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7.3.1 CeP t

3

Si

Des expériences tunnel Josephson ont été réalisées dans CeP t3Si par Su-miyama et collaborateurs [98]. Dans la direction a, ils ont mesuré une dépen-dance conventionnelle de l’effet Josephson (voir figure 7.5), tandis que dans la direction c, l’amplitude du courant Josephson critique est non-décroissante et similaire à nos prédictions (voir figure 7.6). Ceci semble donc constituer une évidence que non seulement la parité mais également la symétrie par renversement du temps est brisée dans ce matériau (en raison de la présence d’ordre antiferromagnétique) et semble indiquer un paramètre d’ordre d + ip.

7.3.2 Y Ba

2

Cu

3

O

7−δ

Il existe un ensemble de mesures de couplage Josephsondans des jonctions Y Ba2Cu3O6+x/Pb suivant différentes directions réalisées par Xavier Grison pendant sa thèse de doctorat [44].

Obtenir un couplage Josephson entre un métal comme le plomb et Y Ba2Cu3O7−δ est extrêmement difficile et très peu de groupes y sont parvenu. La raison en est que la surface d’Y Ba2Cu3O7−δ s’oxyde très facilement et constitue alors une barrière trop épaisse pour permettre l’effet tunnel. Ces jonctions ont donc été réalisées in situ dans un évaporateur équipé d’un système de jeu de masques mécaniques qui permettent la réalisation de jonctions, puis immé-diatement mises à froid, car l’interface évolue très rapidement à température ambiante. La qualité des surfaces sur lesquelles ont été réalisées les jonctions

Figure 7.4 – Courant critique Josephsonen fonction du champ magnétique pour un supraconducteur "d + ip" avec domaines dans la composante p. Les paramètres sont les mêmes que pour la figure 7.3. Les points bleus et les poin-tillés rouges correspondent à deux domaines et deux configurations différentes dont les extrémités sont donnés par (-L/2,-L/3,+L/2) et (-L/2,+L/4,+L/2) respectivement. Le trait plein noir correspond à cinq domaines (-L/2, -0.41L, 0.09L, 0.15L, 0.23L, +L/2).

Figure 7.5 – D’après [98] : Courant Josephson IC(B) pour une jonction CeP t3Si/Al suivant la direction a. Existence d’une enveloppe décroissante. La figure est globalement symétrique en H=0 et le maximum est en H=0.

Figure 7.6 – D’après [98] : courant Josephson IC(B) pour une jonction CeP t3Si/Al suivant la direction c. Pas d’enveloppe décroissante et pas de symétrie en H=0.

Figure 7.7 – Courbe IC(B) obtenue à 1.3 K pour une jonction Y Ba2Cu3O7−δ /Pb dans la direction (110). D’après [44].

a été contrôlée par microscopie électronique et RHEED. Des jonctions ont été réalisées dans les directions (001), (100) et (110).

Dans la direction (001), les auteurs observent une figure de Fraunho-fer conventionnelle 7.8, alors que dans les autres directions, le courant est une fonction non paire du champ, il subsiste un caractère oscilllant, non-décroissant du courant à très fort champ et l’ensemble ressemble fortement à nos simulations (voir figure 7.7 pour la direction (110)). La mesure du courant critique est parfaitement reproductible en champ, mais change complètement lorsque l’échantillon est réchauffé puis refroidi. Les films sont déposés sous conditions optimales de température et de pression d’oxygène cependant, il est fort probable que la jonction Y Ba2Cu3O7−δ/Pb soit localement sous-oxygénée et que le composé mesuré soit en réalité un composé sous-dopé.

Il serait intéressant de reproduire ces expériences dans un composé sous-dopé et de corréler l’existence de ces domaines à la présence d’un pseudogap en mesurant la conductance tunnel au-dessus de la TC du plomb.

Il est bien connu que la surface (110) d’un supraconducteur onde−d pré-sente un caractère dépariant, et qu’elle génère des états liés d’énergie nulle appelé états liés d’Andreev [49]. Une conséquence de la présence de ces états, observée dès 1992 est un pic de courant à tension nulle dans la caractéristique tunnel d’une jonction Y Ba2Cu3O7−δ/métal normal [77]. Il a été proposé que

Figure 7.8 – Courbe IC(B) obtenue à 1.3 K pour une jonction Y Ba2Cu3O7−δ /Pb dans la direction (001). D’après [44].

ces états liés provoquent un renforcement d’une sous-composante du para-mètre d’ordre d ou bien s [39]. Cependant, seul un parapara-mètre d’ordre du type d + ip peut produire des courants d’amplitude non-décroissante en champ, comme ceux qui sont observés.

7.4 Conclusion

Un nouvel aspect de l’effet Josephson a été mis à jour pour les supracon-ducteurs brisant des symétries particulières.

En effet, lorsque la parité spatiale et la symétrie par renversement du temps sont simultanément brisées, la distinction entre couplage singulet et triplet est brouillée et le paramètre d’ordre peut s’écrire s + ip ou bien d + ip. La sous-composante p va être capable de se coupler aux courants circulant dans certaines directions. Dans ce cas, la présence d’une surface dans une direction particulière (perpendiculaire à la direction de la composante p) va exalter la sous-composante p en raison de la présence des courants Meissner. Lorsqu’une jonction Josephson est réalisée avec un autre supraconducteur lui conventionnel, le courant critique Josephson montre un comportement très particulier. Il n’y a pas de décroissance en 1/H du courant critique, celui-ci n’est pas symétrique autour de H = 0 et n’admet pas de maximum en H = 0. En revanche dans une direction perpendiculaire au plan du para-mètre d’ordre, on doit retrouver un comportement conventionnel pour l’effet Josephson.

Ces résultats qui permettent donc d’établir l’existence simultanée d’une brisure de symétrie par renversement du temps et de symétrie spatiale ont été appliqués au composé à fermions lourds non-centrosymmétrique CeP t3Si ainsi qu’aux cuprates sous-dopés.

Chapitre 8

Conclusion et perspectives

Nous avons présenté différentes expériences ayant trait aux supraconduc-teurs à haute température critique réalisées ces douze dernières années tout d’abord au sein de l’UMR137 CNRS/Thalès puis à l’UPR5 CNRS/ESPCI.

Tout d’abord nous avons présenté les résultats d’expériences d’effet Jo-sephson intrinsèque sur des monocristaux de Bi2Sr2CaCu2O8+d. Nous avons étudié la dynamique de ces jonctions après avoir réalisé des mesas dans des monocristaux de Bi1.6P b0.4Sr2CaCu2O8+d, et cherché à comprendre les rai-sons de la diminution du produit ICRN. Nous avons mis en évidence l’exis-tence de flux-flow sous champ magnétique extérieur nul.

Nous avons ensuite présenté nos résultats sur l’injection de spin dans un SHTC à partir d’un matériau à magnéto-résistance colossale La0.66Sr0.33M nO3. Nous avons démontré expérimentalement que les effets publiés dans la litté-rature étaient plus probablement de nature thermique que magnétique.

Nous sommes ensuite passé à l’injection de spin dans un matériau conven-tionnel comme le Nb. Par spectroscopie tunnel nous avons mesuré la densité d’états d’un supraconducteur conventionnel soumis à un courant polarisé en spin. Nous avons montré que cette expérience permet de réaliser une sépa-ration spatiale du spin et de la charge et montré un effet de blocage de la recombinaison à cause de la polarisation en spin : l’effet de "spin-bottleneck". Nous avons consacré une longue étude aux fluctuations thermodyna-miques dans les supraconducteurs à haute température critique et montré qu’à champ magnétique nul, on assiste bien à des fluctuations gaussiennes de l’amplitude et de la phase du paramètre d’ordre. En collaboration avec M. Grilli et S. Caprara de l’université La Sapienza, nous avons montré que ceci prouve qu’une description hydrodynamique et invariante de jauge des

fluctuations correspondant à des paires de fermions relativement libres est adéquate.

Nous avons mené cette étude également dans un supraconducteur très sous-dopé pour lequel nous avons pu tuer complètement la supraconductivité sous champ magnétique intense pulsé à l’Université Catholique de Leuven en collaboration avec J. Vanacken et V.V. Moshchalkov. Cependant, nous avons montré que la transition Supraconducteur/isolant sous champ magnétique intense pourrait être gouvernée par la localisation de paires de Cooper et la la formation d’un superfluide de vortex.

Enfin, nous nous sommes intéressés au couplage Josephson pour des ma-tériaux brisant simultanément les parités spatiale et temporelle et nous avons montré que dans ce cas le courant critique Josephson n’admet pas de décrois-sance en fonction du champ. Ceci permet d’identifier des supraconducteurs au couplage mixte singulet/triplet.

Je souhaite poursuivre les expériences sur les SHTC. En particulier, je pense qu’il est important d’explorer la partie sous-dopée du diagramme de phase des cuprates, où des moments magnétiques orbitaux ont été mis en évidence par une expérience récente de neutrons polarisés [35] (voir Figure 8.1). Des expériences d’effet Sagnac ont également mis en évidence la pré-sence de moments ferromagnétiques associés à une brisure de la symétrie par renversement du temps [110] (voir Figure 8.2). En collaboration avec Philippe Monod et Dorothée Colson (SPEC-CEA), nous avons commencé l’étude du diagramme de phase d’Y Ba2Cu3O7−δ sous-dopé par des mesures d’aimantation en utilisant un SQUID MPMS sous 1 Tesla. Les échantillons sont des céramiques fabriquées par D. Colson, de dopage en oxygène contrôlé par thermogravimétrie.

Je souhaite aussi poursuivre mon étude sous champ magnétique intense à l’Université de Leuven. Si l’on dope La2CuO4 isolant par des ions Sr on obtient un composé conducteur et sous-certaines conditions supraconduc-teur avec des porsupraconduc-teurs de charge de type trou, dont le comportement a été largement décrit dans ce manuscrit. Si maintenant l’on dope le même ma-tériau avec des ions Ce on obtient un composé dont les porteurs de charge sont des électrons et qui est supraconducteur également. Nous avons donc la possibilité d’étudier deux systèmes très symétriques. Dans le cadre de notre collaboration avec KU Leuven (Belgique) et le "National Laboratory for Su-perconductivity " de l’"Institute of Physics" de Beijing (Chine), nous avons commencé l’étude sous champ intense des composés supraconducteurs dopés aux électrons. En effet, ces composés sont également le siège d’un pseudogap

Figure 8.1 – D’après [35]. Diagramme de phase obtenu par la diffraction de neutrons polarisés. Les points blancs correspondent à Tmag au-dessous de laquelle une aimantation alternée est observée.

Figure 8.2 – D’après [110]. Diagramme de phase d’YBCO établi par [110]. Les points verts correspondent à la température au-dessous de laquelle un signal d’effet Kerr est observé.

et d’une transition supraconducteur/isolant et leur diagramme de phase pré-sente une symétrie avec celui des composés dopés aux trous. Nous souhaitons les analyser à la lumière des résultats obtenus pour La2−xSrxCuO4.

Parmi les expériences que je souhaiterais réaliser, il y a également la me-sure de l’imbalance de branche sans un supraconducteur à haute température critique. Toutefois, ce projet se révèle difficile pour des raisons technologiques de réalisation des échantillons. Il faut en effet être capable de réaliser deux jonctions supraconducteur/métal à quelques centaines de nanomètres de dis-tance, et nous explorons diverses pistes technologiques possibles.

Les SHTC présentent une symétrie non conventionnelle et anisotrope du paramètre d’ordre de type majoritairement d. (Nous avons vu que cela peut être d+ip dans les sous-dopés). Dans un tel supraconducteur, les collisions avec les impuretés non-magnétiques devraient induire un dépairage assez im-portant, ce qui ne se réconcilie pas très bien avec la valeur élevée des tempé-ratures critiques et leur robustesse vis-à-vis des impuretés. Il semble donc que le potentiel diffusif des principales impuretés rencontrées dans ces matériaux n’induise pas de grandes variations angulaires de −→

k puisque Tc reste extrê-mement robuste aux impuretés. Comme le taux de relaxation de branche et le taux de dépairage (variation de TC) sont identiques ainsi que cela a été démontré par Lemberger [71], on peut s’attendre à une faible relaxation de branche par les processus élastiques.

Si le mécanisme de relaxation du déséquilibre de charge est modifié dans le cas d’un gap anisotrope, dans le sens où il inclut les processus élastiques de collision, le mécanisme de génération du déséquilibre de branche peut lui aussi être fortement modifié par l’existence des nœuds du gap. Tout d’abord il est possible d’injecter massivement des quasiparticules même à basse énergie dans ces directions, c’est-à-dire que la jonction tunnel d’injection n’est plus nécessaire. De plus le voisinage des directions [110] va agir comme un puits de potentiel pour les déséquilibres de branche. En effet dans la direction stricte des nœuds, la situation est semblable à celle d’un métal où les processus de changement de branche sont interdits, la relaxation ne peut se faire que par des processus permettant de diffuser hors de cette direction. Cependant, dans le cas du métal, la génération de déséquilibre de branche s’arrête lorsque le potentiel créé est suffisant pour générer le courant évacuant la charge, ce qui ne sera pas le cas ici puisque le courant circule sans potentiel associé. (Dans un métal, le déséquilibre de charge ne peut ni s’établir ni relaxer.) Les particules de basse énergie responsables d’un déséquilibre de charge autour de la direction des nœuds vont donc se retrouver comme piégées dans un

puits de potentiel puisque s’évader de cette direction va les confronter à une augmentation d’énergie en raison de l’augmentation du gap.

Cet effet, bien compris dans les supraconducteurs conventionnels, permet-trait de jeter un éclairage nouveau sur les processus de relaxation mettant en jeu les excitations, en raison de leur parenté avec les processus à caractère dépariant (impuretés magnétiques, impuretés non-magnétiques en présence d’anisotropie etc. . .)

On le voit, il reste donc de nombreuses pistes à explorer pour mieux connaître les excitations dans ces matériaux étranges que sont les oxydes supraconducteurs.

Annexe A

Liste des publications

A.1 Revues à comité de lecture

• J. Henry, A. Barbu, B. Leridon, D. Lesueur and A. Dunlop "Electron microscopy observations of titanium irradiated with GeV heavy ions", Nu-clear Instruments and Methods in Physics Research B 67, 390 (1992)

• B. Leridon and R. Maoli, "Critical Josephson currents as a characte-rization tool for superconducting junction arrays", J. Appl. Phys.74, 5648 (1993)

• Egon Marx, Brigitte Leridon , T. R. Lettieri, J.-F. Song, and T. V. Vor-burger "Autocorrelation functions from optical scattering for one-dimensionally rough surfaces", Applied Optics 32, 67 (1993)

• B. Leridon, "Josephson noise in quasiparticle mixers". J. Appl. Phys. 81, 3243 (1997)

• B. Leridon, P. Febvre, S. George, P. Feautrier and W. R. McGrath , "Experimental evidence of Josephson noise in Superconductor-insulator-superconductor quasiparticle mixer". J. Appl. Phys. 82, 3024 (1997)

• B. Leridon, A. Défossez, J. Dumont ,J.P. Contour "Transport measure-ments in Y Ba2Cu3O7−d/P rBa2Cu3−xGaxO7−d superlattices : experimental evidence for underdoping", Physica C 328, 104 (1999)

• B. Leridon, A. Défossez, J. Dumont, J. Lesueur and J. P. Contour "Conductivity of underdoped Y Ba2Cu3O7−d : evidence for incoherent pair correlations in the pseudogap regime" Phys. Rev. Lett. 87, 197007 (2001)

• B. Leridon, A. Défossez, J. Dumont, J. Lesueur and J. P. Contour, Re-ply. to Comment On "Conductivity of underdoped Y Ba2Cu3O7−d: evidence

for incoherent pair correlations in the pseudogap regime", Phys. Rev. Lett., 2003. 90(17) : p. 179704

• J. Dumont, M. Moragues, B. Leridon, J. Lesueur and J.P. Contour, "New insight on spin polarized current injection in high-Tc cuprate/manganite devices. EPJB, 35, p. 331-337 (2003)

• S. Caprara, M. Grilli , B. Leridon and J. Lesueur, « Extended para-conductivity regime in underdoped cuprates ». Phys . Rev. B. 72, 104509 (2005)

• B. Leridon, J. Lesueur and M. Aprili, « Spin bottleneck due to spin-charge separation in a superconductor », Phys. Rev. B 72, 180505(R) (2005) • B. Leridon,Tai.-Kai. Ng and C.M. Varma, "Josephson effect for su-perconductors lacking time-reversal and inversion symmetries", Phys. Rev. Letters 99, 027002 (2007)

• B. Leridon, J. Vanacken, T. Wambecq and V.V. Moshchalkov, "Para-conductivity of underdoped La2−xSrxCuO4 thin-film superconductors using high magnetic fields", Phys. Rev. B. 76, 012503 (2007)

• N. Bergeal, J. Lesueur , M. Sirena, G. Faini, M. Aprili , J.P. Contour and B. Leridon "Using ion irradiation to make high-Tc Josephson junctions ", J. Appl. Phys. 102, 083903 (2007)

• N. Bergeal, J. Lesueur, M. Aprili, G. Faini, J. P. Contour and B. Leridon "Pairing fluctuations in the pseudogap state of copper-oxide superconductors probed by the Josephson effect", Nature Physics 4, 608 (2008)

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