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des mots et des concepts

Chapitre 5 : Analyse des traductions

5.3. des mots et des concepts

Dans le verset qui suit :

»

ىﺪﺳ كﺮﺘﯾ نأ نﺎﺴﻧﻹا ﺐﺴﺤﯾأ

«

ﻢﻗر ،ﺔﻣﺎﯿﻘﻟا : 36 .

«l’homme croirait-il qu’on le laisse errer en vain»,

Kenneth Cragg (K.C), critique la version d’Arberry en écrivant ce qui suit :

« Arberry has Does man reckon that he will be left to roam at

will?’ The picture in the final word is of the camels untethered or animals left unshepherded to wander where they will. Some take the verse as asking whether human life is all in vain or whether man is unaccountable to some last judgement. Others suggest that man must not think himself other than mortal. ‘Does man imagine that he is left on the loose, ‘best captures the idea. By the ‘tether’ metaphor, a contemporary reader discerns an apt analogy for current secularity- a cast of mind for which it is supposed that Quranic Arabic has no precise term. For nothing is ‘secular’ in the sense of being outside the domain of God. But secular man does imagine that he wields an autonomy free from transcendent liability, the only

constraints being those of economic forces and cultural conditioning. He thinks himself, otherwise, ‘neither prohibited nor commanded’. He is left to his own devices in a universe devoid of God. ‘Sudan’ in 75.36 exactly fits this stance, and is illuminated by it, thought the image is from the scenes Muhammad Knew. Formed as a question, the verse knows that secular notions are harboured. Hence, of course, he necessity of prophets and the central Islamic word of a divine imperative commanding the human world. The Qu’ran here has a strongly contemporary ring. English can well render it in the randomness that thinks itself ‘left on the loose.»43

En fait les deux images, celle d’ «errer en vain » et celle d’ «être mortel» sont là. Il n’y a absolument aucune raison qui nous laisserait juger de la validité de la première version et de la non validité de la deuxième. Le contraire est bien sûr aussi valable. En réalité, pour emprunter la fameuse expression des tenants de l’école interprétative, tout n’est qu’une question de « vouloir dire ».

Ainsi, peut-on vraiment considérer que le ‘left on the loose ‘de Kragg est meilleur que la métaphore des chameaux, le ‘roam at will ‘,

43

d’Arberry ? Si on répond par oui, cela présuppose l’existence d’une manière modèle de bien traduire, ce qui est loin d’être vrai.

Cependant, dans le cas contraire, on arriverait à la conclusion que toute traduction du Coran serait valable. Cette conclusion serait également un peu trop audacieuse.

Le fait que K.C parle de ‘contemporary reader’ , lecteur

contemporain, cela suppose que pour bien cerner le sens, une traduction doit tenir compte de deux éléments fondamentaux : le facteur temps, d’une part, et le lecteur, d’autre part. D’abord le temps : un même énoncé ne garde pas le même sens éternellement. Ensuite le lecteur : le sens de ce même énoncé peut varier d’un lecteur à l’autre. Et c’est la ou nous observons une contradiction chez K.C. Car il admet, d’une part, qu’il faut plusieurs traductions du Coran, adaptées selon les deux éléments précédents, pour bien transmettre le sens. Et d’autre part, il présume la non validité des traductions de certains versets chez Arberry .

Un peu plus loin, K.C soutient ce qui suit :

«In Surah 16.9 comes the observation, Wa ‘ala-Allahi qasdu-l-sabi!,

ﻞﯿﺒﺴﻟا ﺪﺼﻗ ﷲا ﻰﻠﻋو

‘the direction of the way os (lit). upon God’. Ethical direction, that is, derives from divine command. But the word qasd has to do with more than ‘direction’, while

sabil is more than just a path or road. The verse, then, may be read as comprehending the whole ‘course’ of history and not merely the ordering of some particular situation. It may cover not only moral discernment of duty but also the providences of time. (Page 53).

Comme dans toutes les langues du monde, la polysémie existe bel et bien dans la langue arabe. Il est vrai que le mot

ﺪﺼﻗ qasd, en

arabe, peut signifier autre chose que direction, et que le mot

ﻞﯿﺒﺳ

sabil peut avoir d’autres sens que chemin, ou rue, mais cela est aussi valable pour l’arabe que pour toute autre langue.

Face à cette polysémie, et «pour des raisons de cohérence»44

, les traducteurs ont tendance à choisir un seul équivalent à chaque terme polysémique en arabe et tente, à chaque fois, de le réutiliser tout au long de leurs traductions. (Voir tableau ci-après). Ils estiment qu’il est même préférable que le traducteur garde ces termes polysémiques, car son rôle n’est pas celui de l’exégèse, mais de transmettre le message tel qu’il est avec ses nuances, ses ambiguïtés et même ses polysémies.

La question qui se pose est : le message est-il vraiment transmis en gardant toutes les ambiguïtés du texte de départ ? C’est ce qu’on

tentera d’élucider à travers la confrontation et l’analyse des traductions ci-après.

L’exemple des termes Taqwa

ىﻮﻘﺗ

et dhikr ﺮﻛذ donné pat K.C illustre parfaitement bien le caractère polysémique de la terminologie coranique :

Taqwa and dhikr are important examples. Both are highly

significant terms and occur in differing senses. The former, noted by Fazlur Rahman in his Major themes of the Qu’ran, as ‘the central of the Qu’ran vision of man under God’, means ‘awe’ before God ‘God fearingness’ and ‘utmost reverence’[…] Derivatives from it, like Muttaqun take on the implied sense of ‘warding off evil’, because a true fear shuns what defiles and blasphemes. Such souls’ in turn, preserve and protect society. To insist on a single English word betrays rather than fulfils loyalty to the original.45

En effet, très souvent dans la langue coranique, un simple mot peut avoir plusieurs variantes au niveau sémantique. Et c’est d’ailleurs dans ce même texte qu’on peut lire :

ﻢﻗر ،ﻞﻣﺰﻤﻟا

5

«ﻼﯿﻘﺛ ﻻﻮﻗ ﻚﯿﻠﻋ ﻲﻘﻠﻨﺳ ﺎﻧإ»

«Nous allons te révéler des paroles lourdes.» L’emmitouflé, V.5. La tradition rapporte que ce verset a été le troisième a avoir été révélé au prophète Mohammed pour lui annoncer que le message du texte coranique sera d’une teneure sémantique extrêmement pesante.

5.4. Traduire l’altérité des noms propres :

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