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Pacte autobiographique, intertextualité et tromperie

Dans le document Feu, suivi de Sophie Calle : soi en négatif (Page 97-122)

Pacte autobiographique, intertextualité et tromperie

Calle signe un pacte autobiographique complexe avec son public. Elle est à la fois auteure, narratrice et personnage. Elle remplit ainsi tous les critères de l’autobiographie telle que définie dans Le Pacte autobiographique par Philippe Lejeune (1996), mais jusqu’où pousse-t-elle les limites du genre ? Elle joue constamment avec cette impossibilité de distinguer le vrai du faux, le véritable du fabriqué. Elle va jusqu’à intituler une de ses expositions Des Histoires vraies pour clore le débat et le questionnement sur la véracité de ses récits (Stech, 2007, p. 103), mais elle nuance, en précisant qu’après le travail de construction qui se fait autour des anecdotes, il en résulte toujours de la fiction.

Tantôt Calle assume pleinement la part conceptuelle de son cheminement artistique, tantôt elle s’en détache en prétextant une démarche personnelle. Elle poursuit ainsi son travail de mystification en entrevue et brouille les pistes sur l’authenticité de son autobiographie. Son œuvre se livre plus vraie lorsqu’elle décrit une habitude due à son déficit mémoriel plutôt qu’une longue recherche esthétique. Questionnée sur l'utilisation conjointe du littéraire et du photographique, Calle a répondu:

Ça s'est fait tout seul. J'ai une mémoire défaillante. Donc cela a toujours été automatique pour moi de prendre des notes. À mes yeux, ce n'était ni de la littérature ni de la photographie. Plutôt un constat, des souvenirs, des traces. Ensuite, je me suis aperçue que mes textes ne se suffisaient pas à eux-mêmes, pas plus que mes

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photos puisque je n'étais pas photographe, je n'avais même pas intérêt d'ailleurs à le devenir. À part pour les tombes, il y a toujours eu liés, ce besoin d'écrire et ce besoin de photographier. (Stech, 2007, p. 97)

Les photographies constitueraient en quelque sorte des notes, des archives de sa démarche pour combler les trous de sa mémoire, documenter sa vie. Autant de photographies que de preuves que ça-a-été1, qu’elle a été et dont elle réitère

l’authenticité dans ses entrevues. Son stratagème peut être remis en question. Dans

Des Histoires vraies, le moment décrit est rarement celui de la photographie qui est le

plus souvent une mise en scène ou une représentation symbolique. Les souvenirs fabriqués après coup sont à l'image de l'anecdote sur sa photographie de mariage:

Notre hymen improvisé, au bord de la route qui traverse Las Vegas, ne m'avait pas permis de réaliser le rêve inavoué que je partage avec tant de femmes: porter un jour une robe de mariée. En conséquence, je décidai de convier famille et amis, le samedi 20 juin 1992, pour une photographie de mariage sur les marches d'une église de quartier à Malakoff. (Des Histoires vraies, p. 68-69)

Ladite photographie de mariage est pourtant des plus communes et crédibles (si ce n'était de la photo de l’enseigne de mariage au service au volant de la Little White Chapel qui la précède de quelques pages). L'extrait montre d'abord qu'on peut recréer le moment en trichant et y inclure la robe et la famille qui aurait dû y figurer. La photo mêle le rêve et la réalité. Elle trahit aussi la fabrication du caractère autobiographique de l'œuvre de Calle et soulève le doute sur l'authenticité de ses autres clichés et

1 Concept élaboré par Roland Barthes dans La Chambre claire selon lequel la photographie atteste la

présence de son objet, car elle ne peut pas mentir. Il a dû être présent devant l’objectif pour s’imprimer sur la pellicule. (Barthes, 1980, p. 120)

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documents. Revient alors au lecteur de nuancer la vérité: elle s'est mariée, l'invention: le décor.

La photographie aurait été tout aussi construite si elle avait tenté de coller à la réalité en recréant de toutes pièces le mariage tel qu'il a été vécu. Dans Des Histoires vraies, Calle raconte qu’elle avait l’habitude de tenir le pénis de Greg, son ancien compagnon, lorsqu’il pissait, car elle avait ce fantasme d’être un homme. Au moment du divorce, elle lui demande de recréer la scène en studio (p. 73). Devant la caméra, ils jouent, ils posent. Un intrus transforme leur habitude. Rien de naturel dans le studio, le seau, et la lentille. Elle est pourtant plus vraie que la photo d'un homme sans sexe (p. 63), assurément trafiquée. Il y a toujours de la fiction découlant de l’acte de création, que ce soit sous les mots ou devant l’objectif :

Le roman autobiographique va se définir par sa politique ambiguë d’identification du héros avec l’auteur : le texte suggère de les confondre, soutient la vraisemblance de ce parallèle, mais il distribue également des indices de fictionnalité, L’attribution à un roman d’une dimension autobiographique est donc le fruit d’une hypothèse herméneutique, le résultat d’un acte de lecture. Les éléments dont dispose le lecteur pour avancer cette hypothèse ne se situent pas seulement dans le texte, mais aussi dans le péritexte, qui entoure le texte, et dans l’épitexte, c’est-à-dire les informations glanées par ailleurs. (Gasparini, 2004, p. 32)

L’usage de la photographie varie à l’intérieur de l’œuvre callienne. L’image fait des clins d’œil au texte. Elle peut aussi l’illustrer, entrer en dialogue avec lui ou en effectuer une mise en regard, mais elle semble surtout créditer d’authenticité les récits, au même titre que les prises de vues d’un détective privé. En quoi la photographie

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permet-elle d’établir une preuve ? Est-ce qu'un escarpin rouge prouve qu'elle a jadis volé une paire de chaussures ? Est-ce qu'un lit vide prouve que Greg avait besoin de se marier pour avoir une érection ? Est-ce qu'une lettre prouve qu'il y a bel et bien une rivale ? D’autres procédés, tels que l’apparence négligée des photographies suggèrent que cette fonction renforcirait le pacte autobiographique :

[Calle] crée à partir d'un projet ou d'un ''scénario'' déterminé, des images qui sont davantage un registre comptable (des instants vécus) que la source d'émotions esthétiques. L'amateurisme apparent des clichés relève d'une intention auctorielle et contribue à mystifier le lecteur. (Guichard, 2004, p. 77)

Selon Barthes, « [t]oute photographie est un certificat de présence » (Barthes, 1980, p. 135) et permet de valider le passé, car l’objet de la photo a nécessairement été. La photographie possède une valeur de pièces à convictions que les mots n’obtiendront jamais puisqu’ils sont associés à la fiction. Or, ce souci d’authenticité n’est qu’un stratagème miné par la construction callienne « puisque le référent échappe constamment, lissé par la voix commune de Calle, déserté par des photographies qui mettent en scène l'absence ou des fragments échappés à une somme incertaine » (Snauwaert, 2006, p. 46). Il en résulte donc un effet de réel tel qu’élaboré par Barthes : « la carence même du signifié au profit du seul référent devient le signifiant même du réalisme : il se produit un effet de réel, fondement de ce vraisemblable inavoué qui forme l’esthétique de toutes les œuvres courantes de la modernité. » (Barthes, 1968, p. 88) Les effets de réel se retrouvent aussi dans les descriptions méticuleuses, le style très factuel, les listes et les détails qui participent davantage au caractère vraisemblable de l’œuvre qu’à son développement.

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Les objets photographiés dans des Histoires vraies sont repris dans

Appointment with Sigmund Freud et ils sont placés parmi ceux du célèbre

psychanalyste. Le mélange de deux vies, de deux époques, a une allure anodine et pourtant, l’exposition des effets de Calle disséminés à travers le musée plutôt que présentés page après page crée un effet de réel. La fausse photographie de mariage encadrée à côté de celle de Freud sur une table, parce qu'elle regagne sa position et son rôle habituels, redonne du pouvoir au caractère authentifiant de la photographie. L'escarpin rouge, traînant dans une armoire du 19e siècle devient moins quelconque que lorsqu'il était pris isolément. Une lettre d’amour que son ancien amant avait écrite pour une autre femme devient aussi plus légitime sous la machine à écrire. C’est d’ailleurs sous une machine à écrire qu’elle l’aurait initialement trouvée. En revanche, d'autres contextualisations comme le croquis de Calle parmi les diplômes de Freud accentuent l'altérité: les objets de Calle n'appartiennent pas à la maison. Elle s'y est infiltrée comme elle s’immisce dans les vies de tant d’inconnus. Cette altérité est constituante chez Calle. Elle inclut constamment les autres, leurs témoignages, leurs photographies, leurs dessins, leurs vies... leur absence. Elle crée son propre musée et collectionne les bribes de son quotidien pour les transformer en exposition. Elle expose ses cadeaux derrière une vitrine dans Le Rituel d’anniversaire (1998) et plus récemment dans Moi aussi (2012). Les cadeaux, les billets de trains, les lettres, les photographies et les notes sont collectionnés comme autant de preuves qui attestent de l'existence du personnage Sophie Calle.

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L'impact de l'image dans Douleur exquise réside non pas dans l’étalage de souvenirs, mais dans la temporalité ambiguë, un avant du point de vue de l'après, et dans la construction et la narration de l'archive et d’une rétrospective conduite par la fatalité. La première partie du livre présente une série de photos étampées de la mention « Douleur J - [le nombre de jours restants avant sa rupture] ». Son voyage au Japon prend fin et elle pense retrouver l’homme qu’elle aime. Au cœur du livre, une photographie en double page : le lit de la chambre d’hôtel où elle attendait son amoureux et le téléphone rouge qui lui a appris qu’il ne la rejoindrait pas en Indes comme promis puisqu’il avait rencontré une autre femme. Dans la deuxième partie, elle réécrit sur la page de gauche le récit de sa rupture toujours sous l’image de la chambre d’hôtel et elle rapporte sur la page de droite les réponses reçues à sa question « Quand avez-vous le plus souffert ? » (p. 202) illustrées par une photo. Elle confronte ainsi sa souffrance à celle des autres dans le but de la mettre en perspective et de se guérir. Le processus thérapeutique par l'épuisement et la relativisation a été publié quinze ans après l’événement.

Les documents présentés dans Douleur exquise n'ont eu de la valeur qu'après la rupture. Le billet de train, tout comme les autres archives personnelles, témoigne d'un passé, banal certes, mais poignant parce que pris dans l’engrenage du décompte enclenché. Il peut difficilement être pris isolément. Exclus de l'enchaînement auquel il participe, il ne vaudrait pas plus qu'une photo sortie d'un album, de son ensemble. L'archive appartient à un autre temps, elle ne vit ni dans le passé, ni dans le présent, mais dans une conciliation entre les deux. Le document perd la fonction qu'il avait au départ pour en trouver une autre. Calle avait conservé des éléments sans savoir qu'ils

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lui permettraient d'étaler ce qu'il lui restait de l'attente, de la douleur et de la guérison. Leur banalité s'enrichit après la rupture et crée un effet de prémonition a posteriori. Ils rendent la frivolité préalable déchirante alors que la douleur devient de plus en plus inéluctable. C’est pourtant dans les interstices laissés par les autres et les objets qu’elle présente que Calle se donne à lire, et non dans le trop-plein d'attestations d’elle-même. Comme l’indique Jean-Paul Guichard au sujet de l’accumulation documentaire, elle s'efface beaucoup plus derrière ses pièces qu’elle ne se montre:

La part autobiographique est faible dans le travail de Sophie Calle. La multiplication des preuves photographiques forme un écran impénétrable qui rend impossible tout accès à ce qui fonde l'autobiographie ou l'autofiction: l'intime. Et ce qui peut sembler livrer une partie du secret de la personne Sophie Calle ne fait qu'ajouter à la mystification: c'est le cas de la série consacrée au choix d'une tombe au cours d'une visite au cimetière avec son père: l'homme photographié est-il le père ? La réponse importe peu. Nous avons affaire à une œuvre composite, ne correspondant pas aux catégories «traditionnelles» de l'usage de la photographie ou de la création littéraire. (Guichard, 2004, p. 80)

Elle effectue en cela un glissement de l’intimité vers l’extimité dont il sera question plus loin.

L’œuvre de Sophie Calle déborde du cadre des expositions et des livres. Elle ne se contente pas de refléter la vie de l’artiste, elle la constitue. L’épitexte, le paratexte et l’intertextualité contribuent au jeu auquel elle s’adonne. Les entrevues qu’elle accorde alimentent tout autant sa fiction. Ses vies inventée et réelle fusionnent. Elle reproduit un extrait d’À l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie d’Hervé Guibert (1990) dans

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double, elle est triple : Sophie-Anna-Maria. Elle incarne le personnage fictif qu’a créé Paul Auster dans Leviathan (1992) à partir d’elle puis elle se transforme elle-même en Maria et se plie aux exigences du rôle. Des journées entières sous le signe du B, du

C, du W l’amène à composer ses journées avec des contraintes dignes de George

Perec afin d’imiter Maria dans la série Doubles-jeux (1989). Sa journée sous C comme

confession commence comme suit : «Comme le Cœur Concilie les Choses Contraires,

la Cérémonie du C m’a Conduite dans un Confessionnal Confesser ma Cécité et mes Carences Concernant la Croyance. » (De l'Obéissance : Le Régime chromatique : Des

Journées entières sous le signe du B, du C, du W, p. 53). Elle pousse encore plus loin

en demandant à Paul Auster d’écrire une année de sa vie qu’elle pourrait suivre à la lettre. Le projet paraît trop hasardeux, alors il lui énonce quelques règles simples à suivre (Calle & Auster, 1998) : Sourire, offrir des sandwichs, discuter de la météo. Tant de choses simples qui prennent une allure loufoque sous le cachet personnel de Calle. Elle se lie dix années plus tard à la voyante Maud Kristen et lui demande à son tour de lui tracer un trajet à suivre. Est-ce parce qu’il n’y a pas de situations propices qu’elle tente d’en créer ? Quoiqu’il en soit, elle prend les indications au sérieux dans

Où et quand - Berck : « Éviter de me demander ce que je fais là. / J’y suis parce que

c’est la règle du jeu. » (p. 95) Elle s’abstient néanmoins de demander aux handicapés de Berck ce qu’ils ont perdu dans leur enfance. Elle projette de mentir ou d’inventer plutôt. N’est-ce pas précisément comme ça que se construit son autofiction: du vrai jusqu’à ce qu’il faille du faux ?

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Elle passe d’un univers à l’autre et se tient à l’enjambement de la fiction et de la réalité. Sa vie devient un théâtre avec différents metteurs en scènes, une juxtaposition de créateurs. Il n’y a plus de cinéma, de littérature ni de photographie, il n’y a plus de son, de mot ni d’image, il y a elle dans une performance de soi, voire une mythologie de soi. Son personnage prend vie et devient autonome:

La duplicité assumée du double-je projette donc Calle dans une fiction de soi qui n'est plus du seul ressort de l'artiste, mais qui peut, en digne figure mythologique, être récupérée et dont les actes peuvent être narrés par tout le monde. Héroïne de sa propre vie, elle apparaît à la fois dans les épopées personnelles d'autres artistes et dans les médias où son visage en madone éplorée fait désormais la couverture des magazines d'art. (Nachtergael, 2012, p. 240)

Elle détruit non seulement la barrière entre le vrai et le faux, mais celle entre la vie et l’œuvre. Elle se plie aux caprices de la fiction, la provoque. Chloé Delaume y voit une fonction de l’autofiction, ce n’est plus tout à fait de l’autobiographie :

Du réel effectuer une modification. C'est à ça que ça sert, aussi, l'autofiction. Imposer le temps interne à l'horloge du dehors. Agir, avoir une prise, forcer les événements. Assigner le réel à la fiction de l'intime. Le travail de Sophie Calle, à mes yeux, va en ce sens. Vie et œuvre se confondent, elle s'est faite l'héroïne d'aventures qui s'écrivent par-delà les supports confinés artistiques. Parfois, l'autofiction se fait participative. (Delaume, 2010, p. 73)

Calle s’impose des contraintes strictes, comme Le Régime chromatique qui la pousse à manger selon des couleurs pour imiter Maria, son double. Les règles qu’elle s’oblige à respecter sont aussi d’ordres stylistique et formel. Son Rituel d’anniversaire, qui consiste à inviter autant de convives que son âge et à photographier et noter tous ses cadeaux n’a rien de naturel ni de mensonger, il constitue une démarche artistique avouée. La mise en évidence du dispositif autobiographique témoigne de la

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contemporanéité de l’œuvre callienne (Richard, 2013) puisque traditionnellement, toute transgression devait rester dissimulée.

Il y a moins d’un siècle, Proust (1954) attaquait violemment Sainte-Beuve. Il mettait à mal ses critiques fondées sur l’analyse de la vie de l’auteur et préférait les analyses formelles et stylistiques. Proust a développé le concept de l’autre moi; la personne qui écrit n’est pas l’être social présent dans les salons et les autres événements mondains. Il fallait ainsi selon lui considérer l’auteur et l’homme de façon distincte et ne pas critiquer une œuvre d’après les valeurs morales du nom sur la couverture. L’autobiographie callienne se veut à l’antipode de l’autre moi, car elle revendique l’unicité de l’auteur-narrateur-personnage, même si le Moi évolue sans cesse et n’a pas d’identité fixe. Chez Calle, l’autofiction remplace l’autobiographie, mais est-ce que le préfixe auto convient pleinement à l’œuvre de Calle ? Elle n’est plus tout à fait elle. Son Je se double, se détache d’elle et pose le défi d’identifier la fine frontière entre elle et lui, entre elle et son art.

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Altérité et deuil

L’inscription de soi, malgré ses allures narcissiques, naît du besoin de s’extérioriser et d’entrer en contact avec notre entourage. Toute écriture vise d’abord à être lue par d’autres, ou du moins par un soi futur. Calle aurait d’ailleurs commencé ses récits autobiographiques chez le psychanalyste (Stech, 2007, p. 98). Dans Prenez soin de vous, elle demande à une centaine de femmes d’analyser la lettre de rupture qu’elle a reçue. La missive est lue et relue sous tous les angles, puis objectivée, décortiquée et disséquée jusqu’à s’éloigner de sa visée et devenir un simple objet d’études. Pour prendre soin d’elle, Calle a eu recours à toute une gamme de professionnelles qui ont réécrit, chacune à sa façon, la fin de son histoire et l’ont aidée à cheminer dans sa guérison. Le processus reprend celui de la psychanalyse, qui est de mieux se comprendre à travers le reflet qui nous parvient des autres et qui nécessite une coopération entre les individus analysant et analysé. Cette dynamique collaborative imprègne la plupart des performances calliennes, sinon toutes.

La souffrance se trouve à l’origine de plusieurs récits de soi et elle s’y évacue. Douleur exquise est la performance d’un deuil, donc d’un rapport à l’autre, aussi subtil puisse-t-il paraître :

Le deuil est immensément rassurant car il nous convainc d'une chose dont nous pourrions douter: notre attachement aux autres. La longue douleur du deuil confirme une chose que la psychanalyse a mise en lumière: avec quelle intransigeance nous sommes dévoués aux gens que nous aimons et haïssons. (Butler, 2002, p. 225)

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Calle transmet à travers Douleur exquise une douleur commune, celle de la rupture amoureuse qui constitue elle aussi une disparition, celle de l’être aimé. L’histoire de la

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