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Chapitre III. Gestion des connaissances et décision

3. La notion de connaissance

3.1. Nature de la connaissance

Trois concepts principaux sont classiquement distingués : donnée, information et connaissance. Cette distinction nous est utile pour montrer le degré de progression dans les niveaux conceptuels associés à chaque notion. Cependant tous les auteurs ne sont pas d’accord sur cette distinction comme l’évoque [Vacher, 2000].

3.1.1. La donnée

Pour Ermine et Tsuchiya, les données sont des faits de base, qui apparaissent au cours de la réalisation d'une tâche [Ermine J.L. et al., 96; Tsuchiya, 1995]. Elles peuvent être transcrites sous forme de chiffres, de mots ou de symboles, de figures… Pour [Brooking, 1998], les données sont des faits, des images, des nombres présentés sans aucun contexte. La notion de donnée est donc perçue comme la couche de plus bas niveau dans la hiérarchie conceptuelle du savoir. C’est sur elle que s’élaborent les notions d’information et de connaissance, elles sont la matière première de l’apprentissage d’un savoir. Dans le concept de donnée, il n’y a aucune notion d’interprétation ni de contexte, elle a une valeur quantitative ou qualitative, se présente sous la forme d’un nombre, d’un extrait électronique de texte ou d’une image, etc.

3.1.2. L’information

[Ermine J.L. et al., 96] s’étonne du débat que soulève la définition du concept d’information, puisqu’il existe une définition précise, mathématique de celui-ci. Elle a été donnée par Shannon en 1949, et constitue ce qu'on appelle la théorie de l'information. Les premiers chercheurs qui ont essayé de définir mathématiquement la notion d'information contenue dans un message ont dressé une liste des propriétés que devrait vérifier la quantité d'information à partir d'une définition plausible. Ils ont ainsi procédé sans s'en rendre compte comme les thermodynamiciens du siècle précédent. C’est ainsi qu’ « au sens strict de la théorie de l’information, l’information est une quantité, mesurée à l’aide d’une formule qui est sensiblement la même, (mais avec un signe inversé) que celle utilisée par le physicien Ludwig Boltzmann à la fin du XIXe siècle pour mesurer l’entropie des gaz » (Philippe Breton). La théorie de Shannon fournit donc l'aspect structurel de l'information. L'aspect fonctionnel de l'information concerne le traitement de l'information, parfois assimilée à la notion d'informatique.

Le dictionnaire Larousse donne cette définition : « Élément de connaissance susceptible d'être codé ou représenté à l'aide de conventionspour être conservé, traité ou communiqué ». Pour [Baizet, 2004] citant [Ermine J.L. et al., 96; Tsuchiya, 1995], les informations sont pour les uns des données triées, sélectionnées et organisées par un individu dans un but précis, pour les autres des données auxquelles sont associées des significations par la description de méthodes et procédures d'utilisation. Ces informations sont à la base d'une possible communication et sont donc formulées, explicitées. Pour [Tsuchiya, 1993], quand on donne un sens à une donnée à travers un cadre interprétatif, elle devient information. Dans [Brooking, 1998] les

Chapitre III - Gestion des connaissances et décision informations sont des données organisées présentées en contexte comme par exemple : les statistiques concernant les maisons d’habitation en Australie, etc.

De cette rapide synthèse, nous retiendrons les éléments suivants. La notion d’information présente donc un degré conceptuel plus élevé que la notion de donnée dans la valeur et la signification qu’elle occupe dans l’application où elle est utilisée. La notion d’information est toujours associée à la possibilité de traitement informatique c'est-à-dire son stockage sous forme exploitable pour les applications. Pour ces raisons, une information doit donc être associée à une représentation formelle permettant sa traduction informatique et conceptuelle.

3.1.3. Définition de la notion de connaissance

Dans [Ermine J.L. et al., 96; Tsuchiya, 1995], les connaissances sont définies soit comme des informations affinées, synthétisées, systématisées, soit comme des informations associées à un contexte d'utilisation. Pour [Brooking, 1998], la connaissance est l’information en contexte, associée à une compréhension de son mode d’utilisation, comme par exemple : la connaissance au sujet du drainage de l’eau dans une rue, déduite de l’observation d’un schéma et la compréhension des influences de l’emplacement des maisons d’habitation sur ces drainages. Ce qu’il résume par l’équation symbolique : connaissance = information en contexte + compréhension. Pour [Bonjour et al., 2002], la connaissance est une information affinée, synthétisée, se rapportant à un contexte spécifié et assurant une finalité bien précise. [Tsuchiya, 1993] formule sa conception de la notion de connaissance d’une autre manière : « L’information ne devient connaissance que lorsqu’elle est comprise par le schéma d’interprétation du receveur qui lui donne un sens (sense-read). Toute information inconsistante avec ce schéma d’interprétation n’est pas perçue dans la plupart des cas. Ainsi la « commensurabilité » des schémas d’interprétation des membres de l’organisation est indispensable pour que les connaissances individuelles soient partagées. »

Pour [Penalva et al., 2002] La connaissance, à l'inverse de l'information, repose sur un engagement, des systèmes de valeurs et de croyances, sur l'intention. La connaissance est bâtie à partir de l'information pour faire quelque chose, pour agir…

On peut considérer cette citation extraite de [Tsuchiya, 1993] comme une synthèse équitable des précédents points de vue : « Although terms ‘datum’, ‘information’, and ‘knowledge’ are often used interchangeably, there exists a clear distinction among them. When datum is sense- given through interpretative framework, it becomes information, and when information is sense-read through interpretative framework, it becomes knowledge. »

[Mayère, 1997] affirme encore que concernant la distinction tentée entre information et connaissance, il est très délicat en pratique de tenter une distinction claire entre ces termes car ils dépendent du point de vue de l’observateur. On remarquera simplement que l’utilisation du mot connaissance renvoie plus explicitement à une dynamique de création et d’échanges, dans lesquels les individus ont une position privilégiée.

Sous l’éclairage de ces définitions, la connaissance correspond au niveau conceptuel le plus élevé de l’apprentissage d’un savoir. La donnée est un élément brut qui n’est pas exploitable en tant que tel. Cette donnée devient information dans le contexte d’un cadre d’interprétation et de fait son traitement informatique est possible. La connaissance est un degré supplémentaire dans l’échelle conceptuelle et nécessite un contexte et surtout cette notion de « commensurabilité », c'est-à-dire cette exigence de compréhension mutuelle des acteurs dans l’échange de ces connaissances.

Chapitre III - Gestion des connaissances et décision Une autre perspective d’analyse de la connaissance correspond à l’idée de classer les connaissances de par leur nature et leur apprentissage. C’est ce que nous allons résumer dans le paragraphe suivant.