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CHAPITRE II: Retrait et fluage à 20°C sous conditions hydriques variables

II. 2.3.1.1 Mécanismes du fluage propre

II.2.3.3 Paramètres influençant le fluage

De nombreux paramètres influencent le fluage propre. La quantité de pâte de ciment est une nouvelle fois prépondérante ainsi que la quantité de granulats. Le rapport E/C et la nature du ciment interviennent également dans l’amplitude et la cinétique du fluage propre [Huet et al.

1982, Neville 2000].

Le rapport E/C

Ulm et al. cités par Benboudjema [Benboudjema 2002], remarquent que seul le rapport E/C influence la cinétique de fluage à court terme. D’après Hansen [Hansen 1986], le rapport E/C initial détermine la porosité capillaire de la pâte de ciment. C’est pourquoi il y a une différence de fluage entre un BHP, dont le rapport E/C est plus faible, et un béton ordinaire. Cela va dans le sens que le fluage propre est étroitement lié à la distribution des pores capillaires. Cette dépendance est présentée dans la Figure II-20.

Figure II-20 : Déformation de fluage propre pour différents rapport e/c [Hummel 1959] cité par [Kanstad 1991]

Lorsque le rapport e/c augmente la déformation de fluage propre est plus importante. Cela montre une fois encore que l’eau joue un rôle capital dans la déformation de fluage. Avec l’augmentation du rapport e/c, la quantité d’eau ne réagissant pas avec le ciment pour former des hydrates croît. L’eau non liée chimiquement est présente dans le béton en quantité plus importante, pouvant jouer le rôle de « lubrifiant » entre les feuillets de C-S-H.

Humidité interne

Le fluage propre dépend fortement de l’eau. Pour un béton séché à 105°C, Acker, [Acker

1988] montre que le fluage propre est quasiment nul. Plusieurs auteurs montrent que le fluage

d’une éprouvette est proportionnel à l’hygrométrie au sein de l’éprouvette [Bažant 1986,

Abiar 1986, Pihlajavaara 1974, Acker et al. 1997, Guénot-Delahaie 1997]. Lorsqu’un béton

est déchargé, sa déformation diminue instantanément (recouvrance instantanée). Cette diminution continue dans le temps en ralentissant (recouvrance différée). La recouvrance dépend aussi du degré d’humidité interne de l’éprouvette [Bažant et al. 1973, Pihlajavaara

1974, Bažant et al. 1976]. La Figure II-21 présente l’évolution du fluage propre pour

Figure II-21 : Déformation de fluage propre en fonction du temps pour différentes conditions de pré- séchage [Wittmann 1970] cité par [Benboudjema 2002]

L’amplitude de la déformation de fluage propre peut être jusqu’à cinq fois plus importante sur une éprouvette préconditionnée avant le fluage à 98% HR qu’à 22,5% HR.

Nature du ciment

La nature du ciment influence le fluage car il conditionne la résistance du béton en compression et en traction. De plus, la finesse du ciment influence la cinétique d’hydratation et le développement dans le temps des caractéristiques mécaniques du matériau. Ces paramètres influencent davantage le fluage au jeune âge. Une fois l’hydratation avancée, le fluage ne dépend plus du type de ciment utilisé [Kamen 2007].

Les granulats

Bien que la nature, la proportion, les propriétés mécaniques des granulats ne soient pas prises en compte par les modèles règlementaires, elles ont une influence certaine [Cubaynes et al.

1996]. La modification du fluage en fonction de la nature minéralogique des granulats est

présentée dans la Figure II-22.

Figure II-22 : Evolutions des fluages totaux de bétons pour lesquels seule la nature minéralogique des granulats diffère [Cubaynes et al. 1996]

Avec :

 B3 : béton contenant des granulats (G3) calcaire dolomitiques concassés de Sorèze ;  B4 : béton contenant des granulats (G4) siliceux concassés de Garonne ;

 B5 : béton contenant des granulats (G5) calcaires concassés de Saint Béat ;

 B6 : béton contenant des granulats (G6) de diabase siliceux concassés de Montredon ;  B7 : béton contenant des granulats (G7) siliceux roulés de Garonne.

D’autres auteurs confirment cette tendance, [Neville 1964] montre que pour une augmentation du volume de granulat de 65% à 75%, le fluage peut diminuer jusqu’à 10%. Le module d’élasticité des granulats jouerait un rôle plus important que leur résistance en compression dans le comportement du béton sous charge.

Troxell et al. [Troxell et al. 1958] montrent également le rôle non négligeable des granulats sur le comportement en fluage du béton. Cette corrélation est présentée dans la Figure II-23.

Figure II-23 : Influence de la nature minéralogique du granulat sur le fluage total [Troxell et al. 1958]

La déformation après 20 ans de fluage serait quatre fois plus grande pour des bétons à base de granulats de grès que pour des bétons à base de granulats calcaire.

Les adjuvants

Les adjuvants sont ajoutés dans la composition du béton notamment pour améliorer certaines propriétés. Les superplastifiants, en dispersant les particules de manière plus homogène à l’état frais, semblent avoir un rôle dans le comportement du béton sous charge à l’état durci. Ils augmenteraient le fluage [Mehta 1986, Neville 1996].

La résistance en compression du béton

Le fluage diminue avec l’augmentation de la résistance du béton [Mehta 1986]. Les travaux de Hummel cités par [Müller et al. 1990] montrent clairement la diminution du fluage lorsque la résistance en compression du béton augmente. Cette corrélation est présentée dans la Figure II-24.

Figure II-24 : Valeur de la fonction de fluage (ou fluage spécifique) en fonction de la durée de chargement pour des bétons de résistance en compression croissante [Müller et al. 1990]

Le fluage spécifique peut être divisé par deux pour une augmentation de résistance de 2,3. Le chargement

Le taux de chargement est un paramètre crucial dans le comportement sous charge. La Figure II-25 propose une relation entre la déformation et la contrainte appliquée.

Figure II-25 : Déformation différée totale en fonction de la contrainte permanente appliquée à différentes échéances : la linéarité est admissible jusqu’à environ 0,5 fois la charge à la rupture [Acker et al. 1983]

Le domaine de linéarité de la déformation existe uniquement pour des contraintes inférieures à 40% ou 50% de la charge à la rupture au jour du chargement. Il est évident que cette valeur dépend de l’âge du chargement du béton et semblerait augmenter avec ce dernier.

Au-delà de 50% de la charge à la rupture, les déformations du matériau augmentent plus rapidement avec la contrainte appliquée. Il est possible que l’endommagement induit par le fluage pour des taux de chargement important (> 50%) modifie le comportement sous charge.

Le traitement thermique

La cure thermique sans chargement a une influence sur le retrait, le fluage propre et le fluage de dessiccation.

Dans [Parrott 1979], des pâtes de ciment subissent une cure sous eau pendant au moins 28 jours pour stabiliser l’hydratation. Elles sont ensuite traitées thermiquement pendant 2 jours. Il montre que des pâtes de ciment traitées thermiquement à 20°C, 75°C et 95°C avant chargement n’ont pas la même réponse mécanique à température ambiante.

Les résultats présentés dans la Figure II-26 montrent que le fluage en dessiccation et le retrait, entre 100% HR et 55% HR, après une cure thermique diminue. Cette diminution est d’autant plus marquée que la température du traitement thermique avant chargement est élevée. En effet, le fluage de dessiccation après traitement à 95°C est plus faible que celui après traitement à 75°C, qui est lui-même encore plus faible que celui sans traitement (à 20°C) (Figure II-26).

Figure II-26 : Evolution du fluage de dessiccation en fonction du retrait pour chaque type de cure thermique [Parrott 1979]

La Figure II-27 présente l’évolution des déformations de fluage de dessiccation en fonction du temps, pour trois types de cure en température (20°C, 75°C, 95°C). Elle montre l’influence du traitement thermique sur les déformations sous charge ultérieure. Il apparaît que le fluage en dessiccation diminue fortement après traitement thermique et ceci est d’autant plus marqué que la température de cure est élevée. En amplitude finale, le fluage de dessiccation pour un échantillon traité à 20°C est plus de deux fois plus grand que celui d’un échantillon traité à 95°C.

Figure II-27 : Fluage en dessiccation en fonction de la durée sous charge pour les trois types de cure en température avant chargement (20°C, 75°C et 95°C) [Parrott 1979]

II.2.4 Modélisation

Dans cette partie, nous allons détailler le modèle développé par Sellier [Sellier 2006, Sellier et

al. 2012] que nous utiliserons durant cette thèse. Tout d’abord, nous présenterons le modèle

d’endommagement. Dans ce chapitre, l’endommagement aura très peu d’impact sur les réponses mécaniques générées par le modèle. Il aura un impact beaucoup plus important dans le chapitre III, et notamment lors des essais en température. Il sera couplé au modèle de fluage. Dans un second temps, nous présenterons alors le modèle permettant de simuler les déformations différées libres et sous charge.