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Une offre directe d’accompagnement et de services qui n’en est qu’à ses prémisses

Chapitre II : L'organisation du recouvrement et l'accompagnement des entreprises

2. Une politique d’accompagnement des entreprises qui se met en place avec une ampleur limitée

2.3. Une offre directe d’accompagnement et de services qui n’en est qu’à ses prémisses

Dans quelle mesure les organismes de recouvrement doivent-ils aller au-delà de leur mission principale pour offrir aux entreprises, notamment les plus petites, un accompagnement et des services complémentaires ? Ils le font déjà dans un certain nombre de cas pour des services de nature administrative mais la DSN offre de nouvelles perspectives en la matière, qui seront à réfléchir à l’avenir. La question se pose en outre d’aller plus loin en proposant aux entreprises des formes de conseils, à certaines étapes de leur cycle de vie ou d’activité.

2.3.1. Les services « administratifs » : un succès inégal et des imperfections

Plusieurs offres de services administratifs aux employeurs existent actuellement : le titre emploi service entreprises (Tese) ou, pour les entreprises agricoles, le titre emploi simplifié agricole (Tesa), le chèque emploi associatif (CEA) pour les associations et le chèque emploi service universel (Cesu) pour les particuliers employeurs (cf. encadré 4).

Ces dispositifs visent à prendre en charge une grande partie des formalités administratives résultant de l’embauche d’un salarié.

76 Encadré 4 - Les offres de services administratifs

Le titre emploi service entreprises (Tese) permet aux entreprises de moins de vingt salariés de gérer l'ensemble de leurs salariés, quel que soit leur contrat de travail (contrat à durée indéterminé, contrat à durée déterminée, contrat d'apprentissage...). Ce dispositif permet d’effectuer la déclaration préalable à l’embauche (DPAE) et le contrat de travail, une seule déclaration mensuelle pour l’ensemble des organismes de protection sociale obligatoire (sécurité sociale, assurance-chômage, retraite complémentaire et, le cas échéant, caisse de congés payés et prévoyance / retraite supplémentaire / soins santé), l’édition du bulletin de salaire, le règlement à l’Urssaf des cotisations et contributions, et en fin d’année l’édition de l’attestation fiscale à remettre au salarié.

Le titre emploi simplifié agricole (Tesa) est un dispositif équivalent pour les entreprises agricoles, utilisable pour les salariés embauchés en contrat à durée déterminée (CDD) pour une durée de trois mois ou moins. À partir de 2018, la MSA met en place un nouveau Tesa (désormais appelé titre emploi service agricole), destiné aux entreprises qui n’ont pas de logiciel de paie et qui ne passent pas par un tiers déclarant. Une entreprise comptant au plus vingt salariés en contrat à durée indéterminée (CDI) pourra utiliser le Tesa pour tous ses salariés (quels que soient leur contrat), ou seulement pour ses salariés occasionnels (en CDD de 119 jours ou moins). Une entreprise qui emploie plus de vingt salariés en CDI ne pourra utiliser le Tesa que pour ses salariés occasionnels, la DSN devant être utilisée pour les autres salariés.

Le CEA et Impact Emploi Association sont deux offres complémentaires qui permettent une prise en charge globale des formalités de gestion d’un salarié dans une association. Le CEA concerne les salariés à temps partiel ou de courte durée alors que le dispositif Impact Emploi vise les salariés permanents. Les deux dispositifs sont gérés par l’Urssaf.

Les dispositifs précédents seront chargés d'établir pour le compte des adhérents les formalités relatives à la déclaration sociale nominative.

Le chèque emploi service universel (Cesu) est également une offre de services qui permet de réaliser simplement l’ensemble des formalités administratives pour un salarié d’un particulier employeur.

Le Tesa, réservé aux salariés occasionnels (en contrat à durée déterminée de trois mois ou moins), est utilisé par un grand nombre d’entreprises agricoles. Sa dématérialisation permet de ne pas avoir à ressaisir les informations en cas de contrats successifs pour un même salarié (saisonnier).

La MSA a communiqué sur ce dispositif auprès des centres comptables.

Le Tese est en revanche peu utilisé. Ce service a pu être perçu comme une concurrence vis-à-vis des offres privées de gestion proposées en particulier par les experts comptables49. Il n’a bénéficié que de peu de promotion et est mal connu des entreprises, alors qu’il pourrait pourtant être très utile aux petites entreprises qui, souvent pour une question de coût, ne passent pas par un tiers déclarant.

Certaines limites du dispositif ont également contribué à son relatif échec. Le Tese est censé gérer les affiliations aux régimes de retraite complémentaire, et aux régimes collectifs de prévoyance, de complémentaire santé et de retraite supplémentaire. De fait, beaucoup d’erreurs ont été relevées dans les régimes d’affiliation et dans les taux de cotisation appliqués (y compris à l’Agirc-Arrco), qui obligent à des retours auprès des entreprises en vue de corrections. Le dispositif, qui cherchait à simplifier les formalités, s’est finalement révélé d’une gestion relativement lourde.

L’hétérogénéité de la législation constitue une difficulté pour ces dispositifs dans la mesure où les services gestionnaires ne disposent pas de toute l’information nécessaire. Pour les

49 Le Tese est utilisé pour les saisonniers dans les secteurs non agricoles mais ils représentent des effectifs moins importants que dans l’agriculture.

77 complémentaires santé et la prévoyance, il peut exister différents taux de contributions en fonction des conventions collectives et, au-delà, selon les entreprises, dont certains contrats (surcomplémentaire santé) peuvent par ailleurs être facultatifs. Il est donc à ce stade, avant le parachèvement de la DSN, difficile de connaître avec certitude les contrats et les taux de cotisation qui s’appliquent à un salarié. Si les accords d’entreprise prennent le pas sur les accords collectifs, le problème se complexifiera encore davantage (plusieurs milliers d’accords).

La mise en œuvre sans erreur de tels dispositifs nécessiterait à cet égard de disposer d’une base de données à jour des contrats de toutes les conventions collectives50.

À terme, la mise en œuvre de la DSN offre la possibilité de réfléchir à de nouveaux services en direction des entreprises comme des salariés comme par exemple la production d’un « bulletin de salaire universel » ou le déclenchement d’informations en direction du salarié en cas de changement de statut (cf. chapitre I).

2.3.2. Une offre de conseils aux entreprises peu développée en provenance des organismes de protection sociale

Au-delà de l’offre de services administratifs, la question se pose d’une offre de conseil aux entreprises par les organismes de recouvrement, notamment aux étapes importantes de la vie des entreprises que sont leur création, leurs éventuels changements de statut, le développement de leurs embauches, ou, au contraire, leur fin d’activité et leur transmission51.

La complexité de la législation, et sa dimension à la fois sociale et fiscale, pourraient justifier une telle intervention des organismes. Les créateurs d’entreprise peuvent en effet ne pas maîtriser la législation et choisir en toute connaissance de cause le statut le mieux adapté à leur activité.

Les organismes de recouvrement n’offrent aujourd’hui pas systématiquement de conseil aux créateurs d’entreprise. Dans le secteur public, ce sont principalement les chambres consulaires qui proposent ce type de conseils, auquel les organismes de recouvrement peuvent s’associer. C’est par exemple le cas de l’Urssaf Poitou-Charentes, qui organise des stages pour les créateurs d’entreprise, avec les chambres consulaires, pour présenter les différents statuts sociaux.

De leur côté, les conseillers du RSI interviennent régulièrement depuis plus de dix ans dans la quasi-totalité des sessions d’information proposées par les chambres consulaires, notamment des Régions Centre-Val-de-Loire et Normandie, pour présenter la réglementation sociale aux créateurs d’entreprise. Le RSI souligne toutefois qu’il y a chaque jour 2 000 nouvelles inscriptions d’entreprises, et qu’un accompagnement individualisé serait impossible à organiser.

Dans le réseau Agirc-Arrco, à l’initiative de certaines chambres de commerce et d’industrie, des IRC participent à des stages destinés aux créateurs d’entreprise.

50 Si les conventions collectives font l’objet d’un recensement par la direction générale du travail et sont rendues publiques sur le site Légifrance, il n’existe, en revanche, aucune base publique de données informatiques permettant d’identifier, pour chacune des conventions, les régimes de protection sociale (de base ou complémentaires, obligatoires ou facultatifs) et les taux de cotisation correspondant.

51 La question du conseil aux entreprises en difficulté est traitée dans un chapitre spécifique.

78 Dans le secteur agricole, la fonction de conseil est également dévolue aux chambres d’agriculture. Toutefois, le réseau des MSA apporte, à la demande, des conseils aux adhérents quant aux impacts du choix d’un statut social en matière de cotisations et de contributions sociales ainsi que sur les aides sociales (exonérations, réductions de taux…) relevant de son champ de compétences. Le conseil peut aussi être donné après l’installation. Ainsi, dans le Languedoc, un agriculteur qui s’installe bénéficie d’un stage de la chambre d’agriculture, avec une présentation de la MSA, qui programme une visite de son exploitation deux ans après. Dans le réseau des Urssaf, des journées d’information sont parfois organisées à destination des auto-entrepreneurs leur présentant les démarches à accomplir auprès des caisses de sécurité sociale (pour l’instant uniquement pour les professions libérales).

Mais ces offres ne sont pas généralisées et, par ailleurs, les organismes restent dans leur domaine de compétence : le champ de la protection sociale. Les organismes de recouvrement seuls ne peuvent ainsi, en l’absence de dispositif interministériel constitué à cet effet, donner de conseil en matière fiscale ou en droit du travail, ces compétences relevant de la DDFiP ou de la Direccte. Pour sa part, la DGFiP considère qu’elle n’a pas vocation à donner des conseils aux entreprises, mais elle répond aux questions juridiques que celles-ci se posent. Elle a développé une offre de service en direction des créateurs d’entreprise, sous forme d’un livret, mais qui ne traite que des questions fiscales. Si une offre publique était envisagée, elle devrait, pour être utile, couvrir l’ensemble des champs pertinents : social, fiscal, travail et, par conséquent, être assurée par tous les organismes compétents, dans le cadre de partenariats qui n’existent pas actuellement.

L’offre privée de conseil est quant à elle beaucoup plus structurée, principalement à travers les réseaux d’experts comptables ou de cabinets conseil, qui proposent des conseils aux créateurs d’entreprise pour choisir leur statut. Il est cependant parfois reproché aux conseils dispensés par certains organismes privés de privilégier l’optimisation par les entreprises de leurs coûts à court terme, aux dépens de la prise en compte d’enjeux de plus long terme, notamment en termes de constitution de droits sociaux. Cette approche peut avoir des conséquences en matière sociale, en conduisant à privilégier à court terme un statut moins coûteux en termes de cotisations sociales, mais n’ouvrant en contrepartie que peu de droits en matière de retraite52.

Une offre publique de conseil plus développée pourrait à cet égard davantage mettre les prélèvements socio-fiscaux en regard des droits sociaux ouverts aux assurés. Elle ne pourrait toutefois être envisagée que dans un partenariat associant tous les secteurs de l’administration, et dans le cadre de collaborations instituées avec les acteurs privés qui interviennent dans ces domaines.