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Neuroimagerie cognitive de la schizophrénie

3.1. Anomalies morphologiques et fonctionnelles liées aux troubles

schizophréniques

Tout comme l‘identification d‘un phénotype cognitif précis dans la schizophrénie, la recherche de bases cérébrales des dysfonctionnements cognitifs dans les troubles schizophréniques s‘est heurtée à une grande hétérogénéité des résultats présentés dans les études. Des travaux en imagerie morphologique ont montré une réduction de la matière grise dans le cortex associatif et les noyaux gris centraux chez les patients présentant un premier épisode schizophrénique (Shenton et al., 2001 ; Kubicki et al., 2007). Rapidement, des modèles de dysconnexions cérébrales ont fait leur apparition pour expliquer les troubles cognitifs en lien avec les anomalies neuroanatomiques et neurofonctionnelles dans les troubles schizophréniques (Friston et Frith, 1995 ; Graybiel, 1997). En effet, des travaux en neurophysiologie et en imagerie fonctionnelle ont montré des activations anormales distribuées dans l‘ensemble du cortex cérébral ainsi que des troubles de connectivité fonctionnelle permettant de plaider pour un dysfonctionnement cognitif global dans les troubles schizophréniques (pour revue, voir Dauvermann et al., 2014) .

3.2. Anatomie fonctionnelle du contrôle cognitif

Un contrôle cognitif efficace requiert une coordination de l‘activité de plusieurs régions cérébrales incluant le CPFDL, le cortex frontal médial (incluant le CCA) et les régions pariétales (Cohen et al., 2000 ; Miller et Cohen, 2001 ; Ridderinkhof et al., 2004 ; Yarkoni et al., 2005). Le CPFDL a un rôle central dans la sélection et le maintien des règles pour l‘action (Watanabe, 1990 ; Watanabe, 1992). Le CCA est associé à la détection de l‘erreur ou du conflit et envoie l‘information au CPFDL qui augmente en conséquence son activation pour s‘adapter rapidement au changement de contexte (MacDonald et al., 2000 ; Egner et Hirsch, 2005 ; Kerns et al., 2005). Le cortex pariétal permet une flexibilité de la focalisation attentionnelle par ses connexions avec le CPFDL (Miller et Cohen, 2001 ; Petersen et Posner, 2012). Les études en imagerie fonctionnelle ont montré chez des participants sains une activation d‘un réseau cortical spécifique incluant le CPFDL et la CCA lors de tâches demandant un contrôle cognitif important (Dove et al., 2000 ; Braver et al.,

53 2003 ; Liston et al., 2006 ; Yeung et al., 2006). Des connexions importantes avec les noyaux gris centraux rendent possible l‘inhibition rapide lors de tâches demandant des ressources cognitives importantes (Ridderinkhof et al., 2004 ; Aron et Poldrack, 2006 ; Aron, 2007).

3.3. Activation du cortex préfrontal associé à une dysrégulation du contrôle

cognitif dans les troubles schizophréniques

Dans les atteintes fonctionnelles en lien avec une dysrégulation cognitive, le cortex préfrontal a reçu beaucoup d‘intérêt de la part des chercheurs. Le CPFDL a été identifié comme une structure cérébrale impliquée de manière préférentielle dans les troubles cognitifs dans les troubles schizophréniques. De nombreuses études ont montré une diminution de l'activité de cette région cérébrale lors d‘une tâche cognitive. Une méta-analyse (Minzenberg et al., 2009) a été menée sur 41 études utilisant de l‘imagerie fonctionnelle pour montrer les régions cérébrales impliquées dans le contrôle cognitif dans les troubles schizophréniques. Les résultats montrent une activation du même réseau cérébral chez les personnes atteintes de schizophrénie et les volontaires sains, incluant le CPFDL, le CCA, le cortex préfrontal ventrolatéral et les structures thalamiques. Cependant, les résultats de cette méta-analyse mettent également en évidence une réduction de l‘activité du CPFDL et du CCA dans la schizophrénie lors d‘exécution de tâches induisant un contrôle cognitif important. D‘un autre côté, les auteurs mettent en évidence une augmentation de l‘activité des régions dorsales du CCA, du cortex préfrontal ventrolatéral, des structures amygdaliennes et des cortex temporaux et pariétaux dans la schizophrénie possiblement expliqués par un effet compensatoire pour s‘adapter à l‘accroissement des ressources cognitives nécessaires à la bonne exécution de la tâche demandée. Une autre analyse de Glahn et ses collègues (2005)

conduite auprès de 12 études centrées sur les activations du CPFDL au cours d‘une tâche de

mémoire de travail a montré une réduction de l‘activité de cette structure mettant en avant une dysrégulation d‘un réseau cérébral en lien avec une augmentation de la demande en ressources cognitives dans la schizophrénie. Les patients atteints de pathologie schizophrénique ont également des troubles de la mémoire épisodique verbale. Des méta-analyses récentes ont montré une part importante d‘une dysrégulation du contrôle cognitif lié à l‘encodage et à la récupération en mémoire épisodique verbale liée à une diminution de l‘activité du CPFDL alors que les structures hippocampiques semblent moins recrutées pour ces processus (Ragland et al., 2009).

54 De plus en plus d‘arguments expérimentaux mettent en évidence la dysrégulation d‘un réseau cortical sous cortical impliqué dans les troubles du contrôle cognitif dans les troubles schizophréniques expliquant la grande hétérogénéité des résultats au niveau des données comportementales et neurofonctionnelles.

Résumé

Les troubles schizophréniques sont hétérogènes dans leurs présentations cliniques. Ils induisent bien souvent des troubles cognitifs variés ayant un impact important dans la vie quotidienne et professionnelle. La grande variabilité des atteintes cognitives montrée par de nombreuses études a amené les chercheurs à proposer des modèles d‘altération globale du fonctionnement cognitif. La perturbation du contrôle cognitif en lien avec une modification d‘un réseau cortico sous cortical recueille de nombreuses validations expérimentales et permet d‘expliquer l‘hétérogénéité des compétences cognitives des patients atteints de schizophrénie. Au chapitre suivant, nous verrons que les troubles émotionnels largement documentés dans les troubles schizophréniques pourraient être directement associés aux troubles cognitifs.

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Chapitre 3 : Processus émotionnels dans les

troubles schizophréniques

Les émotions et la cognition ont souvent été étudiées séparément dans les troubles