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2.2 Outils à aire interfaciale contrôlée

Parmi les outils à aire interfaciale contrôlée, il est possible de distinguer les outils faisant intervenir une aire interfaciale constante structurelle, inhérente à l’outil en lui-même – cellules de Lewis, Nitsch, cellule à membrane tournante – et les outils mettant en jeu des gouttes de phase dispersée dans une phase continue, de taille facilement contrôlable et mesurable, comme la méthode de la goutte unique.

II-2.2.1. Cellule de Lewis et cellule de Nitsch

La cellule de Lewis, apparue en 1954, consiste en une cellule d’extraction thermorégulée, séparée en deux parties par une grille permettant de maintenir une interface stable entre deux fluides immiscibles. L’agitation des deux phases est indépendante et ne doit en aucun cas perturber l’interface (Figure II-3(a)). L’expérience a montré que des résultats reproductibles pouvaient être obtenues dans ce type d’extracteurs, et traités quantitativement en utilisant la théorie du double film. Des épaisseurs de couches limites de diffusion de l’ordre de 10 μm ont été atteintes [8].

50 DIFFUSION RESTREINTE Ne pas diffuser sans autorisation de l’émetteur Schéma de la cellule de Lewis adapté de

Lewis [5]

Schéma de la cellule ARMOLLEX adapté de Danesi [16]

(a) (b)

Figure II-3 : Schémas (a) de la cellule de Lewis adaptée de Lewis [5], (b) de la cellule ARMOLLEX adaptée de Danesi [16]

Cependant, cette première cellule d’extraction, permettant un bon contrôle de l’aire interfaciale n’est pas exempte de défauts. Ainsi, en cas de forte vitesse d’agitation, l’apparition d’un vortex au sein de la cellule conduit à une déstabilisation de l’interface, et par conséquent limite le transfert interfacial et l’interprétabilité des résultats. De plus, le mouvement des fluides à proximité de l’interface et la turbulence interfaciale, souvent mal définis, varient d’un équipement à l’autre [8]. Par conséquent, les épaisseurs des couches limites de diffusion sont régulièrement mal maîtrisées.

Afin de stabiliser davantage l’interface que dans la cellule de Lewis, l’addition d’une seconde grille au niveau de l’interface a été proposée par Nitsch et Hillekamp [17] autorisant l’agitation en sens opposé des deux phases et à vitesse plus élevée. Par la suite, cette cellule a subi d’autres modifications – dimension, agitation - de la part de Danesi aboutissant à la cellule ARMOLLEX [16] (ARgonne MOdified Lewis cell for Liquid-Liquid EXtraction) (Figure II-3(b)) permettant la réduction d’un facteur 8 des volumes des phases utilisées. Enfin, dans le cadre de thèses réalisées au Commissariat à l’Energie Atomique et aux Energies Alternatives, l’agitation

100 mL

mécanique a été remplacée par une agitation magnétique [18], la distance inter-grilles a été étudiée et la distance entre l’hélice d’agitation et la grille par conséquent modifiée [19].

Malgré de multiples validations expérimentales, dans certains cas, il est possible de sous- estimer la composante diffusionnelle du transfert de masse et d’obtenir graphiquement un palier caractéristique du régime chimique, alors que celui-ci n’est pas atteint – notamment en cas de glissement des fluides sur les pales d’agitation, à forte vitesse de rotation de celles-ci [8] – ce qui rend l’étude de cinétiques d’extraction très rapides peu aisée.

II-2.2.2. Cellule de diffusion rotative, cellule à membrane rotative

La cellule de diffusion rotative (RDC), imaginée par Albery en 1976, est constituée d’un premier cylindre en rotation - contenant une phase A, agitée par un cylindre interne perforé – dont la base est constituée d’une membrane perméable Millipore, plongé dans une seconde phase B (Figure II-4). En raison de la faible connaissance de l’hydrodynamique de la phase A au sein du premier cylindre en rotation, cette technique a fait l’objet d’une amélioration continue de la part de Simonin [20], grâce premièrement au remplacement du cylindre en rotation par un capillaire en Perspex® (poly(méthyl-méthacrylate)) de diamètre interne 8 mm (Figure II-5) dont la base en gel de polyacrylamide a permis de quantifier le transfert de masse par radiométrie, puis par le remplacement de ce gel par une membrane hydrophile en polyfluorure de vinylidène d’environ 120 μm d’épaisseur, imprégnée de la phase A – aqueuse, afin d’éviter les écueils concernant la contribution du gel de type « amide » au transfert de masse. Cette nouvelle cellule a été nommée cellule à membrane rotative.

52 DIFFUSION RESTREINTE Ne pas diffuser sans autorisation de l’émetteur Figure II-4 : Schéma originel de cellule de

diffusion rotative adapté de Albery [21]

Figure II-5 : Schéma originel de la cellule à membrane rotative adapté de Simonin [20]

II-2.2.3. Technique de la goutte unique

La méthode de la goutte unique, décrite en 1965 par Nitsch [22], consiste à former une goutte isolée de taille contrôlée d’une phase (Ordre de grandeur : 1 à 2,5 mm de diamètre [23]) - la phase dispersée, aqueuse ou organique - à l’une des extrémités d’une colonne (Figure II-6) remplie par une seconde phase - la phase continue - thermorégulée, et à mesurer le transfert de masse entre cette goutte et la phase continue immobile durant le libre parcours descendant ou ascendant de la goutte. Dans la pratique, plusieurs gouttes de phase dispersée sont créées, suffisamment éloignées les unes des autres pour que l’interaction entre celles-ci soit considérée comme négligeable. Il existe deux modes de fonctionnement de cette technique, le fonctionnement aqueux continu (FAC) lorsque la phase continue est aqueuse, et le fonctionnement organique continu (FOC), lorsque celle-ci est organique. Les phases organiques ayant souvent une densité inférieure à celles des phases aqueuses, ces deux modes de fonctionnement diffèrent aussi par le sens de circulation des gouttes (Figure II-6).

Figure II-6 : Représentation schématique des deux modes de fonctionnement pour la méthode de la goutte unique, d’après le travail de thèse de Berlemont [23] (hauteur 150 cm, diamètre

1,5 cm)

Les avantages de cette technique sont multiples. Le montage opérationnel est relativement simple, et le bon contrôle de la taille des gouttes générées permet un contrôle quasi-parfait de l’aire interfaciale entre les deux phases, en l’absence de déformation trop importante de la goutte. Cependant, cette technique présente aussi des inconvénients tels que la complexité de l’hydrodynamique à la surface et à l’intérieur des gouttes [9 , 10] (Figure II-7), l’incertitude sur le degré de turbulence de l’environnement de la goutte lors de son libre parcours, et la non- applicabilité de cette méthode pour des cinétiques de transfert très rapides (>10-4 m.s-1) ou très lentes (<10-7 m.s-1) puisque le transfert de masse ne doit pas se dérouler entièrement lors de la formation de la goutte et ne doit pas être terminé avant que la goutte n’ait atteint l’extrémité de la colonne.

54 DIFFUSION RESTREINTE Ne pas diffuser sans autorisation de l’émetteur

(a) (b)

Figure II-7 : (a) Schéma représentatif de l’hydrodynamique dans la technique de la goutte unique, (b) photographie associée pour un nombre de Reynolds de 73,6 [24]

II-2.2.4. Conclusion

Ayant passé en revue les outils d’acquisition de données cinétiques, on peut conclure que l’outil idéal permettra :

- un contrôle quasi-parfait de l’hydrodynamique ;

- l’évaluation et le contrôle précis de l’aire interfaciale spécifique ;

- la détermination précise du régime cinétique atteint (diffusionnel ou chimique) ; - une agitation suffisante des phases pour que le régime chimique puisse être atteint ; - une faible consommation des deux phases (chimie verte, screening rapide de molécules