui va ˆetre convertie par la param´etrisation en vitesse moyenne. La param´etrisation GM90 est ´egalement sou- vent appel´ee « diffusion des ´epaisseurs de couches » car elle tend `a r´eduire les ´epaisseurs des couches isopycnales par advection des traceurs le long des isopycnes. C’est par cet effet d’« applanissement » des surfaces isopycnales que la param´etrisation GM90 imite le rˆole des tourbillons de m´eso-´echelle sur la circulation oc´eanique.

Jeu de simulations

Afin de tester l’effet de la param´etrisation GM90 dans les simulations r´egionales aus- trales de r´esolution 0,5˚, deux simulations sont r´ealis´ees dans la configuration PERIANT05. Le tableau 2.2 r´esume les caract´eristiques de ces simulations. La simulation REF05 est

la simulation de contrˆole dans laquelle les tourbillons, dans la mesure de la r´esolution du

mod`ele, sont explicitement r´esolus. La simulation GM05 est la simulation de sensibilit´e

dans laquelle la param´etrisation GM90 est impl´ement´ee avec un coefficient κ = 1000 m2

Fig. 2.7 – Hauteur moyenne (1995-2004) de la surface de la mer (SSH) en m`etres pour (gauche) la simulation REF05 et (droite) la simulation GM05.

R´esultats

Hauteur de surface de mer (SSH)

La Figure 2.7 montre la moyenne de la SSH sur la p´eriode 1995-2004 pour les si- mulations REF05 et GM05. Dans la simulation REF05, la bande de latitude 45˚S-60˚S

pr´esente une importante variabilit´e spatiale `a petite ´echelle correspondant principalement

aux m´eandres des fronts de l’ACC. En revanche, dans la simulation GM05, cette varia- bilit´e m´eso-´echelle est beaucoup moins marqu´ee. Cette comparaison montre que la pa-

ram´etrisation GM90 a tendance `a lisser les petites structures car elle inhibe les tourbillons

de m´eso-´echelle.

Transport de l’ACC

La Figure 2.8 pr´esente l’´evolution du transport annuel au travers de deux sections de l’ACC : le Passage de Drake et le sud des Iles Kerguelen. Au niveau du Passage de Drake - habituellement pris comme section de r´ef´erence pour ´etudier le transport de l’ACC -, le transport moyen sur la p´eriode 1995-2004 est de 143 Sv pour REF05 et de 145 Sv

pour GM05. Le transport moyen de l’ACC, estim´e `a partir d’une combinaison de sections

hydrographiques, mesures de pression et courantom`etres, est ´evalu´e `a 134 Sv avec une

erreur de ±27 Sv (Whitworth et Peterson, 1985; Cunningham et al., 2003). La variabilit´e interannuelle du transport au Passage de Drake est de ±1,2 Sv pour REF05 et de ±0,7

Sv pour GM05. Les estimations issues des observations font quant `a elles ´etat d’une varia-

bilit´e interannuelle du transport au Passage de Drake plus forte (±11,2 Sv, Whitworth et Peterson (1985)). L’origine de cette diff´erence avec les observations peut provenir du fait que les sections hydrographiques ne prennent pas en compte les variations du transport du

contre-courant cˆotier antarctique, alors que celui-ci pourrait compenser les variations au

large. Par exemple, les r´eanalyses SODA montrent une variabilit´e interannuelle du trans- port au Passage de Drake de ±2,1 Sv (Yang et al., 2008).

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Fig. 2.8 – Evolution du transport annuel (en Sv) (a) au Passage de Drake et (b) au sud

des Kerguelen dans les simulations (bleu) REF05 et (vert) GM05.

Ainsi, dans les simulations REF05 et GM05, les valeurs du transport moyen et de sa va- riabilit´e interannuelle au niveau du Passage de Drake sont dans la fourchette d’estimation des observations et r´eanalyses. Toutefois, la simulation GM05 montre syst´ematiquement d’une part, un transport moyen plus intense et d’autre part, une variabilit´e interannuelle plus faible que la simulation REF05, et ce pour les deux sections pr´esent´ees dans la Fi- gure 2.8. La simulation REF05 semble donc mieux en accord avec les estimations fournies par les observations et r´eanalyses.

Cellule de circulation m´eridienne (MOC)

La circulation r´esiduelle est le r´esultat de la comp´etition entre circulation eul´erienne moyenne et circulation induite par les tourbillons (voir partie I). Au niveau de l’ACC, la circulation induite par les tourbillons compense seulement partiellement la circulation eul´erienne moyenne, induisant une circulation r´esiduelle non nulle. Dans le syst`eme de coordonn´ees isopycnales et en dehors des couches de surface, la circulation r´esiduelle peut ˆetre raisonnablement approch´ee par la cellule de circulation m´eridienne (MOC) (McIntosh et McDougall , 1996).

La Figure 2.9 pr´esente la MOC en coordonn´ees σ2 pour les simulations REF05 et

GM05. Dans REF05, la cellule de circulation « subpolaire » s’´etendant entre 35,5 kg m−3

et 36,8 kg m−3 jusqu’`a la latitude de 57˚S pr´esente une intensit´e d’environ +8 Sv. Bien

qu’un peu plus faible que la plupart des valeurs propos´ees par les estim´es observationnels (15-20 Sv, Karsten et al. (2002); Talley (2003)), cette intensit´e entre dans la fourchette de valeurs simul´ees par les mod`eles (8-18 Sv, Hallberg et Gnanadesikan (2006); Lenton et Matear (2007)). Dans GM05, la cellule subpolaire n’apparaˆıt plus, laissant place `a une circulation inverse de faible amplitude. Cette circulation r´esiduelle sugg`ere une surcompen- sation de la circulation eul´erienne moyenne par la circulation induite par les tourbillons. La Figure 2.9 pr´esente ´egalement la circulation eul´erienne moyenne pour GM05 dans la-

quelle les contributions de la vitesse moyenne ~U et celle de la vitesse moyenne induite

par les tourbillons ~U∗ param´etr´ee d’apr`es GM90 (voir ´equation 2.4) ont ´et´e distingu´ees.

La circulation induite par les tourbillons param´etr´es par GM90 compense effectivement la circulation eul´erienne moyenne explicitement r´esolue dans le mod`ele pour des densit´es

potentielles σ2 > 35 kg m−3. Ainsi, dans la direction m´eridienne, aucun transport net de

masses d’eau denses vers le sud n’est effectu´e aux latitudes de l’ACC.

Fig. 2.9 – MOC (exprim´ee en Sv) en coordonn´ees σ2 sur la p´eriode 1995-2004 pour les

simulations REF05 et GM05. (Haut) La MOC correspond `a la MOC totale (circulation

eul´erienne moyenne + circulation induite par les tourbillons transitoires), calcul´ee `a partir

des sorties du mod`ele moyenn´ees sur 5 jours. Dans GM05, le calcul du transport prend en

compte la vitesse induite par les tourbillons (~U∗, equation (2.5)). (Bas) La MOC corres-

pond `a la MOC moyenne (circulation eul´erienne moyenne) dans GM05, calcul´ee `a partir

des sorties moyenn´ees sur 1995-2004, o`u le transport est calcul´e `a partir de ~U seulement

(GM05(V)), et `a partir de ~U∗ seulement (GM05(EIV)). Les valeurs positives indiquent

une circulation dans le sens des aiguilles d’une montre, et les valeurs n´egatives une circu- lation dans les sens inverse des aiguilles d’une montre.

d’une valeur trop ´elev´ee pour le coefficient κ (cf. equation (2.5)). Cependant, de r´ecentes

´etudes montrent que la valeur de 1000 m2 s−1, commun´ement prise dans les mod`eles, serait

trop faible (Sall´ee et al., 2011; Lee et al., 2011), pr´econisant des valeurs d’un ordre dix fois sup´erieur (Sall´ee et al., 2011). Ces r´esultats pourrait simplement impliquer que les valeurs

de κ utilis´ees dans les mod`eles globaux ne sont pas adapt´ees `a la circulation de notre

mod`ele r´egional, et qu’utiliser une telle param´etrisation dans nos simulations m´eriterait une ´etude d´edi´ee. Par ailleurs certaines ´etudes ont montr´e que la param´etrisation GM90

conduit `a des solutions plus r´ealistes lorsque le coefficient κ n’est pas simplement choisi

constant mais fonction de la latitude et/ou du temps (Visbeck et al., 1997; Sall´ee et Rin- toul , 2011).

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Conclusion

Le r´esultat de la comparaison entre les simulations REF05 et GM05 nous montre que GM05 semble moins performante que REF05 dans la repr´esentation des processus dyna- miques tels que le transport de l’ACC et la MOC. En particulier, le transport induit par les tourbillons, tel que calcul´e par la param´etrisation GM90, est probablement trop intense

conduisant `a une repr´esentation erron´ee de la MOC. Ces conclusions sont corrobor´ees par

les r´esultats des travaux de th`ese de Lachkar (2007) montrant que la param´etrisation GM90 dans la configuration globale ORCA05 est particuli`erement d´efaillante pour repr´esenter

l’effet des tourbillons dans les r´egions o`u la couche de m´elange est relativement profonde, ce

qui est le cas de nombreuses r´egions de l’oc´ean Austral. Ainsi, d’une mani`ere plus g´en´erale, les travaux de Lachkar (2007) ont mis en ´evidence l’importance de la repr´esentation ex- plicite, mˆeme partielle, des tourbillons de m´eso-´echelle pour les simulations du carbone anthropique dans l’oc´ean.

Au vu de ces r´esultats et de la probl´ematique de mes travaux de th`ese centr´ee sur les

flux de CO2 dans l’oc´ean Austral, il a ´et´e d´ecid´e que les simulations de r´esolution 0,5˚

n’utiliseraient pas la param´etrisation GM90. Ce choix est ´egalement motiv´e par un souci de coh´erence au sein du jeu de simulations dynamiques de r´esolutions 0,5˚ et 0,25˚; ce, afin de pouvoir y mener une analyse de la sensibilit´e des solutions dynamiques du mod`ele `

a la r´esolution appliqu´ee.

2.4.2 Param´etrisation de Geider et al. (1998)