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Les forums hybrides correspondent à des lieux où sont croisés des discours techniques issus d’experts reconnus, par exemple des ingénieurs, et d’experts citoyens, issus du milieu associatif. Ce sont des forums parce qu’ils parmetttent un débat ouvert sur des choix collectifs. Leur caractèere hybride tient essentiellement de leur composition puisqu’ils réunissent des experts, des militants, des techniciens, etc (Callon et al., 2002, p. 35-36). De tels forums

hybrides se constituent lorsque les solutions émanant des autorités (pouvoirs publics ou autres) sont mises en doute ou ne paraissent pas suffisamment efficaces. Ils peuvent permettre la formulation de réponses appropriées, voire de conduire à des propositions alternatives et possiblement innovantes (ibid.). Ces auteurs parlent alors d’un monde incertain, puisque les solutions ne sont pas dirigées du haut vers le bas, mais transitent à travers un certains nombre d’instances, incluant des mécanismes de concertation et de consultation publique. De tels forums apparaissent lors de controverses en environnement ou en aménagement, alors que les intérêts des uns et des autres se rencontrent et que les acteurs sociaux font appel à la notion de risque et de défense de leur qualité de vie pour interagir dans les débats publics. L’incertitude provient certainement du fait que le savoir technique n’est plus l’apanage des seuls experts et qu’il est dorénavant partagé, discuté et critiqué. C’est à l’intérieur de forums, qui sont l’occasion de « tester des procédures destinées à faciliter la coopération entre spécialistes et profanes » (ibid. p. 60), que se formalisent des modes de « démocratie technique ». Ces forums hybrides fixent les termes dans lesquels sont formulés les problèmes et ils engagent, dans maints cas, des apprentissages collectifs. Les solutions sont toujours négociées et le processus s’engage sur la voie du compromis.

Parmi plusieurs des projets abordés lors de la tenue des groupes de discussion, ceux du Forum sur le canal Lachine et du Forum économique de Verdun apparaissent comme représentatifs de ces forums dans lesquels sont abordées des orientations contradictoires, où se mêlent différentes solutions techniques et où un dialogue s'engage entre les acteurs locaux et les intervenants disposant du pouvoir décisionnel.

L’innovation est donc une des conditions de réussite. Plusieurs projets discutés ont mis en évidence la capacité d'innovation des acteurs locaux, notamment en matière de formation de partenariat et de montage financier. Il y a en effet obligation d’innover dans des situations de problématiques multiples, par exemple lorsque se croisent les questions de la dégradation du cadre bâti, de la

contamination des sols, du manque de logements abordables et de la raréfaction des fonds publics destinés au logement social. Les objectifs d’agir de manière globale et de développer une vision intégrée de la revitalisation urbaine comportent des défis colossaux, comme la nécessité d'interagir avec plusieurs organismes publics, en fonction de différents programmes de financement, et de maîtriser un langage technique complexe, tout en conciliant des intérêts divergents.

Les pratiques communautaires sont donc mises au défi d’innover puisque les problématiques sont complexes et que les moyens manquent alors que les difficultés techniques peuvent être grandes. Par contre, les risques n’en sont pas moins grands. Les orientations sont parfois contradictoires et les intérêts divergents. Plusieurs des projets sont issus de controverses locales de même qu’ils ont pu en susciter de nouvelles. Les oppositions restent omniprésentes. Et le mandat d’assurer la liaison entre l’État et le citoyen est casse-cou.

En terminant, notre étude a fait ressortir finalement la grande diversité des pratiques et la capacité d’innovation des groupes et des associations qui travaillent à la revitalisation urbaine et sociale de la ville ou de leur quartier. De cette grande diversité, nous avons retenu deux approches différentes, l’une de concertation, l’autre entrepreneuriale, nullement antinomiques et possiblement complémentaires. Ces pratiques s’insèrent dans un fonctionnement en réseau territorialisé et se développent à la faveur de partenariats de plus en plus étroits avec les organismes publics mais desquels les acteurs du secteur privé restent relativement absents. Elles permettent, par ailleurs, la constitution d’une expertise locale et communautaire en matière de revitalisation urbaine qui n’est pas négligeable. Par contre, dans les dossiers nécessitant des moyens techniques et financiers d’importance, la mise en œuvre des projets apparaît plus compliquée et les difficultés énoncées lors des groupes de discussion témoignent de limites, de lourdeurs et de délais prolongés. Les expériences réussies ont montré que l’élargissement des appuis et des partenariats apparaissait comme la condition obligée de maîtrise de dossiers complexes

demandant de gros investissements. Cette condition est d’autant plus stratégique que les transformations de la société urbaine s’accélèrent et que la population de Montréal se diversifie.

REMERCIEMENTS

Les auteurs tiennent à remercier Monsieur Guy Cousineau, du CRDIM, pour son soutien tout au long de son étude, ainsi que tous les membres du comité qui ont commenté et discuté les résultats de recherche. Ils sont aussi redevables à tous les participants aux groupes de discussion qui ont accepté de faire part de leur expérience.

BIBLIOGRAPHIE

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Sharken Simon, J. (1999). How to Conduct a Focus group, The Grantsmanship Centre site web, http://www.tgci.com

Les projets qui concernent les logements sociaux, le logement abordable, les projets d’habitation de type coopérative et OSBL, la rénovation des logements locatifs en mauvais état. Les projets peuvent s’adresser à des clientèles ciblées. La thématique devra être abordée en tenant compte du contexte de rareté de logements sociaux et abordables, de la hausse appréhendée des coûts du loyer et du maintien des populations résidantes dans leur milieu.

L’implantation d’équipements offrant des services à la communauté

Il s’agit ici d’équipements collectifs, à vocation sociale, culturelle ou sportive, offrant des services à la population, soit pour l’ensemble de la population du territoire montréalais, soit aux bénéfices d’un groupe précis de la population ou d’un secteur particulier de la ville.

L’aménagement du cadre urbain

Ce thème regroupe des projets d’aménagement qui participent à définir le cadre de vie des personnes. Il est ici question de parcs, d’espaces publics, de places et d’infrastructures visibles, en tenant compte de leur intégration au cadre urbain et à leur environnement.

La revitalisation des artères commerciales

Le développement des espaces commerciaux et la revitalisation des artères commerciales.

La requalification des friches urbaines

Les projets concernant le recyclage et la requalification d’espaces sous-utilisés, dégradés, généralement issus de la période industrielle et qui nécessitent des interventions majeures, notamment de décontamination, de réhabilitation du bâti

ancien et de relance économique. Ils proposent de nouveaux usages en fonction des besoins locaux.

La planification intégrée du territoire

Ce thème aborde les projets multisectoriels qui proposent des solutions intégrées en termes de planification du territoire et d’aménagement. Ces projets visent davantage à influencer les administrations publiques et à orienter les choix concernant un territoire donné qu’à intervenir sur un site en particulier. Certains d’entre eux s’inscrivent à l’échelle du quartier.

ANNEXE II

IMPLANTATION DE SERVICES À LA COMMUNAUTÉ

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