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Une première distinction – toute théorique – peut être effectuée entre les boutiques et les ateliers, fondée sur un critère économique. Dans les premières, l’activité de vente est supposée dominer, tandis que seule la production se déroulerait dans les seconds. Pourtant, une telle distinction apparaît trop simpliste : certains ateliers ne peuvent-ils procéder à la vente des produits qu’ils fabriquent sans aucun inter-médiaire ? Des boutiques aussi banales que les commerces alimentaires ne présentent-elles pas des activités de transformation d’une matière première en produit immédiatement consom-mable, ce qui permet de les considérer comme des lieux d’artisanat culinaire – donc des ateliers ? Quelle que soit la nuance que l’on cherche à donner à ces termes recouvrant les lieux d’exer-cice d’un métier, l’utilisation d’un critère

écono-mique – la situation du lieu dans la chaîne allant de la production à la vente au consommateur – implique de pouvoir connaître les activités qui s’y déroulaient ; il faut donc étudier l’ensemble des données recueillies dans les locaux supposés avoir accueilli des commerces ou des ateliers.

Pour orienter cette recherche, il faudrait réussir à circonscrire le ou les espaces dévolus à la pratique d’un métier dans les maisons, en commençant par l’analyse des textes littéraires et juridiques. Quelle que soit l’activité commer-ciale ou artisanale exercée au sein de l’espace urbain, elle doit pouvoir être facilement iden-tifiable par de potentiels clients. Il ne faudrait pas tirer de ce postulat l’idée que les boutiques ou les ateliers puissent être de manière très générale insérés dans une typologie unique. La variété des métiers1, des aménagements

directe-« […] On vint en procession acheter chez eux, uniquement pour voir la boutique. Le revêtement était tout en marbre blanc ; au plafond, une immense glace carrée s’encadrait dans un large lambris doré et très orné, laissant pendre, au milieu, un lustre à quatre branches […]. À droite, le comptoir, très grand, fut surtout trouvé d’un beau travail ; des losanges de marbre rose y dessinaient des médaillons symétriques. À terre, il y avait, comme dallage, des carreaux blancs et roses, alternés, avec une grecque rouge sombre pour bordure. Le quartier fut fier de sa charcuterie […] ».

E. Zola, Le ventre de Paris, 10e éd., Paris, G. Charpentier, 1878, p. 62-63.

1 M. Della Corte (1965 : 484-486) propose une liste de « métiers » provenant de ses lectures des graffites pompéiens. Toutefois, outre les répétitions de certaines appellations variant selon leur orthographe, une partie des titres réper-toriés ne correspondent pas à des activités professionnelles

e.g.forenses, seribibi, poppaenses. Pour la ville de Rome, S. Treggiari (1980 : 61-64), dans un inventaire qu’elle consi-dère comme incomplet, mentionne 162 noms de métiers, dont certains peuvent relever de grandes catégories indis-tinctes, comme les tabernarii ou les officinatores.

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ment associés à ces métiers ou des localisations au sein des bâtiments interdit toute vue synthé-tique. Seuls certains aspects architecturaux sont suffisamment récurrents pour permettre une caractérisation large. Dans un premier chapitre, nous verrons ainsi quels sont les éléments pouvant permettre l’interprétation a minima

d’un local comme espace commercial ou arti-sanal. Dans de nombreux cas, cette hypothèse ne saurait être affinée. En effet, le faible intérêt à l’égard des boutiques a eu pour conséquence de fréquemment interdire la caractérisation de ce qui était vendu ou produit dans ces locaux.

Toutefois, l’implantation de certains métiers est identifiable à partir des aménagements néces-saires à leur bon déroulement. Ensuite, dans des chapitres distincts, je traiterai d’activités essentielles – commerces alimentaires, boulan-geries et métiers liés au textile. Le choix de ces productions tient essentiellement à des facteurs de conservation. En effet, ces espaces de trans-formation des matières issues de l’agriculture disposent en général d’aménagements maçonnés facilitant leur reconnaissance sans être complè-tement tributaire des données recueillies durant les fouilles.

Se poser la question des moyens permettant de reconnaître une boutique pourrait paraître aussi trivial qu’illusoire. Les journaux de fouilles font preuve d’un automatisme interpré-tatif parfois désarmant : la seule présence d’une large ouverture sur la rue fait reconnaître une boutique au rédacteur ; dans un second temps, une précision sur la nature des objets vendus peut être donnée en fonction des éléments mis au jour dans le local. Il faut ainsi admettre qu’il n’existe aucun critère objectif permettant de définir une boutique ou un atelier. Seule la conjonction de certaines données architectu-rales, éventuellement complétée par les objets mis au jour à l’intérieur de l’espace défini,

CHAPITRE I

ANATOMIE GÉNÉRALE DES BOUTIQUES

permet de proposer une telle interprétation. Si l’hypercritique récemment développée par P. Allison à propos des pièces situées en façade et s’ouvrant largement sur la rue ne saurait être acceptée1, il convient cependant d’effectuer une nouvelle analyse des sources écrites pour en extraire les caractères utilisés par les Anciens pour décrire les lieux de métier. À partir de là, il est possible, en procédant de l’extérieur vers l’intérieur, en prenant en considération succes-sivement la façade des espaces commerciaux puis les différents aménagements internes et finalement les objets qui y ont été découverts, de proposer différents moyens d’identifier les espaces commerciaux.

1 P. Allison (2004 : 112) refuse, dans son ouvrage, de considérer ces espaces comme des boutiques. En revanche, ces derniers sont souvent indiqués comme tels (shop) dans sa base de données électronique, avec une précaution toute rhétorique rendant les seuls fouilleurs responsables de l’in-terprétation (« has been identified as a shop »). En dépit des réels apports de cette recherche, la volonté souvent ambiguë de P. Allison de n’utiliser que les objets mis au jour – alors qu’elle est consciente des pertes de données entre la fouille proprement dite et la rédaction des comptes rendus – fait

que son discours est souvent critiquable, notamment en ce qui concerne certaines interprétations isolées. Comme postulat assumé, particulièrement pour éviter l’abus de l’argument a silentio, je considère qu’il est beaucoup plus probable que les pièces largement ouvertes sur la rue, liées ou non par une porte à une domus, soient d’abord des espaces commerciaux. Pour les interpréter comme espaces de réception, hall précédant l’atrium, il faudrait en apporter la preuve matérielle.

« L’ambiente era un magazzino o bottega e ciò lo dimostra la scanalatura sulla soglia […] ».

Giornale degli scavi di Ercolano, 8 gennaio 1929. « Cela étant, l’identification des locaux est évidem-ment une entreprise aléatoire ».

T. Kleberg, Hôtels, restaurants et cabarets dans l’antiquité romaine. Études historiques et philologiques, Uppsala, Almqvist & Wiksells Boktryckeri, 1957, p. 39.

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I.1 Analyse des mentions textuelles de taberna À l’aube du nouveau millénaire, dans un article consacré aux différentes méthodes déployées pour comprendre la sphère domes-tique dans le monde romain, P. Allison a donné un lointain écho à la querelle des Universaux qui a fortement agité le monde intellectuel médiéval au XIIe puis au XIVe siècles. Dans cette étude qui se veut critique, elle a en effet dénoncé les usages abusifs de la terminologie latine pour décrire des vestiges archéologiques ainsi que les effets de cette utilisation, qui mènerait souvent à une interprétation excessive des textes et à des conclu-sions douteuses2. Si une telle entreprise peut être considérée comme salutaire face à certaines faci-lités terminologiques, ses propres excès tendent à la discréditer. Toutefois, il convient de laisser à P. Allison le mérite d’avoir soulevé la question de l’emploi de termes latins pour caractériser des pièces et leur attribuer de la sorte une fonction.

Je limiterai ma participation à cette réflexion aux seuls espaces commerciaux et artisanaux. Les enjeux d’une telle recherche sur les termes latins utilisés pour caractériser boutiques et ateliers sont multiples. Le premier est certainement de déterminer ce que recouvre un terme a priori

générique comme taberna souvent utilisé dans les écrits archéologiques pour définir des espaces commerciaux. À partir de cette étude termino-logique, il est possible de cerner les contours de la vision propagée par les auteurs anciens sur le commerce de proximité. Cette critique des sources littéraires permet en retour de mieux cerner les éventuels abus d’usage de ces termes dans l’historiographie. L’analyse d’un terme comme taberna, généralement traduit comme boutique, avec toutefois l’émergence progressive de nuances, est primordiale. Il ne saurait toute-fois être question de prendre en considération l’ensemble des occurrences de ce mot dans la litté-rature latine, où les redondances et les mentions n’apportant aucune spécification matérielle sont légions. J’ai fait le choix de ne pas prendre en

compte le mot officina tant il semble – mais cela mériterait certainement un développement ulté-rieur – être lié à des établissements généralement non urbains d’une dimension importante. Ses occurrences les plus nombreuses proviennent des estampilles sur briques ou tuiles. Quant aux quelques mentions où le terme d’officina est suivi d’un adjectif ou d’un complément du nom, le sens semble alors celui très général d’atelier ou de fabrique3. Pour les autres appellations liées à l’artisanat, leurs spécificités sont telles que leur étude sera menée, le cas échéant, conjointement avec celle de leurs vestiges archéologiques.

L’étude des différents sens de taberna a déjà fait l’objet de plusieurs analyses. À la suite de T. Kleberg, V. Gassner a conclut à l’existence de deux acceptions pour ce terme, d’une part celle de boutique – local dans lequel des échanges commerciaux sont conclus –, d’autre part celle d’auberge (Gasthaus)4. Ce double sens semble exister dès l’époque de Plaute et se maintenir jusqu’au Ve siècle de notre ère. En dépit de ces recherches, certains points méritent d’être précisés. Il convient de chercher à déterminer l’aspect de ces tabernae, ou, à défaut, leur posi-tion dans un édifice, ainsi que l’extension des possibilités offertes par ces locaux. Je ne tenterai pas d’élargir ces réflexions à la situation topogra-phique des tabernae en ville. En effet, par-delà certaines positions très générales, l’essentiel des occurrences de ce terme qui se bornent à rensei-gner sur un lieu ont déjà été étudiées et renvoient surtout principalement à la situation dans Rome. Les problèmes de topographie de l’Urbs dépas-sent de loin le cadre de cet ouvrage5.

I.1.1 Analyse des textes littéraires

La plus claire définition de la boutique provient du Commentaire à l’édit du préteur d’Ulpien, transmis par fragments dans le Digeste :

« tabernae » appellatio declarat omne utile ad habitandum aedificium, non ex eo quod tabulis cluditur6.

2 Allison 2001 b : 185-192.

3 Cf. TLL, 9², s.v., II, 2.

4 Kleberg 1957 : 19-22 ; Gassner 1984.

5 Sur les renseignements topographiques apportés par les textes mentionnant des tabernae, cf. Morel 1987 :133-137 ; LTUR V, s.v.tabernae argentariae, tabernae circa forum,

tabernae lanienae, tabernae novae, tabernae veteres ; Papi 2002 : 45-53.

6 Ulp., ad ed., 28 (Dig. 50, 16, 183) : « On appelle ‘taberna tout édifice qui sert d’habitation, non pas parce qu’il est fermé par des planches ».

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aurait tendance à remettre en cause l’idée que les

tabernae ont pour vocation première à abriter des transactions commerciales. Dans l’édition du Digeste dirigée par Th. Mommsen, celui-ci a proposé d’apporter une correction au texte : le

non devrait selon lui être placé avant omne7. Ce simple changement a pour effet immédiat d’in-verser complètement le sens de la définition. Je reviendrai plus loin sur cet extrait d’une glose juridique d’utilisation éminemment délicate ; retenons simplement l’association taberna habi-tation – fermeture par des planches, sans préjuger du rapport entretenu par ces différents termes.

Faute de pouvoir se fonder sur cette défini-tion, même comme première approche, il faut se tourner vers des textes plus elliptiques, dont la

taberna n’est guère le sujet principal. Ainsi, Cicéron a fréquemment utilisé les tabernae et leurs gérants comme exemples dans ses discours et dans ses réflexions. Ne nous attardons pas sur les variations des jugements qu’il porte à l’encontre des bouti-quiers : souvent méprisés, considérés comme la lie de la société romaine8, les boutiquiers, portion

du peuple aisément manipulable selon l’orateur, peuvent devenir, à l’occasion des discours contre Catilina, d’une vertu incorruptible, fût-elle fondée sur la volonté de préserver leurs gains. Sans

taberna, pas de bénéfice (quaestus), les tabernae

sont le lieu de transactions commerciales9. Bien que dans une acception plus technique et précise, ce constat est sanctionné au IIIe siècle par une définition d’Ulpien :

‘instructam’ autem tabernam sic accipiemus, quae et rebus et hominibus ad negotiationem paratis constat10.

En mentionnant la possibilité que la taberna

soit instructa et donc dotée des moyens humains et matériels de fonctionner, le juriste réduit lui aussi cette dernière à un espace destiné à accueillir un négoce sans précision quant à sa nature.

Pour définir les affaires pouvant être effec-tuées dans ces tabernae, la plus grande variété semble régner. Ainsi, pour expliquer le mode de formation des adjectifs à partir d’un substantif, Varron donne une liste de différents commerces pouvant s’exercer dans une taberna et la carac-térisant11. Il est particulièrement intéressant de 7 Mommsen-Krüger-Kunkel 1954, ad loc.

8 Cf. Cic., Off., 1, 150, cit. infra n. 1 p. 219. Dans son plaidoyer en faveur de L. Valerius Flaccus, Cicéron assimile boutiquiers et artisans à la lie de la société (omnem faecem civitatum), sous prétexte que D. Lelius Balbus les aurait achetés pour les faire témoigner contre son client :

Cic., Flac., 18 : Opifices et tabernarios atque illam omnem faecem civitatum quid est negotii concitare, in eum prae-sertim qui nuper summo cum imperio fuerit, summo autem in amore esse propter nomen ipsum imperii non potuerit ?

« Des artisans, des boutiquiers, toute la lie des cités, est-il bien difficest-ile de les ameuter, surtout contre un homme qui venait d’avoir sur eux une autorité souveraine et qui ne pouvait pas être très aimé, en raison même de son titre de chef suprême ? » [trad. CUF].

9 Cic., Cat., 4, (VIII), 17 : Quare, si quem vestrum forte commovet hoc, quod auditum est, lenonem quendam Lentuli concursare circum tabernas, pretio sperare sollicitari posse animos egentium atque imperitorum, est id quidem coeptum atque temptatum ; sed nulli sunt inventi tam aut fortuna miseri aut voluntate perditi, qui non illum ipsum sellae atque operis et quaestus cotidiani locum, qui non cubile ac lectulum suum, qui denique non cursum hunc otiosum vitae suae salvum esse velint. multo vero maxima pars eorum, qui in tabernis sunt, immo vero - id enim potius est dicendum - genus hoc universum amantissimum est oti. etenim omne instrumentum, omnis opera atque quaestus frequentia civium sustentatur, alitur otio ; quorum si quaestus occlusis tabernis minui solet, quid tandem incensis futurum fuit ?

« Si donc il en est parmi vous qui s’affolent au bruit qu’un certain entremetteur, gagé par Lentulus, tourne

autour des tabernae, espérant pouvoir soulever à prix d’ar-gent les besogneux et les naïfs, oui, pareille entreprise a bien été tentée ; mais il ne s’est trouvé personne de condi-tion assez misérable, personne d’âme assez abjecte pour ne pas vouloir que le lieu qui abrite son tabouret de travail et son gain quotidien, que sa chambrette et son petit lit, qu’en un mot la sécurité de la vie ne lui fussent conservés. En fait, la majeure partie de ceux qui tiennent boutique, ou pour mieux dire – car c’est là la vérité –, tous les gens de cette sorte ont plus que personne le culte de la paix. Car tout métier, toute profession, tout commerce est favorisé par l’affluence des clients, alimenté par la paix : or si le commerce diminue quand on ferme les tabernae, que serait-il enfin advenu si on les leur eût incendiées ? » [trad. CUF].

10 Ulp., ad ed., 28 (Dig., 50, 16, 185) : « Nous considérons qu’une taberna est instructa, si elle est comprend les choses et les hommes servant aux affaires ».

11 Varr., L., 8, 30, 55 : quoniam taberna, ubi venit vinum, a vino vinaria, a creta cretaria, ab unguento unguentaria dicitur, analogon si essent vocabula, ubi caro venit, carnaria, ubi pelles, pelliaria, ubi calcei, calcearia diceretur, non laniena ac pellesuina et sutrina.

« Etant donné que, quand on vend du vin dans une

taberna, on la dit vinaria à partir de vinum, cretaria à partir de creta, unguentaria à partir d’unguentum, si les mots étaient formés par analogie, on dirait [la taberna] carnaria ; quand c’est de la viande, on la dira carnaria, pelliaria pour des peaux, calcearia pour des chaussures et non pas laniena,

pellesuina ou sutrina ». ANATOMIE GÉNÉRALE DES BOUTIQUES

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noter que parmi les activités mentionnées sont mélangées celles désignant nécessairement un simple commerce – vente de vin ou de viande – à celles qui pourraient également impliquer une production – tabernae cretaria, unguentaria,

pelliaria, calcearia. Il semble en effet difficile de supposer que les chaussures (calcei) vendues dans une telle boutique n’aient pas été également produites au même endroit. Cette seule notule grammaticale tendrait ainsi à faire des tabernae

des lieux génériques qui peuvent abriter des « ateliers » en plus des simples espaces de vente. Une telle suggestion est partiellement confirmée par l’analyse des sources juridiques menées par M. A. Ligios : en dépit de la mention récurrente, notamment en ce qui concerne les institores, de l’emptio-venditio ou de la negotiatio, mais égale-ment de l’emploi de termes précis pour certaines activités – pistor, fullo –, le terme de taberna est également employé pour désigner des lieux de production d’échelle réduite12.

En revanche, seuls de rares textes renseignent sur la situation des tabernae dans les édifices où elles sont installées. La première mention est tirée de l’ouvrage de Varron sur l’agriculture :

[…] si ager secundum viam et op<p>ortunus viatoribus locus, aedificandae tabernae devorsoriae, quae tamen, quamvis sint fructuosae, nihilo magis sunt agri culturae partes13.

Il semble ici que la taberna devorsoria soit un édifice à part, intégré à une propriété rurale. Sa position en bord de route est bien évidem-ment dictée par la fonction même de ce local, accueillir des voyageurs pour qu’ils puissent faire étape lors de leur déplacement. Quant à la négation du lien entre un tel commerce et les activités agricoles, elle permet de dissocier les revenus de la terre des investissements d’une autre nature. Il ne s’agit pas ici de trouver un mode d’écoulement pour la production de la villa, mais bien de dégager du profit grâce à une situation particulière dans un contexte rural14. La précieuse mention de Vitruve sur la localisa-tion de la taberna dans un cadre urbain offre un sens différent :

Qui autem fructibus rusticis serviunt, in eorum vestibulis stabula, tabernae, in aedibus cryptae, horrea, apothecae ceteraque, quae ad fructus servandos magis quam ad elegantiae decorem possunt esse, ita sunt facienda15.

Rappelons que ce texte est tiré d’une partie du livre VI où Vitruve expose le lien qu’il est nécessaire de développer, lors de la conception de sa maison, entre le statut de l’occupant et le plan de l’édifice16. La similitude formelle avec le texte de Varron est assez importante. Toutefois, contrairement au traité agronomique, les

tabernae sont ici présentées comme un moyen

12 En dépit d’un titre de paragraphe sans ambiguïté (La

‘taberna’ non è un luogo di produzione), M.A. Ligios (2001 : 42-47) en conclut que la taberna a pu abriter des activités de production. Bien que les activités de foulerie aient reçu un traitement particulier dans les sources juridiques en raison du problème casuistique que constitue le dépôt de linge à

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