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3. Cadre conceptuel

3.3. Contexte sanitaire

3.3.7. Mourance

C’est à Lydia MÜLLER qu’on doit le terme de « mourance »94,95. Elle a inventé ce mot parce qu’il manquait, en français, un terme pour le processus de la mort et parce qu’il suggère l’opposé de la naissance. Elle a identifié les aspects physiques et les états d’âme des personnes en fin de vie et a dégagé sept phases (stades psycho-corporels) dans la mourance. Pour chaque phase, elle a développé les tâches d’accompagnement pour les divers accompagnants, à savoir : soignants, bénévoles et proches. Les phases et les tâches d’accompagnement sont les suivantes :

91Administration fédérale. Département fédérale de l’intérieur (DFI). Office fédéral de la santé publique OFSP. Adresse URL :http://www.bag.admin.ch/transplantation/00695/index.html?lang=fr (Page consultée le 21 août 2008)

92Ibidem

93Informations recueillies auprès d’un médecin suite à un entretien téléphonique le 26 août 2008.

94MÜLLER Lydia,Les 7 phases de la « mourance ». Revue de la Société Suisse de Médecine et de Soins Palliatifs, N° 02, été 2007.

95D’origine suisse alémanique, Lydia MÜLLER est psychothérapeute spécialisée dans

l’accompagnement des personnes en fin de vie. MÜLLER Lydia. Mourir vivant. Interview paru dans la Revue REEL, fév. 2003 [En ligne] Adresse URL :http://www.entrelacs.ch/presse/interview.pdf(Page consultée le 9 avril 2008)

1. Le diagnostic d’une maladie incurable

Il provoque quatre états possibles : l’état de choc, le déni (refus d’y croire), l’état émotionnel de révolte ou de tristesse dépressive, l’état d’hyper-lucidité avec absence totale d’émotion.

L’enjeu est double : il s’agit d’oser regarder en face la fin inéluctable et de faire le bilan de son passé.

Pour l’état de choc, l’accompagnement consiste à assurer une présence silencieuse, une attention avec peu de mots, la personne étant incapable de les saisir. Il s’agit d’aider à nommer et exprimer la souffrance et les émotions pour que la personne retrouve ses repères et devienne apte à faire face à ce qui vient.

Pour le déni, il s’agit d’assurer une présence chaleureuse et d’attendre que cède la résistance face à la réalité. Pourl’état émotionnel de révolte ou de tristesse dépressive, il s’agit de laisser exprimer les émotions sans vouloir raisonner ni rassurer. Il s’agit de lui dire qu’il a le droit de ressentir tout ce qu’il sent. Pour l’état d’hyper-lucidité, peu d’accompagnement est nécessaire. Il s’agit tout au plus de l’aider à faire le bilan de sa vie, de nommer ses besoins et de l’aider à les réaliser.

Pour Lydia MÜLLER, cette première étape s’apparente à la décision de mourir.

De manière inconsciente, la personne décide de mourir par la survenue d’une maladie mortelle.

2. Les pertes et infirmités fonctionnelles

La maladie progresse et le malade voit ses fonctions corporelles diminuer, ses rôles professionnels, sociaux et familiaux s’effriter. Il oscille entre l’espoir et le désespoir, entre la révolte et la résignation, entre la rationalisation et les émotions. L’espace se rétrécit et le temps augmente.

L’enjeu est double : il s’agit de profiter de ce qui reste et d’accepter de perdre pour gagner ailleurs.

L’accompagnement consiste à accueillir la souffrance de l’autre sans être submergé par elle, sans la minimiser, ni la positiver. L’accompagnement consiste aussi à donner du sens à cette épreuve.

3. Le blocage des attachements

C’est le stade de dépendance physique quasi totale. Souvent les douleurs physiques persistent malgré la médication. C’est la phase avec le plus de demandes de suicide assisté ou d’euthanasie active.

L’enjeu est double : il s’agit de lâcher ce à quoi on tient le plus et d’oser le saut dans l’inconnu.

En termes d’accompagnement, c’est l’ultime occasion d’aider le mourant à mettre en ordre ses affaires.

4. Le détachement

Ce stade est la fin des attachements affectifs.

La dépendance physique est totale. Le mourant alterne entre présence et absence de conscience, il ne parle plus ou très peu, il ne désire plus s’alimenter.

L’accompagnement consiste à ralentir notre propre rythme, à se calquer sur le rythme du mourant et à soutenir les proches qui perdent un être cher.

Les états intérieurs de l’agonie :

5. Le bilan de vie

La personne revoit toute sa vie avec ses imperfections.

6. L’Amour absolu

Le mourant est couché, immobile, il n’articule plus, est difficilement compréhensible. Il émet des râles. La souffrance psychique semble primer sur la douleur physique mais s’exprime par le corps. Son regard est translucide. Il est semi-conscient.

En termes d’accompagnement, il s’agit de ralentir son rythme, l’important n’étant plus de faire mais d’être. Les manipulations du corps sont à limiter au maximum parce qu’elles ramènent le mourant inutilement à son corps souffrant.

L’accompagnement consiste à assurer les soins de bouche et de confort. Il consiste à inviter les proches à des ultimes réconciliations, à l’expression des derniers « je t’aime ».

7. La mort : la dernière expiration

Il s’agit de rester en silence et de faire ses adieux, d’inviter les proches à faire de même, leur donner la possibilité de participer à la toilette mortuaire, leur offrir un temps de parole et de partage.

Dans la pratique, l’accompagnement en fin de vie mobilise beaucoup d’énergie et de temps.

La plupart du temps, l’entourage contribue grandement à améliorer l’accompagnement d’un patient en fin de vie, qu’il s’agisse de la famille, des voisins, des proches, des médecins... Il arrive néanmoins parfois que l’accompagnement de la famille s’avère aussi pénible que l’accompagnement du malade lui-même. Pour Françoise BARDET, « un exploit réussi est affaire de communauté et non exploit individuel, même si l’infirmière joue souvent un rôle de coordinatrice centrale. »96Les infirmières du CMS paraissent très seules dans ces moments. « La souffrance de la soignante est d’autant plus forte que celle-ci exerce son métier en solitaire. »97 Il existe différentes associations qui se sont spécialisées dans l’accompagnement des malades en fin de vie et des familles (ex. la Ligue suisse contre le cancer, Info Sida, Pro Senectute, les églises protestantes et catholiques, la Main tendue...).

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