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Organisation structurale de la chromatine

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1-Le collier de perles

Au sein du noyau, l’ADN n’est pas nu mais organisé sous forme de chromatine : 146 paires de bases (pb) de la double hélice de 2nm sont enroulées autour d’un octamère d’histones (H2A, H2B, H3 et H4 présentes chacune en double exemplaires). Cette structure appelée le nucléosome est l’unité de base répétée de la chromatine (fibre de 11nm) (Wolffe, 1998) et la distance relative entre chaque nucleosome influe sur le degré de condensation de la chromatine et donc sur l’accessibilité de l’information génétique aux facteurs de transcription (Felsenfeld, 1992). L’inclusion de l’histone H1 au sein de cette structure permet une condensation plus importante de la chromatine (fibre de 30nm) (Misteli et al., 2000), dont le degré ultime de compaction est représenté au sein des chromosomes mitotiques (14000nm)

(Figure 3).

2-Les histones

Les histones sont de petites protéines basiques très conservées au cours de l’évolution dont la structure peut être divisée en trois domaines (Luger et Hansen, 2005). Le domaine central des histones est une région très conservée lors de l'évolution, comme en atteste l’histone H4 qui présente une différence de seulement 2 acides aminés (A.A) entre le thymus de veau et le petit pois (DeLange et al., 1969). Ce domaine est également très structuré, présentant une organisation en trois hélices alpha séparées de deux boucles (Arents et Moudrianakis, 1995). Les deux autres domaines des histones correspondent à leurs extrémités carboxy et amino terminales (appelé par la suite C-terminal et N-terminal, respectivement). Au contraire du domaine central, ces "queues" des histones ne sont pas structurées et varient dans leur composition ; elles sont le lieu privilégié des modifications post traductionnelles des histones dont la complexité et l’importance sera développée dans un chapitre dédié par la suite. Dans le noyau, les histones H3 et H4 s’associent en hétérodimères tout comme les histones H2A et H2B, le tout formant à terme un octamère (Tagami et al., 2004) (Figure 4) et non pas en un tetramère (H3-H4) avec deux dimères H2A-H2B comme définit il y a quelques années (Wolffe, 1998).

3-Les histones de liaison

L’histone de liaison H1 (et son variant H5) est présent tout le long de la chromatine du génome eucaryote. Il est nécessaire pour le repliement de la chromatine en une structure plus élaborée, plus compacte: la fibre de 30nm (Huynh et al., 2005) qui est moins accessible aux enzymes de remodelage de la chromatine et même réfractaire à la transcription (Horn et al., 2002). Il existe 11 sous types de H1 (Clausell et al., 2009); 7 étant somatiques, 3 retrouvés dans le sperme et 1 spécifique des oocytes. Les histones de liaison sont de petites protéines basiques, composées comme les précédentes de trois domaines: un domaine globulaire assez bien conservé entre les espèces, une extrémité N-terminale de 20 à 35 A.A et une extrémité C- terminale d’environ 100 A.A, stabilisant le repliement de la chromatine (Caterino et Hayes, 2011). Malgré la présence d’H1 sur l’ensemble du génome, quelque soit le type de chromatine (hétérochromatine ou euchromatine), certaines régions dépourvues de cet histone ont été identifiées, principalement au niveau de régions denses en gènes actifs et particulièrement au niveau du site de début de la transcription (TSS) de ces gènes. Cependant, 10% des sites ne présentant pas H1 semblent être localisés au niveau de régions intergéniques ; ces sites ou une partie d’entre eux pourraient constituer des éléments régulateurs (Braunschweig et al., 2009). Il semblerait donc que H1 fasse partie des modulateurs majeurs de la chromatine.

4-Les variants d’histones

Des variants d’histones ont été découverts chez plusieurs espèces eucaryotes, différant de façon plus ou moins importantes des protéines histones conventionnelles au niveau de leurs séquences (Malik et Henikoff, 2003) mais également dans leur assemblage au sein des nucléosomes. Ces différences ont une répercussion au niveau de la fonction de ces variants, et présentent des rôles spécifiques dans de nombreux processus biologiques, tels que l’organisation centromérique, la réparation de l’ADN, l’inactivation du chromosome X (Xi) ou encore la transcription.

a-Les variants de H2A

H2A.Z est un variant de l’histone H2A dont l'inactivation chez la Souris est létale

(Faast et al., 2001). Les nucléosomes contenant ce variant présentent des caractéristiques biochimiques et physiques spécifiques et sont réfractaires à certaines modifications post- traductionnelles. H2A.Z possède des rôles variés ; il est notamment impliqué dans la régulation de la transcription génique, pouvant servir de frontière à la diffusion de

INTRODUCTION

l’hétérochromatine, et intervient dans le développement embryonnaire (Guillemette et Gaudreau, 2006 ; Eirin-Lopez et Ausio, 2007; Kusch et Workman, 2007). Dans l’euchromatine, H2A.Z serait présent uniquement au niveau de la région promotrice de la sous-population des gènes transcrit par l’ARN-PII ne présentant pas de TATA box. Ce variant serait "déposé" à ce niveau par l’intermédiaire du complexe SWR1 (Swi/Snf related protein) chez la levure ou son homologue (swr1) chez l’humain (Zhang et al., 2005). Un recrutement alternatif d’H2A.Z est envisageable dans la mesure où des études effectuées au sein du laboratoire de Madhani (Raisner et al., 2005) ont indiqué que H2A.Z serait également présent sur le promoteur de gènes actifs ou inactifs présentant un motif d’ADN spécifique consistant en deux segments redondants de 10 pb contenant le site de liaison de la protéine Reb1 suivi d’une séquence de 7 pb : dT:dA. Les gènes cibles de H2A.Z présentent une région libre en nucléosomes, située environ 200 pb en amont du site de transcription (TSS), cette région étant entourée par deux nucléosomes H2A.Z (Raisner et al., 2005; Yuan et al., 2005). D'autre part, H2A.Z est préférentiellement lié aux promoteurs de gènes réprimés lors de changements importants du transcriptome chez la levure à la suite d'un "heat shock", une perte de H2A.Z étant observée sur les promoteurs de gènes actifs associée à un gain de ce variant au niveau des promoteurs inhibés (Zhang, 2005). Il est possible que cette perte en H2A.Z soit associée à une moins grande stabilité des nucléosomes contenant ce variant par rapport à ceux contenant H2A. Au niveau de l’hétérochromatine, H2A.Z aurait deux rôles. Tout d'abord, sa présence à proximité des télomères permettrait le maintien de frontières entre l’hétérochromatine des télomères et les gènes adjacents, en relation avec l’acétylation de l’histone H4. En effet, chez la levure, une absence d’H2A.Z ou bien un défaut d’acétylation d’H4 entraine une diffusion des protéines Sir, impliquées dans l’hétérochromatisation, des télomères vers les gènes adjacents (Zhang et al., 2004). Ce rôle a été confirmé chez le Poulet (Bruce et al., 2005). Deuxièmement, H2A.Z aurait un rôle fondamental au cours du développement précoce de l’embryon. Ceci résultant d'un fort enrichissement de ce variant au sein de l’hétérochromatine constitutive où il interagit avec HP1α et INCENP, deux protéines importantes pour la ségrégation chromosomique (Rangasamy et al., 2003). Il a également été montré dans les cellules ES que H2A.Z est enrichi sur de nombreux gènes en lien avec le développement comme en atteste l'annotation en termes GO (Gene Ontology) des gènes cibles d’H2A.Z qui correspondent majoritairement à des facteurs de transcription ayant des rôles importants dans les processus de développement comme les facteurs FOX ou GATA (Creyghton et al., 2008).

Le variant de type MacroH2A existe sous 3 formes, MacroH2A1.1, MacroH2A1.2 et MacroH2A.2. La partie N-terminale de MacroH2A.1 est à 64% identique à celle de H2A mais sa partie C-terminale est très différente. De très grande taille, elle constitue une région non histone (Pehrson et Fried, 1992) qui contient un domaine appelé Macro ayant la capacité à lier des ADP-ribose (Adénosine diphosphate-ribose) ainsi que d’autres petites molécules associées (Kustatscher et al., 2005), mais sa fonction est pour le moment encore inconnue. MacroH2A est particulièrement enrichi sur le Xi dans les cellules mammifères (Ladurner, 2003) ainsi qu’au niveau de certains gènes réprimés en attente d’activation (Buschbeck et al., 2009). Une étude récente, dirigée par le laboratoire de Lee Kraus (Gamble et al., 2010) a cependant montré une localisation de macroH2A en amont du TSS de certains gènes impliqués dans la régulation du développement et des cascades de signalisation. De plus, dans certains cas, MacroH2A aurait une capacité à réguler positivement la transcription, ce qui étendrait donc les rôles historiques de ce variant généralement associé à des régulations négatives.

H2AX est un variant de l’histone H2A découvert dans les années 1980 qui possède une

structure similaire à H2A excepté un motif présent sur son extrémité C-terminale (Redon et

al., 2002). H2AX est impliqué dans la réparation des cassures doubles brins de l’ADN, la

phosphorylation de sa sérine 139 permettant en effet le recrutement de nombreuses protéines impliquées dans la réponse à ce type de dommages de l’ADN (Paull et al., 2000).

b-Les variants de H3

H3.3 est un variant de l’histone H3 (Hake et Allis, 2006) spécifiquement enrichi sur

les gènes ayant un fort taux en CpG au niveau des promoteurs (HCP), qu’ils soient transcriptionnellement actifs ou non, au niveau de leurs séquences régulatrices, de leurs corps et après leurs signaux de terminaison; et cela dans les cellules souches embryonnaire (cellules ES) ainsi que dans les cellules différenciées. Cependant, il est important de noter que H3.3 est perdu par les gènes pluripotents tel que Nanog ou Oct 4 au cours de la différenciation cellulaire. H3.3 est incorporé dans la chromatine par deux voies distinctes. La première, nécessitant la protéine chaperonne HIRA, est mise en jeu sur les gènes HCP alors que la seconde, impliquant Atrx est relative au chargement de H3.3 au niveau des télomères (Glodberg et al., 2010). Il a également été établie une anti-corrélation entre la présence du variant d’histone H3.3 (localisé majoritairement au niveau de régions transcriptionnellement actives) et celle de H1 au niveau de la chromatine, probablement afin que les gènes et les

Figure 5: Exemples de modifications post-traductionnelles des histones.

Les extrémités N-terminales des histones sont les cibles de modifications post-traductionnelles, telles que l’acétylation et la méthylation des résidus lysines et arginines, la phosphorylation sur les sérines et les thréonines ou encore l’ubiquitination.

éléments régulateurs restent accessibles à divers facteurs impliqués dans la régulation transcriptionnelle (Braunschweig et al., 2009).

La protéine CENP-A est un variant de l’histone H3 chez les vertébrés. On la trouve uniquement au niveau des centromères où elle permet la formation d’un nucléosome spécifique dont la structure reste à déterminer (Henikoff et Ahmad, 2000). Deux études ont montré le remplacement de l’histone H3 par CENP-A au niveau des centromères, dont des études de ChIP-chip (immunoprécipitation de la chromatine et analyse sur puce) qui montrent une déplétion en H3 in vivo au niveau de domaines où CENP-A est présente (Lo et al., 2001), mais également des études de microscopie chez la Drosophile mettant en avant une absence de H3-GFP (Green fluorescent protein) au niveau des domaines de liaison de CID (orthologue de CENP-A) (Ahmad et Henikoff, 2001). Paradoxalement, d’autres travaux montrent au contraire qu’il existerait une alternance de nucléosomes incluant CENP-A avec d’autres présentant H3 au sein du centromère (Blower et al., 2002). CENP-A est essentielle dans l’organisation et la fonction du kinétochore, sa déplétion par ARN interference (ARNi) chez C.elegans (Buchwitz et al., 1999) ou chez D.melanogaster (Blower et Karpen, 2001) ou bien son inactivation par KO chez la Souris (Howman et al., 2000) entrainant d’importants problèmes dans la ségrégation des chromosomes et même un phénotype létal dans certains cas.

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