5.3 Oscillations collectives de spins dans un ferrofluide
5.3.3 Observation exp´erimentale des modes de spin dans un conden-
η
xσ
x2+ η
yσ
y2+ η
zσ
z2. (5.87)
Remarquons que le mode de plus basse ´energie (non nulle) pr´esente des oscillations
collectives de spin dont l’amplitudeP varie lin´eament dans l’espace. Si ces oscillations
ont lieu suivant l’axe x, on a P
1,0,0=a
1,0,0x. La fr´equence de ce mode est 2πυ
1,0,0=
~/M σ
x2. D’apr`es la relation (5.73), on a
2πυ
1,0,0ω
x. (5.88)
Ce comportement collectif pour lequel la fr´equence d’oscillation est inf´erieure aux
fr´equences de pi´egeage est une caract´eristique unique des condensats spinoriels. En
effet, les modes de l’´etat fondamental d’un condensat scalaire sont caract´eris´es par
des fr´equences sup´erieures ou ´egales aux fr´equences du pi´egeage harmonique [86].
5.3.3 Observation exp´erimentale des modes de spin dans un
condensat de 52Cr pi´eg´e
Des modes collectifs caract´eris´es par une fr´equence inf´erieure aux fr´eqeunces du
pi`ege ont ´et´e observ´es exp´erimentalement par Lepoutre et al. [38]. La situation
ex-p´erimental est ´equivalente `a celle discut´e au chapitre 4. Les auteurs consid`erent
un condensat de
52Cr de N ' 4 ×10
4dans un pi`ege de fr´equence ω
x= 298 Hz,
ω
y= 245 Hz et ω
z= 210 Hz (fig. 5.2). Les spins sont ´ecart´es de leur direction
ini-tiale d’un angle θ
r= π/2. `A partir de cet ´etat initial, les dynamiques de spins sont
enclench´ees par la pr´esence d’un champ magn´etique inhomog`ene
γ
z'γ
zxxeˆ
z(5.89)
COLLECTIFS DE SPIN DANS UN FERROFLUIDE
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110
0
20
40
60
80
100
120
140
Figure 5.2 – Fr´equence des oscilations de spin associ´ees aux dynamiques de populations
et de la s´eparation spatiale des ´etats de spin. La fr´equence th´eorique est indiqu´ee en par la
ligne en traitill´ees. Les donn´ees exp´erimentales sont reprisent `a partir de [38].
R´esultats exp´erimentaux
Les auteurs mesurent les oscillations des populations de spin en variant γ
zx. Ils
observent que la fr´equence de ces oscillations augmente avec leγ
zx. Ces r´esultats sont
repris sur la figure5.2 (courbe en pointill´ees rouges). Les auteurs observent aussi des
oscillations m´ecaniques mesur´ees `a partir de l’´evolution de la s´eparation spatiale entre
les diff´erents ´etats de spin. Comme on peut le constater sur la figure 5.2 (courbe en
pointill´ees noir), les fr´equences des oscillations m´ecaniques sont proches des fr´equences
des oscillations des populations de spin. Cela indique que ces deux oscillations sont
coupl´ees. Pourγ
zx'6.18 mG cm
−1, les populations de spin oscillant `a une fr´equence
de
υ
exppop= 36.5±7 Hz. (5.90)
Pour la mˆeme valeur du gradient, la fr´equence des oscillations m´ecanique est de
υ
expmec= 40±4 Hz. (5.91)
Comparaisons aux r´esultats th´eoriques
Comparons `a pr´esent ces r´esultats exp´erimentaux aux pr´edictions de notre mod`ele
th´eorique. Pour les param`etres exp´erimentaux donn´es pr´ec´edemment, l’´energie par
particule (5.72) est minimis´ee par les valeurs σ
x' 2.4µm, σ
y' 2.92µm et σ
z'
3.4µm. Ainsi, pour des oscillations suivant l’axe x, la fr´equence du mode de plus
basse ´energie pr´edite par nos calculs est
Ce r´esultat est bon accord avec les mesures exp´erimentales `a gradient faible (fig. 5.2).
Pourγ
zx>20 mG cm
−1, les fr´equences mesur´ees exp´erimentalement s’´ecartent
sensi-blement de la valeur th´eoriqueυ
1,0,0. Dans ce r´egime, l’approximation des faibles
oscil-lations que nous avons consid´er´ee pour r´esoudre l’´equation du spin n’es plus valables.
De plus, pour des gradient fort, l’approximation d’un condensat ferromagn´etique n’est
plus valable. `A titre quantitatif, la condition (5.59), avec T =π/2ω
x' 4.8ms donne
γ
zx90 mG cm
−1.
Analyse des effets dipolaires
Finalement, notons que le bon accord entre les mesures exp´erimentales `a gradient
faible et nous calculs semblent indiquer que les effets dipolaires (absents dans notre
mod`ele) sont n´egligeables. Pour comprendre cette observation, nous avons ´etudi´e la
stabilit´e d’un syst`eme uniforme `a l’aide de l’analyse de Bogoliubov introduite au
chapitre 2. Plus pr´ecis´ement, nous avons calcul´e le spectre d’excitation apr`es une
rotation des spins d’un angle θ
r= π/2. Pour ce faire, nous avons ´ecrit le syst`eme
d’´equations de Bogoliubov (´eq. 2.32) dans le rep`ere de Larmor introduit `a la section
4.1.2. Cela revient essentiellement `a effacer le champ magn´etique en posant p = 0
et `a n´egliger les termes de relaxation dipolaire. La matrice de Bogoliubov peut ˆetre
trouv´ee dans l’annexeB. En l’absence d’interaction dipolaire, les spectres ´energ´etiques
des modes de densit´e et de spin sont donn´es simplement par les ´equations (2.130),
(2.131) et (2.132) avecp= 0. En particulier, il y a deux modes non gapp´es. Le premier
est un mode de densit´e et le second est un mode de spin pr´esentant le spectre suivant
E
k= ~
2k
22M , (5.93)
o`u k est le nombre d’onde. En pr´esence d’interaction dipˆole-dipˆole, le spectre de ce
mode est fortement modifi´e. Apr`es calculs, on obtient
E
k=p
[ε
k−3πc
ddnS(θ
k)] [ε
k+ 6πc
ddnS(θ
k)], (5.94)
o`uS est une fonction d´ependant de l’angle polaire θ
kdonn´e par
S(θ
k) = 13 + cos 2θ
k. (5.95)
L’expression (5.94) montre que les excitations de longueur d’onde λ
c= 2π/k
λ
c>2π/p8M πc
ddn/~
2(5.96)
sont dynamiquement instables.
Dans l’exp´erience, la densit´e du condensat d´ecroit `a cause de la perte d’atomes
par relaxation dipolaire. Pour faire une comparaison quantitative, on peut consid´er´e
une densit´e moyenne de l’ordre de n∼10
20m
−3. On obtient
λ
c&8µm. (5.97)
La longueur d’onde des excitations instables est du mˆeme ordre de la taille du
conden-sat pi´eg´e. Par cons´equent, les effets dipolaires li´es `a cette instabilit´e dynamique
pour-raient ˆetre diminu´es par le pi´egeage, ce qui expliquerait pourquoi il y a un bon accord
avec nos calculs avecc
dd= 0. Pour un syst`eme plus grand, on peut s’attendre `a ce que
le comportement collectif soit fortement modifi´e par les interactions dipˆole-dipˆoles.
COLLECTIFS DE SPIN DANS UN FERROFLUIDE
5.4 Conclusion
Dans ce chapitre nous nous sommes int´eress´es `a la persistance de la nature
fer-romagn´etique en pr´esence d’un gradient de champ magn´etique. Nous avons vu que
l’´energie cin´etique acquise par les ´etats de spin en pr´esence d’un gradient∇γ
ztend `a
alt´erer la nature ferromagn´etique du syst`eme. Cet effet est contrebalanc´e par
l’´ener-gie ferromagn´etique due aux interactions de contact c
1n. Nous avons interpr´et´e la
persistance du ferromagn´etisme comme le r´esultat d’une comp´etition entre ces deux
effets, et nous avons obtenu un crit`ere qui fixe le r´egime de cette persistance.
En supposant la conservation du ferromagn´etisme, nous avons mis en ´evidence
l’existence de modes d’oscillations de spin dans la cas d’un condensat pi´eg´e. La
fr´equence d’oscillation de ces modes est de l’ordre de ~/M σ
2o`u σ est la taille du
condensat. Nous avons vu que la fr´equence du premier mode a la particularit´e d’ˆetre
inf´erieure aux fr´equences de pi´egeage. En dernier, nous avons vu que nos calculs
sont en bon accord avec les mesures exp´erimentales des oscillations de spin `a faibles
gradients r´ealis´ees au sein de notre groupe.
Conclusion
J’ai pr´esent´e dans ce manuscrit les r´esultats de mes travaux de th`eses sur les
propri´et´es stationnaires et le comportement dynamiques des condensats spinoriels
di-polaires. En premier lieu, j’ai abord´e le r´egime de faible champ magn´etique et discut´e
les instabilit´es de la phase ferromagn´etique. En deuxi`eme lieu, j’ai abord´e le r´egime
de fort champ magn´etique et discut´e les dynamiques du condensat ferromagn´etique
polaris´e apr`es rotation globale des spins. Les principaux r´esultats de ce travail sont
r´esum´es ci-dessous.
R´egime de faible champ magn´etique : instabilit´es dynamiques et d´
ema-gn´etisation spontan´ee.
Phase ferromagn´etique de densit´e uniforme :
• Nous avons mis en ´evidence l’existence d’instabilit´es dynamiques au-dessous du
champ magn´etique p
dd= 4πc
ddf n/3,o`u c
ddest une constante de l’interaction
dipolaire. Ce comportement est commun aux syst`emes de spin f = 1,2et3que
nous avons ´etudi´es.
• Nous avons montr´e que ce comportement est li´e `a l’instabilit´e dynamique du
mode de pr´ecession de spin qui est caus´ee par les processus de relaxation
dipo-laire. Les instabilit´es dynamiques se traduisent par le d´eveloppement de textures
de spin qui engendrent des dynamiques de d´emagn´etisation. Cela indique que
la phase ferromagn´etique polaris´ee n’est pas l’´etat fondamental pour un champ
magn´etique p < p
dd.
• Par le moyen de simulations num´eriques, nous avons confirm´e le
d´eveloppe-ment de textures de spin et la d´emagn´etisation du condensat pour un champ
magn´etique p < p
dd.
Condensat de
52Cr pi´eg´e :
• Nous avons calcul´e num´eriquement un champ magn´etique de d´emagn´etisation
p
dem. Premi`erement, nous avons montr´e que p
ddd´ependent uniquement des
interactions dipˆole-dipˆoles. Deuxi`emement, nous avons observ´e que p
dem< p
ddet que p
demse rapproche de p
dddans le cas d’un syst`eme de grande taille.
• Nos r´esultats sugg`erent d’interpr´eter les dynamiques d´emagn´etisation du
conden-sat pi´eg´e comme une signature des instabilit´es dynamiques mises en ´evidence
pour le condensat uniforme.
R´egime de fort champ magn´etique : dynamique de spin, persistance du
ferromagn´etisme et oscillations collectives
• Nous avons montr´e un tr`es bon accord avec nos simulations num´eriques et des
observations exp´erimentales de dynamiques de populations de spin dans le cas
d’un condensat
52Cr pi´eg´e.
• Premi`erement, nous avons observ´e que les dynamiques de spin s’accompagnent
d’une persistance inattendue du ferromagn´etisme. Nous avons interpr´et´e cette
persistance, dans le cas d’un syst`eme uniforme, comme une comp´etition entre
l’´energie cin´etique acquise par les composantes de spin et l’´energie
ferromagn´e-tique.
• Deuxi`emement, nous avons mis en ´evidence un comportement oscillatoire des
spins. Dans le cas des oscillations de faibles amplitudes, nous avons montr´e
que les fr´equences des oscillations est de l’ordre de ~/M σ o`u σ est la taille du
condensat. Nos r´esultats sont en bon accord avec les observations
exp´erimen-tales.
Pour les besoins de ce travail de th`ese, j’ai d´evelopp´e une application de calcul
nu-m´erique« SDBEC» qui permet de r´esoudre l’´equation de Gross-Pitaevskii dipolaire
stationnaire et dynamique. SDBEC prend en compte les syst`emes de spinf = 1,2 et
3. Cet outil offre la possibilit´e de r´ealiser des«exp´eriences num´eriques»en contrˆolant
diff´erents param`etres comme l’intensit´e des interactions d´ependantes du spin, la
re-laxation dipolaire, la variation spatiale et temporelle du champ magn´etique, etc. Par
exemple, en ce qui concerne les dynamiques de d´emagn´etisation, il serait int´eressant
de r´ealiser une ´etude syst´ematique en fonction de la taille du condensat afin de
confir-mer (ou d’infirconfir-mer) quep
ddtend vers p
demdans le cas des syst`emes de grandes tailles.
Une autre ´etude syst´ematique compl´ementaire serait de varier c
ddafin de v´erifier si
p
dem∝c
dd.
La r´esolution num´erique de l’´equation de Gross-Pitaevskii spinorielle peut
n´eces-siter des temps de calcul num´erique consid´erables. Cela est notamment dˆu au nombre
´elev´e de degr´es de libert´e de spin, en particulier dans le cas du spin f = 3. Une
ma-ni`ere int´eressante de r´eduire ces temps de calcul serait d’int´egrer `a SDBEC le syst`eme
de pseudo spin 1/2. Ces syst`emes pr´esentent la particularit´e d’avoir une longueur de
spin locale toujours maximale et qui est ´egale1/2. Ainsi, ils sont parfaitement adapt´es
pour simuler les dynamiques des condensats de spinf ≥1lorsque le ferromagn´etisme
est suffisamment bien conserv´e. Toutes les observables peuvent ˆetre calcul´ees `a partir
des calculs r´ealis´es sur un syst`eme de spin1/2. Par exemple, les dynamiques de
popu-lations peuvent ˆetre d´eduites directement `a partir de l’´evolution de la composante f
zdu vecteur spin comme suit N
m'R
drn(r)|ζ
m(r)|
2avecζ(r) = e
−icos−1(fz(r)/f)fyζ
F.
Il serais aussi possible de calculer num´eriquement les fr´equences des modes
d’oscilla-tions en fonction deθ
r, des gradients appliqu´es et de la forme du pi´egeage.
Pour finir, je tiens `a souligner le fait que mon travail de th`ese a fortement b´en´efici´e
de la proximit´e des travaux exp´erimentaux de l’´equipe.
Annexe A
Mod´elisation num´erique
Cette annexe pr´esente, de mani`ere tr`es br`eve, la m´ethode de r´esolution num´erique
de l’´equation de Gross-Pitaevskii utilis´ee dans ce travail.
Plusieurs travaux ont ´et´e consacr´es `a ce probl`eme. Le cas d’un syst`eme sans spin
avec ou sans interactions dipolaire est trait´e dans les r´ef´erences [87–90]. Le cas des
syst`emes de spin f = 1 et f = 2 sans interactions dipolaire est trait´e dans les
r´ef´erences [91,92]. Le lecteur peut ´egalement consulter les excellents articles de X.
Antoine et R. Duboscq [93–95]. L’´etat fondamental est obtenu par ´evolution en temps
imaginaire. Le lecteur peut consulter les r´ef´erences suivantes [96–101].
Afin de faciliter l’impl´ementation de nouvelles fonctionnalit´es, notre code« SDBEC »
est d´evelopp´e en langage C
++et en mode POO
1. SDBEC prend en compte les
sys-t`emes de spin f = 1,2et 3.
A.1 Equation de Gross-Pitaevskii adimensionn´´ ee
Pour commencer, nous allons ´ecrire l’´equation de Gross-Pitaevskii adimensionn´ee
dans le cas d’un syst`eme de spin f. Pour ce faire, on introduit les grandeurs sans
dimensions
˜
r =r/l
0, t˜=t×ω
0et ψ˜=ψ×l
3/20
. (A.1)
Suivant cette formulation, les unit´es de longueurs, de temps et d’´energie sont
respec-tivement
l
0= (~/M ω
0)
1/2, t
0= 1/ω
0et
0=~ω
0. (A.2)
Dans ces unit´es, les constantes de couplages adimensionn´ees g
Fet le coefficient c˜
dds’´ecrivent
g
F= 1
l
20~ω
0×g
Fet ˜c
dd= 1
l
02~ω
0×c
dd. (A.3)
Afin d’all´eger les notations, on supprime les «˜» dans la suite. L’´equation de
Gross-Pitaevskii adimensionn´ee s’´ecrit
i∂ψ
m∂t =−∇2
2+ 12 η
x2x
2+η
y2y
2+η
2zz
2+pm+qm
2ψ
m+ X
m2m0 1m0 2C
mm2 m0 1m0 2ψ
m∗2ψ
m0 2ψ
m0 1+c
ddX
m0b·f
mm0ψ
m0, (A.4)
o`uη
x,y,z=ω
x,y,z/ω
0. L’´energie totale s’´ecrit
E =Z drψ
m∗−∇
22 +
1
2(η
2xx
2+η
y2y
2+η
z2z
2) +pm+qm
2ψ
m+ 12Z dr X
m1m2m0 1m0 2C
mm2 m0 1m0 2ψ
∗m1ψ
m∗2ψ
m0 2ψ
m0 1+ c
dd2 Z drX
mm0b·f
mm0ψ
m∗ψ
m0. (A.5)
Dans le document
Analyse théorique des excitations et des instabilités des condensats de Bose-Einstein spinoriels dipolaires
(Page 141-149)