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II. Etat de l'art

II.2. Les Facteurs de contrôle de la sédimentation au Paléoprotérozoïque Paléoprotérozoïque

II.2.2. Oxygénation de la planète et conséquences

L'histoire de l'oxygénation de la planète débute à -3 Ga avec des taux de O2 10-5 à 10-4 fois moins élevés que l'actuel (Crowe et al., 2013; Pavlov and Kasting, 2002), probablement liés aux toutes premières cyanobactéries et algues, se développant de façon très locale en raison d'un climat chaud et d'une géodynamique propice aux apports en nutriments (Fig. II.6). Cependant, l'apparition de l'oxygène ne s'est pas effectuée de façon continue et on observe deux stades (Planasky et al, 2014; Gauthier-Lafaye et Weber, 2013), à savoir : entre 3 et 2,45 Ga et entre 2,45 et 2 Ga:

Entre 3 Ga et 2,45 Ga, les premiers pics d'oxygène vont directement être consommés par les réactions chimiques suivantes (Fennet et al, 2005; Posth et al, 2008; Hanna et al, 2004) :

- Le fer d'origine hydrothermale, présent sous forme de Fe2+ en grande quantité dans les océans précambriens, va directement réagir avec l'oxygène pour précipiter sous forme d’oxyde de fer et former les premiers Banded Iron Formations (BIF; Fig. II.6 et Fig. II.8; 4Fe2++ 3O2 = 2Fe2O3). Ces BIFs seront discutés plus loin dans le texte.

- Les gaz réducteurs tels que l'hydrogène ou encore le sulfure d'hydrogène, émis par les volcans sous-aquatiques archéens, vont réagir avec l'oxygène (Fig. 8; Kasting 1993; Sleep & Zahnle 2001; Holland 2006; Kump & Barley 2007) pour donner des sulfates :

H2 + O2 = H2O ou H2S + 2O2 = SO4 2-+ 2H+. A partir du Paléoprotérozoïque, les dépôts sédimentaires augmentent grâce au brassage induit par la tectonique des plaques. Les sédiments hydratés repris par les subductions permettent par la suite un changement dans la composition des gaz volcaniques qui vont devenir plus oxydés (enrichissement en CO2, H2O, SO2). Ces gaz plus oxydés ne réagissent plus avec l'oxygène et favorisent ainsi l'oxygénation de la planète (Kump & Barley 2007; Reddy & Evans 2009, Holland 2009).

- L'ammoniaque (NH4+) est oxydée en nitrite par réaction biologique. Ce processus est appelé la "nitrification" (2NH4+ + 3O2  2NO2- + 2H2O + 4H+). L'oxygène primairement formé est donc directement consommé par cette réaction. Dans un second temps, les nitrites se transforment

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en nitrates toujours par réaction bactérienne. Ces nitrates, via des réactions enzymatiques bactériennes, vont alors réagir avec les liaisons H+ de l'eau et former de l'azote volatile. Ce processus est appelé la "dénitrification" (4NO3- + 5(CH2O) + 4H+  2N2 + 5CO2+ 7H2O). Elle a pour conséquence la réduction de la productivité biologique, provoquant ainsi une diminution des colonies de cyanobactérie (Fennel et al., 2005; Falkowski et Godfrey, 2008; Godfrey et Falkowski, 2009) et donc une diminution du taux d'O2 émis (Fig. II.6).

De nombreux auteurs considèrent qu'entre 2,45 et 2,0 Ga, l'apparition de l'oxygène dans l’atmosphère est quasi irréversible et supérieure à 10-5 PAL (Present Athmosphere Level, Pavlov and Kasting, 2002; Pollack et al., 2009). Cette période est appelée the "Great Oxydation Event" (GOE ; Bekker et al., 2013; Holland, 2002; Pavlov and Kasting, 2002) ; elle serait liée à trois évènements majeurs (Fig. II.8) :

i) La disparition du fractionnement indépendant de la masse pour l'isotope du soufre qui serait le témoin de la formation d'une couche d'ozone autour de la Terre. Le rayonnement ultraviolet ne pouvant plus atteindre la surface de la Terre, la molécule SO2 n'est plus fractionnée. L'enregistrement du δ33S avant 2,45 Ga varie de -5 à -15 ‰ et reste proche de zéro après 2,45 Ga (Farquhar et al., 2000; Farquhar and Wing, 2003).

ii) L'effet boule de neige de la glaciation huronienne (2.4-2.1 Ga; Evans et al., 1997; Kopp et al., 2005) qui résulterait de la réaction de l'atmosphère primitive chargée en méthane avec l'oxygène photosynthétique. Le méthane étant un gaz à effet de serre, sa diminution drastique aurait eu pour effet de provoquer une glaciation globale (Kopp et al., 2005; Rasmussen et al., 2013) à la suite de laquelle, l'atmosphère appauvrie en méthane aurait pu s'enrichir en O2

(Bekker and Kaufman, 2007).

iii) Le Lomagundi-Jatuli Event (LJE; 2263 ± 43 Ma et 2082 ± 25 Ma; Martin et al., 2013 et références incluses), pendant lequel les isotopes de δ13C des carbonates sont exceptionnellement hauts (+5 et +16 ‰), comparés à celui des périodes plus anciennes ou plus récentes (Fig. II.8; δ13C = 0 ± 5‰ ; Shields et Veizer, 2002). Ceci s'expliquerait par la fin de la glaciation huronienne qui aurait eu deux conséquences, à savoir : 1) la prolifération des bactéries et des cyanobactéries (Karhu et Holland, 1996; Bekker et al., 2008) permettant l'oxygénation de la couche photique et 2) la réouverture des systèmes terrigènes entrainant ainsi d'importants dépôts de black shale dans les bassins profonds stratifiés (les dépôts de black shales à cette époque sont 3 fois plus importants que ceux du Phanérozoïque et de l’Archéen ; Aharon, 2005; Condie et al., 2001). La matière organique étant principalement constituée de 12C, le CO2 de l'atmosphère va s'enrichir en 13C. Les carbonates inorganiques ainsi formés pendant le LJE vont donc être anormalement enrichis en 13C (Karhu et Holland, 1996; Bekker et al., 2008).

Concernant les océans profonds, la stratification en une couche photique et une couche inférieure anoxique (Canfield et al., 2008) aurait permis aux océans profonds de rester anoxiques jusqu’à -800 Ma (Fig. 10; Klein, 2005; Anbar et Knoll 2002).

L’effet de l’augmentation de l'oxygénation de la planète combiné à la fin de la glaciation et au LJE va impliquer des modifications minéralogiques importantes comme par exemple l'apparition des dépôts évaporitiques sulfatés rougeâtres (red bed ; Cloud 1968; Holland et al. 1997) et la disparition de l'uraninite, la pyrite, la sidérite détritique (Clemmey and Badham, 1982; Cloud, 1972; Farquhar and Johnston, 2008; Karhu and Holland, 1996; Rasmussen and Buick, 1999).

Etat de l'art En terme de sédimentation, les océans chauds et réduits (Fig. II.8) auraient permis une accumulation du Fe2+ et Mn2+ dissous (Weber, 1973) ainsi que d'important dépôts de black shales riches en métaux de transition (incluant le Mn) ainsi que la formation abondante de BIF entre 2,5 et 2 Ga (Klein 2005 et références incluses). La formation plus spécifique de black shales et des BIFs est discutée dans le paragraphe suivant.

Fig. II.8: Evènements majeurs de la transition Archéen-Protérozoïque discutés dans le texte. HG: Glaciation Huronienne; GOE: Great Oxydation Event; LGE: Lomagundi-Jatuli Event, SH: évènement Shunga. (Modifié d'après Anbar et Knoll, 2002;

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