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PAN-AFRICAINE DU SUD DU OUADDAÏ

2.6 Comparaison des échantillons à l’échelle microscopique

3.1.2 Le multi-équilibre

A l’image de l’échantillon GB16-3A, les autres roches schisteuses que nous avons étudiées dans la partie méridionale du Ouaddaï montrent des assemblages minéralogiques à biotite- micas blancs dont les pics de métamorphisme peuvent atteindre 550 °C ou plus. La sillimanite est effectivement présente dans un échantillon de quartzite (GB16-7A). Signalons également la présence de petits grains de grenat très riches en manganèse dans l’échantillon de quartzite (GB16-12), reflétant un métamorphisme schiste vert n’atteignant pas le facies amphibolite. A ces relativement basses à moyennes températures, les équilibres thermodynamiques ne sont que locaux au sein des roches schisteuses en évolution P-T (Vidal

et Parra, 2000). L’équilibre thermodynamique est alors maintenu par la cristallisation de

nouveaux grains montrant une composition différente de ceux préexistant, plutôt que par un changement de composition des minéraux par diffusion. Il en résulte la formation d’une mosaïque d’équilibres locaux différents impliquant des minéraux de compositions variées qui se sont formés à différents moments, et qui coexistent de manière métastable (hors de l’équilibre).

Pour affiner nos estimations en pression et en température, nous avons donc utilisé la méthode du multi-équilibre. L’intérêt principal de cette technique vient du fait que l’on peut travailler dans un système surdéterminé, c’est-à-dire avec un nombre d’équilibres indépendants supérieur à deux. Si les données thermodynamiques sont correctes et si la paragenèse observée est bien à l’équilibre, toutes les réactions d’équilibre intervenant dans le calcul de la ∑∆G2 s’intercepteront en un point dans un diagramme P-T (Figure IV.15).

104 Figure IV.15: Exemple de diagramme P-T d'un équilibre chlorite - phengite - quartz - eau. 66 réactions sont tracées sur 359 possibles, 7 sont indépendantes (4 ont été tracé en bleu foncé). Chacune des 66 courbes tracées représente une réaction d'équilibre faisant intervenir des pôles purs de chlorite et de phengite. Les pôles purs utilisés pour les chlorites sont : le clinochlore, Mg-amésite, Fe-amésite, sudoite, daphnite; et pour les phengites : Al-céladonite, Fe-céladonite, muscovite, pyrophyllite, pyrophyllite hydratée. Les réactions se coupent parfaitement (sans montrer de dispersion) en un point représentant les conditions P-T d’équilibre de l’assemblage Chl-Phg-Qtz-H2O. Cela indique que les chlorites et les phengites testées (composition chimique donnée ci-dessus en poids d'oxyde et en fraction molaire avec le format d'input de TWEEQ) sont à l'équilibre thermodynamique à 4.8 kbar et 390°C (échantillon HO-18, Houndé, Burkina Faso, Ganne et al., 2012).

Nous nous sommes focalisés sur la phase minérale phengite (Phg) car la chlorite n’a pas été identifiée dans les roches étudiées. Les données thermodynamiques sur les pôles purs des micas phengitiques sont par ailleurs très bien connues (Dubacq et al., 2010), probablement mieux que celles des chlorites (Vidal et al., 2001), ou bien encore celles d’autres silicates utilisés dans le logiciel Perple-X. Pour ces micas phengitiques, il s’agit des pôles muscovite (Ms: Si3Al3KO10(OH)2), pyrophyllite (Prl: Si4Al2O10(OH)2), pyrophyllite hydratée (Prl.H2O:

Si4Al2O10(OH)2.H2O), céladonite (Cel: Si4Al(Mg,Fe)KO10(OH)2), paragonite (Pg:

105 Nous avons alors utilisé un programme de calcul matlab (PhgQtz), développé par Benoit Dubacq, intégrant le traitement de ces informations chimiques des phengites ainsi que des fonctions thermodynamiques compatibles avec elles (Dubacq et al., 2010). L’utilisation de cet algorithme a permis de mener une étude thermodynamique assez complète sur six échantillons de schistes de la partie méridionale du Ouaddaï, constitués essentiellement de phyllosilicates et de quartz (GB15-5, GB15-10, GB15-18, GB-16-3A, GB16-7A, GB16-12).

Les courbes bleues présentées (Figure IV.16) correspondent aux pentes d’équilibre de chacun des micas blancs analysés dans ces six échantillons alors que les courbes présentées dans la Figure IV.17 représentent une moyenne de ces pentes d’équilibre, calculée sur l’ensemble des micas blancs analysés dans chacun de ces six échantillons. Ces pentes passent par des points en mauve (Figure IV.16) ou des figurés de différentes couleurs (Figure IV.17). Ces points ou figurés correspondent aux moyennes de pression (P) et de température (T) calculées pour ces micas phengitiques par la méthode du multi-équilibre Pgh-Qtz-H2O, pour une activité en eau s’échelonnant entre 0.9 (hydraté) et 0.1 (anhydre). Les valeurs réalistes pour cette activité en eau se situent au-dessus de 0.7 en domaine orogénique de type alpin ou himalayen (Dubacq

et al., 2010 ; Ganne et al., 2011) (Figure IV.14). Ces données indiquent une température de

106 Figure IV.16: Pentes d’équilibre des micas blancs analysés dans six échantillons du massif du Ouaddaï et reportées dans un espace Pression-Température. Ces pentes passent par les points en mauves (coefficient de corrélation 0.99). Ces points correspondent aux moyennes de

107 pression (P) et de température (T) calculées pour ces micas blancs par la méthode du multi- équilibre Pgh-Qtz-H2O, pour une activité en eau s’échelonnant entre 0.9 (hydraté, basse pression dans la grille PT) et 0.1 (anhydre, haute pression). Les valeurs réalistes pour cette activité en eau se situent au-dessus de 0.7 (Ganne et al., 2012). Une température de 400°C est obtenue pour cet échantillon, au pic du métamorphisme, pour une pression maximale de 5 Kbars.

Figure IV.17: Pentes d’équilibre « moyenne » des micas blancs analysés dans six échantillons du massif du Ouaddaï et reportées dans un espace Pression-Température.

Synthèse

La modélisation thermodynamique (pseudosection, couplée à la méthode multi- équilibre de la muscovite phengitique et la biotite) donnent une estimation des conditions de pression inferieures à 0,5 GPa à des températures inférieures ou égales à 400°C dans la partie ouest de la zone d’étude (figure III.18, à gauche). Ces équilibres thermodynamiques sont donc restés locaux au sein des roches schisteuses en évolution suivant les conditions pression- température très variable due à la présence de muscovite de plusieurs générations dans des schistosités distinctes. On note des variations locales de pression autour de 0,5 GPa à des

108 températures de 550°C dans les quartzites à grenat et à sillimanite (au centre et au sud-est de la zone d’étude). Ces conditions de pression et température sont estimées pour une activité en eau supérieure 0,7, en domaine orogénique de type alpin ou himalayen (Dubacq et al.,

2010 ; Ganne et al., 2011). Si on considère que l’activité en eau dans ces muscovites est

inferieure 0,7, on évoluerait vers des conditions thermiques elevées comme temoin les courbes de stabilités des micas phengitiques réalisées par la méthode multi-équilibre, identique au champ des phengites en vert dans la pseudosection (figure III.18, à droite). Le paragneiss à grenat-biotite situé à l’Est de la zone d’étude est en cours de modélisation thermodynamique. Cependant, la présence de grenat alumineux (type almandin) dans cette roche permet de souligner un faciès de moyenne pression (faciès à disthène-sillimanite) et s’inscrit dans les paragenèses de micaschiste à biotite, muscovite, disthène, staurotide qui reste stable à des temperatures élevées, dans le faciès des amphibolites.

Figure IV.18 : Pseudosection comparée au courbe de stabilité des micas phengitiques calculé par la méthode multi-équilibre pour une activité en eau supérieure 0,7, en domaine orogénique de type alpin ou himalayen (Dubacq et al., 2010 ; Ganne et al., 2011).

Ces études ont permis de mettre en evidence des conditions métamorphiques variables dans la partie méridionale du Ouaddaï : faciès schistes verts dans la partie NW et faciès amphibolites dans la partie SE (figure IV.19). Ces conditions métamorphiques sont comparables au gradient métamorphique de type barrovien.

109 Figure IV.19: Carte géologique montrant des gradients métamorphiques croissants du NW vers le SE.

110 CHAPITRE V:

SIGNATURES GEOCHIMIQUES MAJEURS, TRACES ET ISOTOPIQUES

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