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Notions d’intégration pérenne et ses freins dans la IR&D

Chapitre 2 Problématiques & Hypothèses

2.1 Notions d’intégration pérenne et ses freins dans la IR&D

Comme discuté dans le chapitre précédent, la complexité croissante des technologies dans

plusieurs secteurs innovants, comme le secteur PV, amène souvent les industriels à nouer

des relations de partenariat avec les organismes de recherche.

Il s’agit d’une transaction « Business – to – Business » (B2B) où le partenaire industriel est le

client et le consommateur de la R&D. En effet, ce type de transactions définit les relations

commerciales entre entreprises, en opposition avec le « Business - to – Consumer » (B2C).

Dans le B2B, le consommateur final est une autre entreprise où la relation entre le

client/fournisseur se traduit par un cahier des charges où le client fixe ses objectifs et ses

besoins. Cette relation est plus compliquée lorsque le système est complexe et composé de

plusieurs sous-produits entrainant plusieurs interactions entre différents acteurs ayant leurs

propres besoins (Figure 34), comme dans le cas des systèmes PV.

Hypothèse 1 :

L’utilisation de l’ACV comme un outil de pilotage pour la mise en place d’une base

de données de référence, fiable, simple à actualiser, et contenant des résultats de

référence compréhensibles et interprétables par des non spécialistes, est une

condition nécessaire pour faciliter la démarche d’intégration de la dimension

environnementale dans les projets de R&D à TRL bas.

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La notion d’« intégration » a été définie par Le Pochat [112] comme le changement d’état de

l’organisation passant d’un état X à un état Y. Millet [114] a analysé l’intégration

informationnelle dans les organisations industrielles et a définit l’intégration comme suit «

l’intégration est l’effort d’une organisation pour des relations interindividuelles,

inter-fonctionnelles et inter-entreprises plus étroites. Elle se fonde sur une coordination plus étroite

des tâches, sur la coopération et sur le partage des informations et des prises de décisions.

La gestion de cette interdépendance organisationnelle au niveau intra ou inter entreprise

devient ainsi une intégration « informationnelle ».

La pérennité, d’autre part, décrit la durabilité et la continuité dans le temps. Ainsi un

changement ou une intégration devient pérenne s’il est intégré systématiquement dans

l’activité quotidienne au sein de l’organisme. Et par conséquent une intégration pérenne de

l’éco-conception dans la R&D signifie adopter une nouvelle vision au sein de l’organisme.

L’intégration de l’éco-conception dans la démarche stratégique des industriels est encore un

phénomène émergent [115] [116], et il existe un écart entre la théorie et la pratique de

l’éco-conception. Plusieurs lacunes empêchent d’adopter cette démarche d’implémentation au sein

de l’entreprise comme par exemple l’absence d’une feuille de route pour supporter les

industriels dans une démarche d’éco-conception [117] [118] [119]. De ce fait, la composante

environnementale n’est pas souvent exigée dans le processus de développement du produit.

Dans leur étude sur la pratique de l’éco-conception dans le cadre d’un processus de

conception, Deutz et al.[120] ont montré que les critères de coûts de production et fiabilité sont

Figure 34. Interactions B2B dans un système complexe entre la R&D et les partenaires

industriels

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considérés par plus de 85 % des entreprises dans le processus de développement du produit ;

par contre les critères environnementaux comme le recyclage, les déchets et la pollution sont

considérés par moins de 40% des entreprises. Étant donnée la relation clé entre l’organisme

de R&D et le partenaire industriel, et les contraintes qui peuvent entourer le processus de

développement, l’intégration du paramètre environnemental dans les projets de R&D peut

ainsi être considérée comme un réel défi. En effet, cette intégration signifie un changement

dans l’organisation des projets de R&D, par l’ajout de nouveaux besoins, qui aujourd’hui ne

sont pas (ou peu) inscrits dans les cahiers des charges (Figure 35). Ce changement va

impacter la relation « fournisseur / client » (acteur de la R&D / partenaire industriel) et peut

être soumis à l’échec, surtout dans le cas où il y a une résistance au changement du processus

de développement déjà fixé ([120], [122], [123]). Ceci est souvent associé à des besoins déjà

observés dans certains projets de R&D du secteur PV, où les cahiers des charges sont

souvent technico-économiques, les systèmes PV étant considérés comme des produits

intrinsèquement « vert ».

Il existe également d’autres obstacles qui limitent cette intégration comme l’investissement en

temps et argent pour la mise en place d’un outil adapté au sein de l’organisme, et les

ressources humaines pour initier et suivre la démarche [124] (Figure 36). De plus, le grand

nombre d’outils existants aujourd’hui pour l’éco-conception peut rendre le choix de l’outil le

plus pertinent difficile [125].

L’échec de l’intégration et sa pérennité peut également être dû à la résistance des acteurs de

la R&D eux même (équipe du projet), pouvant être justifié par un manque de connaissances

et/ou d’expertise dans la maîtrise des nouveaux outils et l’application de nouvelles méthodes

[126]. De plus, étant donné que cette intégration n’entre pas souvent dans les cahiers des

charges et donc dans le cadre des exigences des projets, la résistance du concepteur peut

être considérée comme légitime.

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Donc, plusieurs barrières existent, limitant ainsi une implémentation efficace et pérenne de la

démarche d’éco-conception dans l’organisme de R&D, qui sont synthétisées comme suit :

Expertise spécifique, non seulement pour l’application de la démarche mais aussi

pour la compréhension des résultats pour la prise de décision finale.

Figure 35.La nouvelle vision dans la R&D avec l’intégration de la démarche

d’éco-conception.

Figure 36. Les différentes contraintes qui

entourent le processus de développement d'un

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Temps requis, pour l’application de ces méthodes et la réalisation des analyses.

Investissement économique, pour la mise en place de la démarche au sein de

l’organisme.

Diversité et grand nombre d’outils existants, rendant le choix difficile.

Formalisation excessive des méthodes, créant une divergence entre le besoin réel

de l’industrie et la démarche théorique proposée et un cahier des charges non souvent

en adéquation avec la démarche d’éco-conception.

Même si le besoin d’intégration existe, un outil d’éco-conception qui franchit ces obstacles est

alors nécessaire pour garantir sa pérennité. Cet outil doit également satisfaire des

caractéristiques bien spécifiques qui sont :

- Une démarche à la fois objective et subjective pour évaluer le profil environnemental

de la technologie dès la phase de R&D tout en respectant le besoin de l’industriel.

- Des résultats quantitatifs pour pouvoir argumenter la prise de décision.

- Une démarche d’analyse multicritères permettant l’évaluation et l’amélioration

d’une technologie éco-conçu pendant le processus de développement.

2.2 Les outils d’éco-conception dans la littérature : fonctions et