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Partie 1 : Qu’est-ce que la Biologie de garage ?

D- Un mouvement parti pour durer ?

Le biohacking est un mouvement qui s’est développé progressivement, jusqu'à connaître un fort engouement à partir de 2011 environ. Cette popularité auprès des médias et du grand public a contribué au développement du mouvement et à la création de nombreux laboratoires communautaires. Au-delà de cet effet de mode, la question se pose toutefois de savoir si la biologie de garage est une pratique assez solide pour s’inscrire dans la durée et, pour aller plus loin, si elle est vouée à rester un simple occupation sans conséquence ou si elle est porteuse d’un potentiel économique et scientifique réel.

28 MEYER, Morgan. Bricoler le vivant dans les garages : Le virus, le génie et le ministère [en ligne].

Terrain, 2015, 64.

29 Les sujets traités étaient par exemple l’acceptation et le statut de cette viande artificielle, le bien-être animal, les conséquences écologiques, mais aussi des questions plus philosophiques telles qu’une possible distanciation d’avec la nature ou une paresse morale découlant de la possibilité d’une viande artificielle.

KEULARTZ, Jozef, VAN DEN BELT, Henk. DIY-Bio – Economic, Epistemological and Ethical

Implications and Ambivalences [en ligne]. Life Sciences, Society and Policy, 2016, 12(7), p. 10.

30 Ibid. p. 11.

7 : le Bento Lab contient, de gauche à droite :

le nécessaire pour réaliser des électrophorèses sur gel ; un transilluminateur ; une centrifugeuse ; une machine PCR32.

[IMAGE SUPPRIMÉE POUR CAUSE DE DROITS D’AUTEUR]

8 : Le thermocycleur en temps réel Amplino33.

32 <bento.bio> (consulté en juillet 2017). 33 <amplino.org> (consulté en juillet 2017).

La réponse à la première question est évidemment positive : le biohacking a aujourd’hui perdu la majeure partie de sa popularité passée et ne fait plus la une de la section sciences des journaux en ligne (ceux-ci se sont un moment tournés vers le « grinding »34, avant de passer à

tout autre chose). Les scientifiques, biologistes et sociologues, continuent de parler du sujet, mais beaucoup moins intensément qu’entre 2012 et 2015. Le public, lui, continue d’aller dans des laboratoires ouverts pour pratiquer la biologie le temps d’un atelier pratique ou pour mener à bien un projet. Les groupes de biologie de garage sont en effet encore nombreux et bien vivants, même si leur format a quelque peu changé par rapport à cet « âge d’or » où les possibilités du biohacking étaient encore mal définies35. Cette évolution sera vue plus en détail

plus bas.

La réponse à la deuxième question est plus nuancée, mais elle est aussi globalement positive. Une grande partie des pratiques biohacking sont centrées autour de débutants qui apprennent les bases et font des expériences simples, mais beaucoup de biohackers sont plus expérimentés et capables de prototyper des inventions ou de conduire des recherches plus poussées. Ainsi, de nombreux équipements scientifiques ont pu être créés grâce à la biologie de garage, et si beaucoup sont destinés à être construits de toutes pièces par d’autres biohackers, certains tels que Bento Lab, Amplino et OpenPCR peuvent être achetés pour quelques centaines d’euros. Au-delà des instruments, des start-up sont parfois aussi montées dans les laboratoires de biohacking. Le laboratoire La Paillasse a par exemple abrité le groupe à l’origine de Pili36,

une start-up qui produit des encres à partir de bactéries. D’un point de vue moins économique et entièrement orienté vers la science, Epidemium37 est un projet de recherche collaborative sur

le cancer mené conjointement par le laboratoire Roche et le biohacklab La Paillasse. Il faut également noter que, puisque ces chercheurs amateurs n’ont souvent pas un passé académique,

34 Cet autre mouvement, qui dérive en partie de la biologie de garage, est décrit plus en détail en Annexe. 35 LANDRAIN, Thomas. Interview par COUTANT, Rémi au sujet de La Paillasse et de la biologie de garage. Paris, 6 juin 2017. Disponible en Annexe.

36 PILI. Pili.bio – Living Colors [en ligne]. Disponible sur <pili.bio> (consulté en juillet 2017).

9 : En haut, le thermocycleur OpenPCR à côté d'un ordinateur38. En bas, une vue de l’intérieur de la machine39.

38 <openpcr.org/blog> (consulté en juillet 2017). Les plans de fabrication sont disponibles sur le site. 39 <openwetware.org/wiki/BME103:W930_Group3> (consulté en juillet 2017).

la publication dans des revues scientifiques n’est pas nécessairement un objectif pour eux, et beaucoup de leurs résultats sont plutôt diffusés directement sur internet. Ainsi, pour Gtudhkin, Kuiten et Millet, « La contribution de la biologie DIY à la biotechnologie devrait être évaluée

selon trois catégories : 1) avancées techniques et scientifiques, 2) réalisations de nouvelles entreprises, et 3) contribution à la sensibilisation et à l’éducation du public »40. En l’absence

de cet objectif de publication académique, la production scientifique des biohackers n’est pas facile à évaluer, mais les créations d’entreprises sont nombreuses et leurs innovations diverses ; les innombrables ateliers pratiques organisés par les groupes de biologie de garage témoignent de l’importance de ce mouvement pour l’éducation scientifique de la population.

40 « DIYbio’s contribution to biotechnology should be judged in three categories: 1) technical and scientific achievements, 2) new business achievements, and 3) contribution to public awareness and education. »

GRUSHKIN, Daniel, KUIKEN, Todd, MILLET, Piers. Seven Myths and Realities about Do-It-Yourself

10 : Les filaments blancs sont de l'ADN de fraise41.

Partie 2 : La biologie de garage dans la

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